ב״ה
Mettre
ou ne pas mettre les Tafillin à Shabboth, Yôm Tôv et durant Hôl
Hammô´édh
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Nous
savons tous qu'à Shabboth et Yôm Tôv, nous ne mettons pas les
Tafillin. Mais combien d'entre nous connaissons réellement la raison
et l'origine de cette règle ?
Le
Makhilto` la déduit du verset suivant1 :
Et
tu garderas ce décret en son temps, Miyomim Yomimoh.
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וְשָׁמַרְתָּ
אֶת-הַחֻקָּה
הַזֹּאת,
לְמוֹעֲדָהּ,
מִיָּמִים,
יָמִימָה
|
Et
il explique de la façon suivante l'expression מִיָּמִים,
יָמִימָה
« Miyomim
Yomimoh » :
[Cela
signifie qu']il y a des jours où tu mets [les Tafillin] et des
jours où tu ne [les] mets pas. Ceci exclut les Shabbothôth et
les Yomim Tôvim. Rébbi Yishoq a dit : « Puisque
Shabboth est appelé un `ôth2
et que les Tafillin sont appelées `ôth, tu ne dois pas placer un
`ôth à l'intérieur d'un [autre] `ôth ».
|
יש
ימים נותן ויש ימים שאין אתה נותן יצאו
שבתות וימים טובים.
רבי
יצהק אומר האויל ושבת קרויה אות.
ותפלין
קרויין אות.
לא
יתן אות בתוך אות
|
Ainsi,
d'après le Makhilto`, nous ne mettons pas les Tafillin à Shabboth
et Yôm Tôv parce que ces jours-là sont eux-mêmes déjà des
signes de notre relation avec HaShem. De ce fait, un autre signe
n'est pas nécessaire ces jours-là. Le terme « signe »
se comprend ici dans le sens des Miswôth particulières
attachées à ces jours qui nous rappellent notre alliance et
relation avec HaShem. Rien que nous trouver à Shabboth ou Yôm Tôv
et nous abstenir des Malo`khôth interdites suffit en soi, et aucun
autre signe ou rappel n'est nécessaire.
Mais
alors, comment cela se fait-il que certaines personnes mettent les
Tafillin durant Hôl Hammô´édh, tandis que d'autres ne les
mettent pas ? Comme nous l'avons vu dans l'article intitulé
« Mettre
ou ne pas mettre les Tafillin durant Hôl Hammô´édh ? »,
certains disent que Hôl Hammô´édh est aussi
un `ôth, tout comme Yôm Tôv. En effet, tout comme il ne nous est
pas permis de consommer du Homés
le premier et le dernier jour de Pésah, cela ne nous est pas
permis non plus durant Hôl Hammô´édh Pésah. Le
`ôth de Hôl Hammô´édh Pésah est donc le fait de
s'abstenir de consommer et posséder du Homés,
comme à Yôm Tôv Pésah. Et tout comme nous avons une
obligation de nous asseoir sous la Soukkoh le premier et le dernier
jour de Soukkôth, nous en avons également l'obligation durant Hôl
Hammô´édh Soukkôth. Le `ôth de Hôl Hammô´édh Soukkôth
est donc l'obligation de nous asseoir sous la Soukkoh, comme à Yôm
Tôv Soukkôth.
Mais
d'autres disent que la Masékhéth Mô´édh Qoton,
aussi bien dans la Mishnoh que dans la Gamoro`, et aussi bien dans le
Talmoudh Bavli que dans le Talmoudh Yarousholmi, sous-entend
clairement que nous devons mettre les Tafillin durant Hôl
Hammô´édh, parce qu'il est dit que l'on peut rédiger ses propres
parchemins de Tafillin durant Hôl Hammô´édh. Or, étant
donné qu'écrire est interdit durant Hôl Hammô´édh, cela
n'aurait pas été permis si le fait de porter des Tafillin durant
Hôl Hammô´édh n'était pas une Miswoh !
À
la lumière de cette divergence d'opinion, que nous avons expliqué
en détails dans l'article susmentionné, une question toute
naturelle se pose : si nous avons une Tôroh Écrite et Orale
fiable, ainsi qu'une chaîne de transmission de la tradition, comment
se fait-il que l'on ne sache pas s'il faille mettre ou pas les
Tafillin durant Hôl Hammô´édh ? Chaque génération
ne pouvait-elle voir et savoir si les gens de la génération
précédente mettaient ou pas les Tafillin durant Hôl
Hammô´édh ? Môshah Rabbénou ע״ה
et
Yahôshoua´ bin Noun ע״ה,
qui sont les premiers maillons de la chaîne de transmission de la
tradition, mettaient-ils ou pas les Tafillin durant Hôl
Hammô´édh ?
Vous
pourriez être tentés de répondre en disant, comme l'ont fait les
Tôsofôth3
ז״ל,
qu'il y a certainement eu de longues périodes de temps où personne
ne portait les Tafillin. Le raisonnement de cet argument est que s'il
y a eu de longues périodes de temps où aucun des Talmidhé Hakhomim
n'a accompli une certaine Miswoh, cela pourrait expliquer
comment la confusion est née sur cette question. Mais ce n'est pas
une réponse satisfaisante pour ce problème, parce qu'il n'existe
aucune époque connue où tous les Talmidhé Hakhomim,
partout dans le monde entier, négligèrent la Miswoh des
Tafillin.
Vous
pourriez également être tentés de dire que cette confusion doit
être née du temps où les Syro-Grecs, durant la période qui mena
aux événements de Hanoukkoh, imposèrent de graves décrets
sur les Israélites, leur interdisant de pratiquer les Miswôth.
Mais là encore, ce n'est pas une réponse satisfaisante, parce que
la majorité des Israélites et Talmidhé Hakhomim de cette
époque-là vivaient à Bovél, où de tels décrets n'existaient pas
et où les Israélites étaient donc libres de pratiquer les Miswôth
comme celle des Tafillin. Par conséquent, cette hypothèse ne peut
pas expliquer comment est-ce qu'il a pu être possible d'oublier s'il
fallait mettre ou pas les Tafillin durant Hôl Hammô´édh.
Une
autre approche consisterait à citer le Sama''g
ז״ל,
qui se plaignait du fait que certaines communautés de son
époque refusaient tout simplement de mettre les Tafillin, et ce
n'importe quel jour de l'année. Leur pratique était basée sur la
Halokhoh qui impose que celui qui met les Tafillin doit avoir un
corps et un esprit propre. Et comme ces communautés estimaient qu'il
n'était pas possible d'avoir constamment son corps et son esprit
propre, elles ne mettaient tout simplement jamais les Tafillin.
Peut-être que l'abandon de la Miswoh des Tafillin causa une
confusion par la suite quant à savoir s'il fallait ou pas les mettre
durant Hôl Hammô´édh une fois que la Miswoh des
Tafillin fut à nouveau pratiquée. Mais cette hypothèse n'est pas
satisfaisante non plus, car ce problème ne concernait que certaines
communautés de son époque. Le Sama''g lui-même, les gens de sa
propre communauté, ainsi que les autres Ba´alé Tôsofôth de son
temps, n'ont jamais négligé la Miswoh des Tafillin. Donc,
cette hypothèse ne répond pas à nos interrogations.
En
réalité, les réponses à nos questions sont bien plus simples
qu'on ne le pense. Nous voyons à travers plusieurs Mishnoyôth,
Gamorôth et Tashouvôth que dès le départ, les Talmidhé Hakhomim
mettaient les Tafillin certains jours, tandis qu'à d'autres moments
ils ne les mettaient pas. De la même manière, nous voyons que
certains Talmidhé Hakhomim se couvraient la tête
constamment, qu'ils soient chez eux ou en public, tandis que d'autres
ne la couvraient pratiquement jamais, qu'ils soient chez eux ou en
public. Ce que chaque Talmidh Hokhom faisait était évident
(puisqu'on pouvait l'observer de ses propres yeux), mais chacun avait
des raisons halakhiques différentes pour expliquer son comportement
différent de celui des autres.
Contrairement
à notre époque, la pratique du Judaïsme était relativement
« libre » et certaines choses étaient laissées à
l'appréciation de chacun. C'est pourquoi, durant Hôl
Hammô´édh, un Talmidh Hokhom se comportait en accord avec
la position selon laquelle nous sommes supposés mettre les Tafillin
durant Hôl Hammô´édh, tandis qu'un autre se comportait en
accord avec la position selon laquelle nous ne sommes pas supposés
les mettre durant Hôl Hammô´édh. C'est pourquoi le débat
du port des Tafillin durant Hôl Hammô´édh n'est même
jamais explicitement mentionné dans le Talmoudh, parce
qu'il n'y aucune Halokhoh sur le sujet. Môshah Rabbénou n'a jamais
dit quels jours les Tafillin devaient être mises et quels jours
elles ne devaient pas l'être.
Vous
allez alors répondre à cela que nous avons pourtant vu plus haut,
dans le Makhilto`, ainsi que dans la Gamoro` de Manohôth
36b
mentionnée dans l'article susmentionné, que Rébbi Yishoq
ז״ל
et
Rébbi Yôsé le Galiléen ז״ל
ont
expliqué, sur la base du verset de Shamôth
13:10,
que l'on ne mettait pas les Tafillin à Shabboth et Yôm Tôv. Ce qui
indique donc qu'il y aurait bien une « tradition » qui a
déterminé les jours où l'on met les Tafillin et ceux où l'on ne
les met pas, à savoir, les jours qui sont liés à un `ôth.
Sauf
qu'il y a quatre problèmes à ce raisonnement : le premier est
que, bien que Hôl
Hammô´édh soit une période liée à un `ôth, il y a une
divergence quant à savoir si l'on met ou pas les Tafillin durant
cette période. Ce qui montre qu'il n'y a pas de tradition à ce
niveau. Le deuxième problème est que, comme nous l'avons dit dans
l'article susmentionné, tout le monde n'est pas d'accord sur le fait
que ce verset de Shamôth
13:10
se rapporte aux Tafillin. Rébbi ´aqivo` ז״ל,
par exemple, explique et démontre que ce verset a à voir avec
l'observance de Pésah,
et non avec la Miswoh
des Tafillin. Troisièmement, si le port des Tafillin était interdit
à Shabboth et Yôm Tôv parce que ces jours sont des signes à eux
seuls et ne nécessitent pas d'autre signe, pourquoi portons-nous des
Sisith
à Shabboth et Yôm Tôv, alors que ce sont aussi des signes de notre
relation avec HaShem (puisqu'elles nous rappellent les 613 Miswôth
de la Tôroh) ? Si le port de Tafillin est interdit les jours de
Shabboth, Yôm Tôv et Hôl
Hammô´édh sur la base que ces jours-là sont un `ôth à eux seuls
et ne nécessitent donc pas un autre `ôth, la même logique devrait
être utilisée pour interdire de porter des Sisith
ces jours-là ! Et quatrièmement, contrairement à ce que l'on
pense généralement, ne pas mettre les Tafillin à Shabboth n'est
pas une interdiction gravée dans le marbre. En effet, il y a bel et
bien un débat dans le Talmoudh quant à savoir s'il faut ou pas
mettre les Tafillin à Shabboth !
Ceux
qui préconisent de ne pas mettre les Tafillin durant Hôl
Hammô´édh s'appuient toujours sur le fait que Hôl
Hammô´édh serait comme Shabboth et Yôm Tôv, c'est-à-dire, un
`ôth. On ne devrait donc pas mettre les Tafillin durant Hôl
Hammô´édh, puisqu'il aurait été tranché que Shabboth et Yôm
Tôv ne sont pas des jours où l'on devrait les mettre. Mais ce
raisonnement est complètement rendu irrecevable par la toute
première Mishnoh du Chapitre 10 de la Masékhéth ´érouvin !
En effet, là, nous lisons ceci :
Celui
qui trouve [à Shabboth] des Tafillin [en chemin] doit les faire
entrer4
une paire à la fois. Rabban Gamli`él a dit : « [Il
doit emporter] les deux pairs à la fois ! ». Dans
quel cas s'applique les paroles susmentionnées ? Dans le cas
de vieilles [Tafillin]. Mais dans le cas de [Tafillin] neuves, il
est exempt. S'il les trouve rangées dans des étuis ou attachées
dans des ballots, il doit rester à côté d'elles jusqu'à ce
qu'il fasse sombre, puis il peut les emporter. Mais dans une
période de danger, il les recouvre et s'en va.
|
המוצא
תפילין,
מכניסן
זוג זוג;
רבן
גמליאל אומר,
שניים
שניים.
במה
דברים אמורים,
בישנות;
אבל
בחדשות,
פטור.
מצאן
צבתים או כרכות,
מחשיך
עליהן ומביאן;
ובסכנה,
מכסן
והולך לו
|
Analysons
cela point par point. Nous ferons une synthèse générale :
Celui
qui trouve [à Shabboth] des Tafillin [en chemin] doit les faire
entrer une paire à la fois : Lorsqu'on trouve à
Shabboth des Tafillin qui pourraient être endommagées, voire
même volées, il est strictement interdit de les laisser là.
Mais à Shabboth, il est interdit de les prendre et les mettre
dans un lieu sûr à cause de l'interdiction de porter dans le
domaine public et transférer dans le domaine privé. Par
conséquent, la première opinion dans la Mishnoh est qu'il faut
mettre une paire à la fois et la garder sur soi jusqu'à ce qu'on
arrive dans un lieu sûr. Là, on la retirera, puis on retournera
chercher l'autre paire. La raison pour laquelle les mettre est
permis à Shabboth est que mettre les Tafillin n'équivaut pas à
les porter.
Quant
à l'expression « paire », cela fait référence aux
deux Tafillin, à savoir, celle de la tête et celle du bras.
Rabban
Gamli`él a dit : « [Il doit emporter] les deux pairs à
la fois ! » : Mais Rabban Gamli`él est d'avis
qu'il est permis de mettre sur soi les deux paires de Tafillin à
la fois. On aura donc mis deux Tafillin de la tête et deux
Tafillin du bras en une fois, car il y a suffisamment de place sur
sa tête pour porter deux paires de Tafillin et suffisamment de
place sur son bras pour porter deux paires de Tafillin.
Dans
quel cas s'applique les paroles susmentionnées ? Dans le cas
de vieilles [Tafillin] : Bien qu'il soit obligatoire de
mettre des Tafillin trouvées à Shabboth afin de les emmener en
lieu sûr, cela n'est le cas qu'avec des Tafillin où tout indique
qu'elles ont déjà servi et qu'elles sont valables.
Mais
dans le cas de [Tafillin] neuves, il est exempt : Par
contre, si rien n'indique que les Tafillin aient déjà servi, et
étant donné que les Tafillin neuves pouvaient ressembler en fait
à des amulettes ou des bijoux, et que quand bien même ce serait
effectivement des Tafillin, le fait qu'elles soient neuves ne
permet pas d'être certain de leur validité (peut être que les
parchemins n'ont pas été vérifiés quand ils furent rédigés),
il n'y a pas d'obligation de les mettre pour les placer en lieu
sûr.
S'il
les trouve rangées dans des étuis ou attachées dans des
ballots, il doit rester à côté d'elles jusqu'à ce qu'il fasse
sombre, puis il peut les emporter : S'il trouve des
paires de Tafillin en très grande quantité en un même endroit,
il ne peut pas toutes les mettre, parce que sa tête et son bras
ne peuvent pas contenir tant de paires, mais il ne peut pas non
plus poursuivre sa route et les laisser là, car elles pourraient
s’abîmer. Par conséquent, sa seule option consiste à rester
assis près de ces paires de Tafillin et attendre que Shabboth
soit terminé.
Mais
dans une période de danger, il les recouvre et s'en va :
Il est expliqué dans la Gamoro` que la période de danger dont on
parle ici est la période où les Israélites étaient pourchassés
et tués par les Romains, qui avaient interdit l'observance des
Miswôth aux alentours de la révolte menée par Bar
Kôzivo` en l'an 135 de l'E.C.. Par conséquent, le fait de
surveiller des Tafillin ou d'être vu avec des Tafillin sur soi
mettait les Israélites en danger.
Surveiller
des Tafillin dans une période de danger n'est pas une obligation,
car la vie humaine prime sur toutes les Miswôth de la
Tôroh (sauf trois). On ne peut pas se mettre en danger pour des
paires de Tafillin. C'est pourquoi, si le fait de les surveiller
ou même de les mettre peut être un danger, la Mishnoh donne la
permission de d'abord les recouvrir (de terre, par exemple) de
façon à ce qu'elles ne soient pas remarquées, puis de s'en
aller et les laisser là.
|
La
Gamoro` rapporte que cette Mishnoh est liée à la question
consistant à savoir s'il est permis ou pas de mettre les Tafillin à
Shabboth, et mentionne que certains Tanno`im et `ammôro`im
soutiennent que l'argument basé sur le verset de Shamôth 13:10
ne tient pas la route, et qu'il y avait bel et bien une Miswoh
de mettre les Tafillin à Shabboth, même si les Tafillin sont un
`ôth !
La
Gamoro` conclut qu'en réalité, la seule et unique raison pour
laquelle il est « interdit » de mettre les Tafillin à
Shabboth, est que les Rabbins ont émis une Gazéroh (décret) contre
le fait de les mettre à Shabboth. Il n'y a donc pas une tradition
remontant au Sinaï selon quoi on ne doit pas mettre les Tafillin à
Shabboth ! Et pourquoi les Rabbins ont-ils émis un tel décret ?
Parce que les Tafillin font partie de ces choses que les gens
pourraient retirer et finir par porter en main, au lieu de les
mettre, transgressant ainsi la Malo khoh de porter dans le domaine
public. Et la Gamoro` explique que même d'après la position de ceux
qui soutiennent que Shabboth n'est pas un jour où l'on doit mettre
les Tafillin, celui qui le fait néanmoins
n'est pas Hayyov
(coupable) de la transgression de la Malo`khoh de porter dans le
domaine public, parce que mettre les Tafillin n'équivaut
pas à les porter, puisque les Tafillin étaient considérées comme
des vêtements (étant donné que contrairement à notre époque, on
les portait tous les jours et toute la journée) ou comme des bijoux.
Or, on ne peut être Hayyov de la Malo`khoh de porter dans le
domaine public si c'est quelque chose que les gens portent en
vêtement ou en bijoux. C'est pour cela que les Rabbins annulèrent
leur Gazéroh dans le cas de celui qui trouverait des Tafillin dans
le domaine public. Si mettre les Tafillin à Shabboth était
complètement interdit, les Rabbins n'auraient pas fait d'exception
dans ce cas-là. Ils ont tranché que dans un tel cas, on a
l'obligation de les mettre et les emporter en lieu sûr.
Mais
la Mishnoh nous explique que ce n'est le cas que lorsqu'on est
certain que ce sont bien des Tafillin, ce que l'on pouvait déterminer
grâce à la façon particulière avec laquelle le nœud de la
Tafilloh de la tête était fait. Mais si ce ne sont pas des
Tafillin, mais par exemple des amulettes que les gens portaient
également comme des Tafillin, la Gazéroh continue à s'appliquer.
Les
Tafillin de la tête étaient à l'origine beaucoup plus petites que
celles que la majorité des Juifs ont à notre époque. La Gamoro` de
´érouvin 95a explique que les deux paires de Tafillin Shal
Rô`sh dont parle la Mishnoh pouvaient être placées sur la tête
d'un homme normal. Il y a d'ailleurs une `aggodhoh très intéressante
rapportée dans la Gamoro` de Shabboth 49a, concernant un
homme que l'on surnommait אלישע
בעל כנפים « `élisho´
Ba´al Kanafayim » (`élisho´, maître des ailes) :
Et
pourquoi l'appelait-on « Ba´al Kanafayim » ?
Parce qu'à l'époque où le méchant régime Romain décréta sur
les Israélites que quiconque mettrait les Tafillin serait
décapité, `élisho´ les mettait et sortait [avec] en public !
Un soldat le vit et se mit à le poursuivre. Lorsqu'il [vit] qu'il
le rattrapait, il les retira de sa tête et les plaça dans sa
main. Le soldat lui demanda « Qu'y a-t-il dans ta
main ? » Il lui dit : « Des ailes de
colombe ! » Il ouvrit sa main et des ailes de
colombes s'y trouvaient. C'est pourquoi il fut appelé « `élisho´
Ba´al Kanafayim »
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ואמאי
קרי ליה בעל כנפים שפעם אחת גזרה מלכות
רומי הרשעה גזירה על ישראל שכל המניח
תפילין ינקרו את מוחו והיה אלישע מניחם
ויוצא לשוק ראהו קסדור אחד רץ מפניו ורץ
אחריו וכיון שהגיע אצלו נטלן מראשו
ואחזן בידו אמר לו מה זה בידך אמר לו
כנפי יונה פשט את ידו ונמצאו כנפי יונה
לפיכך קורין אותו אלישע בעל כנפים
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Les
Tafillin de la tête étaient si petites qu'elles pouvaient tenir
dans une main fermée ! Et d'après la Halokhoh, il y a une
obligation de toujours mettre les Tafillin du bras sous la manche
(contrairement à la majorité des Juifs d'aujourd'hui, qui exposent
leurs bras car la boîte de leurs Tafillin sont tellement grosses que
la manche de leur chemise est trop étroite que pour couvrir leur
bras), et elles étaient tellement plates qu'elles ressemblaient
réellement à un bijoux. De ce fait, il n'était pas évident de
déterminer ce que portait quelqu'un, s'il s'agissait de Tafillin,
d'amulettes ou de bijoux !
Ainsi,
la Gamoro` de ´érouvin 95a nous apprend qu'avant
l'instauration de cette Gazéroh, les Israélites portaient bel et
bien les Tafillin et des bijoux à Shabboth, et il n'était pas
évident de déterminer ce qu'ils avaient mis sur leur tête ou leur
bras, ou s'ils avaient mis leur Tafillin pour la Miswoh des
Tafillin ou juste comme un bijoux (puisque les Tafillin étaient bien
plus qu'un objet rituel. Elles étaient aussi des « vêtements »
ou des bijoux, tout comme le Tallith était utilisé, pas seulement
comme objet rituel, mais aussi comme manteau ou encore comme
couverture afin de se garder au chaud la nuit).
Les
gens portaient les Tafillin à Shabboth, parce que même si vous
souteniez, avant l'instauration de la Gazéroh, que Shabboth n'était
pas un jour pour mettre les Tafillin, cela ne signifiait pas qu'il
était interdit de les mettre comme bijoux, mais juste qu'en les
mettant à Shabboth on n'accomplissait pas la Miswoh des
Tafillin avec elles. Il est devenu « interdit » de mettre
les Tafillin à Shabboth seulement lorsque les Rabbins émirent une
Gazéroh, par crainte qu'étant donné que les gens pouvaient mettre
les Tafillin comme un vêtement ou un bijoux, ils finiraient par les
porter en main dans le domaine public, plutôt que de les mettre.
Il
est donc important d'insister sur le fait que mettre les Tafillin
dans ces temps-là n'avait rien à voir avec ce que nous faisons à
notre époque. La majorité des Juifs d'aujourd'hui ne les mettent
comme une Miswoh que pour Shaharith et les retirent
aussitôt après. Mais dans les temps passés, ils les mettaient dès
le matin avant de sortir en public et les gardaient sur eux toute la
journée, pour ne les retirer que le soir. De l'autre côté, il y
avait des situations dans lesquelles les retirer, ou tout simplement
ne pas les mettre, était une obligation, comme par exemple lorsqu'on
se trouve dans des lieux impurs, sales, malodorants, etc. Il fallait
également les retirer chaque fois que l'on allait dans une Béth
Hakkissé`. En outre, le Makhilto`5
rapporte que celui qui lit la Tôroh est exempt de la Miswoh
des Tafillin ! Et même d'après l'opinion de ceux qui disent
qu'en mettant les Tafillin à Shabboth on n'accomplissait pas la
Miswoh des Tafillin avec elles, la Gamoro` rapporte que si
vous aviez déjà vos Tafillin sur vous le Vendredi avant l'entrée
de Shabboth, vous n'avez pas l'obligation de les retirer,
indiquant par-là qu'avoir les Tafillin à Shabboth n'était pas un
problème en soi, ni une interdiction absolue.
Tous
ces faits nous permettent de comprendre comment des Talmidhé
Hakhomim ont pu diverger sur la pratique à suivre et
semblaient ne pas être au courant de la pratique des générations
qui les ont précédés quant au fait de mettre ou pas les Tafillin à
Shabboth, Yôm Tôv ou Hôl Hammô´édh. Voir un Talmidh
Hokhom mettre ou ne pas mettre de Tafillin (ou quelque chose
ressemblant à des Tafillin) à Shabboth ou Hôl Hammô´édh
n'indiquait rien du tout sur le fait de savoir si l'on pouvait ou ne
pouvait pas mettre les Tafillin à Shabboth, Yôm Tôv ou Hôl
Hammô´édh. En effet, cette question était laissée à
l'appréciation de chacun, et chacun avait ses propres motivations et
raisons pour les mettre ou pas. C'est comme voir un Hosidh
porter ou ne pas porter son Shtreimel tel ou tel Shabboth. Il peut
arriver que parfois il ne le mette pas pour telle ou telle raison, et
qu'un autre Shabboth il le mette pour telle ou telle raison. Et il
arrive même que pour telle ou telle raison il mette son Shtreimel
durant toute la semaine, et pas qu'à Shabboth !
C'est
pour cela que certains ont commencé à creuser dans la Tôroh pour
essayer de voir s'il leur était possible de trouver des versets sur
lesquels se baser afin de soutenir telle ou telle approche concernant
le fait de mettre ou pas les Tafillin à Shabboth et Yôm Tôv.
Certains ont utilisé le verset de Shamôth 13:10, qu'ils ont
interprété comme voulant dire que la Tôroh l'interdisait. La
majorité des `ammôro`im et, par conséquent, des Ri`shônim, ont
alors conclu que nous ne portons pas de Tafillin à Shabboth et Yôm
Tôv. Mais cela ne veut pas dire que d'après la Tôroh ou la
Halokhoh, cela soit bel et bien interdit. Et il en est de même avec
Hôl Hammô´édh.
Donc,
pour répondre à nos questions de départ, « si nous avons
une Tôroh Écrite et Orale fiable, ainsi qu'une chaîne de
transmission de la tradition, comment se fait-il que l'on ne sache
pas s'il faille mettre ou pas les Tafillin durant Hôl
Hammô´édh ? Chaque génération ne pouvait-elle pas voir et
savoir si les gens de la génération précédente mettaient ou pas
avec les Tafillin durant Hôl Hammô´édh ?
Môshah Rabbénou et Yahôshoua´ bin Noun, qui sont les premiers
maillons de la chaîne de transmission de la tradition, mettaient-ils
ou pas avec des Tafillin durant Hôl
Hammô´édh ? », il n'y
avait pas de tradition à ce sujet, et chacun faisait comme il le
sentait. On voyait des gens mettre les Tafillin (ou
quelque chose ressemblant à des Tafillin) à Hôl Hammô´édh,
pour la Miswoh ou comme bijoux, tandis que d'autres ne les
mettaient pas du tout durant cette période.
Et
ils avaient des explications diverses pour expliquer leur
comportement. C'est ainsi que de générations en générations,
depuis Môshah Rabbénou, d'innombrables explications différentes
pouvaient exister pour justifier de mettre ou ne pas mettre les
Tafillin tel ou tel jour.
Plus
tard, la seule et unique raison de mettre les Tafillin fut dans le
cadre d'une Miswoh, et non plus comme bijoux. Et les gens
finirent par ne plus les mettre qu'à des occasions particulières et
au cours d'activités bien déterminées.
En
raison de tout cela, savoir s'il fallait mettre ou pas les Tafillin
devint un énorme problème. C'est pourquoi il existe différentes
positions quant au fait de mettre ou pas les Tafillin durant Hôl
Hammô´édh. Et c'est pourquoi se baser sur la pratique des
générations précédentes n'a pas résolu le problème, puisque
déjà dans ces temps-là, il n'y avait pas une, mais plusieurs
pratiques !
Mais
d'un point de vue strictement halakhique, il n'y a aucune
interdiction à mettre les Tafillin à Shabboth (dès lors qu'on
veille à ne pas les porter en main dans le domaine public), Yôm Tôv
ou Hôl Hammô´édh.
1Shamôth
13:10
2Un
signe.
3Sur
Barokhôth 22b
4Dans
un lieu sûr
5À
la Parashath Bô`