lundi 1 février 2016

Exposer les fausses notions : « Pour l'élévation de l'âme de... »

ב״ה

Exposer les fausses notions

« Pour l'élévation de l'âme de... »


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La question suivante m'a été soumise :

Mon père souhaite offrir quelques Sefarim au Beth HaMidrash. Est-ce que l'ajout d'un message du type "Offert par M. X a à la mémoire de..." (Avec le même message en hébreu Leylou Nishmat...) est autorisé selon la halakha? Y a t-il un message type que l'on doit mettre? Je ne sais pas s'il y a une trace de cela dans la littérature rabbinique et je ne me suis jamais penché sur le concept d'élévation des âmes?

Cette question est très intéressante et me donne l'occasion de traiter d'une doctrine et pratique erronée très répandue dans les milieux orthodoxes. Il n'est pas rare d'entendre un rabbin déclarer au début de ses Shi´ourim que « Le cours est dédié à l'élévation de l'âme d'Untel fils d'Untel ». De même, de nombreux sites Internet proposent aux internautes de sponsoriser des Shi´ourim pour l'élévation des âmes de leurs défunts. On observe également chez de nombreux Juifs la pratique consistant à allumer lors de l'anniversaire d'un décès des bougies pour l'âme du défunt, ainsi que la pratique de lire des Tahillim pour les âmes des morts. Et enfin, il est de coutume de fréquemment dédier ou ouvrir un ouvrage pour l'élévation de l'âme d'un défunt.

Ceux qui défendent les pratiques susmentionnées affirment qu'elles seraient sous-entendues dans la Mishnoh suivante1 :

Ils ne bénissent pas sur la lumière ni sur les parfums des Gôyim, ni sur la lumière ni sur les parfums des morts, ni sur la lumière ni sur les parfums qui se trouvent devant une idolâtrie. Ils ne bénissent sur la lumière qu'après avoir fait usage de sa lumière.
אין מברכין לא על הנר ולא על הבשמים של גויים, ולא על הנר ולא על הבשמים של מתים, ולא על הנר ולא על הבשמים שלפני עבודה זרה. אין מברכין על הנר, עד שייאותו לאורו

Cette Mishnoh nous dit qu'une bougie, flamme ou lampe à huile qui aurait été allumée en l'honneur d'un mort, et non pour sa lumière en elle-même, ainsi que des parfums ou épices ayant servi à masquer la mauvaise odeur d'un cadavre, et non pour que l'on jouisse de sa bonne odeur en elle-même, ne peuvent servir pour la cérémonie de la Havdoloh ; puisqu'il était prévu qu'ils servent aux morts, ils ne peuvent servir pour la Havdoloh. Par conséquent, si quelqu'un était mort le Vendredi et que l'enterrement était prévu le Samedi soir, on ne pourra pas utiliser cette lampe et faire la bénédiction de בּוֹרֵא מְאוֹרֵי הָאֵשׁ « Bôré` Ma`ôré Ho`ésh » dessus.

La raison pour laquelle, lorsque quelqu'un décédait, on allume une lampe ou bougie en son honneur, c'est afin de symboliser l'idée d'éternité de l'âme, le fait que bien que la personne soit physiquement morte, son âme étant éternelle, c'est comme si elle continuait de vivre, mais dans un autre monde. Il n'y a rien d'autre caché derrière cette pratique.

Mais sur base de cette Mishnoh, le `ôrhôth Hayim écrit ceci :

Rabbénou `oshér (le Ro`''sh) écrit que chacun a l’usage - la veille de Yôm Hakkippourim - d’allumer une veilleuse afin d’expier les fautes de son père et de sa mère, car c’est une marque d’honneur pour HaShem, comme il est dit : « Honorez HaShem par les lumières ». Une tradition d’Israël a force de loi

C'est de là que provient la pratique de faire et dédier certaines choses à « l'élévation de l'âme » d'un défunt. Les gens croient que par de telles choses ils peuvent contribuer à l'expiation des péchés du défunt. En d'autres mots, ils accomplissent de bonnes œuvres dans l'espoir qu'HaShem ית׳ les attribut au défunt dans le nom duquel elles ont été accomplies, ajoutant ainsi au défunt des « mérites » qui lui permettront de compenser ses mauvaises actions ! Cette doctrine est de la pure foutaise !

Nous lisons ceci dans la Tôroh2 :

Je prends à témoin au milieu de vous, aujourd'hui, les cieux et la terre : j'ai placé devant toi la vie et la mort, la bénédiction et la malédiction ; choisis la vie afin que tu vives, toi et ta postérité !
הַעִדֹתִי בָכֶם הַיּוֹם, אֶת-הַשָּׁמַיִם וְאֶת-הָאָרֶץ--הַחַיִּים וְהַמָּוֶת נָתַתִּי לְפָנֶיךָ, הַבְּרָכָה וְהַקְּלָלָה; וּבָחַרְתָּ, בַּחַיִּים--לְמַעַן תִּחְיֶה, אַתָּה וְזַרְעֶךָ

À la fin de sa vie, Môshah Rabbénou ע״ה demanda aux Israélites de faire un choix définitif. Si la possibilité existe qu'une âme puisse être affectée positivement par des actes post-mortem réalisés par les vivants en son nom, Môshah Rabbénou n'aurait pas enseigné que l'homme pouvait choisir la vie ou la mort. Choisir la mort signifie faire le choix d'une issue négative irréversible. Comment peut-il y avoir une issue négative, si quelqu'un d'encore vivant peut changer le sort de quelqu'un d'autre après sa mort ?

Mais Môshah Rabbénou a dit aux Israélites que leurs décisions terrestres avaient de réelles conséquences. C'était l'enseignement des deux boucs de Yôm Hakkippourim, ainsi que des deux montagnes de Garizzim et ´évol. Dans tous ces trois cas, Môshah Rabbénou enseignait qu'il n'y avait que deux voies possibles que l'on pouvait suivre : celle de la destruction, personnalisée par le bouc-émissaire démembré et la nature stérile du Mont ´évol, ou la voie de la Vie Véritable, personnalisée par le deuxième bouc de Yôm Hakkippourim appartenant à HaShem et la topographie luxuriante du Mont Garizzim. La connaissance d'une possibilité de culpabilité éternelle est si important que Môshah Rabbénou en parle à de nombreuses reprises. Le Rov Sa´adhyoh Go`ôn ז״ל parle également abondamment de tourments perpétuels pour certaines âmes.3 Étant donné que cela fait mal de se dire qu'un être que l'on a aimé pourrait être perdu pour toujours, on a tendance à se raccrocher sur des opinions qui nous rassurent et qui allègent la conscience.

Les décisions qu'un homme a prises sur Terre ont des conséquences permanentes si elles n'ont pas été rectifiées de son vivant. Môshah Rabbénou le dit ouvertement. N'accordons aucun crédit aux notions populaires que nous entendons fréquemment, comme « élever l'âme d'un défunt ». Cette pratique est si bizarre qu'elle se fait souvent lorsque des gens boivent du scotch et mangent des cakes, en croyant que cet espèce de « Qiddoush » cérémoniel fait expiation pour les méfaits du défunt. Bien qu'elle soit très populaire, et soutenue par de nombreux éminents rabbins contemporains, notre baromètre pour déterminer la vérité reste la Tôrath Môshah, et non les pratiques dévoyées déguisées en manteau de Judaïsme actuellement prêchées. Une fois que l'adhérence méticuleuse à la Tôrath Môshah est perdue, le Judaïsme perd son authenticité et toute valeur, et n'est plus qu'un Judaïsme fait de mains d'hommes et à l'image des hommes !

Suggérer que les vivants peuvent faire profiter aux morts par les actes accomplis en leur nom enseigne la notion hérétique selon laquelle l'homme n'est pas responsable de ses décisions. Cela enseigne qu'un homme peut gravement pécher et commettre les pires choses qui soient, mais son fils intègre et encore vie rendra bons les méfaits de son père. Les descendants de Homon יש״ו peuvent-ils faire de lui un Saddiq (juste) ? Si vous répondez que cela se peut, vous devrez alors également accepter le cas inverse : un homme mort en étant juste et intègre peut-il devenir un Rasha´ (impie) à cause des mauvais actes de son fils impie encore en vie ? Nous voyons l'absurdité d'une telle position !

Ce qui pourrait amener à adhérer à une telle croyance est l'amour véritable que l'on ressent envers le défunt. Mais aussi tendres que de tels sentiments puissent être, nous ne pouvons compromettre la vérité pour apaiser ses sentiments. Une autre raison pourrait être sa propre peur d'être soi-même jugé coupable pour ses actes. Si quelqu'un pense pouvoir changer le sort de son père après le décès de celui-ci, ipso facto cela signifie que son propre sort pourrait aussi être amélioré après sa propre mort. C'est donc une « assurance vie » que l'on souhaite pour soi. Et cela mène à cette stupidité de réciter le Qaddish chaque jour, durant les douze mois qui suivent le décès de ses parents, car on croit que cela leur fera mériter un jugement positif dans le Tribunal Céleste ! De la pure foutaise, d'autant plus que le Qaddish n'était en réalité récité qu'à la fin des Shi´ourim que donnaient les rabbins à leurs élèves dans les Bathé Midhroshim.

.La Tôroh rejette catégoriquement cette doctrine. En effet, par quel système, et par quelle justice, une personne vivante peut-elle corriger le mal commis par un défunt ? HaShem nous dit ceci dans Sa Tôroh4 :

Les parents ne doivent pas être mis à mort pour les enfants, et les enfants ne doivent pas être mis à mort pour les parents ; chaque homme ne sera mis à mort que pour son propre méfait !
לֹא-יוּמְתוּ אָבוֹת עַל-בָּנִים, וּבָנִים לֹא-יוּמְתוּ עַל-אָבוֹת: אִישׁ בְּחֶטְאוֹ, יוּמָתוּ

Il est clair que la justice de Dieu est parfaite. Celui qui est corrompu paie le prix pour ses propres crimes. Sa corruption ne peut pas lui être pardonnée, à moins qu'il s'en repente de son vivant. S'il a échoué à se repentir, il est mort dans un état corrompu, et il ne peut plus jamais défaire son mal. Ce concept d'élévation des âmes du défunt par les actes des vivants est : 1) dénué de raison, et 2) une violation même des paroles de Dieu.

En outre, la notion de repentance ne sert plus à rien avec une croyance selon laquelle le vivant peut expier le mort. S'il en était ainsi, le concept de Tashouvoh (repentance) n'a aucune place dans le Judaïsme. Je pourrais me débaucher, voler, tuer et violer des femmes toute ma vie, parce que mon fils rectifiera tous mes actes après ma mort ! Cela n'a aucun sens ! Dans son Mishnéh Tôroh5, le Ramba''m ז״ל rapporte l'enseignement de nos Sages de mémoire bénie selon quoi celui qui dit « Je pécherai et me repentirai à Yôm Hakkippourim » ou « Je pécherai et me repentirai avant de mourir », celui-là ne sera jamais pardonné. S'il en est ainsi, à combien plus forte raison pour celui qui pèche et ne se repent PAS avant sa mort !

En posant quelques questions, vous découvrirez que ceux qui épousent une telle doctrine sont complètement démunis. Demandez-leur comment fonctionne concrètement cette doctrine, ils n'auront aucune réponse ! Pourquoi ? Parce que ce n'est pas un principe basé sur la vérité, et comme c'est le cas pour toute fausseté, il ne peut être soutenu par la raison. La rationalité est le test infaillible pour déterminer que quelque chose est exact. C'est un fondement de la Tôroh.

Le Ramba''m écrit ceci dans son Mishnéh Tôroh :

Car si quelqu'un n'a pas acquis de la sagesse ici, ni de bonnes œuvres, il n'y a rien qu'il puisse mériter par-là, car il est dit6 : « Car il n'y a point d'acte, ni de calcul, ni de connaissance, ni de sagesse dans le séjour des morts ! »
שְׁאִם לֹא יִקְנֶה הֵנָּה חָכְמָה וּמַעֲשִׂים טוֹבִים--אֵין לוֹ בְּמַה יִזְכֶּה, שֶׁנֶּאֱמָר "כִּי אֵין מַעֲשֶׂה וְחֶשְׁבּוֹן, וְדַעַת וְחָכְמָה, בִּשְׁאוֹל

Le passage du Prophète Mal`okhi ע״ה, que cite ici le Ramba''m, est clair. Une fois que quelqu'un meurt, il n'y a plus de changement.

Ainsi, il est préférable d'écrire « à la mémoire de X » ou « pour le souvenir de X », plutôt que « pour l'élévation de l'âme de X », car dédier un livre à un défunt ne fera de toute façon pas s'élever son âme et ne fera pas expiation pour lui, chose qui est, de toute façon, impossible une fois qu'on meurt, peu importe ce que les vivants font en l'honneur ou au nom du défunt !

1Barokhôth 8:8
2Davorim 30:19
3Voir dans son Séfar Ho`amounôth Wadda´ôth »
4Davorim 24:16
5Hilkôth Tashouvoh 4:1

6Mal`okhi 3:6