lundi 5 janvier 2015

Jusqu'où va le libre-arbitre ?

בס״ד

Parashath Shémôth

Jusqu'où va le libre-arbitre ?


La Parashath Shémôth introduit l'histoire de l'asservissement des Bénéi Yisro`él en Égypte et la nomination de Môshèh Rabbénou ע״ה en tant que dirigeant et représentant des Hébreux qui confrontera Pharaon et exigera leur libération. Dans cette Paroshoh, nous faisons face à un thème qui reviendra régulièrement tout au long de l'histoire de l'Exode : le concept de l' « endurcissement » du cœur de Pharaon. En parlant à Môshèh Rabbénou avant qu'il ne parte pour l’Égypte confronter Pharaon, HaShem lui dit la chose suivante :

Shémôth 4:21
Dans ton chemin pour retourner en Égypte, vois toutes les merveilles que J'ai placées dans ta main et accomplis-les devant Pharaon. Mais Je renforcerai son cœur, et il ne renverra pas le peuple.
בְּלֶכְתְּךָ לָשׁוּב מִצְרַיְמָה, רְאֵה כָּל-הַמֹּפְתִים אֲשֶׁר-שַׂמְתִּי בְיָדֶךָ וַעֲשִׂיתָם לִפְנֵי פַרְעֹה; וַאֲנִי אֲחַזֵּק אֶת-לִבּוֹ, וְלֹא יְשַׁלַּח אֶת-הָעָם

Plus tard, avant le début des Dix Plaies qui ébranleront l’Égypte, HaShem répéta ceci à Môshèh Rabbénou :

Ibid., 7:3
Et J'endurcirai le cœur de Pharaon et Je multiplierai Mes signes et Mes merveilles dans le pays d’Égypte.
וַאֲנִי אַקְשֶׁה, אֶת-לֵב פַּרְעֹה; וְהִרְבֵּיתִי אֶת-אֹתֹתַי וְאֶת-מוֹפְתַי, בְּאֶרֶץ מִצְרָיִם

Plus tard encore, après la sixième plaie, nous lisons ceci :

Ibid., 9:12
Et HaShem renforça le cœur de Pharaon et il ne les écouta pas, comme HaShem l'avait déclaré à Môshèh.
וַיְחַזֵּק ה׳ אֶת-לֵב פַּרְעֹה, וְלֹא שָׁמַע אֲלֵהֶםכַּאֲשֶׁר דִּבֶּר ה׳, אֶל-מֹשֶׁה

La Tôroh fait également d'autres références à la « manipulation » du cœur de Pharaon par HaShem.1

Comme le rapporte en long et en large le Rambam זצ״ל, dans son Mishnéh Tôroh2 et son Shémônoh Péraqîm3, aucune notion de récompense et de punition ne pourrait être possible sans une volonté humaine libre et non refrénée. Et pourtant, la Tôroh indique clairement que HaShem est intervenu dans la faculté de Pharaon à prendre des décisions, injectant dans le monarque égyptien un esprit de désobéissance et d'obstination qui l'empêchait de faire le choix moral de libérer le peuple Hébreu asservi. HaShem alla jusqu'à expliquer à Môshèh Rabbénou la raison de cette interférence dans le libre-arbitre de Pharaon :

Ibid., 10:1
Car J'ai rendu têtu son cœur, ainsi que le cœur de ses serviteurs, afin de pouvoir placer Mes signes que voici au milieu de lui.
כִּי-אֲנִי הִכְבַּדְתִּי אֶת-לִבּוֹ, וְאֶת-לֵב עֲבָדָיו, לְמַעַן שִׁתִי אֹתֹתַי אֵלֶּה, בְּקִרְבּוֹ

Il semble que HaShem ait endurci volontairement le cœur de Pharaon et l'ait privé de son libre-arbitre afin de continuer à envoyer des plaies sur l’Égypte et démontrer ainsi Sa puissance illimitée et Son contrôle sur la nature. Mais comment HaShem peut-Il punir un être humain à qui Il a retiré toute possibilité d'opérer des choix libres et conscients ?

La réponse qu'apporte le Rambam à cette question est probablement la solution la plus pertinente et judicieuse à avoir été proposée pour résoudre cette difficulté. Il écrit ceci dans son Mishnéh Tôroh :

Hilkhôth Téshouvoh 6:4-54
Il est possible qu’un homme commette une grave faute ou de nombreuses fautes jusqu’à ce que la justice devant le Juge de Vérité veuille que le châtiment de ce pécheur pour ces fautes délibérées soit que l’accès au repentir lui est bloqué, et qu’il n’ait pas la possibilité de se repentir de sa faute, afin qu’il meure et soit effacé du fait de ses fautes... C’est pourquoi, il est dit dans la Tôroh : « Je renforcerai le cœur de Pharaon », car il avait fauté de lui-même au début en faisant du mal au [peuple d']Israël qui habitaient sa terre, comme il est dit5 : « Eh bien ! Usons d’expédients contre elle », le repentir lui fut refusé pour qu’il soit puni. C’est pour cela que le Saint, béni soit-Il, durcit son cœur.
וְאִפְשָׁר שֶׁיֶּחֱטָא הָאָדָם חֵטְא גָּדוֹל אוֹ חֲטָאִים הַרְבֵּה, עַד שֶׁיִּתֵּן הַדִּין לִפְנֵי דַּיָּן הָאֱמֶת שֶׁיִּהְיֶה הַפֵּרָעוֹן מִזֶּה הַחוֹטֶא עַל חֲטָאִים אֵלּוּ שֶׁעָשָׂה בִּרְצוֹנוֹ וּמִדַּעְתּוֹ, שֶׁמּוֹנְעִין מִמֶּנּוּ הַתְּשׁוּבָה וְאֵין מַנִּיחִין לוֹ רְשׁוּת לָשׁוּב מֵרִשְׁעוֹ, כְּדֵי שֶׁיָּמוּת וְיֹאבַד בַּחֲטָאִים שֶׁעָשָׂה...לְפִיכָּךְ כָּתוּב בַּתּוֹרָה "וַאֲנִי, אֲחַזֵּק אֶת-לֵב-פַּרְעֹה": לְפִי שֶׁחָטָא מֵעַצְמוֹ תְּחִלָּה וְהֵרַע לְיִשְׂרָאֵל הַגָּרִים בְּאַרְצוֹ, שֶׁנֶּאֱמָר "הָבָה נִתְחַכְּמָה, לוֹ", נָתַן הַדִּין לִמְנֹעַ מִמֶּנּוּ הַתְּשׁוּבָה, עַד שֶׁנִּפְרָעִין מִמֶּנּוּ; לְפִיכָּךְ חִזַּק הַקָּדוֹשׁ בָּרוּךְ הוּא אֶת לִבּוֹ

En d'autres mots, le Rambam explique que la doctrine du libre-arbitre n'est pas absolue. Dans certaines situations de violations répétées ou graves, HaShem peut punir le coupable en le privant de la possibilité de se repentir. Dans ses Shémônoh Péraqîm, le Rambam développe davantage ce concept et fait remarquer que tout comme HaShem peut punir quelqu'un en perturbant ses fonctions physiques (comme la vue6 et le mouvement naturel des membres du corps7), Il peut également interférer dans les facultés mentales de quelqu'un et contrôler ses décisions. Néanmoins, ce n'est pas la norme, car, en règle générale, le Tout-Puissant n'interfère pas et laisse aux êtres humains une autorité totale sur les décisions qu'ils prennent entre le bien et le mal. Il peut toutefois intervenir en guise de punition à l'égard de ceux qui se sont rebellés ou ont péché volontairement et en pleine connaissance de cause à de très nombreuses reprises. Pharaon a brutalement asservi les Bénéi Yisro`él et a même tué des milliers d'enfants Hébreux afin d'entraver leur reproduction ; tout cela, il l'a fait par la puissance de sa בחירה חופשית « hîroh Hôfshîth » (libre-arbitre) qui était encore parfaitement intacte. HaShem décida de punir le monarque pour cette période prolongée de maltraitance volontaire et sadique en le privant de la liberté de choisir sa politique et d'émanciper les esclaves Hébreux. En d'autres mots, par cette violence et haine injustifiée envers les Hébreux, il a creusé sa propre tombe ! C'est parce qu'il voulait tant faire de mal aux Hébreux qu'HaShem a alors décidé de le priver de la capacité à ne plus leur faire du mal de façon à ce que son jugement soit scellé et irréversible !

Après avoir offert cette explication sur l' « endurcissement » du cœur de Pharaon, le Rambam s'attelle alors à répondre à une question évidente :

Mishnéh Tôroh, Hilkhôth Téshouvoh 6:6
Pourquoi lui envoya-t-il dire par l’intermédiaire de Môshèh : « Renvoie [le peuple] et repens-toi », alors que le Saint, béni soit-Il, avait déjà dit qu’il ne renverrait pas [le peuple], comme il est dit8 : « Mais toi et tes serviteurs, je sais que vous ne craignez pas encore HaShem D.ieu » ? [La réponse se trouve dans ce verset9 :] « Mais voici pourquoi Je t’ai laissé vivre : pour te faire voir Ma puissance, et pour glorifier Mon nom dans le monde », [c'est-à-dire,] afin de montrer au monde entier que lorsque le Saint, béni soit-Il, bloque l’accès au repentir à un pécheur, il ne peut pas se repentir, et meurt avec le mal qu’il a fait au début de plein gré.
וְלָמָּה הָיָה שׁוֹלֵחַ לוֹ בְּיַד מֹשֶׁה וְאוֹמֵר לוֹ שַׁלַּח וַעֲשֵׂה תְּשׁוּבָה, וּכְבָר אָמַר לוֹ הַקָּדוֹשׁ בָּרוּךְ הוּא שְׁאֵין אַתָּה מְשַׁלֵּחַ, שֶׁנֶּאֱמָר "וְאַתָּה, וַעֲבָדֶיךָיָדַעְתִּי . . .", "וְאוּלָם, בַּעֲבוּר זֹאת הֶעֱמַדְתִּיךָ" --כְּדֵי לְהוֹדִיעַ לְבָאֵי הָעוֹלָם, שֶׁבִּזְמָן שֶׁמּוֹנֵעַ הַקָּדוֹשׁ בָּרוּךְ הוּא הַתְּשׁוּבָה לַחוֹטֶא, אֵינוּ יָכוֹל לָשׁוּב, אֵלָא יָמוּת בְּרִשְׁעוֹ שֶׁעָשָׂה בַּתְּחִלָּה בִּרְצוֹנוֹ

La méchanceté de Pharaon est ce qui a amené HaShem à le priver de son libre-arbitre. Et ainsi, l'entêtement de Pharaon et son refus inexplicable et irrationnel de libérer les esclaves, même après toutes les plaies ayant déjà ravagé l’Égypte, montraient au monde, qu'à l'occasion, il peut arriver que HaShem prive quelqu'un de la possibilité de se repentir !

Le Rambam nous renvoie vers d'autres cas où nous voyons également que HaShem peut s'emparer du pouvoir du libre-arbitre de quelqu'un ou d'un groupe d'individus :

Ibid., 6:4
C’est ce que dit le Saint, béni soit-Il, par l’intermédiaire de Yésha'yohou10 : « Que le cœur de ce peuple soit engraissé... qu’il ne s’amende alors et ne soit guéri ». De même, il est dit11 : « Mais ils raillaient les messagers de D.ieu, dédaignaient Ses paroles et tournaient en dérision Ses prophètes, jusqu’à ce que le courroux d'HaShem s’accrut contre Son peuple de façon irrémédiable », c'est-à-dire qu’ils fautèrent de plein gré, et multiplièrent leurs fautes jusqu’à ce qu’ils furent punis de ne pas avoir accès au repentir, le « remède ».
הוּא שֶׁהַקָּדוֹשׁ בָּרוּךְ הוּא אוֹמֵר עַל יְדֵי יְשַׁעְיָהוּ, "הַשְׁמֵן לֵב-הָעָם הַזֶּה ... וָשָׁב--וְרָפָא לוֹ". וְכֵן הוּא אוֹמֵר "וַיִּהְיוּ מַלְעִבִים, בְּמַלְאֲכֵי הָאֱלֹהִים, וּבוֹזִים דְּבָרָיו, וּמִתַּעְתְּעִים בִּנְבִאָיועַד עֲלוֹת חֲמַת-ה', בְּעַמּוֹ--עַד-לְאֵין מַרְפֵּא" --כְּלוֹמַר חָטְאוּ בִּרְצוֹנָם וְהִרְבּוּ לִפְשֹׁעַ, עַד שֶׁנִּתְחַיְּבוּ לִמְנֹעַ מֵהֶן הַתְּשׁוּבָה שְׁהִיא הַמַּרְפֵּא

Le point où il n'y a plus de « remède » signifie, selon le Rambam, que HaShem a retiré au peuple la possibilité de se repentir, les privant donc ainsi de la puissance de la Téshouvoh, qui est le remède qui pouvait faire en sorte qu'ils soient pardonnés pour leurs méfaits.

Le Rambam poursuit et nous donne d'autres exemples pour illustrer ce principe :

Ibid., 6:7
De même, Sîhôn, du fait de ses fautes, fut puni de ne pas avoir accès au repentir, comme il est dit12 : « car HaShem, ton D.ieu, avait raidi son esprit et endurci son cœur ». De même, les Cananéens, du fait de leur immoralité, l’accès au repentir leur fut bloqué, et ils entrèrent en guerre contre le peuple d'Israël, comme il est dit13 : « Cela vient d'HaShem qui renforcça leur cœur pour qu’ils appellent à la guerre contre Yisro`él afin qu’on les exterminât ». De même, [les membres du peuple d']Israël à l’époque de. `Èlîyohou, qui multiplièrent leurs fautes, n’eurent pas accès au repentir, comme il est dit14 : « et Tu as tourné leur cœur en arrière », c'est-à-dire Tu les as empêchés [d’accéder] au repentir.
וְכֵן סִיחוֹן לְפִי עֲווֹנוֹת שֶׁהָיוּ לוֹ נִתְחַיַּב לְמָנְעוֹ הַתְּשׁוּבָה, שֶׁנֶּאֱמָר "כִּי-הִקְשָׁה ה' אֱלֹהֶיךָ אֶת-רוּחוֹ, וְאִמֵּץ אֶת-לְבָבוֹ". וְכֵן הַכְּנַעֲנִיִּים לְפִי תּוֹעֲבוֹתֵיהֶם מָנַע מֵהֶן הַתְּשׁוּבָה עַד שֶׁעָשׂוּ מִלְחָמָה עִם יִשְׂרָאֵל, שֶׁנֶּאֱמָר "כִּי מֵאֵת ה' הָיְתָה לְחַזֵּק אֶת-לִבָּם לִקְרַאת הַמִּלְחָמָה אֶת-יִשְׂרָאֵל, לְמַעַן הַחֲרִימָם". וְכֵן יִשְׂרָאֵל בִּימֵי אֵלִיָּהוּ לְפִי שֶׁהִרְבּוּ לִפְשֹׁעַ, מָנַע מֵאוֹתָן הַמַּרְבִּים תְּשׁוּבָה, שֶׁנֶּאֱמָר "וְאַתָּה הֲסִבֹּתָ אֶת-לִבָּם, אֲחֹרַנִּית", כְּלוֹמַר מָנַעְתָּ מֵהֶן הַתְּשׁוּבָה

Dans les deux premiers exemples susmentionnés, nous voyons comment HaShem a endurci les cœurs ou les esprits de nations ennemies afin qu'elles puissent attaquer les Bénéi Yisro`él. Là aussi, le Rambam explique que ces deux nations avaient péché à un tel point que HaShem les priva de leur libre-arbitre afin qu'en attaquant les Bénéi Yisro`él Il ait l'occasion de les détruire. Quant au dernier cas, le Rambam explique que durant l'époque de `Èlîyohou Hannovî` ע״ה, alors que régnait `Ahov Hammèlèkh, le Royaume d'Israël trahit HaShem à un tel point qu'ils furent incapables de se repentir, de sorte que c'était HaShem, d'une certaine manière, qui les laissait s'égarer.

Le Rambam conclut alors cette discussion de la façon suivante :

La conclusion est que le D.ieu [Unique] n’a pas décrété que Pharaon ferait du mal au [peuple d']Israël, que Sîhôn fauterait dans sa terre, que les Cananéens se dépraveraient, ni que le [peuple d']Israël adorerait des idoles. Plutôt, tous ont fauté de leur propre initiative, et ont été punis de ne pouvoir accéder au repentir.
נִמְצֵאתָ אוֹמֵר שְׁאֵין הָאֵל גּוֹזֵר עַל פַּרְעֹה לְהָרַע לְיִשְׂרָאֵל, וְלֹא עַל סִיחוֹן לַחֲטֹא בְּאַרְצוֹ, וְלֹא עַל הַכְּנַעֲנִיִּים לְהַתְעִיב, וְלֹא עַל יִשְׂרָאֵל לַעֲבֹד עֲבוֹדָה זָרָה; אֵלָא כֻּלָּן חָטְאוּ מֵעַצְמָן, וְנִתְחַיְּבוּ כֻּלָּן לִמְנֹעַ מֵהֶן הַתְּשׁוּבָה

Cela est conforme à l'enseignement de nos Sages qui nous disent que HaShem nous assiste selon les choix que nous faisons : si nous voulons nous souiller, Il nous aidera à nous souiller davantage ; à l'inverse, si nous voulons nous purifier, Il nous aidera à nous purifier davantage !

Rabbî Mé`îr Simhoh HaKôhén זצ״ל, dans son ouvrage intitulé « `Ôr Saméah »15, mentionne un exemple supplémentaire, qui a apparemment échappé au Rambam. Il le tire du livre de Shémou`él Hannovî` ע״ה :

1 Shémou`él 2:25
« Si un homme pèche contre un autre homme, il16 tranche entre eux; mais si c'est contre HaShem que cet homme a péché, qui intercédera pour lui? » Mais ils n'écoutaient point leur père, car HaShem cherchait à les faire mourir.
אִם-יֶחֱטָא אִישׁ לְאִישׁ, וּפִלְלוֹ אֱלֹהִים, וְאִם לַה׳ יֶחֱטָא-אִישׁ, מִי יִתְפַּלֶּל-לוֹ; וְלֹא יִשְׁמְעוּ לְקוֹל אֲבִיהֶם, כִּי-חָפֵץ ה׳ לַהֲמִיתָם

Le verset susmentionné dit clairement que si Hôfni et Pinhos n'ont pas écouté leur père, c'est parce que כִּי-חָפֵץ ה׳ לַהֲמִיתָם « car HaShem cherchait à les faire mourir ». Rabbî Mé`îr Simhoh explique donc ce verset en s'appuyant sur tout ce qu'a expliqué le Rambam plus haut : leur impiété, leur volonté de constamment pécher et leur corruption avaient atteint le niveau où HaShem leur a retiré la possibilité de changer afin qu'ils puissent mériter la mort !

Il mentionne un autre exemple que l'on retrouve dans le livre de Yéhèzqé`l Hannovî` ע״ה :

hèzqé`l 24:13
Il y a de l'infamie dans ton impureté: puisque J'ai cherché à t'épurer et que tu n'es pas devenue pure, tu ne te débarrasseras plus de ton impureté, jusqu'à ce que J'aie assouvi Ma colère sur toi.
בְּטֻמְאָתֵךְ, זִמָּה: יַעַן טִהַרְתִּיךְ, וְלֹא טָהַרְתְּ--מִטֻּמְאָתֵךְ לֹא תִטְהֲרִי-עוֹד, עַד-הֲנִיחִי אֶת-חֲמָתִי בָּךְ

Ce passage nous apprend que les Bénéi Yisro`él refusèrent de se repentir lorsque HaShem mit à leur disposition l’opportunité de le faire, et par conséquent ils furent punis par la perte de la possibilité de faire Téshouvoh !

Le Midrosh rapporte l'anecdote suivante, qui arriva à Rabbî Shim´ôn bèn Laqqîsh17 : « Une fois, le Tout-Puissant lui fit parvenir [un message] à cinq reprises, et il ne prêta aucune attention à Ses paroles. Le Tout-Puissant lui a dit : ''Tu as raidi ton cou et endurci ton cœur ! Voici, J'ajouterai de l'impureté à ton impureté !'' »

Il y a néanmoins des cas où, même en ayant commis les pires péchés qui soient, un individu ne se voit pas retirer son libre-arbitre et ne se voit pas priver de l'opportunité de faire Téshouvoh. C'est pourquoi, dans ses Shémônoh Péraqîm, le Rambam écrit qu'il est futile de commencer à questionner ou à s'enquérir du système utilisé par HaShem pour déterminer à qui est-ce qu'Il retire le libre-arbitre et à qui est-ce qu'Il ne le retire pas ! Tout comme l'esprit humain limité est incapable de comprendre pourquoi HaShem a créé certains objets dans une certaine forme et d'autres dans une forme différente, le Rambam explique que nous ne pouvons pas non plus pleinement comprendre comment HaShem choisit de punir tel ou tel transgresseur. Certaines transgressions sont punies par des souffrances dans ce monde et d'autres dans le Monde-à-Venir ; de même, HaShem punit certains pécheurs par des maux physiques, et d'autres par l'incapacité de se repentir. Par conséquent, le Rambam écrit que cela fait partie des questions que l'on ne doit même pas se poser, car elles sont tout simplement sans réponse pour l'esprit humain. HaShem Lui-même choisit la façon la plus appropriée de punir quelqu'un, et il ne nous appartient pas de commencer à spéculer sur ce sujet.

Le système Divin de récompense et de punition dépasse le cadre limité de la compréhension humaine. Si nous sommes prêts à accepter les apparentes incohérences du jugement Divin et avons confiance dans le fait que HaShem récompense et punit de façon juste, en dépit de l'incompréhension pouvant entourer Ses jugements, nous pouvons alors également avoir confiance dans le fait que dans Son infinie sagesse Il a estimé à juste titre que Pharaon ne méritait plus de jouir du privilège de la repentance, alors que le Roi `Ahov pu encore en jouir malgré son énorme impiété !

Tout cela étant dit, nous pouvons quand même nous poser des questions sur l'équité de ce système, qui permet de priver de libre-arbitre certains individus. Le jugement Divin prend en compte les sentiments de remords d'un pécheur et les efforts qu'il consent à faire pour s'améliorer. Pourquoi pourrait-on priver quelqu'un d'avoir recourt à la Téshouvoh ?

La réponse est celle-ci : l'institution de la Téshouvoh, qui fait partie intégrante de la foi israélite, pourrait potentiellement être détournée et abusée par de possibles pécheurs. Voir la Téshouvoh comme un moyen d'échapper à la punition, être conscient du fait que la compassion Divine peut être éveillée après coup et excuser un transgresseur, pourraient quelque peu diminuer la force du jugement Divin. La flexibilité du système de récompense et de punition Divine qui résulte de l'accessibilité de la Téshouvoh doit être limitée afin que la perspective-même de la punition dissuade de potentiels transgresseurs. Cela explique la possibilité d'une suspension de la Béhîroh Hôfshîth dans les cas traités par le Rambam. Nous devons être conscients que HaShem ne répondra pas toujours favorablement à nos appels pour la compassion, que tout crime ou toute série de crimes n'est pas toujours pardonnable. Cette prise de conscience est nécessaire pour préserver l'intégrité du système de rétribution Divine, qui aide à faire appliquer les lois d'HaShem.

Ainsi, être privé de la possibilité de faire Téshouvoh est une limite inhérente du système même de la Téshouvoh, une limite nécessaire pour garantir que le pécheur potentiel n'effritera pas l'effet dissuasif de la rétribution Divine.
1Shémôth 10:1, 20, 27 et 14:4
2Hilkhôth Téshouvoh, Chapitre 5
3Chapitre 8
46:3, dans certaines éditions.
5Shémôth 1:10
6Comme dans Béré`shîth 19:11.
7Comme dans 1 Mélokhîm 13:4.
8Shémôth 9:30
9Ibid., 9:16
10Yésha'yohou 6:10
112 Divréi Hayyomîm 36:16
12Dévorîm 2:30
13Yésha'yohou 11:20
141 Mélokhîm 18:37
15Qui est un commentaire sur le Mishnéh Tôroh.
16Le juge.

17Un `Amôro` du troisième siècle, plus connu sous son surnom de « Réish Laqqîsh ».