dimanche 4 janvier 2015

Prononcer les Noms Divins

בס״ד

Prononcer les Noms Divins


Il est bien connu que dans le monde Juif religieux, et ce depuis des siècles, on évite au maximum d'employer les Noms Divins, que l'on remplace plutôt par des Attributs Divins. Il est écrit dans la Tôroh1 :

Ne profanez point Mon saint Nom, afin que Je sois sanctifié au milieu des Bénéi Yisro`él. Je suis HaShem, qui vous sanctifie !
וְלֹא תְחַלְּלוּ, אֶת-שֵׁם קָדְשִׁי, וְנִקְדַּשְׁתִּי, בְּתוֹךְ בְּנֵי יִשְׂרָאֵל: אֲנִי ה׳, מְקַדִּשְׁכֶם

Le verbe traduit par « profaner » est לחלל « Léhallél », qui signifie « rendre profane » ou « rendre ordinaire » ; en d'autres mots « désacraliser ». C'est la raison pour laquelle les jours de la semaine sont appelés ימי החול « Yéméi Hahôl », c'est-à-dire, « Les jours profanes ». Ils sont « profanes » dans le sens où ils sont ordinaires par rapport au Shabboth, qui est un jour saint. Le verbe traduit par « sanctifier », dans le verset susmentionné, est לקדש « Léqqadèsh », qui signifie « rendre distinct », ou « mettre à part » ; dn d'autres mots, « sacraliser ». HaShem est saint, car Il n'existe rien d'autre en-dehors de Lui. Il est donc à part. Le peuple d'Israël est un peuple saint, non pas dans le sens où il est supérieur aux autres peuples, car ce n'est pas vrai, mais dans le sens où il se distingue de tous les autres peuples existants sur cette planète de part sa moralité et sa proximité et relation particulière avec le Créateur. Le Shabboth est saint, car il est distinct et séparé des autres jours de la semaine. De ce fait, être saint, c'est être mis à part. Avec tout cela, nous pouvons comprendre le verset susmentionné de la façon suivante : « Ne faites pas un usage ordinaire ou banal de Mon saint Nom, afin que Je sois mis à part au milieu des Bénéi Yisro`él. Je suis HaShem, qui vous distingue de tous les autres peuple, et donc, distinguez-moi aussi ! »

Puisque ces versets interdisent de faire un usage banal et ordinaire des Noms Divins, et donc, par la même occasion d'utiliser constamment les Noms Divins pour tout et n'importe quoi, il est devenu interdit d'employer les Noms Divins, sauf lorsqu'on prie et que l'on étudie ou lit la Tôroh, car ce sont des activités saintes, tout comme les Noms Divins sont saints. Pour toutes les autres activités qui n'entrent pas dans le domaine de la prière, de la lecture ou de l'étude de la Tôroh et des textes sacrés, les Noms Divins doivent être remplacés par des substituts. C'est grâce à cette sanctification des Noms Divins que les Juifs se sont toujours préservés de blasphémer D.ieu et d'employer Ses Noms à tord et à travers, contrairement à d'autres qui emploient les Noms de D.ieu pour jurer pour tout et n'importe quoi, même pour des choses qu'ils savent être des mensonges. C'est précisément pour éviter cela qu'HaShem ordonne de ne pas faire d'usage profane de Son Nom et d'ainsi éviter au maximum de l'employer, car au plus on l'emploie au plus les chances augmentent d'en faire un nom banal ! Ce n'est pas pour rien que SEULE UNE FOIS PAR AN, à Yôm Hakkîppourîm, le Kôhén Godôl avait la permission de prononcer le Nom Divin de la façon dont il s'écrit. Le reste de l'année, cela n'était pas permis. Et c'est pour cela que la prononciation des Noms Divins était changée et qu'on ne les prononçait pas de la façon dont ils s'écrivent.2

Mais cela s'applique-t-il totalement à toute activité en-dehors des trois susmentionnées (prière, lecture, étude) ?

Le Minhag dans les communautés des 'Édouth Hammizroh3, des Téimonîm et des Talmîdéi HaRambam, est que lorsqu'on chante des chants religieux (Pîyoutîm, Baqqoshôth, Nîggounîm, Zémîrôth, Shîrîm, etc.), on prononce les Noms Divins sans les déformer. De ce fait, on prononce correctement le שם אדנות « Shém `Adnouth » en disant « `Adônoy », et non pas « HaShem » , et on prononce correctement le שם אלוהות « Shém `Èlôhouth » en disant « `Èlôhîm » et non pas « `Èlôqîm ». La raison en est que chanter des chants religieux est également une activité sainte, qui pourrait même être comparé à la prière, car chanter, c'est aussi prier. Et c'est d'ailleurs la raison pour laquelle la quasi-totalité des bénédictions et prières juives se font avec un air chantonnant.

C'est à l'opposé du Minhag des `Ashkénazîm et des Hasîdîm, qui est d'éviter dans tous les cas la prononciation des Noms Divins, sauf lors de la prière, de l'étude et de la lecture de textes sacrés. La raison pour laquelle les `Ashkénazîm et les Hasîdîm sont plus stricts à ce sujet, c'est parce qu'ils craignent que si l'on prenait l'habitude de prononcer les Noms Divins en-dehors des trois activités susmentionnées, on en arriverait à les banaliser et à les prononcer sans les Kawwonôth appropriées.4 Toutefois, ce n'est qu'une Houmroh (mesure de rigueur), car selon le ´ïqqar Haddîn (l'essence de la Halokhoh ; la lettre de la loi), tout le monde reconnait, même les `Ashkénazîm et les Hasîdîm, qu'il est permis de prononcer les Noms Divins lors de toute activité sainte, y compris lorsqu'on chante des chants religieux.

De plus, dans la Halokhoh des communautés des 'Édouth Hammizroh, des Téimonîm et des Talmîdéi HaRambam, il est stipulé qu'à chaque fois qu'on appelle ou parle à un ami, nous ajoutons יה « Yoh » devant le nom de la personne qu'on appelle ou la personne à qui l'on parle. Par exemple, si on appelle Yôséf, on lui dira « Yoh Yôséf, j'ai à te parler ! » La raison de cette pratique est qu'il est rapporté dans les textes les plus anciens qu'à l'époque où le Béith Hammiqdosh fut détruit, il y a eu un décret passé par les Romains interdisant aux Juifs de prononcer le Nom d'HaShem. Qu'ont alors fait les Bénéi Yisro`él ? Quand un Juif parlait à un autre Juif, il l'appelait « Yoh » suivi par son prénom, afin de discrètement mentionner le Nom d'HaShem. Cette pratique était acceptable et ne fut pas considérée comme un blasphème, car HaShem étant notre Père, et nous étant Ses enfants, chaque Juif contient en lui l'Essence de D.ieu. Chaque Juif est « Héléq `Èlôhah Mimma´al Mamosh – une partie réelle du D.ieu d'En-Haut », et il n'est donc pas interdit d'appeler son ami ou son frère Môshèh en disant « Yoh Môshèh ». C'est de ce décret Romain que s'est développé ce Minhag qui est resté, jusqu'à nos jours, très répandu chez les Juifs séfarades et orientaux, plus particulièrement dans les communautés marocaines et yéménites.5

Et enfin, il y a un autre cas où mentionner le Nom Divin est permis dans la Halokhoh des communautés des 'Édouth Hammizroh, des Téimonîm et des Talmîdéi HaRambam. Quand un bébé ou quelqu'un tousse, nous avons le Minhag de mentionner le Nom d'HaShem en disant au bébé ou à la personne « `Adônoy Yishmôr » (que D.ieu préserve) ou toute autre phrase similaire. Mais le plus répandu est de dire en judéo-arabe « Shaddaï Ma´ak » (Que le Tout-Puissant soit avec toi) ou « Yismillah Ma´ak » (Que le Nom de D.ieu soit avec toi). Cela est basé sur le verset suivant6 : ה׳, יִשְׁמָרְךָ מִכָּל-רָע: יִשְׁמֹר, אֶת-נַפְשֶׁךָ « `Adônoy Yishmorkho Mikkol Ro´, Yishmôr Èth-nafshèkho – `Adônoy te préservera de tout mal ; Il préservera ta personne », et il est aussi précisé que7 : שֹׁמֵר פְּתָאיִם ה׳ « `Adônoy préserve les simplets », ce qui inclut les enfants en bas âge, puisqu'ils n'ont pas encore développé de la Do´ath (connaissance). Voilà pourquoi il est plus approprié encore de souhaiter une bénédiction à un enfant qui tousse, tout en utilisant le Nom Divin.

1Wayyiqro` 22:32
3Terme qui désigne les Juifs Séfardîm et Orientaux.
4Pour de plus amples détails, voir Bésél HaHokhmoh 4:52.
5Voir Nôhéghokhmoh, page 192 ; voir aussi Nèfèsh Hayofoh, par le Rov Yishoq Pal`aggî.
6Téhîlîm 121:7
7Ibid., 116:6