mercredi 22 avril 2020

Le thon en boite nécessite-t-il un Hakhshér


בס״ד

Le thon en boite nécessite-t-il un Hakhshér (tampon de Kashrouth) ?


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La question suivante m'a été envoyée :

Chalom Rav. Je ne sais plus où j'ai lu cela mais il semble que l'on puisse acheter n'importe quelle marque de boîte de thon sur le marché (et pas seulement celle du Beth Din de Paris...). Apparemment c'est une fausse légende de croire qu'on peut trouver du requin ou du dauphin dans une boîte à la place du thon car :
- Le thon est sélectionné sur les bateaux.
- Dans les usines aussi, il n'y a que le thon qui circule sur la chaîne de production.

En effet, la température de cuisson pour le thon n'est pas la même que celle du requin, du dauphin ,et varie même en fonction des espèces de thons. ( Le thon blanc et le rouge ne se cuisent pas à la même température). Donc, cela demanderait trop de temps et d'argent à l'entreprise s'il fallait aussi cuire du requin...
Bref, tout cela pour dire qu’apparemment il y a de très faibles, voire aucune, chances de voir un problème de mélange entre un thon et une autre espèce de poisson dans ces usines (comme le thon de la marque petit navire)

Tout cela pour vous demander : Puis-je acheter (selon la Halakha) des produits préparés par des Goyim contenant du thon en boîte si je sais de source sûre qu'il n'y a aucun ingrédient illicite ?

Merci Rav !

Cette question concernant la permissivité d’acheter et consommer du thon en boite sans Hakhshér est très intéressante, et est, à nouveau, l'un des très nombreux sujets de divergence entre `ashkanazim et Saphoraddim, mais également un sujet autour duquel une légende insensée est attachée par les rigoristes et ceux qui ne prennent pas la peine de se renseigner un minimum.

Tout d'abord, sachez que sur la propre liste du Consistoire de France on peut retrouver des marques de thon en boite parfaitement autorisées et qui ne nécessitent aucune surveillance, car aucun des ingrédients ne pose problème dans la confection. Cela répond donc en partie à votre question. Où pourrait donc se trouver le souci que se font certains concernant le thon en boite, au point d'exiger la présence d'un Hakhshér ?

L'interdiction du « Bishshoul ´akkou''m » interdit de consommer des aliments cuits par un Gôy. Même si tous les ingrédients sont parfaitement Koshér, la nourriture est interdite du fait qu'elle a été cuisinée par un Gôy. La coutume séfarade est plus stricte que la pratique ashkénaze en ce qui concerne cette Halokhoh. Les ashkénazes permettent de manger des aliments cuits par un Gôy si un Juif a participé à quelque façon que ce soit au cours du processus de cuisson, même s'il a simplement allumé la flamme ou allumé le four. Les séfarades, cependant, interdisent les aliments cuits par un Gôy à moins qu'un Juif ait véritablement joué un rôle actif dans le processus de cuisson, par exemple en versant les ingrédients dans la casserole ou en mélangeant les aliments.

La question se pose de savoir si cette Halokhoh affectera le statut du thon en conserve, qui subit un processus de cuisson avant sa mise en conserve. Plusieurs raisons ont été invoquées pour autoriser la consommation de thon en conserve produit par des Gôyim.

Premièrement, l'interdiction du « Bishshoul ´akkou''m » ne s'applique qu'aux aliments qui ne sont pas habituellement consommés crus. Le sushi, ou thon cru, est une délicatesse en Extrême-Orient, et nous pourrions donc affirmer que le thon n'est pas soumis à l'interdiction du « Bishshoul ´akkou''m », puisque c'est un poisson qu'il est parfaitement possible de consommer cru.

Deuxièmement, lorsque la question fut posée au Rov ´ôvadhyoh Yôséph, il a tranché que le thon en conserve n'entrait absolument pas dans la catégorie de « Bishshoul ´akkou''m », tout simplement parce que la Halokhoh ne considère pas la technique du fumage comme de la « cuisson ». De ce fait, le principe de « Bishshoul ´akkou''m » ne s'applique pas aux aliments qui ont été fumés ou cuit à la vapeur par des Gôyim, et, par conséquent, tranche le Rov ´ôvadhyoh Yôséph, le thon n'est pas sujet au « Bishshoul ´akkou''m ». En effet, le thon en conserve est cuit deux fois pendant sa transformation en usine. Il est d'abord cuit à la vapeur avec la peau avant le retrait et après la mise en conserve dans une cuisinière industrielle. Et puisqu'il est déjà consommable avant la deuxième cuisson, il n'a pas le statut de « Bishshoul ´akkou''m » (puisque ce n'est pas la deuxième cuisson dans la cuisinière industrielle qui le rend consommable ; cette deuxième cuisson ne fait qu'améliorer son goût, puisque le goût du thon après la première cuisson à la vapeur dans une usine est de moins bonne qualité que le produit en conserve final).

Troisièmement, la Halokhoh du « Bishshoul ´akkou''m » stipule que ne sont concernés que des aliments dignes d'être servis à la table des rois (c'est-à-dire, des dignitaires et gens importants) Du thon frais pourrait être servi aux rois, princes, présidents et dignitaires, mais du thon en conserve est considéré comme n'étant pas suffisamment respectable que pour être apporté » à des dignitaires. Par conséquent, de nombreux Pôsaqim tranchent que l'interdiction du « Bishshoul ´akkou''m » ne s'applique pas au thon en conserve.

Enfin, comme vous l'avez signalé, il existe une légende totalement farfelue, souvent invoquée par des Pôsaqim ashkénazes, selon quoi on pourrait retrouver du requin ou dauphin dans le thon en conserve. Et en raison de cela, il faudrait interdire le thon en boite qui n'aurait pas de Hakhshér. C'est l'un des nombreux exemples de rabbins qui tranchent sur des sujets qu'ils ne maîtrisent absolument pas, tout simplement parce qu'ils n'ont pas pris la peine de se pencher sérieusement sur la question.

Cette légende est née d'un malentendu. Les thons se déplacent souvent sous les dauphins. Par conséquent, lorsque le thon est péché au filet, cela entraîne fréquemment la capture et mort de nombreux dauphins dans les filets. À cause de cela, des millions de dauphins ont perdu dans les filets de pêche au thon. Cela a amené au développement de nouvelles techniques de pêche au thon pour épargner les dauphins, comme par exemple la pêche à la ligne plutôt qu'au filet. C'est ainsi qu'il existe des boites de thon sur lesquelles il est indiqué « sans dauphin ». Certaines personnes croient que cela signifie qu'il pourrait y avoir du dauphin dans d'autres boites de thon, alors que cela signifie simplement que le thon n'a pas été péché avec des dauphins.

Même lorsque du thon a été péché avec des dauphins, il est pratiquement impossible de retrouver de la viande de dauphin mélangé dans le thon, car le thon est trié, éviscéré, et taillé à la main, tandis que les dauphins attrapés dans les filets sont immédiatement retirés des filets. Les labels « sans dauphin » servent donc à rassurer les environnementalistes sur le fait que la pêche du thon s'est déroulée sans avoir tué le moindre dauphin.

Pour toutes ces raisons, les séfarades de manière générale (et quelques Pôsaqim ashkénazes), autorisent sans le moindre problème le thon en conserve sans qu'il n'y ait de Hakhshér sur la boite, dès lors que les ingrédients sont autorisés (par exemple, huile végétale et non animale, et qu'il n'y a pas d'additifs interdits).