samedi 28 mars 2015

Les vraies Massôth

ב״ה

Les vraies Massôth sont molles et souples, et non sèches et dures

De vraies Massôth

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D'après la Halokhoh et nos anciennes traditions, la Massoh a toujours été molle et souple, ressemblant à une pita très épaisse. La farine et l'eau étaient malaxées en une pâte molle et placées dans un four ou sur des briques chaudes. La chaleur transformait l'humidité de la pâte en de la vapeur qui gonflait le produit. (C'est ainsi que l'on obtient la poche d'une pita.) Les Juifs yéménites font encore cuire ainsi leurs Massôth molles dans un four appelé « Tabboun », tout comme les Talmidhé HaRamba''m.

Les Massôth molles sont en fait une pratique encore largement préservée parmi les communautés séfarades (voir ici un Sédhar de Pésah séfarade, où on peut notamment voir les Massôth molles à partir de 17 minutes et 40 secondes) et yéménites. Cette Massoh est molle et épaisse, et est délicieuse lorsqu'elle est fraîche, mais rassis et moisie rapidement. Il n'est donc pas surprenant que la Halokhoh et la tradition fournissent des instructions très claires sur la cuisson de Massôth fraîches pendant la fête de Pésah. Le ´oroukh Hashoulhon rapporte ceci : « Il est bien connu que dans les temps anciens, ils ne cuisaient pas l'ensemble de leurs Massôth avant Pésah, mais en cuisaient des fraîches tous les jours [de Pésah] ».1 Dans le même chapitre, en parlant de la Kazzayith de Massoh à consommer lors du Sédhar de Pésah, il déclare que « la Massoh qui est molle et pliable comme une éponge », et est à l'évidence dotée de petites poches d'air, ne doit pas être compressée pour atteindre le volume minimum requis ! C'est également mot pour mot ce que disent le Shoulhon ´oroukh Horov2, et le Mishnoh Barouroh.3 Aucune de ces trois autorités ne mentionne pas même une seule fois les Massôth dures et sèches consommées à notre époque par la majorité des `ashkanazim. Voici le langage original, pour ceux qui voudraient vérifier. (Cliquez pour agrandir.)

Le ´oroukh Hashoulhon :


Le Shoulhon ´oroukh Horov :


Le Mishnoh Barouroh :


Le changement vers des Massôth dures et sèches (de la majorité des `ashkanazim d'aujourd'hui) fut causé pour des raisons « pratiques » et non halakhiques. Étant donné que de moins en moins de personnes cuisaient leurs pains à la maison le reste de l'année, les gens eurent de moins en moins de confiance en eux pour cuire leurs Massôth durant Pésah. Cuire des Massôth durant Pésah sans expérience fait prendre d'énormes risques : il suffit d'à peine quelques minutes de cuisson en trop pour en arriver à une transgression biblique. Rien que le fait d'être en possession d'une pâte levée, ou même trouver durant la fête de Pésah du levain qui avait échappé à notre attention, nous oblige à le détruire.

Mais si on change la règle en exigeant que les Massôth ne soient plus cuites durant Pésah mais avant Pésah, on sera alors confronté à un autre problème : comment faire pour que les Massôth ne moisissent pas ? La seule option possible pour étendre leur durée de vie, pour ainsi dire, consista à les rendre dures et sèches. L'étape suivante logique fut ensuite de rendre les Massôth très fines de sorte qu'elles puissent être mâchées sans trop de difficulté.

Et voilà comment la majorité des Juifs sont passés d'une Massoh molle et souple à la Massoh sèche et dure que l'on connaît aujourd'hui ! Et ce changement a eu lieu il y a près de 300 ans !

Sauf que peu de gens le savent, mais ce changement cause un problème halakhique quant à savoir quelle bénédiction faire sur cette « Massoh » dure, qui n'a plus l'apparence du pain ! En effet, la bénédiction à faire sur cette « Massoh » dure est en réalité « Mazônôth » et non pas « Hammôsi` », car c'est un pain croustillant comme des biscottes ! Malgré cela, les `ashkanazim font « Hammôsi` » sur cette « Massoh » dure toute l'année, et à Pésah y compris. Quant aux Safaradhim, certains ont adopté une position de compromis : à Pésah, ils disent « Hammôsi` » sur cette « Massoh » dure (histoire de pouvoir faire la Birakhath Hammozôn durant la période de Pésah), mais le reste de l'année ils disent « Mazônôth » ! Mais l'attitude séfarade nous montre que les « Massôth » dures consommées de nos jours ne sont normalement pas du pain mais des biscottes ou des crackers !

Tout cela nous permet de mieux comprendre un passage du Talmoudh mentionné dans la Haggodhoh de Pésah, qui stipule que Hillél ז״ל avait la coutume de faire un כּוֹרֵךְ « Kôrékh » avec de la Massoh et du Morôr. En Hébreu moderne sioniste, le terme « Kôrékh » est employé pour désigner un « sandwich ». Et ainsi, la majorité des Juifs croient que la pratique d'Hillel consistait à prendre une Kazzayith de Massoh et une Kazzayith de Morôr, et d'en faire un sandwich que l'on trempe ensuite dans le Harôsath. Mais il n'en est( absolument pas ainsi ! Le mot « Kôrékh » signifie « enrouler », comme ce que nous faisons avec le Séfar Tôroh une fois que nous avons fini de le lire, ou encore lorsque nous enroulons la lanière des Tafillin autours du bras. Ce n'est pas du tout possible avec un sandwich ! En outre, le Talmoudh décrit clairement ce que faisait Hillél : il enveloppait la viande de l'agneau et le Morôr à l'intérieur de la Massoh. Cela est tout bonnement impossible avec les « Massôth » dures utilisées par la majorité des Juifs aujourd'hui ! Par contre, cela se fait très facilement avec une Massoh molle et pliable comme une pita !

À droite, le faux « sandwich » d'Hillél ; à gauche, le vrai « Kôrékh » d'Hillél

En résumé :

La « Massoh » dure avec laquelle nous sommes familiers n'est pas la Massoh exigée par nos anciennes traditions. Notre tradition et Halokhoh ne se réfèrent exclusivement qu'à une Massoh molle et pliable. Cette tradition ininterrompue a été préservée jusqu'à aujourd'hui par les Juifs yéménites, les Talmidhé HaRamba''m et les Safaradhim. De nombreux Juifs ashkénazes sont également revenus à l'usage des Massôth molles et pliables, et de nombreux éminents Rabbonim contemporains ont soutenu cette transition, sans oublier que ce sont les Massôth mentionnées également par le Shoulhon ´oroukh Horov, le ´oroukh Hashoulhon ou encore le Mishnoh Barouroh.

Il y a à peine quelques générations d'ici, les grands-parents de nos grands-parents consommaient des Massôth qui étaient totalement différentes des « biscottes » que l'on mange de nos jours ! Ils consommaient de vraies Massôth, les Massôth exigées par nos anciennes traditions, des traditions fermement connectées à notre Tôroh et notre Talmoudh, à notre Mishnoh et notre histoire. Ils consommaient les mêmes Massôth que celles que nos ancêtres consommèrent le jour où HaShem ית׳, d'un bras puissant, les fit sortir d’Égypte pour en faire le peuple d'Israël ; ils consommaient des Massôth molles et pliables !

Les Massôth molles et pliables sont les seules traitées dans l'intégralité du Talmoudh et notre Halokhoh. Elles étaient fraîchement cuites chaque jour durant la fête de Pésah. Il était inimaginable que des Massôth cuites quatre, voire même cinq jours plus tôt, puissent même être considérées comme de la nourriture pour la fête !

Hillél, et sa coutume d'enrouler dans une Massoh de la viande de l'agneau pascal et du Morôr, a été préservée pour l'éternité dans notre Haggodhoh. Et pourtant, nous sommes parvenus à mal traduire le terme « Kôrékh » et transformer cette enroulement en un sandwich ! Il est évident que seule une Massoh molle et pliable peut être utilisée comme enveloppe pour faire un « Kôrékh ».

Les « Massôth » dures et sèches que nous connaissons aujourd'hui ont moins de 300 ans. Jusque là, toutes les Massôth suivaient une chaîne de tradition ininterrompue remontant jusqu'à nos ancêtres qui furent libérés d’Égypte et se tinrent au Mont Sinaï pour recevoir la Tôroh de Dieu. Cette tradition ininterrompue définissait la Massoh comme étant molle, pliable, moelleuse, épaisse et goûteuse.

En fait, la « Massoh » dure et sèche consommée par la majorité des Juifs d'aujourd'hui n'est même pas du tout de la Massoh ; c'est une gaufrette ou un biscuit, et ne mérite en réalité pas du tout la bénédiction de « Hammôsi` » faite lorsqu'on consomme du pain ! Vous pouvez vous référez à cet égard au Shoulhon ´oroukh, `ôrah Hayim 168:7, ainsi qu'au Shou''th Minhath Yishoq 1:71. D'ailleurs, beaucoup de Juifs ayant conservé leur capacité à réfléchir sainement sont surpris par le fait que l'on fasse une bénédiction différente selon que l'on consomme des crackers à l'eau ou des « Massôth » dures ! Après tout, ils ont la même apparence, le même goût, et sont produits de la même façon. Pourquoi donc la bénédiction à faire avant de consommer une Massoh dure serait-elle différente de celle faite avant la consommation de crackers à l'eau ? Effectivement, la bénédiction pour la « Massoh » dure est « Mazônôth » et non « Hammôsi` » !

l'innovation et l'histoire de la « Massoh » dure n'ont pas de sources halakhiques, mais reposent sur des problèmes pragmatiques. Lorsque la société moderne occidentale s'est de plus en plus éloignée de la cuisson du pain fait maison, la pratique traditionnelle de la cuisson de Massôth fraîches faites maison, quotidiennement durant la période de Pésah, déclina dans les pays ashkénazes. L'inexpérience de la cuisson domestique créa des risques intolérables de produire par inadvertance du Homés. Les `ashkanazim et Juifs d'Occident commencèrent alors à cuire toutes les Massôth nécessaires pour Pésah avant Pésah et non plus pendant Pésah, et il devint nécessaire de trouver un moyen de les préserver pour la durée de la fête (qui dure une semaine). Bien que cela nécessitait que les Massôth soient cuites jusqu'à en devenir dures, leur faisant ainsi perdre leur statut de « pain », on estima que cela représentait le moindre des deux maux !

Puissent les paroles que nous prononçons lors du Sédhar de Pésah, à savoir, qu'Hillel enroulait dans sa Massoh du Morôr (et de la viande) s'accomplissent en actes. Nous honorons Hillél durant notre Sédhar en reproduisant cette coutume. Cette année, que cela ne soit pas un simple culte des lèvres, mais que cela soit reproduit en acte concrets également !

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