dimanche 7 février 2016

Qui est « le Soton » dans la tradition juive ?

ב״ה

Exposer les fausses notions

Qui est « le Soton » dans la tradition juive ?


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Nous lisons dans la Tôroh, à la suite des événements du Déluge, que HaShem ית׳ décida de ne plus jamais détruire la Terre, notant la nature pécheresse inhérente de l'homme1 :

Je ne maudirai à nouveau plus la terre à cause de l'homme, car le penchant du cœur de l'homme est mauvais dès sa jeunesse, et Je ne frapperai à nouveau plus tous les vivants comme Je l'ai fait.
לֹֽא־אֹ֠סִף לְקַלֵּ֨ל ע֤וֹד אֶת־הָֽאֲדָמָה֙ בַּֽעֲב֣וּר הָֽאָדָ֔ם כִּ֠י יֵ֣צֶר לֵ֧ב הָֽאָדָ֛ם רַ֖ע מִנְּעֻרָ֑יו וְלֹֽא־אֹסִ֥ף ע֛וֹד לְהַכּ֥וֹת אֶת־כָּל־חַ֖י כַּֽאֲשֶׁ֥ר עָשִֽׂיתִי

Le Ramba''m ז״ל cite ce verset dans le cadre de son exposé sur le livre de `iyôv, dans son Môréh Navoukhim (Guide des Égarés).2 Il explique que ce livre est une allégorie du début jusqu'à la fin, et qu'il n'y est rapporté rien de littéral. En d'autres mots, `iyôv n'est pas une vraie personne, mais ce récit nous a été rapporté pour illustrer la foi contre vents et marées qui devrait animer chacun d'entre nous. Sur la base de nombreux commentaires faits par HaZa''l dans le Talmoudh et le Midhrosh, le Ramba''m explique que le ָטָן « Soton »3 décrit dans le livre de `iyôv est une référence allégorique au יֵצֶר הָרַע « Yésar Hora´ », c'est-à-dire le mauvais penchant qui se trouve à l'intérieur de chaque être humain et qui l'attire vers des comportements pécheurs.

Dans le contexte de cette discussion, il attire plus particulièrement notre attention sur le commentaire de nos Sages4 selon quoi le mauvais penchant fait surface dans un être humain déjà depuis le moment de sa naissance. Rébbi Yahoudhoh Hannosi` ז״ל est cité comme ayant expliqué le mot מִנְּעֻרָ֑יו « dès sa jeunesse », qui apparaît dans le verset susmentionné, comme voulant dire : « dès le moment où il est secoué », se référant au moment de la naissance, lorsqu'un enfant est « secoué » et extrait de sa position dans l'utérus. Déjà depuis ce moment, l'être humain expérimente une tendance naturelle pour les vains plaisirs et gratifications. Le Ramba''m oppose à cet égard le mauvais penchant au יֵצֶר הַטּוֹב « Yésar Hattôv », le penchant inné de l'être humain vers le bien, qui lui ne fait surface à l'intérieur de lui qu'au moment où « l'esprit s'est développé », c'est-à-dire, au moment où il atteint la maturité.

De façon tout à fait intéressante, après avoir fait cette distinction entre les débuts des deux penchants conflictuels de l'homme, le Ramba''m cite un passage du Talmoudh5 qui offre une analogie servant à décrire ces deux penchants. Cette analogie est basée sur une histoire brièvement rapportée dans le livre de Qôhalath6 concernant une petite ville assiégée par un puissant roi, et un homme « pauvre et sage » parvient on ne sait trop comment à fuir la ville et se mettre en sécurité. Le Talmoudh explique cette image comme un symbole représentant le « puissant » Yésar Hora´ qui assaille un être humain. L'individu « pauvre et sage » représente le Yésar Hattôv d'un être humain, qui est capable de l'extraire de l'emprise du mauvais penchant.

Il ressort de la présentation faite par le Ramba''m qu'il comprend ce passage talmudique comme traitant des différents moments de la vie où ces deux forces intérieures font surface. Le Yésar Hora´ est décrit comme un « puissant roi », tandis que le Yésar Hattôv est décrit comme un « pauvre », parce que le premier fait surface avant le deuxième. En d'autres mots, la raison pour laquelle le mauvais penchant semble souvent plus puissant que le bon penchant, c'est tout simplement parce qu'il est là en premier. Un enfant vient au monde avec un désir enraciné pour la gratification instantané, et une préoccupation égoïste pour ses propres besoins et envies. Durant l'enfance, un enfant commence petit à petit à être capable de ressentir un soucis pour les besoins des autres, ou de réprimer ses propres tendances naturelles afin de se soumettre à un but supérieur. D'ici au moment où il développe une conscience morale et spirituelle, il s'est déjà habitué à se focaliser exclusivement sur ses propres besoins. C'est pour cela qu'on trouve souvent difficile de freiner ses tendances instinctives pour se soumettre au Yésar Hattôv ; parce qu'il a passé cinq ans de sa vie à poursuivre la gratification plutôt que la vertu.

Cela ne veut pas nécessairement dire que nos mauvais penchants sont plus forts que notre penchant pour la grandeur spirituelle. Plutôt, les mauvais penchants sa saisissent de l'être humain avant qu'il ne puisse développer son Yésar Hattôv, et cela explique la lutte de toute une vie humaine pour faire dominer son bon penchant sur le mauvais.

1Baré`shith 8:21
2Volume 3, Chapitre 22
3Un terme qui signifie simplement « adversaire » ou « accusateur »
4Midhrosh, Baré`shith Rabboh 34 ; Talmoudh, Sanhédhrin 91b
5Nadhorim 32b

6Qôhalath 9:14-15
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