בס״ד
Emission de semence en vain : Une approche
rationaliste
Introduction
Cet article peut être téléchargé ici.
Cela fait longtemps que des lecteurs du blog, ainsi
que des élèves, me demandent de traiter des sujets de la masturbation et de « l’émission
de semence en vain » (הוֹצָאַת
זֶרַע לַבַּטָּלָה « Hôṣo`ath Zara´
Labbattoloh »), mais du point de vue de l’école rationaliste du judaïsme.
Après avoir réfléchi à certains e-mails et aux témoignages qui me sont parvenus,
je me suis rendu compte que c'était probablement l'un des sujets les plus
importants mais les moins discutés qui affectent les Juifs orthodoxes et leur
bien-être social et émotionnel.
L'impact de ce problème sur le bien-être sexuel, émotionnel
et social de l'homme Juif orthodoxe, alors qu'il grandit à travers l'enfance,
l'adolescence et l'âge adulte, ne peut être surestimé. (Je parle spécifiquement
de la masturbation masculine, car il s'agit d'un blog halakhique, et il n'y a
pas de discussion approfondie sur la masturbation féminine dans les sources
halakhiques. C'est évidemment un sujet très important en soi, mais puisque je
ne suis pas sexologue, je n'en discuterai pas ici). L'impact général de cette
question sur la société orthodoxe est très significatif. Vous n’avez pas idée
du nombre de religieux qui m’en ont déjà parlé. De toute évidence, l'homme
orthodoxe a les mêmes problèmes sexuels que tout autre être humain, Juif ou
non, mais plusieurs facteurs propres à notre communauté en font un sujet qui
convient vraiment à un blog comme celui-ci (et croyez-moi, mon blog est lu même
dans des milieux religieux juifs que vous ne soupçonneriez pas).
Premier facteur. La société juive orthodoxe
évite de discuter de sujets à caractère sexuel. En apparence, cela est souvent
justifié par des affirmations selon lesquelles discuter de ces questions en
public est une violation des principes de pudeur ou « Ṣani´outh ».
Cet argument a un certain mérite bien sûr…sauf lorsque le sujet est
complètement ignoré et que qu’on n’en discute pas même en privé pour proposer
aux jeunes des alternatives ! Malheureusement, comme ces sujets ne sont
pas discutés ni en public ni en privé, les jeunes sont moins bien guidés, ils
ne savent souvent pas vers qui se tourner pour obtenir de vrais conseils, et
les conseils donnés, dans les rares cas où ils sont donnés, sont souvent mal
informés, pour en dire le moins. En outre, lorsqu’on regarde la littérature
juive traditionnelle, comme par exemple le ṬoNo’’Kh, le Midhrosh, ou encore le Ṭalmoudh,
nous constatons qu’AIUCUN sujet n’était tabou. Hashshém ית׳, à
travers les Prophètes, et nos Sages, à travers le Midhrosh et le Ṭalmoudh,
osaient aborder tous les sujets avec de nombreux détails qui feraient rougir
bon nombre de religieux. C’est une méthode saine, car lorsqu’on ose parler de tout
avec nos jeunes et enfants, ils n’auront pas la tentation d’aller chercher
leurs réponses dans des sources inappropriées, ni de développer une attitude
hypocrite de piété en public et de débauche en privé.
Deuxième facteur. On entend souvent parler d’une
interdiction de la masturbation masculine, l'interdiction halakhique bien
connue sous le nom de « gaspillage de la semence » ou « émission
de semence en vain ». Lorsqu'une activité humaine normale telle que la
masturbation est interdite, cela peut être une source de culpabilité et de
honte énorme pour un jeune orthodoxe qui n'est pas familier avec le
développement sexuel normal et ne sait pas où il peut se tourner pour obtenir
de l'aide. Jusqu'à 80% des adolescents de sexe masculin normaux se masturbent,
et même si ces chiffres étaient différents pour les adolescents orthodoxes, il
y a certainement encore un grand pourcentage de garçons Juifs orthodoxes qui le
font. L'impact psychologique de masse de jusqu'à 80% de nos enfants étant engagé
dans une activité dont ils ont appris que la Ṭôroh condamne et considère comme un
péché est quelque chose qui doit être énorme. Je ne suis pas un psychologue
social. Cependant, je sais par ma propre expérience du fait d’avoir évolué dans
cet environnement et par les nombreuses personnes qui ont eu le courage d'en
discuter ouvertement, que cette question est extrêmement importante.
Troisième facteur. La tendance à une compréhension
plus mystique de notre religion et à l'abandon d'une perspective plus
rationaliste est celle que les lecteurs de ce blog connaissent très bien.
Quiconque connaît le sujet de la masturbation dans la littérature juive est
sûrement conscient de l'association entre la gravité du « péché » de
la masturbation et les sources Qabbalistiques. Bien qu'il existe clairement des
sources halakhiques traditionnelles pour l'interdiction (dont nous discuterons
en détail lorsque nous entrerons dans la discussion principale de cette série
d'articles), les sources Qabbalistiques se sont emparées de ce sujet et l’ont
transformé en l'un des péchés majeurs d'importance cosmique, au-delà de ce que
dicte réellement la Halokhoh, ainsi que nous le découvrirons. Cela
peut être une source majeure de désespoir pour les adolescents aux prises avec
le problème, d'autant plus qu'ils sont également les moins équipés pour
comprendre et faire la différence entre la vraie Halokhoh et les
déclarations effrayantes que l’on retrouve dans des sources Qabbalistiques.
Quatrième facteur. Une grande partie du
discours halakhique sur la masturbation est basée sur les travaux des érudits
halakhiques médiévaux (les Ri`shônim) qui ont été fortement influencés par les
croyances de leur temps concernant les « dangers » pour la santé lorsqu’on
« gaspille la semence ». C’est un fait que peu de Juifs orthodoxes
acceptent d’admettre : les Ri`shônim interprétaient souvent certains
sujets halakhiques à la lumière de la science connue de leur époque, qui n’était
pas toujours exacte, loin de là même. Comprendre cela est essentiel à toute
discussion rationaliste sur le sujet, et nous allons bien sûr approfondir cela
de manière beaucoup plus détaillée. Cependant, les jeunes orthodoxes
d'aujourd'hui apprennent souvent dans la Yashivoh (et je suis bien
placé pour en témoigner, puisque je suis passé par le système) qu'une analyse
historique qui associe le processus halakhique à toute sorte de lien avec la
compréhension scientifique et culturelle actuelle n'est rien de moins qu'une
hérésie pure et simple. En tant que tel, un jeune orthodoxe croira souvent
qu'il est en train de détruire son cerveau et sa force vitale lorsqu'il se
masturbe, car c'est ce que disent les « livres saints » (Saphorim),
et il ne pourrait pas comprendre que ces choses étaient souvent simplement en correspondance
complète avec les croyances « scientifiques » de l'époque où
elles ont été rédigées. Cela ajoute à la culpabilité et à la consternation de
la jeunesse malheureuse et non guidée de notre époque.
Cinquième facteur. La signification de l'idée
que les Juifs sont un peuple élu est souvent interprétée aujourd'hui comme
voulant dire que les Juifs sont en quelque sorte intrinsèquement différents de
tous les autres. Or, de nombreux sages du judaïsme, comme le Rambo’’m ז״ל, avaient
une vision radicalement différente de la signification de l’élection des Juifs.
Cependant, la croyance que les Juifs sont intrinsèquement différents est une
idée répandue dans de nombreux cercles orthodoxes aujourd'hui. Cela conduit à
des soupçons sur les écrits scientifiques et culturels auxquels certains jeunes
orthodoxes peuvent parfois être exposés. Ainsi, les rares jeunes orthodoxes qui
peuvent tomber sur un article, ou même rencontrer un thérapeute ou un
enseignant, ou un professionnel de la santé qui peuvent offrir des conseils
raisonnables sur le sujet, les rejettent souvent en raison de ces soupçons.
Sixième facteur. Le tabou contre la lecture de
livres et d'articles profanes, en particulier ceux concernant des questions
sexuelles, fait qu'il est de moins en moins probable qu'un jeune orthodoxe ait
un jour la chance d'être exposé à des écrits responsables sur un comportement
sexuel normal. Le peu de matériel lié à la sexualité qu'un jeune orthodoxe peut
voir sera souvent inapproprié et trompeur, et parfois simplement pornographique
et potentiellement dangereux pour son développement sexuel sain. Cela rend
difficile pour le Boḥour de Yashivoh typique de comprendre ce qui
est scientifique et responsable, et ce qui est dangereux et malsain.
Il y aurait davantage de choses à écrire dans cet
article d’introduction, mais je pense avoir suffisamment démontré pourquoi
c'est un problème particulier pour un homme Juif orthodoxe grandissant dans le
monde orthodoxe d'aujourd'hui. Je pense qu'il est évident que la santé sexuelle
et le développement des hommes de notre communauté ont un impact profond sur la
santé de notre communauté en général. Parce que je ne suis pas un spécialiste
des sciences sociales, je choisirai de ne pas entrer dans les détails sur le
type d'impact que cela a sur notre société. J'espère que vous conviendrez au
moins avec moi qu'il s'agit d'un sujet extrêmement important et qu'une approche
halakhique rationaliste peut être très bénéfique pour le Juif rationaliste.