בס״ד
Petite histoire de
la doctrine de la réincarnation
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article peut être téléchargé ici.
Dans
cet article, nous allons parcourir les sources afin de déterminer si le concept
de גלגול
« Gilgoul »
(réincarnation) est relativement nouveau ou ancien, et s'il est unanimement
accepté par nos rabbins comme faisant définitivement partie de la théologie de
la Tôroh.
Ø TaNa''Kh
Il
n'y a aucune référence directe ou explicite aux Gilgoulim dans le TaNa''Kh.
Cependant, à partir du Moyen-âge, ceux qui ont embrassé cette notion ont
commencé à voir des allusions allégoriques aux Gilgoulim dans certains versets.
Citons
un exemple[1] : וְלֹא
אִתְּכֶם, לְבַדְּכֶם--אָנֹכִי, כֹּרֵת אֶת-הַבְּרִית הַזֹּאת, וְאֶת-הָאָלָה, הַזֹּאת...וְאֵת אֲשֶׁר אֵינֶנּוּ פֹּה, עִמָּנוּ הַיּוֹם
« Ce
n'est pas seulement avec vous que Je contracte cette alliance et ce
pacte...mais aussi avec celui qui n'est pas ici avec nous aujourd'hui ».
Les adeptes du Gilgoul prennent ce passage comme voulant dire qu'il y a un
« vous » qui n'est pas ici aujourd'hui, mais qui se manifestera à un
stade ultérieur. (À noter que c'est l'un des nombreux passages que réfute le
Rov Sa´adhyoh Go`ôn ז״ל
dans
ses textes anti-réincarnations.)
Un
autre exemple[2] :
דּוֹר הֹלֵךְ וְדוֹר בָּא « Une
génération part et une autre vient ». Les défenseurs de la notion
de Gilgoul disent que ce Posouq signifie qu'une génération qui est décédée
reviendra à nouveau dans les générations suivantes. (Mais là encore, c'est une
lecture aisément réfutable, puisque le Posouq entier déclare : דּוֹר הֹלֵךְ וְדוֹר בָּא, וְהָאָרֶץ לְעוֹלָם עֹמָדֶת
« Une
génération part et une autre vient, mais la terre se maintient pour toujours ».
Le Posouq signifie tout simplement que bien que les générations se succèdent et
que les êtres humains naissent et meurent, la terre, elle, n'a pas besoin de
renouvellement et subsiste constamment. Lisez d'ailleurs les versets qui
viennent juste après, et qui confirme bien que c'est uniquement cela que
voulait dire ici Shalômôh Hammalakh ע״ה.)
Ø L'ère
talmudique (jusqu'à l'an 500 de l’Ère Courante)
De
même, il n’existe aucune référence directe ou explicite aux Gilgoulim dans la
Mishnoh, la Gamaro` ou
le Midhrosh. Et encore une fois, les commentateurs médiévaux qui ont souscrit à
la notion du Gilgoul ne pouvaient que tenter de trouver des allusions à l’idée,
qui seraient cachées dans les textes talmudiques (quitte à très souvent donner
une lecture de ces passages qui en dénature complètement le sens originel,
comme pour les deux exemples de versets TaNa''Khiques susmentionnés).
Ø Les
Karaïtes
La
première référence explicite à la réincarnation se trouve ironiquement dans les
sources karaïtes. Le fondateur de la secte karaite, ´onon ban Dowidh (715 -
795) a écrit que la réincarnation était déjà un principe établi dans les cultures
existantes. Il semble vouloir faire allusion aux sectes gnostiques, aux
premiers chrétiens et peut-être à certaines sectes islamiques mystiques.
Il
est intéressant de noter que l’ensemble des Karaïtes a rejeté la notion de
réincarnation, probablement en raison de l’absence totale de références
scripturaires.
Cependant,
de nombreux juifs peuvent avoir été influencés par certaines de ces premières
sectes islamiques et avoir adopté leur doctrine de la réincarnation. Si cela
est vrai, cela indique une influence intéressante et hautement controversée sur
le concept de réincarnation. Le Rambo''m en parle dans son Môréh Navoukhim[3] (Guide
des Égarés). Il y rapporte que certains Ga`ônim
ont été influencés par quelques aspects du kalâm islamique. Bien que les membres
de la secte islamique des Mutazila étaient des rationalistes et non des
mystiques, ils adhéraient à la notion de réincarnation et il y a eu quelques
influences mutuelles avec certains Ga`ônim aux 8ème
et 9ème siècles qui ont fait entrer la notion de réincarnation dans
les milieux de certains Ga`ônim.
Ø Séphar
Habbahir
L'une
des premières références claires à la notion de réincarnation, dans les
principales sources juives, se trouve dans l’ouvrage kabbalistique connu sous
le nom de Séphar Habbahir. C'est là que les choses deviennent encore plus
intéressantes, car sa date et sa paternité sont âprement disputées.
Selon
les kabbalistes, ce livre aurait été écrit vers l'an 100 de notre ère par Ribbi
Nahounyo`
ban Haqqonoh ז״ל. D'autres pensent qu'il a été écrit par le fils du Ra`ava''d,
Yishoq l'Aveugle au 13ème siècle (tout comme le Zôhar).
D'après
le Séphar Habbahir[4] :
Pourquoi y a-t-il un type de Saddiq
pour qui arrive du bien et un autre type de Saddiq pour qui arrive du
mal ? - C'est parce que le deuxième Saddiq était mauvais auparavant
(c'est-à-dire dans une vie antérieure) et est maintenant puni.
Ø Le
Zôhar
Il
existe également de nombreuses références à la réincarnation qui se trouvent
dans le principal ouvrage kabbalistique, le Zôhar. Et encore une fois, la date
et la paternité de ce livre font l’objet d’un différend similaire à celui pour
le Séphar Habbahir.
Les
mystiques prétendent qu'il a été écrit par Ribbi Shim´ôn ban Yôho`y
(80-160 de l’Ère Courante). D’autres prétendent qu’il a été composé en Espagne,
au 13ème siècle, par Ribbi Môshah de Léon (1240-1305). [Voir les
nombreux articles sur le blog consacré au Zôhar.] Il convient de noter que tout
comme pour le Séphar Habbahir, tous ceux qui croient en l'authenticité du Zôhar
et l'attribuent à Ribbi Shim´ôn ban Yôho`y ז״ל n'ont aucune preuve
textuelle, ancienne, traditionnelle ou même scientifique à apporter, alors que
les preuves de la non authenticité et non antiquité de ces livres sont légions
(et bon nombre de ces preuves ont été apportées par des rabbins qui acceptent
néanmoins ces livres, comme par le Rov Ya´aqôv de Emden qui, bien
qu'il croyait en la sagesse contenue dans le Zôhar, a publié un ouvrage d'une
centaine de pages démontrant que le Zôhar n'est pas de Ribbi Shim´ôn ban Yôho`y,
qu'il contient des erreurs, distorsions de passages bibliques, certaines
hérésies, etc.)
Le
Zôhar déclare[5] :
Tant qu'un individu échoue dans le
dessein qui est le sien dans ce monde, le Saint, béni soit-Il, le déracine et
le replante encore et encore.
Le
Zôhar est le tout premier ouvrage à employer littéralement le terme de « Gilgoul ».
Ø Expansion
rapide de la notion kabbalistique de « Gilgoul »
Quelle
que soit la date que nous choisissons pour dater le Bahir et le Zôhar, il est
clair que c'est seulement à partir du 13ème siècle que la doctrine
du Gilgoul a commencé à jouir d’une grande popularité (ce qui est étrange si on
croit que ces deux ouvrages dateraient du 2ème siècle de l’Ère
Courante)
·
Le Rambo''n (Nahmanide,
1194-1270)
Bien
que certains kabbalistes espagnols comme le Rambo''n aient au départ hésité à
ouvertement mentionner le concept et ne l’aient fait que par « allusions
et sous-entendus », il n’a pas fallu longtemps pour que ce concept
soit accepté par la population.
Le
Rambo''n a écrit que le concept du Gilgoul est essentiel pour comprendre et
donner un sens aux histoires de la Tôroh. D'après lui, cette notion permet de
voir sous une lumière nouvelle les personnages bibliques et de percer des
secrets auxquels nous n'aurions autrement pas pu avoir accès. Grâce à la notion
du Gilgoul, le Rambo''n considère que nous pouvons comprendre pourquoi ils ont
agi comme ils l'ont fait, parce que nous savons qui ils étaient vraiment dans
leurs incarnations précédentes.[6]
·
Le `ar''i (Ribbi Yishoq
Louria `ashkanazi, 1534-1572)
À
l'époque de Ribbi Yishoq Louria, également connu sous le nom du `ar''i
Za''l, le concept a commencé à prendre son essor. C'est notamment à cause de
son ouvrage intitulé « Sha´ar Haggilgoulim », ou « La
Porte des Réincarnations », qui explique, entre autres idées, les
racines spirituelles de bon nombre de nos grands sages, dont il aurait eu la
révélation. (Le livre a été finalement achevé par le plus grand Talmidh du
`ar''i, à savoir, Ribbi Hayyim Vital, et édité par son fils, Ribbi Shamou`él
Vital. Il emprunte beaucoup au Zôhar, Poroshath Mishpotim, où sont traitées ces
idées.)
À
partir de ce moment, le concept de réincarnation a été inscrit dans le psyché
collectif du peuple juif comme étant apparemment un principe fondamental de la
foi, et il l’est resté jusqu’à ce jour.
·
Le Shélo''h (Ribbi
Yasha´yohou
ban `avrohom Halléwi Horowitz, 1555-1630)
Le
Rov Yasha´yohou
ban `avrohom Halléwi Horowitz a écrit :
Il y a des péchés pour lesquels la
purification dans le domaine spirituel seule ne suffit pas… ils sont obligés de
subir un deuxième cycle dans ce monde en guise de réhabilitation… ce qui se
produit généralement lorsque l'âme est confrontée au même défi auquel elle
avait succombé dans sa vie antérieure.
·
Manashshah
ban Yisro`él (1604-1657)
Ribbi
Manashshah
ban Yisro`él (qui s'appelait originellement Manoel Dias Soeiro), auteur du
Nishmath Hayyim (un ouvrage sur la réincarnation)[7], a écrit
que `odhom Hori`shôn ע״ה
avait
appris la doctrine de la réincarnation, mais qu'elle avait été oubliée par la
suite. Ensuite, Pythagore (qui selon cette source était un Juif) la reçut de
nouveau par l'intermédiaire d'une révélation que lui aurait accordé le prophète
Yahazqé`l ע״ה.
C’est
une référence fascinante, car c'est la première à explicitement considérer la
réincarnation comme faisant dès le début partie des croyances de l’humanité,
tout en précisant qu'elle ne serait entrée à nouveau dans le judaïsme qu'à
partir du 6ème siècle avant notre ère grâce à Pythagore. (Mais évidemment,
l'auteur n'appuie ses déclarations d'aucune preuve.)
Il
a écrit[8] :
La majorité des sages d’Israël
croient [en la réincarnation] et écrivent que c’est une croyance vraie et l’un
des principes fondamentaux de la Tôroh. Cela résout le problème d'un Saddiq
qui souffre. Nous sommes obligés d’écouter les paroles de ces autorités, et
avons cette conviction sans aucun doute ni hésitation que ce soit ...
Ø Popularité
de la réincarnation dans les milieux hassidiques
Le
principe de Gilgoul a été adopté et embelli par le Ba´al Shém Tôv et ses
partisans, de nombreux Rebbe`im hassidiques prétendant être conscients
de leurs personnalités antérieures.
Quelques
exemples :
· Le
Ba´al Shém Tôv (1700-1760) prétendit être le Gilgoul du Rov Sa´adhyoh
Go`ôn (882-942). Ironiquement, comme nous le verrons plus tard, le Rov Sa´adhyoh
Go`ôn était un critique virulent de la théorie de la réincarnation. Cela n’a
pas dissuadé les Hasidhim de dire que le Ba´al Shém Tôv
aurait procédé au Tiqqoun (rectification) de l'âme du Rov Sa´adhyoh.
· Rabbi
Nahmon de Breslev prétendit être la combinaison des âmes de Sho`oul,
Ribbi Shim´ôn ban Yôho`y et du Ribbi Nahmon du Talmoudh.
· Le
Hôzah de Lublin a dit un jour à son ami Rabbi Zelka de Grodzisk que la
raison pour laquelle ils étaient de si bons amis est qu'ils étaient père et
fils dans une vie antérieure.
· Rabbi
`avrohom Yahôshoua´
Heschel a déclaré qu’il en était à son troisième Gilgoul, après avoir été un
Nosi` et un Résh Goloutho` dans ses vies antérieures.
· Rabbi
Manahém
Mendel de Rouzhin a déclaré qu'il s'était réincarné cent fois et que c'était sa
dernière fois.
·
Rabbi Bertzi Leifer
de Nadvirna a déclaré qu'il s'était réincarné à trois reprises. La première
fois en tant que Qamou`él ban Shiphton, chef de la tribu
d'Ephraïm lorsque les Israélites erraient dans le désert (voir Bamidhbor
34:24).
La deuxième fois en tant qu'agriculteur, et il a visité sa propre tombe. Sa
troisième réincarnation eut lieu avant la deuxième guerre mondiale. (Fait
intéressant, il a mentionné qu'il était le plus satisfait lorsqu'il s'était
réincarné en agriculteur!)
Ø Âmes
humaines piégées dans des animaux
Il
y a des histoires concernant des Rebbe`im hassidiques qui déclaraient « Koshér »
des animaux égorgés que d'autres rabbins avaient disqualifiés ! La raison
invoquée par ces Rebbe`im hassidiques est que l'âme humaine qui avait
été piégée dans cet animal devait être libérée. Ils ont évoqué l'opportunité
halakhique de trancher avec indulgence sur certains aspects de la Kashrouth sur
base de la notion de « Marouvoh » ou
grande perte (généralement financière). Ils ont interprété cela comme une
« grande perte spirituelle » pour l'âme, qui s'était logée
dans un corps animal. Par conséquent, tout devait être mis en œuvre pour la
« libérer ».
Une
de ces histoires est rapportée au nom du Hôzah de Lublin, qui a déclaré
au sujet d'un poulet dont on avait appris à son épouse qu'il avait été égorgé
de manière incorrecte; « Sachez que la pauvre âme transmigrée dans ce
poulet attend déjà depuis de nombreuses années, et maintenant, elle plaide que
nous mangions ce poulet ce Shabboth pour opérer son Tiqqoun ». C'est
un exemple classique des hérésies qui avaient court dans les premiers milieux hassidiques :
transgresser la Halokhoh sous des motifs prétendument spirituels.
Une
autre histoire raconte comment une oie a été déclarée non Koshér car elle
n'avait pas été égorgée correctement, et celui qui se faisait appeler le
« Saddiq d'Alsk » prit une partie de sa graisse et en a fabriqué des
bougies pour Hanoukkoh. Il déclare que la bénédiction qu’il a récitée
sur les bougies a « libéré » l’âme humaine qui avait emprisonnée à
l’intérieur de l'oie.
Rabbi
Naphtoli Bachrach écrit[9] :
Notre maître, le `ar''i Za''l, a
dit : « Quand vous voyez des gens qui sont arrogants et qui n’ont
aucune honte, sachez qu’ils ont été transmigrés en une bête, un animal ou un
oiseau impur. De la même manière que ceux qui n’ont pas honte - ceux-ci non
plus n'ont pas honte ».
Je
vous laisse vous-mêmes être juges de croire ou pas en la véracité de telles
histoires d'âmes humaines réincarnées dans des animaux, concept que rejetait
catégoriquement le Rambo''n, bien qu'il fut un grand kabbaliste. Et sachez
aussi que même dans le Zôhar, il n'est jamais fait mention que les hommes
pourraient se réincarner dans des animaux.
Ø Réincarnation
et genre
D'après
les kabbalistes, en règle générale, les âmes des hommes transmigrent vers
d'autres hommes et, de la même manière, celles des femmes transmigrent vers des
femmes. Cependant, il existerait des exceptions, par exemple lorsque l'âme d'un
homme se réincarne dans le corps d'une femme. Les kabbalistes disent que
lorsque cela arrive, la femme est stérile. Ils affirment que c'était le cas de
Tomor, qui aurait eu une âme d'homme. Son âme aurait ensuite été transférée à
Routh, et elle ne pouvait donc pas avoir d'enfants tant qu'on ne lui donnait
pas les aspects d'une autre âme féminine.
Les
kabbalistes disent que Yahoudhoh ע״ה, le fils de Ya´aqôv
`ovinou ע״ה, serait une autre exception, puisqu'il aurait eu une âme
partiellement féminine.
Ø Opposition
à la théorie de la réincarnation
À
la lumière de tout ce qui précède, beaucoup de gens pourraient être surpris que
la théorie de la réincarnation ne soit pas adoptée à l'unanimité par tous nos
sages de la Tôroh :
·
Rov Sa´adhyoh Go`ôn (882-942)
À peu près au moment où le concept de réincarnation
pénétrait dans le monde juif, le Rov Sa´adhyoh Go`ôn ז״ל a rapidement réagi pour exprimer sa désapprobation
totale de la nouvelle idée.
Il
a écrit[10] :
Pourtant, je dois dire que j'ai
trouvé certaines personnes, qui se disent juives, professant la doctrine de la
réincarnation… ce qu'elles veulent dire, c'est que l'âme d'une personne est
transférée à une autre, puis à une autre. Nombre d'entre eux allaient jusqu'à
affirmer que l'esprit d'un être humain pouvait entrer dans le corps d'une bête
- ou celui d'une bête dans le corps d'un être humain – et encore d'autres
absurdités et stupidités de ce type.
Il
a expliqué que le concept bien authentifié de la résurrection exclut la théorie
de la réincarnation car le corps et l’âme sont en tandem et que l’âme ne peut
que retourner vers son « propre » corps et non vers celui d’un autre.
·
Le Rambo''m
(Ribbénou Môshah ban Maymôn, 1135-1204) et son fils Ribbénou `avrohom ban
HaRambo''m (1186-1237)
Pour
certains, il est surprenant de noter que le Rambo''m ז״ל est
exceptionnellement silencieux sur la question de la réincarnation. Il est
généralement franc sur tant de questions fondamentales de la théologie de la
Tôroh qu'il faut se demander pourquoi il a gardé le silence sur cette question
essentielle sur laquelle tant d'autres, surtout à cette époque, ont été très
critiques. Son fils, Ribbénou `avrohom ben HaRambo''m ז״ל, qui était aussi son
successeur, a toutefois exprimé son opposition à la croyance en la
réincarnation. Et étant donné que le fils puisait abondamment dans les
enseignements de son père, et a même révélé de nombreuses positions soutenues
par son père que ce dernier n'avait pas mises par écrit, il ne fait aucun doute
que le Rambo''m n'adhérait pas à la notion de réincarnation. Nous pouvons le
déduire également des nombreux textes que le Rambo''m a écrit sur le sujet de
la résurrection. Enfin, le Rambo''m ne s'attelait qu'aux principes et croyances
fondamentales du judaïsme. Son silence sur le sujet de la réincarnation indique
clairement qu'il ne considérait pas cette croyance comme faisant partie du
système de croyance de la Tôroh et du judaïsme.
Il
en est de même de Ribbénou Yahoudhoh Halléwi (1075-1141), l'un
des plus grands des Ri`shônim, mais qui n'a pourtant jamais rien dit ou écrit
sur la réincarnation, alors que, comme le Rambo''m, il a pourtant abondamment
écrit sur tout ce qui concernait le judaïsme.
·
Ribbénou Yôséph
`albô (1380-1444)
De
même, Ribbénou Yôséph `albô ז״ל
a
rejeté la théorie de la réincarnation. Il a écrit :
Il y a ceux… [qui affirment qu']il
est possible que l'âme qui a déjà servi dans un corps humain revienne pour
demeurer dans un [autre] corps. Mais ce n'est pas correct.
Selon
lui, une âme n'a pas la liberté de choix avant de naître dans un corps humain.
Il est né « contre sa volonté ». Mais ce n'est qu'après s'être uni au
corps qu'il acquiert la liberté de choix. Cette liberté de choix atteinte par
l'âme est si précieuse que même « les anges se sont égarés ... et ont
demandé à se prosterner devant l'homme ... car les anges eux-mêmes n'ont pas le
libre arbitre ».
Une
fois que l'âme est devenue un agent du libre arbitre « Pourquoi
reviendrait-elle dans le corps ? Et pourquoi un corps potentiel serait-il
prêt à recevoir l'âme qui a déjà servi dans un autre corps plutôt que de
recevoir une âme (nouvelle et originale) ? »
Il
ajoute que la seule chose plus absurde que la réincarnation dans une autre
forme humaine serait la notion selon laquelle une âme peut aussi « transmigrer
dans le corps des animaux ».
Il
termine par une expression d'exaspération totale en ajoutant « et
HaShem sait ».[11]
·
Le Rasha''sh (Rabbi
Shamou`él
Strashoun, 1794-1872)
Le
Rov Shamou`él
Strashoun, dans son célèbre commentaire sur le Talmoudh, rapporte une preuve
talmudique contre les Gilgoulim. Il rapporte ceci :
La Tôroh déclare[12] : בָּרוּךְ אַתָּה, בְּבֹאֶךָ; וּבָרוּךְ אַתָּה, בְּצֵאתֶךָ
« Béni
sois-tu à ta venue, et béni sois-tu à ta sortie ». Nos Sages ont
expliqué que cela signifie que tout comme la venue de quelqu'un dans ce monde se
fait sans péché, de même la sortie de quelqu'un de ce monde doit être sans
péché.[13] Sur
base de cela, il est considéré comme allant de soi par nos Sages que l'entrée
dans ce monde se fait sans péché. Cela exclut la réincarnation, dont la base
même est de retourner dans le monde pour rectifier des péchés antérieurs.
·
Rabbi Shimshôn Rapho`él Hirsch (1808-1888)
Rabbi
Shimshôn Rapho`él Hirsch est considéré comme l'un des plus grands penseurs
juifs de l'ère moderne. Il a pourtant écrit que la croyance en la réincarnation
était l'une des distinctions majeures qui distinguait le judaïsme de la
religion des anciens Égyptiens, la réincarnation étant le principe central de
la foi égyptienne. En d'autres mots, les anciens Israélites rejetaient
catégoriquement la notion de réincarnation, qui était un des fondements de la
foi égyptienne. Or, n'oubliez pas que HaShem Lui-même a catégoriquement défendu
aux Israélites de conserver ou imiter les croyances, us et coutumes auxquels
croyaient les Égyptiens. Et la réincarnation est l'un d'eux.
·
D'autres
De
très nombreux autres illustres rabbins de la tradition juive ont
catégoriquement rejeté le concept de Gilgoulim. Citons par exemple : le Saphôrnô[14],
Ribbénou `avrohom `ibn Daoud[15],
Ribbénou `avrohom ban Hiyo`[16] (le
maître du `ibn ´azro`), Ribbénou Léon de Modène, Ribbenou Yadhoyoh
Bershidi, Ribbénou Dowidh Qimhi (surnommé le Rada''q, l'un des plus
grands commentateurs du TaNa''Kh) ou encore Ribbénou Hasda`y Qresqas.
Ø Conclusion
Bien
que la perception commune aujourd’hui soit clairement biaisée en faveur de la
croyance dans les Gilgoulim, il est intéressant de découvrir que, sur la base
d’une vue d’ensemble des sources, il faut dire que le « jury
théologique » n’a toujours pas été choisi, et que les choses sont plus nuancées
qu'il n'y parait.
Cela
ne signifie pas que le système de croyance personnel doit être compromis d’une
manière ou d’une autre. Les croyances religieuses sont par nature très
subjectives et émotionnelles, et doivent rester une prérogative religieuse
personnelle. Mais ce qui est clair est que ceux qui croient en la réincarnation
ne peuvent pas prétendre avec honnêteté et intégrité qu’il n’existe qu’une
seule approche hashqaphique définitive concernant la question de la
réincarnation, et que cette croyance serait « traditionnelle »
ou encore un « fondement de la foi », ce qui sous-entendrait
que ceux qui n'y souscriraient pas seraient « hérétiques » ou
en-dehors de la foi. En outre, tous ceux qui prétendent que c'est la croyance
universelle d'Israël se trompent, car bon nombre d'éminents rabbins passés et
présents se sont opposés à la notion de Gilgoulim, avec des preuves souvent
beaucoup plus détaillées, développées, sourcées et argumentées que les
défenseurs de la réincarnation.