vendredi 14 octobre 2016

La Paroshoh avec le Ramba''m : Ha`azinou

ב״ה

La Paroshoh avec le Ramba''m

Ha`azinou


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Parmi les phrases les plus difficiles à comprendre dans le cantique du Ha`azinou on compte celle du cinquième verset, où nous lisons ceci1 : שִׁחֵת לוֹ לֹא, בָּנָיו מוּמָם « Shihath Lô Lô` Bonow Moumom. » Ce passage a été interprété de diverses façons. Rash''i ז״ל, suivant le Targoum `ounqélôs, le traduit comme voulant dire : « Leur corruption est leur œuvre, et non la Sienne. À Ses fils incombe leur faute. » D'après cette lecture, Môshah Rabbénou ע״ה souligne que les Bané Yisro`él n'ont causé aucun tort à HaShem Lui-même à travers leurs méfaits ; c'est seulement eux, et non Lui, qui souffrent en conséquence de leur iniquité.

Le Rashba''m ז״ל interprète ce verset quelque peu différemment. Il écrit : « Yisro`él nuit à lui-même... Il s'est lui-même fait du tort...et personne d'autre... Les enfants du Tout-Puissant se sont eux-mêmes ternis. » D'après le Rashba''m, Môshah Rabbénou souligne que les Bané Yisro`él ne peuvent blâmer qu'eux, et personne d'autre, pour leur malheur. Cette lecture est en fait parfaitement en phase avec le thème et le but fondamental du cantique du Ha`azinou, puisqu'HaShem ית׳ explique vers la fin de la Paroshoh précédente2 qu'il sert à « rendre témoignage » du fait que les Bané Yisro`él furent prévenus à l'avance des conséquences désastreuses de leur trahison envers le Tout-Puissant. (Voir l'article intitulé « La Paroshoh avec le Ramba''m : Wayyélakh », où nous en avions parlé.) En guise d'introduction à ce cantique, Môshah Rabbénou déclare que lorsque le mal s'abattra sur les Bané Yisro`él, ils devront reconnaître leur propre responsabilité, plutôt que chercher à blâmer HaShem ou qui que ce soit d'autre.

Le Ramba''m adopte également cette lecture, mais l'applique d'une façon plus générale. Dans le Volume 3 de son « Môréh Navoukhim »3, il classe tous les maux qui peuvent s'abattre sur les êtres humains dans trois catégories :
  1. les maux naturels, comme les catastrophes naturelles et les maladies qui ne peuvent être évitées ;
  2. les maux causés par un homme (ou groupe de personnes) à autrui, comme un crime ou une guerre ;
  3. les maux qu'une personne provoque sur elle.

Le Ramba''m affirme que l'écrasante majorité des maux qu'une personne endure tombent dans la troisième catégorie, c'est-à-dire qu'ils sont causés par la personne elle-même. Bon nombre des malheurs dont souffrent les gens sont le résultat du fait qu'ils n'ont pas fait preuve de la prudence adéquate, qu'ils n'ont pas fait les efforts requis pour éviter la mésaventure qui leur est arrivée, ou qu'ils n'ont pas suffisamment pris soin de leur santé et bien-être. Si, par exemple, quelqu'un est sorti en plein hiver, sous -20°C, sans s'être couvert de la façon appropriée qu'exige un tel temps glacial, la grosse grippe qu'il attrapera et les brûlures qu'il ressentira aux doigts et aux orteils en raison du froid, ne seront pas à imputer à HaShem ou à un autre facteur, mais à lui-même, à sa propre négligence. De même, si quelqu'un devient paralysé parce qu'il a consommé des aliments nocifs pour le corps, sa paralysie n'est pas le résultat d'une punition Divine, mais le résultat de sa propre bêtise (ou ignorance). De même pour celui qui est atteint d'un cancer des poumons en raison du fait qu'il fumait. HaShem ni qui que ce soit n'est responsable ou n'a joué le moindre rôle dans ce qui lui est arrivé. Dans ce contexte, le Ramba''m cite le verset susmentionné tiré de la Parashath Ha`azinou :

La plupart des maux qui frappent les individus viennent d'eux-mêmes, je veux dire des individus humains qui sont imparfaits. Ce sont nos propres vices qui nous donnent lieu de nous lamenter et d'appeler au secours. Si nous souffrons, c'est par des maux que nous nous infligeons nous-mêmes de notre plein gré, mais que nous attribuons à Dieu ; loin de Lui une pareille chose ! C'est ce que Dieu a déclaré dans Son livre, en disant : שִׁחֵת לוֹ לֹא, בָּנָיו מוּמָם « Shihath Lô Lô` Bonow Moumom. » Shalômôh a exprimé la même idée en disant4 : אִוֶּלֶת אָדָם, תְּסַלֵּף דַּרְכּוֹ; וְעַל-יְהוָה, יִזְעַף לִבּוֹ « La sottise de l'homme pervertit sa voie, mais c'est contre HaShem que s'irrite son cœur. »

Le Ramba''m n'explicite pas du tout comment est-ce que précisément il lit ce verset, bien qu'il soit clair, du contexte, qu'il a adopté une approche quasiment similaire de celle proposée par le Rashba''m. Môshah Rabbénou déclare ici que le mal dont souffrent les Bané Yisro`él est le résultat de מוּמָם « Moumom », leur propre faute et défaut. Si nous avions pris de plus grandes précautions dans l'entretien de notre corps et de nos possessions, nous nous serions épargnés de nombreux maux et mésaventures qui se sont abattus sur nous. Un peu plus loin dans ce même chapitre du « Môréh Navoukhim », le Ramba''m détaille les divers vices de l'être humain qui lui causent du tort, et cite un certain nombre de passages bibliques qui démontrent la tendance déroutante que l'être humain a de causer lui-même sa chute et ses propres malheurs.

Comme l'a mentionné le Ramba''m, cette tendance n'inclut pas seulement le fait de se causer du tort, mais également celui de rejeter la faute sur Dieu, de se plaindre vers Lui lorsqu'on souffre des effets négatifs de nos propres négligences. Beaucoup de gens, quand il leur arrive quelque chose, ont pour réflexe de tout remettre sur Dieu. « Si telle ou telle chose est arrivée, c'est que c'est la volonté de Dieu. » « Si je suis tombé malade c'est que Dieu l'a voulu ! », « Si j'ai échoué à mes examens, c'est que Dieu ne voulait pas que je réussisse », et ainsi de suite. Mais par de tels propos, ils se dédouanent en réalité de toute responsabilité dans ce qui leur est arrivé. Les gens, par nature, préfèrent s'absoudre de toute culpabilité et blâmer quelqu'un d'autre, plutôt que d'accepter la responsabilité de leurs erreurs. Ce verset tiré de notre Paroshoh de la semaine devrait donc nous rappeler à nous habituer à regarder d'abord et premièrement vers nous-mêmes à la recherche de réponses lorsque les choses ne se déroulent pas comme nous l'aurions espéré, et voir comment corriger les erreurs que nous avons faites, au lieu d'instinctivement pointer du doigt les erreurs commises par les autres. Comme l'enseigne le Ramba''m, nous finirons par découvrir que dans la plupart des cas les problèmes auxquels nous sommes confrontés sont le fait de nos propres œuvres, et ne sont pas entièrement la faute de quelqu'un d'autre, et encore moins celle de Dieu !

1Davorim 32:5
2Ibid., 31:19-21
3Chapitre 12

4Mishlé 19:3