ב״ה
Il
n'y a pas de période de deuil durant la Safirath Ho´ômar
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Il
existe une pratique très répandue au sein de l'orthodoxie juive
consistant à suivre toute une série de pratiques de deuil durant la
période de la Safirath Ho´ômar, à savoir :
- interdiction de tenir des mariages et des célébrations de mariage
- interdiction de se couper les cheveux et de se raser
- interdiction d'écouter de la musique instrumentale
- interdiction d'acheter et de porter des vêtements neufs
La
période sur laquelle ces pratiques seront respectées varie d'une
communauté à l'autre :
- la pratique dominante consiste à les respecter à partir du premier jour du compte du ´ômar jusqu'au trente-troisième jour
- la pratique majoritaire chez les Safaradhim consiste à les respecter à partir du premier jour du compte du ´ômar jusqu'au matin du trente-quatrième jour
- certains ont la pratique de les respecter à partir de Rô`sh Hôdhash `iyor jusqu'au matin du 3 Siwon
- d'autres enfin ont la pratique de les respecter à partir du 2 `iyor jusqu'à la veille de Shovou´ôth
Dans
toutes les approches susmentionnées, exceptée celle des Safaradhim,
le deuil est suspendu le trente-troisième jour du ´ômar, que l'on
appelle communément ל״ג
בָּעוֹמֶר « La''g
Bo´ômar ». Le seul fait que les Safaradhim ne suspendent
pas les pratiques de deuil ce jour-là démontre que le 33ème jour
du ´ômar n'est en réalité pas une fête officielle du Judaïsme.
Quant aux Dôr Da´im et Talmidhé HaRamba''m, non seulement nous ne
célébrons pas La''g Bo´ômar, mais nous ne suivons pas non plus de
période de deuil durant la Safirath Ho´ômar.
Lorsque
vous demandez aux « Orthodoxes » pourquoi est-ce qu'ils
respectent un deuil durant la Safirath Ho´ômar, et pourquoi
s'achève-t-il (ou est-il suspendu) précisément le 33ème jour du
´ômar, trois réponses sont
généralement avancées :
- Il est dit dans le Talmoudh que 24 000 des disciples de Rébbi ´Aqivo` ז״ל ont été frappés par une plaie qui ne cessa que le 33ème jour du ´ômar.
- Le 33ème jour du ´Omar, Rébbi Shim´ôn ban Yôho`y ז״ל aurait rédigé et terminé le Zôhar.
- Ce serait également ce jour-là que Rébbi Shim´ôn ban Yôho`y décéda.
Concernant
les points 2 et 3, voir les articles intitulés « Qui
a écrit le ''Zôhar'' ? » et « Cinq
choses à savoir sur La''g Bo´ômar ». Nous allons
analyser le point 1 et voir ce qu'il en retourne réellement.
Le
Talmoudh Bavli, dans Yavomôth 62b, nous dit que Rébbi
´aqivo` avait douze mille pairs de disciples de Gavath à `antipras.
(Cela fait un total de 24 000 disciples. Mais dans la version que
l'on retrouve dans le Midhrosh1,
le mot « pairs » n’apparaît pas, suggérant qu'ils
étaient 12 000 disciples au total. De l'autre côté, ailleurs, le
Bavli2
parle plutôt de 24 000 pairs de disciples, ce qui fait donc 48 000
disciples.) Tous ces disciples sont morts d'une « plaie »
causée par le fait qu'ils ne se respectaient pas les uns les autres.
À la suite de leur mort, le Bavli dit que le monde fut privé de
l'étude de la Tôroh jusqu'à ce que Rébbi `aqivo` ne se rende dans
le sud de la Palestine et ne forme cinq disciples d'une érudition
remarquable, parmi lesquels Rébbi Shim´ôn abn Yôho`y. Le
Bavli cite alors une source tirée des Tanno`im selon quoi les
disciples de Rébbi ´aqivo` (peu importe leur nombre exact) avaient
péri durant la période de la Safirath Ho´ômar, entre Pasah
et Shovou´ôth. (Plus tard, le Bavli écrit qu'ils sont morts d'une
sorte de maladie. Mais du Talmoudh Yarousholmi il ressort clairement
qu'ils sont en fait tombés au combat durant la révolte de Bar
Kôzivo`. Pour chaque divergence entre les deux Talmoudhin, nous nous
alignons derrière le Yarousholmi. Ainsi, lorsqu'on dit que les
disciples de Rébbi ´aqivo` moururent d'une plaie parce qu'ils ne se
respectaient pas les uns les autres, cela signifie en réalité
qu'HaShem les fit mourir au combat dans la révolte Judéenne contre
Rome pour la raison précédemment citée.)
Mais
malgré tout cela, et cela a toute son importance, le Bavli ne cite
jamais La''g Bo´ômar (le 33ème jour du ´ômar), impliquant par-là
que la mort de ces disciples s'est produite durant l'entièreté de
la période de la Safirath Ho´ômar.
Deuxièmement,
ce passage ne fait aucune mention de quelques pratiques de deuil que
l'on devrait observer pour marquer cette tragédie. En fait, il n'a
jamais existé de recommandation à prendre le deuil pour cette
tragédie durant tout le premier millénaire qui suivit cet
événement. Bien au contraire, le Talmoudh et d'autres sources
anciennes décrivent constamment la période de la Safirath Ho´ômar
comme une période de joie et de célébrations. Les écrits des
Juifs du 7ème siècle, par exemple, considéraient les jours entre
Pasah et Shovou´ôth comme une période de joie.
Certains,
afin de défendre coûte que coûte ces pratiques de deuil observées
de nos jours par la majorité des Juifs, prétendent qu'elles
tireraient leur source des écrits des Ga`ônim. Il est vrai qu'on y
trouve ceci3 :
Concernant
votre question sur la raison pour laquelle nous ne tenons pas de
fiançailles, ni de mariage entre Pasah et Shovou´ôth...
Vous devez savoir qu'il n'y a là aucune interdiction, mais que c'est
plutôt une coutume de deuil, car HaZa''l disent que Rébbi
´aqivo` avaient 12 000 pairs de disciples et qu'ils sont morts entre
Pasah et Shovou´ôth... Depuis lors, les générations
précédentes se sont accoutumées durant ces jours-là à ne pas se
marier.
Certains,
en lisant les mots « depuis lors » concluent que
cela signifie que cette pratique s'est développée du temps de la
Mishnoh elle-même. Sauf qu'il n'existe aucune source pour
l'attester, et aussi bien la Mishnoh que la Gamoro` n'en font
mention. Comme l'a dit le ´oroukh
Hashoulhon ז״ל,
la seule conclusion valable consiste à dire que cette coutume s'est
développée durant la période des Ga`ônim.
Deuxièmement,
notez que ce passage indique clairement que cette pratique n'est en
rien une interdiction. C'est en fait la raison pour laquelle aucune
pratique de deuil à observer durant la période de la Safirath
Ho´ômar n'est mentionnée dans les écrits des Ri`shônim (qui ont
suivi les Ga`ônim).
Troisièmement,
d'autres écrits des Ga`ônim ne font mention que de la pratique
consistant à ne pas se marier durant ces semaines-là. Jamais ils ne
mentionnent d'autres pratiques de deuil, contrairement aux
« Orthodoxes » d'aujourd'hui qui interdisent d'écouter
de la musique, d'acheter des vêtements neufs, de jouer d'instruments
de musique, de se couper les cheveux, etc., du premier au
trente-troisième jour du ´ômar. Des écrits des Ga`ônim nous
voyons en fait que l'on est censé être joyeux durant la période de
la Safirath Ho´ômar. Cependant, puisque d'un côté nous ne sommes
pas censés être triste, dans le deuil, etc., mais que de l'autre
côté il convenait de faire quelque chose de symbolique pour ne pas
oublier la catastrophe ayant frappé les pairs de disciples de Rébbi
´aqivo`, on demanda de ne s'abstenir que du mariage. Pourquoi le
mariage ? Pour la simple raison que le mot « pair »,
qui se dit en Hébreu זוּג
« Zough »,
signifie aussi « couple ». Par conséquent, afin
de commémorer le décès des pairs de disciples, les gens
s'abstenaient d'unir des couples. Mais à l'exception de cette seule
restriction, toutes les autres formes de joie et célébrations
étaient permises, car la période de la Safirath Ho´ômar ne doit
pas être une période de deuil et de tristesse, contrairement à ce
qu'elle est devenue aujourd'hui.
Durant
le Moyen-âge, les jours qui suivaient Pasah étaient une
période de grands dangers pour les Juifs ashkénazes. C'était la
saison des accusations de meurtres rituels portées contre eux par
les Catholiques, des pogroms et le lancement d'expéditions punitives
et militaires contre les Juifs, comme les Croisades qui exterminèrent
les Juifs de Rhénanie en Mai 1096. À cause de cela, il devint
ordinaire pour les Juifs ashkénazes de prendre le deuil les semaines
qui suivaient Pasah, tellement ordinaire que les rabbins de
cette époque-là furent convaincus qu'il y avait quelque chose
d'intrinsèquement grave concernant les jours séparant Pasah
de Shovou´ôth. Le fait que les disciples de Rébbi ´aqivoh`
moururent durant la même période confirma leur jugement. On
commença alors à s'imposer progressivement durant toute la période
de la Safirath Ho´ômar certaines des pratiques de deuil que l'on
connaît aujourd'hui. Et tout cela a été expliqué par de nombreux
éminents rabbins, parmi lesquels le Rov
Samson Raphaël Hirsch ז״ל,
le ´oroukh Hashoulhon, et beaucoup d'autres, qui rejetaient
catégoriquement le lien entre La''g Bo´ômar et les événements
rapportés dans le Talmoudh.
1Baré`shith
Rabboh 61:50
2Nadhorim
50a
3Halokhôth
Pasouqath Min Hagga`ônim 97