ב״ה
Le
traditionnel VS le réformiste
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Comme
vous l'avez certainement remarqué à travers plusieurs de mes
articles, je ne fais pas partie de ceux qui croient que toutes les
tendances au sein du judaïsme se vaudraient. Il est essentiel de
connaître les différences entre les diverses tendances afin de ne
pas tomber dans de nombreux pièges, comme le syncrétisme ou
accepter des idéologies qui s'apparentent à des hérésies Tout
comme nos Sages ne considéraient pas légitimes les mouvances
sadducéennes, esséniennes, nazaréennes ou encore celles des
Kouthim, sur des bases halakhiques et traditionnelles objectives, de
même, nous ne pouvons tolérer toutes les tendances modernes du
judaïsme (libérale/réformée, Conservative/Massorti,
reconstructionniste, et même certaines déviances orthodoxes), et
devons être capables de nous en expliquer à l'aide d'arguments
objectifs tirés de la Halokhoh et de la tradition.
C'est
à l'égard du Siddour traditionnel d'Israël que l'on découvre le
plus grand contraste entre l'attitude du traditionnel, d'un côté,
et celle du Réformé et Reconstructionniste, de l'autre côté. Le
Juif traditionnel est tout simplement trop modeste que pour critiquer
le Siddour. Il sait qu'il fut progressivement mis en place par des
Saddiqim et Hakhomim dont il souhaiterait
atteindre et imiter la ferveur religieuse. À l'inverse, les Réformés
et Reconstructionnistes considèrent le Siddour sous leur angle
caractéristique de l'adoration de l'homme et le modifient afin qu'il
colle à leur nouvelle religion.
- Les Qôrbonôth
Par
exemple, le Siddour traditionnel fait souvent référence aux animaux
sacrificiels qui étaient offerts dans le Béth Hammiqdosh à
Yarousholayim ´ir Haqqôdhash. Les Juifs
traditionnels ne prétendent pas comprendre la signification de ces
Qôrbonôth. Les nombreuses explications proposées par Ribbénou
ז״ל,
le Rambo''n ז״ל,
le Mahabbér ז״ל
et
d'autres, ne résolvent pas toutes les interrogations à ce sujet.
Mais le fait qu'ils ne comprennent pas ne les amènent pas à
s'octroyer le droit de rejeter ces passages. Ils ne savent pas, mais
ils croient ! Ils croient non seulement en Hashshém ית׳
mais
également en la sagesse des Hakhomim ayant formulé
ces prières. De l'autre côté, les Réformés et
Reconstructionnistes sont certains de savoir mieux que leurs
prédécesseurs. Ils sont si certains de leur rationalisation des
Houqqim bibliques concernant les Qôrbonôth, que s'appuyant
sur elle ils se sentent en droit de dédaigner ceux qui les ont
précédés. Un illustre « rabbin » Réformé osa même
déclarer « Transformerons-nous nos synagogues en
abattoirs ? », pour justifier de retirer du Siddour
les références aux Qôrbonôth. Mais les Juifs traditionnels sont
trop modestes que pour se dire que leurs aspirations religieuses sont
supérieures esthétiquement et philosophiquement à celles des
Prophètes, qui ont approuvé le culte sacrificiel. Et en y regardant
de plus près, les Juifs traditionnels se rendent compte de la nature
inappropriée et biaisée des arguments de leurs adversaires.
Ces
derniers partent des suppositions que la prière fut ordonnée par
des Prophètes progressifs comme substitut aux Qôrbonôth, et la
synagogue comme substitut au Béth Hammiqdosh. Mais ils ignorent les
innombrables preuves dans les sources midrashiques et talmudiques
attestant que les prières étaient récitées en même temps que les
Qôrbonôth étaient offertes, et que même aux époques du Béth
Hammiqdosh, lorsque les offrandes animales étaient la règle, il
n'existait pas seulement des centaines de synagogues à
Yarousholayim, mais il y avait même une
synagogue dans le Béth Hammiqdosh lui-même ! Il est vrai que
les Prophètes ont critiqué l'hypocrisie de ceux qui offraient des
Qôrbonôth en pensant, par exemple, qu'il suffisait d'en apporter
pour que le Créateur les exonère de leurs crimes commis envers la
veuve, le pauvre et l'orphelin, sans même aucune repentance. Or, ces
même Prophètes critiquaient également, et avec une vigueur
identique, ceux qui s'adonnaient à la prière, qui levaient leurs
mains en adoration vers le ciel, alors qu'elles avaient été des
instruments de vol et de meurtre.1
Cela signifie-t-il donc que les Prophètes étaient opposés à la
prière ? Nous voyons donc le ridicule de l'approche des
Réformés.
Oui,
certains peuples primitifs offraient des animaux pour calmer leurs
fausses divinités, mais un Juif traditionnel ne peut jamais oublier
le Chapitre 19 de Wayyiqro`, ce chapitre immémorial qui contient
l'obligation de וְאָֽהַבְתָּ֥
לְרֵֽעֲךָ֖ כָּמ֑וֹךָ
« et
tu aimeras ton semblable comme toi-même ».2
Ce même chapitre contient les lois fondamentales qui régissent la
validité ou l'invalidité des offrandes animales. Si ce chapitre est
une obligation de Hashshém, qui oserait le modifier ou effacer la
moindre partie de ce qu'il contient ? Mais s'il avait été
écrit par un homme, qui oserait dire que le génie qui a conçu les
prescriptions éthiques extraordinaires qu'on retrouve dans ce
Chapitre 19 était dans le même temps un barbare pour ne pas avoir
compris, contrairement aux Réformés, qu'il était offensant de
considérer que des offrandes animales pourraient constituer une
expérience religieuse authentique ? Le Juif traditionnel est
prêt à accorder à Hashshém ou à Son serviteur le bénéfice du
doute, et bien qu'il ne présume pas connaître pleinement la
signification des offrandes animales, il ne les considère pas non
plus comme une marque de barbarisme. En fait, il ne doit jamais être
oublié que les Juifs, même les Réformés, ont conservé dans leur
calendrier religieux jusqu'à nos jours un souvenir du culte
sacrificiel d'antan, à savoir le Sédhar de Pasah,
qui est de loin le rituel juif le plus observé et chéri. Si les
Réformés étaient logiques avec leur approche et opinion sur les
offrandes animales, ils devraient renoncer à observer le Sédhar de
Pasah,
qui est un rappel de l'agneau que l'on offrait au Béth Hammiqdosh !
Les
Réformés et Reconstructionnistes sont prompts à citer un passage
du Mishnéh Tôroh de Ribbénou pour justifier leur élimination de
toutes les références aux Qôrbonôth dans leur Siddour. Mais à
quel point sont-ils honnêtes lorsqu'ils ignorent les affirmations
explicites de Ribbénou selon quoi lorsque le Moshiah
viendra, l'intégralité du culte sacrificiel sera restaurée ?
En outre, ils citent le fait que Ribbi Yôhonon
ban Zakka`y, en l'an 70 de l’Ère Courante, interdit d'apporter des
Qôrbonôth, mais ignorent dans le même temps la raison que lui-même
a expressément exprimée : c'était afin de prolonger le deuil
pour la destruction du Béth Hammiqdosh ! Il décréta des
interdictions similaires, comme par exemple l’interdiction de tenir
des mariages trop festifs.
Rien
ne tient la route dans les arguments que les Réformés pourraient
donner pour dénigrer les Qôrbonôth et leurs références dans le
Siddour. Au contraire, cela ne fait que faire ressortir leur
arrogance et mépris envers la Tôroh, la tradition et les Sages.
- Façon de considérer la femme
L'arrogance
des Réformistes et Reconstructionnistes, par rapport aux ancêtres,
dans leur attitude envers les Qôrbonôth est égalée uniquement par
leurs sentiments de supériorité dans le domaine de la
« galanterie ». Le Juif traditionnel, encore une fois, ne
prétend pas être plus galant que ses ancêtres ; et si dans le
judaïsme en général, et dans le Siddour en particulier, il y a des
facteurs qui offenseraient les femmes, il ne rejette rien. Il
souhaite simplement avoir davantage de connaissances avant d'exprimer
son opinion sur le sujet, se demandant ce qu'ont voulu réellement
dire les Sages, et s'il serait possible de comprendre différemment
leurs propos. Comme pour les Qôrbonôth, le Juif traditionnel ne
considère pas la tradition injuste, mais parcourt les sources pour
être plus éclairé sur le sujet. Au lieu de purger le Siddour des
prières qui lui posent problème, il se met à tourner les pages du
Talmoudh pour en savoir plus sur la question. Il part de la
supposition qu'il n'en sait pas assez, et qu'il n'est pas plus saint
et savant que les initiateurs de notre énorme héritage, car la
modestie est la marque de fabrique de la tradition.
Il
est vrai que de nombreux textes peuvent être cités du Talmoudh et
du Midhrosh pour illustrer la basse estime de certains rabbins
concernant l'intelligence des femmes. Mais on peut citer autant, si
pas plus de passages encore tirés des mêmes sources, qui illustrent
le profond respect que bon nombre d'autres rabbins avaient vis-à-vis
des femmes. En outre, les rabbins n'avaient pas non plus la même
opinion quant à savoir qui était plus chaste entre les hommes et
les femmes. Mais de manière générale, la Halokhoh était
remarquablement progressiste à l'égard des droits des femmes, dans
et en dehors du cadre du mariage, même si l'égalité ne fut jamais
la règle, avant comme aujourd'hui. (D'ailleurs, il est absurde de
militer pour l'égalité homme-femme. Les deux sexes sont différents
et ont des rôles distincts. Il y a des domaines dans lesquels les
femmes sont plus brillantes et d'autres dans lesquels les hommes
brillent davantage.)
De
plus, le statut des femmes du point de vue de la pratique religieuse,
de la prière, de la synagogue, ou même des fonctions dans le Béth
Hammiqdosh, nécessite une analyse philosophique plus minutieuse que
voudraient nous le faire penser ceux qui, à la hâte, se prétendent
être les émancipateurs des femmes. Concernant l'écrasante majorité
des commandements, les femmes furent autant soumises à la Loi que
les hommes. Et leurs capacités ne furent jamais rabaissées. En
effet, du point de vue stricte de la Halokhoh, dix femmes
réunies ensembles pourraient organiser des offices de prière comme
les hommes. Et des femmes pourraient également être appelées à la
Tôroh lors des lectures publiques. Mais elles préféraient rester
discrètes, contrairement à bon nombre de femmes contemporaines qui
militent bruyamment pour avoir le droit de se voir accorder l'honneur
de monter à la Tôroh ou mettre les Taphillin
devant tout le monde, mais qui ne font pas autant de bruits pour le
droit de mettre les Taphillin ou un Tallith en
privé, chose que la Halokhoh leur permettrait sans
problème ! C'est là que l'on voit la malhonnêteté de ces
femmes et des mouvements réformés et reconstructionnistes.
Du
point de vue des rituels, les femmes ne furent pas astreintes à
l'accomplissement de nombreux commandements. Néanmoins, elles
avaient la permission de les accomplir, si elles le désiraient. Mais
chaque fois que le commandement impliquait une limite de temps pour
être accompli, elles étaient exemptées. C'est pour cette raison
qu'elles ne se virent pas imposer l'obligation de mettre les
Taphillin ou de porter un Tallith, parce que les
hommes n'ont l'obligation de les mettre qu'en journée mais pas de
nuit. Et ces exemptions n'étaient en rien liées à la prétendue
« impureté »ou « saleté » de la femme.
Certains rabbins contemporains enseignent maladroitement que les
femmes auraient été exemptées de ces Miswôth parce que
s'occuper des corvées domestiques, des enfants, etc., ne laisserait
pas aux femmes de temps pour ces Miswôth. Non seulement cet
argument n'a aucune source dans la tradition, mais elle permet des
contre-arguments très faciles. En effet, si telle en serait la
raison, pourquoi même les femmes non mariées, et jeunes femmes,
ainsi que les femmes âgées, en seraient exemptées ? Ou en
quoi serait-il impossible ou difficile pour une femme, même ayant
des enfants, de réciter le Shama´ Yisro`él
deux fois par jour (le matin et le soir), une Miswoh dont les
femmes sont également exemptées ? Nous pouvons voir que cet
argument ne tient pas la route.
Une
lecture minutieuse des sources talmudiques révèle que la différence
que fait la Halokhoh entre les hommes et les femmes était
basée sur la nature et le fonctionnement naturel, et non sur des
considérations sociales ou économiques. La nature n'a pas doté les
hommes d'un apparatus interne leur permettant de mesurer le temps.
Afin qu'un homme apprenne à sanctifier le temps, la Halokhoh
lui impose de nombreuses Miswôth qui sont régies par un
calendrier et une horloge. Les femmes, par contre, par la nature même
de leur constitution physique et des exigences de la Halokhoh
par rapport à leurs périodes menstruelles, avaient moins besoin
qu'on les rende conscientes de la sainteté du temps. Elles sont
conscientes qu'elles ont une horloge naturelle : chaque mois,
elles ont une période de menstruation ; contrairement aux
hommes, elles ont également une limite biologique pour procréer,
etc. Leur période naturelle a alors été orientée vers la sainteté
par la Halokhoh. L'homme cherche constamment à s'échapper
de son instabilité par la conquête, tandis que la femme est
toujours rattrapée par son « destin ». C'est parce que
le schéma de la femme est en phase avec les saisons de la terre.
Dans son propre corps elle reproduit le schéma de la terre, qui se
renouvelle de façon cyclique. C'est ce fonctionnement naturel de la
femme, qui est limitée, qu'elle le veuille ou pas, par différents
délais dans sa vie, qui a été pris en compte au niveau de la
Halokhoh.
L'homme
étant incapable, sans contrainte, de sanctifier son temps, la
Halokhoh lui impose plus de devoir, et en bénissant
chaque jour Hashshém de ne pas l'avoir fait femme, il veut dire
par-là que c'est une grâce Divine qu'il ait été créé homme pour
s'obliger à servir Hashshém, car autrement, sans ces Miswôth
il n'aurait été que vide. Cette bénédiction n'est donc en aucun
cas une insulte ou mépris vis-à-vis des femmes. Il est intéressant
de noter que l'auteur de cette bénédiction fut Ribbi Mé`ir ז״ל,
dont l'épouse n'était pas seulement sa bien-aimée, mais également
sa collègue, une femme dont l'érudition en Tôroh était si élevée
que le Talmoudh rapporte qu'une fois tous les Sages émirent une
certaine opinion sur une question, puis interrogèrent Barouriyoh
(l'épouse de Ribbi Mé`ir) qui donna une opinion inverse, et elle
fut suivie ! Elle joua également un rôle prépondérant dans
la composition de la Mishnoh ! Sachant cela, il est impossible
que cette bénédiction ait émané d'un homme sexiste ou misogyne !
Et
lorsque le Juif traditionnel récite quotidiennement la bénédiction
composée par Ribbi Mé`ir, il n'est jamais animé de la pulsion de
la modifier, ni de la supprimer, car ce serait de l'arrogance ;
il se prétendrait plus galant que ce grand Sage, et plus respectueux
de son épouse que ne l'était Ribbi Mé`ir vis-à-vis de la sienne !
- Façon de considérer Hashshém
Toutefois,
c'est vis-à-vis de Hashshém, plus que vis-à-vis des femmes ou des
Qôrbonôth, que le Juif traditionnel se retrouve dans une humeur
plus modeste que les Réformateurs et Reconstructionnistes. Le Juif
traditionnel ne fixe pas la portée ou étendue de l'omnipotence de
Hashshém. Il ne sait pas comment ou quand Hashshém ressuscitera les
morts, mais il ne place pas en conséquence cette possibilité en
dehors de la puissance de Hashshém. En fait, Hashshém doit
ressusciter les morts s'Il doit exercer Son omnipotence dans la
réalisation de Son attribut de Sadhoqoh.
Car, comme l'explique magistralement bien le Rov Yôséph B.
Soloveitchik, le rang le plus élevé sur l'échelle de la Sadhoqoh
implique de donner de l'aide à ceux qui sont dans le plus grand
besoin, à ceux qui sont les plus abandonnés à eux-mêmes. Or, qui
sont les plus incapables de s'aider eux-mêmes que les morts ?!
C'est pourquoi, si les attributs Divins de Gavouroh
et Sadhoqoh ont une quelconque
signification, ils doivent inclure l'ultime résurrection des morts.
Ce dogme ne s'accepte pas aisément, car il transcende la raison
humaine, mais il n'est pas plus surnaturel que la plupart des
enseignements des Navi`im (prophètes) selon quoi
la nature deviendra parfaite, que la mort disparaîtra, que l'ordre
moral et naturel refléteront ensembles et en même temps le dessein
ultime de leur Créateur, etc. Ce n'est qu'avec la `amounoh
qu'on peut rendre significatifs et donner un sens à ces
enseignements prophétiques basiques.
Les
agnostiques sont cohérents. Ils ne prétendent pas que le progrès
est réel ou qu'il y aurait un concept de perfection. Mais les
Réformateurs et Reconstructionnistes prêchent encore les idéaux
prophétiques, en dépit de leur caractère surnaturel, mais nient à
Hashshém la puissance de faire venir un Moshiah de chair et
de sang ou de faire justice à ceux qui, sans faute de leur part,
naquirent avant l'ère où la mort ne sera plus.
Les
Reconstructionnistes en particulier ont cherché à intégrer dans le
judaïsme toutes les normes du naturalisme moderne. Le Siddour compte
de nombreuses références aux lois naturelles. Par exemple, dans la
première bénédiction qui précède la récitation du Shama´
du soir nous déclarons ceci : מַחֲלִיף
אֶת הַזְּמַנִּים,
מְסַדֵּר
אֶת הַכּוֹכָבִים בְּמִשְׁמְרוֹתֵיהֶם
בָּרָקִיעַ כִּרְצוֹנוֹ « Il
alterne les saisons, Il met en ordre les étoiles d'après leurs
gardes dans le firmament, selon Son désir ». Mais avec
le Psalmiste, le Juif traditionnel considère le naturel comme
miraculeux et cela se reflète dans les formulations employées dans
le Siddour. D'ailleurs, aucun scientifique n'a même jamais supposé
pouvoir donner l'explication complète de tous les phénomènes. Et
quand bien même il s'aventurerait à le faire, l'explication
conserverait une grande part de mystères, car le phénomène
expliqué pourrait être uniquement la partie visible de l'iceberg,
alors que ce qu'il reste à expliquer pourrait être encore plus
extraordinaire. Néanmoins, même sans explication complète, le peu
qu'on connaît suffit à causer une grande admiration envers
Hashshém, et quand bien même le but d'une découverte serait de
nier Hashshém, la vérité est que chaque découverte confirme la
nature miraculeuse de la création et de la nature. Mais retirer au
Créateur Son pouvoir d'interférer avec la loi de la nature
n'équivaut pas seulement à renier Son omnipotence, mais également
cet élément de « miracle » dans la nature, que les
scientifiques appellent « chance » et qu'ils tentent de
rationaliser depuis les jours de Peirce.
Ce
qui est fondamental dans le judaïsme traditionnel c'est l'adoration
de Hashshém en tant que Créateur, et le dogme qui l'accompagne
selon quoi aucune chose créée ne peut être adorée. Concevoir
Hashshém en des termes humains équivaut pratiquement à faire d'une
créature (puisque Hashshém est rabaissé au niveau des hommes ou
d'autres créations) l'objet d'une adoration plutôt que le Créateur.
C'est la raison pour laquelle la modification que les Réformistes et
Reconstructionnistes ont apporté au Siddour dans la première
bénédiction qui précède le Shama´ du matin
est dramatique, car dans sa forme originelle elle nous transmettait
un message fondamental. La formule de cette bénédiction est
celle-ci :
Béni
tu es `adhônoy notre `alôhim, Roi de
l'univers, Formateur de la lumière et Créateur de l'obscurité,
Faiseur de la paix et Créateur de tout, Celui qui renouvelle dans
Sa bonté, chaque jour, constamment, l’œuvre de la création.
Béni Tu es `adhônoy, Formateur des luminaires.
|
בָּרוּךְ
אַתָּה יהוה,
אֱלֹהֵינוּ
מֶלֶךְ הָעוֹלָם,
יוֹצֵר
אוֹר וּבוֹרֵא חֹשֶׁךְ.
עֹשֶׂה
שָׁלוֹם וּבוֹרֵא אֶת הַכֹּל,
הַמְחַדֵּשׁ
בְּטוּבו בְּכָל יוֹם תָּמִיד מַעֲשֶׂה
בְרֵאשִׁית.
בָּרוּךְ
אַתָּה יהוה,
יוֹצֵר
הַמְּאוֹרוֹת
|
Cette
bénédiction, qui est une paraphrase de Yasha´yohou
45:7, fut instituée par les `anshé Kanasath
Haggadhôloh (Hommes de la Grande Assemblée)
pour servir de protestation contre le zoroastrisme, qui souscrivait à
la croyance selon quoi le bien et le mal, la lumière et l’obscurité,
étaient représentés par des divinités distinctes. Afin d'affirmer
l'opposition sans équivoque du judaïsme face à cette approche, les
`anshé Kanasath Haggadhôloh
appelèrent les Juifs à proclamer quotidiennement le fait que
Hashshém seul est « Formateur de la lumière et Créateur
de l'obscurité, Faiseur de la paix et Créateur de tout »,
Lui qui est partout considéré comme Saint par les créatures, y
compris par les milices célestes. C'est la signification essentielle
de la première bénédiction qui précède le Shama´
du matin. Plus tard, cette bénédiction fut rallongée à l'époque
des Ga`ônim et ensuite au Moyen-âge. À
Shabboth et Yôm Tôv, et plus particulièrement durant les Dix Jours
Redoutables, de nombreux Piyoutim et autres additions ont été
ajoutés dans cette bénédiction.
Enfin,
le Siddour contient également de nombreux anthropomorphismes sur
Hashshém. Et l'écrasante majorité de ceux qui comprennent les
prières ne furent pas amenés à concevoir Hashshém en termes
humains, malgré le fait que des figures de style anthropomorphiques
étaient employées. Mais les Réformistes et Reconstructionnistes,
dans leur zèle pour bannir tout anthropomorphisme, le remplacèrent
par l'anthropocentrisme. À la place des figures de style
anthropomorphiques, ils présentèrent un dieu créé à l'image de
la couronne de Sa création, l'homme. Et la conséquence fut que tout
ce que l'homme ne pouvait pas concevoir fut, ipso facto, supposé
être hors de portée de la puissance de Hashshém. C'est pourquoi
les Réformistes (Juifs libéraux) et Reconstructionnistes en sont
arrivés à présumer que Hashshém ne S'est jamais révélé. C'est
aussi pour cela qu'ils rejettent catégoriquement la possibilité que
Hashshém ait pu Se choisir un peuple appelé à devenir Son royaume
spécial de Kôhanim et une sainte nation ! La
doctrine des libéraux est donc qu'il n'y a pas de révélation
Divine, et puisqu'il n'y a pas de révélation Divine, il n'y a a
donc pas de peuple élu de Hashshém. La Tôroh est vue par ces
hérétiques comme étant une œuvre purement humaine, et en tant que
telle elle n'a pas de nature éternelle et peut être modifiée, et
certaines de ces lois ou idéologies peuvent être rejetées si elles
ne sont plus en phase, selon eux, avec l'époque !
Ce
sont les hérésies que vous tolérez en considérant les Réformistes
et Reconstructionnistes comme des mouvements « juifs ».
- L'élection du peuple juif
Non
seulement les Réformés et Reconstructionnistes accusent nos
ancêtres d’anthropomorphisme, mais ils les accusent également
d'égocentrisme par le fait que nos ancêtres affirmaient une
croyance dans le concept d'élection du peuple d'Israël par
Hashshém. Cela pourrait vous surprendre mais les Réformés et
Reconstructionnistes ne croient pas du tout dans la notion pourtant
biblique que nous serions les élus de Hashshém, comme mentionné
plus haut. Ils considèrent qu'il est injuste d'estimer que Hashshém
aurait favorisé un peuple par rapport aux autres. Le rejet de cette
doctrine pourtant fondamentale du TaNa''Kh est causé par les
sentiments humanistes qui imprègnent ces deux branches hérétiques
du judaïsme. C'est au point qu'ils ont osé retirer du Siddour
traditionnel l'expression « Qui nous a choisis »
et l'ont remplacée par « Qui nous a rapprochés de
Lui ». Mais il est inutile de dire que remercier
Hashshém de nous avoir rapprochés de Lui peut être tout aussi
offensant que de Le remercier pour nous avoir choisis. Si la dernière
formule sous-entend qu'Il nous a choisis en rejetant d'autres, alors
la première, par la même logique erronée, sous-entend que si nous
sommes proches c'est que d'autres sont plus loin. Or, si les autres
nations peuvent faire le choix de se rapprocher de Lui, c'est
qu'elles peuvent également faire le choix d'être choisies. Et c'est
précisément ce que le Juif traditionnel enseigne. Le fait d'avoir
été choisi n'exclut personne. Pourquoi devrions-nous donc avoir
honte de notre élection par Hashshém, en sachant, en outre, que
ceux qui n'ont pas été choisis peuvent faire le choix de l'être
(de la même manière qu'ils peuvent choisir de se rapprocher de
Hashshém), soit en acceptant partiellement la Tôroh (les Sept Lois
Noahides), soit en se convertissant ?
Le
peuple d'Israël n'a pas seulement été choisi, mais il a également
choisi d'être choisi, en faisant le choix d'accepter sur lui
l'intégralité de la Tôroh et des Miswôth.
Cette élection n'est pas pour décorer ou pour se glorifier aux yeux
des nations, mais vient avec des obligations et des responsabilités.
En effet, Hashshém a exprimé qu'Il était sanctifié par ceux qui
étaient les plus proches de Lui3 ;
or, c'est justement du plus proche qu'Il attend une réalisation
maximale du potentiel et une obéissance maximale et minutieuse.
Ainsi, l'élection du peuple juif fait des Juifs des commandos dans
la lutte pour l'accomplissement de la volonté de Hashshém dans
l'univers. Et dans cette bataille les Juifs ont en réalité
énormément appris de très nombreux Gôyim. Mais quelqu'un qui se
dit religieux et est doté d'un peu de modestie n'oserait pas se
grandir en se donnant l'image d'un vrai universaliste tout en
accusant à demi-mots ses ancêtres d'avoir été des xénophobes,
comme le font les Réformés et Reconstructionnistes !
Le
fait que le monde Gôy réagisse négativement au concept du « Peuple
Élu » ne justifie pas et ne nous autorise pas à chercher leur
approbation au dépend de notre tradition et de l'intégrité de la
réputation de bon nombre de personnes qui ne peuvent plus se
défendre aujourd'hui. En fait, si nous devions excessivement nous
inquiéter des incompréhensions des Gôyim, alors les Réformés et
Reconstructionnistes feraient certainement mieux d'abandonner le
sionisme, et même le Sédhar de Pasah, car les Gôyim
d'aujourd'hui n'aiment pour la plupart d'entre eux pas du tout le
sionisme, et qu'ils ne sont pas capables de comprendre le rituel de
la nuit de Pasah.
Le
problème est que les Réformés et Reconstructionnistes, en tant
qu'humanistes extrémistes, placent les pensées humaines devant
celles de Hashshém, et s'inquiètent ainsi plus de plaire aux hommes
plutôt qu'à Hashshém.
- La notion du retour à Sion
La
plupart des Libéraux et Reconstructionnistes ne sont pas prêts à
retirer toute mention de Sion de leurs Siddourim, mais ils
s'accordent sur le principe que prier pour un « retour »
là-bas est hypocrite. Étant donné qu'ils ne croient pas en un
Messie personnel qui rassemblera les « exilés » des
quatre coins de la terre, et étant donné qu'ils sont amoureux de la
vie prospère en Amérique et en Europe qu'ils mènent, ils altèrent
leurs Siddourim afin qu'ils reflètent leur confort dans la
civilisation occidentale.
Mais
pour le Juif traditionnel, prier pour un retour vers Sion ne signifie
pas seulement retourner littéralement en Terre d'Israël, mais cela
constitue également une prière pour retourner vers Hashshém. Car
avant d'opérer un retour physique vers `aras Yisro`él, le
Juif se devra d'opérer un retour spirituel vers Hashshém, condition
immuable pour le retour massif vers Sion. Ainsi, avant la venue du
Moshiah, qui nous tirera de cet exil, il reste encore
énormément de travail personnel à faire. Certains pourraient
choisir de le faire en `aras Yisro`él, d'autres en Amérique,
d'autres encore en Europe, voire même à Madagascar. Tous sont
conscients du rôle du judaïsme et des Juifs dans l'avancement de la
justice sociale. Mais pour le Juif traditionnel, Sion représente
beaucoup plus qu'un lieu géographique ; il s'agit de la Terre
Sainte ! Tout comme le monde doit être corrigé afin qu'il
puisse œuvrer et avancer vers la justice, de même les occupants de
la Terre d'Israël doivent être corrigés vers la justice pour le
bien du judaïsme. Et comme dans les précédentes périodes de
l'histoire juive, les deux fonctions doivent être réalisées par
des Juifs aussi bien à la maison qu'en exil. Que certains d'entre
nous aient fait le choix ou en aient été contraints de servir dans
un lieu plutôt qu'un autre est conséquent, mais n'altère en rien
la signification des prières pour un retour complet, lorsque le
monde entier connaîtra la justice et les justes, et que les Juifs
rentreront à la maison pour jouir d'une plus grande communion avec
Hashshém et expérimenter davantage de Sa sainteté dans leur
observance de Sa Tôroh...l'intégralité des 613 Miswôth,
qu'il est impossible de respecter à l'époque présente. (Mais
puisque les Libéraux et Reconstructionnistes ne croient pas en
l’immutabilité et immuabilité de la Tôroh, ils n'espèrent donc
pas de retour vers Sion, où la Tôroh pourra être pleinement
respectée.)
Là
encore, cela pourrait nécessiter un peu de `amounoh non
seulement pour croire que cela se produira mais également que cette
communion totale avec Hashshém est l'objectif ultime. Les Libéraux
et Reconstructionnistes croient plutôt que l'objectif ultime n'est
pas la communion totale avec Hashshém, mais atteindre la justice
sociale, la liberté, l'égalité et la prospérité, de sorte que
l'homme puisse se développer seul ! Le but ultime est donc
l'homme, au-delà duquel il n'y a rien d'autre. Et lorsque l'ère
messianique viendra, l'homme, d'après leur idéologie, sera capable
de réaliser le maximum de son potentiel et par lui-même. Mais pour
faire quoi ? Serions-nous tenter de demander ! L'humaniste
laïc se contente simplement de dire qu'il ne sait pas pour quelle
raison. Il suppose en savoir peu sur la vie, et il la mène comme il
la trouve ! Mais eux qui déguisent leurs doctrines abjectes et
centrées sur l'homme dans des manteaux de religion, nous doivent
bien une réponse : quand l'homme aura atteint son plein
potentiel, quelle sera la suite ? Qui aura-t-il après ? Et
pour quoi faire ? Au moins, le traditionnel affirme que la fin
de tout est l'accomplissement de la volonté maximale de Hashshém,
la Tôroh ! L'homme est la couronne de la Création, mais il
reste néanmoins une chose créée, et c'est vers le Créateur et Sa
volonté que nous aspirons à « retourner ».
Nous
pourrions continuer à élaborer sur les différences notoires entre
les Juifs traditionnels, d'un côté, et les Libéraux et
Reconstructionnistes, de l'autre côté. Mais ce que nous avons dit
ici devrait suffire à comprendre pourquoi tous les mouvements
prétendument « juifs » ne se valent pas.
1Voir
Yasha´yohou 1:15
2Wayyiqro`
19:18
3Wayyiqro`
10:3