mardi 22 décembre 2015

Le Dix Tévéth, nous jeûnons aussi pour la Tôroh

ב״ה

Le Dix Tévéth, nous jeûnons aussi pour la Tôroh


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Le Ramba''m ז״ל introduit les jeûnes publics de la manière suivante1 :

Il y a des jours où l'ensemble des Israélites jeûnent parce que des calamités s'y sont produites, afin d'éveiller les cœurs et ouvrir les sentiers de la repentance. Et cela sert de souvenir de nos œuvres mauvaises et des œuvres de nos ancêtres, qui ressemblent à nos œuvres actuelles, et qui ont causé à eux et à nous ces calamités, car en se souvenant de ces choses, nous revenons vers le bien, car il est dit2 : « et ils confesseront leur faute et la faute de leurs ancêtres ».
יֵשׁ שָׁם יָמִים שֶׁכָּל יִשְׂרָאֵל מִתְעַנִּים בָּהֶם, מִפְּנֵי הַצָּרוֹת שֶׁאֵרְעוּ בָּהֶן, כְּדֵי לְעוֹרֵר הַלְּבָבוֹת, וְלִפְתֹחַ דַּרְכֵי הַתְּשׁוּבָה; וְיִהְיֶה זֶה זִכָּרוֹן לְמַעֲשֵׂינוּ הָרָעִים, וּמַעֲשֵׂה אֲבוֹתֵינוּ שֶׁהָיָה כְּמַעֲשֵׂינוּ עַתָּה--עַד שֶׁגָּרַם לָהֶם וְלָנוּ אוֹתָן הַצָּרוֹת: שֶׁבְּזִכְרוֹן דְּבָרִים אֵלּוּ, נָשׁוּב לְהֵיטִיב, שֶׁנֶּאֱמָר: וְהִתְוַדּוּ אֶת-עֲו‍ֹנָם וְאֶת-עֲו‍ֹן אֲבֹתָם

Nous voyons donc que notre repentance doit être axée sur ces œuvres qui ont amené nos ancêtres et nous-mêmes à subir ces souffrances que nous portons encore jusqu'à aujourd'hui.

Lorsque nous tentons d'appliquer les paroles du Ramba''m, le jeûne du Dix Tévéth présente une certaine difficulté. Lorsqu'on demande aux gens la raison pour laquelle ils jeûnent à cette date, la réponse classique qui est apportée est celle-ci3 :

Et le Dix du [mois] de Tévéth : c'est le jour où le roi Navoukhadhna`ssar le méchant campa contre Jérusalem et la plaça sous le siège.
וַעֲשִׂירִי בְּטֵבֵת--שֶׁבּוֹ סָמַךְ מֶלֶךְ בָּבֶל נְבוּכַדְנֶאצַּר הָרָשָׁע עַל יְרוּשָׁלַיִם, וְהֵבִיאָהּ בְּמָצוֹר וּבְמָצוֹק

Ce jeûne commémore le jour où le siège de Jérusalem commença à l'époque du Premier Béth Hammiqdosh. (Pour de plus amples informations historiques, voir l'article intitulé « Le Jeûne du Dix Tévéth ».) Il semble être difficile de se rapporter à cet événement à notre époque, puisque l'exil qui le suivi prit fin lors de la construction du Deuxième Béth Hammiqdosh. Ce n'est donc pas un événement ayant encore la moindre portée aujourd'hui, puisque les conséquences qui en ont résulté prirent fin 70 ans plus tard. Notre exil actuel découle de toutes les tragédies qui se sont abattues sur nous depuis la destruction du Deuxième Béth Hammiqdosh, qui n'a aucun lien avec le Dix Tévéth. Quelle douleur sommes-nous donc censés assumer qui découlerait des événements du Dix Tévéth ?

En fait, il y a d'autres raisons à l'institution de ce jeûne qui ont des conséquences beaucoup plus pertinentes pour notre époque. Si nous jetons un coup d’œil sur l'une des Salihôth composées pour le Dix Tévéth (pour le lien entre réciter des Salihôth et jeûner, voir l'article intitulé « Salihôth et jeûnes »), nous trouvons une liste des tragédies qui se sont abattues sur les Israélites durant le mois de Tévéth. L'auteur de cette prière déclare : « Pour ces trois événements j'ai institué un jeûne : [le huitième jour de Tévéth,] le roi Grec m'a forcé à traduire la Tôroh en Grec...J'ai été réprimandé le neuf...Et en ce jour fut arraché le donneur de belles œuvres, ´azro` Hassôfér ». Le troisième événement que l'auteur décrit ensuite est le siège de Jérusalem, qui eut lieu le 10 Tévéth. En comprenant le lien entre ces trois événements, nous comprendrons comment les effets du Dix Tévéth continuent à se faire ressentir jusqu'à nos jours.

La traduction de la Tôroh en Grec causa des dommages irréparables. La Tôroh nous a été donnée dans une seule et unique langue. Les nuances, subtilités et implications des mots particuliers choisis se perdent dans une traduction. Les « 70 facettes de la Tôroh », dont ont parlé HaZa''l, ne peuvent être aisément vues ou discernées à partir d'une traduction. En outre, lorsque quelqu'un traduit un texte, il est contraint de choisir une interprétation spécifique qu'il considère exprimer le mieux le sens des mots originels. Les significations ou interprétations alternatives sont écartées. C'est cet aspect de la traduction de la Tôroh qui fut le plus nuisible. Cela donne la permission aux gens d'expliquer la Tôroh comme eux l'estiment approprié, ignorant d'autres sens pertinents et applicables qui sont également venus du Sinaï. Les enseignements des Sages furent écartés, et les saintes paroles de la Tôroh furent corrompues. Pour cette raison, un jeûne était justifié.

La mort de ´azro` ע״ה porta un coup très dur à l'étude de la Tôroh également. Jusqu'à son époque, l'écriture `ashourith que nous utilisons aujourd'hui dans nos rouleaux de la Tôroh était inconnue des masses. Il y avait un Séfar Tôroh rédigé dans cette écriture, mais il était gardé dans le lieu le plus saint et réservé uniquement à un usage limité pour les gens les plus érudits. Qui avait-il de si spécial sur l'usage de cette écriture ? La façon de former les lettres et les couronnes qui décoraient bon nombre de ces lettres transmettaient des messages sur la compréhension du texte. ´azro` savait comment comprendre la Tôroh orale à partir de ces lettres et couronnes. Avant lui, la populace connaissait la Tôroh orale et des aides dans le texte n'étaient pas nécessaires. Mais de son temps, la populace devint moins experte dans ce domaine. ´azro` vit qu'une mesure d'urgence était nécessaire pour préserver la continuité de l'enseignement et la compréhension de la Tôroh orale. Nos Sages nous ont dit que si Môshah Rabbénou ע״ה n'avait pas été choisi pour donner la Tôroh au peuple d'Israël, ça aurait certainement été ´azro` qui l'aurait fait ; néanmoins, c'est quand même lui qui a offert au peuple la sainte écriture utilisée encore jusqu'à nos jours. Le décès de ´azro` marqua la fin d'une ère. Pour cette raison, un jeûne était justifié.

Le Ramba''m, dans les Hilkôth Malokhim, écrit que nous devrions désirer la venue du Moshiah, pas parce que le statut des Israélites changera pour le meilleur, ni parce qu'on pourra alors se réjouir, mais plutôt parce que nous serons libres de nous adonner à l'étude de la Tôroh sans distraction, ni empêchement. L'exil est une période où nous sommes accablés de soucis et affligés par des difficultés en tous genres. L'exil ne conduit pas à l'étude de la Tôroh. Avec le commencement du siège de Jérusalem, notre exil a réellement commencé. La splendeur de la Tôroh a commencé à se faner. Pour la toute première fois de notre histoire, nous n'étions plus dans les conditions optimales pour étudier la Tôroh. Nous étions dans un déclin. Avec le décès de ´azro` quelques années plus tard, la distance d'avec la méthode appropriée pour l'étudier se creusa davantage. Avec la traduction de la Tôroh en Grec quelques années plus tard encore, nous sommes tombés à un nouveau bas niveau : non seulement nous étions en exil, mais nous étions également confrontés à la nouvelle difficulté que présentait une traduction de la Tôroh.

Les trois événements que commémore le jeûne du Dix Tévéth partagent un dénominateur commun : un déclin dans l'étude diligente de la Tôroh, qui commença par le siège de Jérusalem et qui nous poursuit jusqu'à nos jours. La peine découlant des événements du Dix Tévéth qui nous assaille encore aujourd'hui devient donc très claire. Nous devrions tous la ressentir. Nous devrions tous nous rendre compte de la perte énorme que nous avons subie. Mais plus important encore, nous devrions prendre à cœur les propos du Ramba''m en nous remémorons ces événements, de sorte que nous puissions nous repentir et nous améliorer dans notre conduite. En d'autres mots, que nous puissions prendre la ferme résolution de mettre fin à cette situation de déclin de l'étude de la Tôroh ! C'est notamment ce que j'essaie de faire à travers les articles que je publie sur ce blog.

Et une des meilleures façons de connaître la Tôroh Écrite et Orale dans son sens le plus proche de l'excellence, c'est notamment par l'étude de la Mishnoh de HaZa''l et du Mishnéh Tôroh du Ramba''m !

qu'HaShem puisse accorder un jeûne léger à l'ensemble des enfants de notre peuple !

1Mishnéh Tôroh, Hilkôth Ta´niyôth 5:1
2Wayyiqro` 26:40

3Mishnéh Tôroh, Hilkôth Ta´niyôth 5:2