vendredi 21 août 2020

La notion de Shinouy

 

בס״ד

 

La notion de Shinouy

 


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J’ai reçu la question suivante :

 

Je lisais votre article sur les Melâ`khoth de Shabbâth et vous parliez à un moment de « Shinouy ». C’est une façon détournée de faire un « travail » interdit le Shabbâth, le rendant ainsi autorisé et sans transgression, si j’ai bien compris.

 

Ma question est simple : Peut-on faire les 39 Melâ`khoth avec un Shinouy ? Ou bien le Shinouy n’est limité qu’à un  certain type de travaux  ou seulement les travaux interdits Midderabbânan ?

 

Par exemple : notre Rav avait dit un jour a quelqu’un que si on ouvrait la porte d'un réfrigérateur alors que la lumière s’allume, on pouvait refermer la porte du réfrigérateur avec un Shinouy en la poussant avec l’épaule. De ce fait le réfrigérateur s’éteindrait en se refermant sans transgresser l’interdiction d’éteindre la lumière grâce a ce Shinouy. Dans ce cas un juif qui voudrait se rendre à la Shoul un Shabbâth, mais est bloqué par la porte électrique du hall d’immeuble, pourrait très bien sortir le Shabbâth pour aller a la Shoul en appuyant sur le bouton avec sa jambe et non avec son doigt (Shinouy). D’ailleurs, beaucoup de juifs ne vont pas à la Shoul à cause des portes électriques (il faudrait revoir ce problème).

 

Dans ce cas peut on allumer un feu le Shabbâth avec Shinouy ? Cuire, construire, planter etc., avec Shinouy ? Car si faire d’une façon différente une Melâ`khâh interdite le Shabbâth avec un Shinouy est autorisé, où est la limite ? Ou bien un Shinouy est-il un acte réglementé par nos sages ?

 

Merci pour vos précisions Rav !

 

Amicalement  

 

Cela fait beaucoup de questions très intéressantes que je vais traiter très simplement.

 

Pour comprendre la notion de « Shinouy », il faut d’abord comprendre la notion de « Malo`khoh ». Comme cela a été expliqué dans l’article intitulé « Travail réfléchi », huit conditions doivent être remplies pour déterminer qu’un acte faisant partie des 39 Malo`khôth de Shabboth est une transgression du Shabboth. Et nous avions là qu’une de ces huit conditions était que l’acte en question devait avoir été réalisé de la manière ordinaire. Ce principe se retrouve énoncé dans le Ṭalmoudh (Shabboth 62a).

 

La raison à cela est que lorsque la Ṭôroh parle des Malo`khôth, elle emploie l’expression de מְלֶאכֶת מַחֲשָׁבֶת « Mala`khath Maḥashavath – ouvrage réfléchi » (Shamôth 35 :33). De là nous apprenons que pour transgresser le Shabboth, une Malo`khoh doit constituer un acte « réfléchi », c’est-à-dire être bien planifiée, faite avec une intention, et réalisée d’une manière professionnelle (qui permettra de réaliser un acte significatif, au résultat appréciable).

 

Une fois que l’on a compris cela, le concept de Shinouy se comprend par lui-même. Nous pouvons le définir comme une modification qui permet de transformer un acte interdit Midda`ôroyatho` (au niveau biblique) en un acte qui n’est plus interdit qu’à un niveau Middarabbonan (au niveau rabbinique), ce qui est un degré d’interdiction moins grave.

 

Puisqu’une Malo`khoh doit être réalisée d’une manière professionnelle pour constituer une transgression du Shabboth, un Shinouy doit obligatoirement être un acte réalisé d’une manière moins professionnelle que d’ordinaire, de sorte que soit les résultats de l’acte seront moins bons ou la méthode employée sera plus difficile. En d’autres mots, un Shinouy est valable lorsque le résultat d’un acte est moins satisfaisant ou que le mode de réalisation de l’acte est plus fastidieux. Si aucune de ces deux définitions ne s’applique, il ne s’agit alors pas d’un Shinouy. Ainsi, d’après de nombreux Pôsaqim, comme par exemple Horov Môshah Feinstein, le « Shinouy » consistant à employer son coude pour allumer la lumière n’est pas valable, car cet acte n’affecte en aucun cas le contact électrique qui active la lumière. Le résultat est exactement le même que si on avait utilisé son doigt pour appuyer sur l’interrupteur. L’une des deux conditions susmentionnées n’est donc pas remplie. Et on pourrait également avancer qu’utiliser son coude pour appuyer sur l’interrupteur ne constitue pas une difficulté particulière.

 

L’exemple d’un Shinouy acceptable serait comme ceci : Imaginez que vous voudriez boire du café à Shabboth. Vous ne pourrez pas utiliser le filtre à café, car cela constituerait la transgression de la Malo`khoh de trier. Mais le Ṭalmoudh lui-même (et cela est repris également dans le Mishnéh Ṭôroh) autorise à réaliser un filtrage avec, par exemple un tissu, puisque le filtrage par un tissu ne permettra d’obtenir un aussi bon résultat que si on avait utilisé un ustensile spécialement destiné au filtrage. De ce fait, plutôt que d’employer un filtre à café, pour reprendre notre exemple, on pourra utiliser une chaussette ou tout autre tissu à cette fin, car le filtrage par cette méthode ne sera pas professionnel, ne permettant pas d’avoir une qualité de filtrage équivalente à celle qu’on aurait obtenue en utilisant le filtre à café. Puisque le résultat sera d’une qualité moindre et moins satisfaisante, il s’agit d’un Shinouy valable. De même, pour prendre un deuxième exemple, s’il est absolument nécessaire d’écrire à Shabboth, un droitier qui ne saurait pas bien écrire de la main gauche devrait utiliser sa main gauche pour écrire. Car non seulement ce sera un acte difficile, mais en plus le résultat sera d’une qualité inférieure que s’il avait écrit avec sa main droite. Dernier exemple : si quelqu’un s’est rendu compte qu’il portait sur lui un objet qu’il lui est interdit de porter dans le domaine public, son Shinouy pourra être de s’arrêter toutes les quatre `ammôth jusqu’à ce qu’il parviendra à sa destination. Le fait de s’arrêter et marcher quatre `ammôth par quatre `ammôth rallonge son trajet et ajoute une grande difficulté. C’est donc un Shinouy valable. (Cet exemple est également explicitement mentionné dans le Ṭalmoudh et Mishnéh Ṭôroh.)

 

Toutes les trente-neuf Malo`khôth du Shabboth sont concernées par ce principe. S’il y a un besoin réel ou une nécessité absolue de devoir les accomplir, elles peuvent être accomplies par un Shinouy remplissant au moins une des deux conditions : soit le mode de réalisation est plus difficile, soit la modification réalisée ne permettra pas un résultat équivalent que si on avait accompli l’acte de façon ordinaire. Et ainsi, l’acte réalisé ne sera plus une transgression biblique (puisqu’il n’y a pas de professionnalisme et qu’il est de moindre qualité) mais simplement au pire une transgression rabbinique.

 

En espérant que cela vous aura éclairé.