mercredi 21 janvier 2015

Aucun code halakhique n'est supérieur au Talmoud

בס״ד

Aucun code halakhique n'est supérieur au Talmoud


Rabbî Yôséf Qa`rô זצ״ל a rédigé deux ouvrages monumentaux qui servaient à compléter le travail commencé par le Rambam זצ״ל, tout en prenant en compte les critiques de ceux qui, comme le Ra`avad זצ״ל, s'étaient opposés au Rambam. Le Ra`avad acceptait l'autorité du Mishnéh Tôroh, car c'était le tout premier code halakhique strictement basé sur le Talmoud (qui, au final, est la source ultime pour toute décision halakhique). Néanmoins, il.reprochait au Rambam d'avoir rédigé le Mishnéh Tôroh sans citer de sources pour appuyer ses décisions. À cause de cela, un autre érudit qui soutient une opinion différente de celle du Rambam (qui ne s'appuya que sur le Talmoud) n'aura aucune raison valable de changer son opinion étant donné qu'il ne connaît pas la base exacte de l'opinion du Rambam. En outre, le Ra`avad fit remarquer que le Rambam ne citait pas toutes les opinions talmudiques existant sur un sujet. S'il l'avait fait, quand bien même il aurait pris position pour une des diverses opinions mentionnées dans le Talmoud, d'autres érudits ayant étudié le Mishnéh Tôroh, auraient pu prendre en compte toutes les opinions talmudiques sur un certain sujet plutôt que de simplement s'appuyer sur la décision du Rambam.1

Rabbi Yôséf Qa`rô, dans son Késéf Mishnéh (son commentaire sur le Mishnéh Tôroh), défendit le Rambam par deux arguments :

  1. Le Rambam a clairement écrit qu'il désirait être aussi concis que possible. Par conséquent, il est évident qu'il ne pouvait mentionner toutes les opinions talmudiques dans le Mishnéh Tôroh.
  2. La publication et le style de rédaction du Mishnéh Tôroh n'empêche pas un futur érudit d'étudier par lui-même le Talmoud et suivre une opinion différente de celle choisie par le Rambam. Par contre, quelqu'un qui n'est pas érudit et est incapable de lire le Talmoud par lui-même (parce qu'il ne comprend pas l'Araméen) peut s'appuyer sur l'opinion du Rambam, tout comme un érudit qui n'a pas le temps d'examiner la Halokhoh du Talmoud par lui-même.

Il a donc rédigé à son tour deux ouvrages qui, lorsqu'ils sont lus ensemble, complète le travail du Rambam, tout en répondant aux critiques émises sur le Mishnéh Tôroh. Le premier ouvrage est le Béith Yôséf, qu'il rédigea en guise de commentaire sur le Tour, tout en s'appuyant sur les opinions du Rîf זצ״ל, du Rambam et du Rô`sh זצ״ל, qu'il considérait être les trois plus grands Rî`shônîm. Le Tour, rédigé par Rov Ya´aqôv Ba´al HaTourîm זצ״ל (un fils et disciple du Rô´sh), rassemble et classe selon une structure précise toutes les Halokhôth talmudiques pertinentes pour l'époque qui a suivi la destruction du Béith Hammiqdosh. Rabbî Yôséf Qa`rô suivit la structure du Tour dans son Béith Yôséf et donna toutes les sources talmudiques de chacune de ces lois, ainsi que toutes les opinions talmudiques divergentes n'ayant pas été citées dans le Tour.

Quelques années plus tard, Rabbî Yôséf Qa`rô rédigea le Shoulhon ´Oroukh, dans lequel il ne reporte plus les sources talmudiques sur les lois et les opinions divergentes, mais se contente simplement d'indiquer ce qu'il estime être la Halokhoh Léma´aséh (loi pratique). Un étudiant pointilleux ne peut donc pas simplement lire le Shoulhon ´Oroukh. Il doit étudier à la fois le Béith Yôséf et le Shoulhon ´Oroukh pour connaître aussi bien les différentes opinions, les raisons des Halokhôth, et pouvoir décider en pleine connaissance de cause ce qu'est la règle à suivre, car certaines décisions finales du Shoulhon ´Oroukh ne sont pas basées sur des sources talmudiques.

Aujourd'hui, beaucoup se contentent de faire des choses simplement parce que « C'est écrit dans le Shoulhon ´Oroukh », comme si tout ce qui était dit dedans était correct et ne faisait l'objet d'aucune contestation. (Or, il existe de nombreux commentaires sur le Shoulhon ´Oroukh qui ne suivent pas la règle tranchée dedans.) C'est en fait une attitude que tous les rabbins contemporains et venus peu après le Shoulhon ´Oroukh ont combattue.

Par exemple, le Rov Yôm Tôv Heller זצ״ל, auteur du « Tôsafôth Yôm Tôv » (1579-1654) a expliqué que « Rov Yôséf Qa`rô n'a jamais eu pour intention que les décisions halakhiques soient tranchées uniquement sur la base du Shoulhon ´Oroukh. Hos WaSholôm de penser une telle chose de lui ! Seul celui qui étudie le Tour avec l'explication du Béith Yôséf, et a ensuite des problèmes pour déterminer ce qui est la décision finale, peut la comprendre à partir du Shoulhon ´Oroukh. C'était là son intention, sans l'ombre du moindre doute ! »2

Quant au Maharasha זצ״ל (Rov Shamou`él Eidels, 1555-1631), il a déclaré ceci : « Ceux qui prennent des décisions halakhiques sur la base du Shoulhon `Oroukh, sans même connaître les raisons de ces décisions et sans avoir d'abord examiné le sujet sur la base de ce qu'en dit le Talmoud (c'est ce qui s'appelle שימוש תלמידי חכמים « Shîmoush Talmîdéi Hakhomîm – la façon d'apprendre des érudits »), et prennent ensuite des décisions erronées, ces gens sont considérés comme des destructeurs du monde ! »3

Aucun code halakhique n'est au-dessus du Talmoud, qui doit rester la source ultime de notre pratique et croyances religieux. Ceux qui ont les capacités de pouvoir étudier le Talmoud doivent le faire. Les codes halakhiques (Mishnéh Tôroh, Tour, Béith Yôséf, Shoulhon ´Oroukh, Mishnoh Barouroh, etc.4) ne remplacent pas le Talmoud et ne sont pas au-dessus de ce dernier, car au final, c'est le Talmoud qui est considéré être notre Tôroh Orale ! Si nous croyons qu'elle vient d'HaShem Yisbourakh, non seulement on prendra la peine de l'étudier (si on en a les capacités, ou qu'il est possible de l'étudier avec quelqu'un de plus savant), mais en outre, chaque fois que l'on sera confronté à une décision contraire à ce qui est dit dans le Talmoud, peu importe que cette décision fut prise par le Rambam, Rashî זצ״ל, le Tour, Rabbî Yôséf Qa`rô, etc., nous pencherons pour ce qui est dit dans le Talmoud ! Et si le Talmoud donne différentes opinions considérées valables, personne n'a alors le droit de juger celui qui suit telle opinion valable du Talmoud, ou celui qui suit telle autre opinion valable du Talmoud, car nos Sages ont toujours mis en avant l'importance de la diversité et le fait d'écouter tout le monde, à partir du moment où l'opinion de quelqu'un tombe dans les limites de la Halokhoh.

C'est du « Shîmoush Talmîdéi Hakhomîm » !
1Hasagôth, à la fin de l'introduction du Ra`avad sur le Mishnéh Tôroh.
2Introduction au Divréi Hamoudôth ; Ma`adanéi Yôm Tôv sur Shabboth.
3Commentaire sur Sôtoh 22b

4Ce sont tous des livres qui apportent beaucoup et sont d'une grande aide pour faciliter notre étude et nous guider, surtout lorsque quelque chose n'est pas explicite dans le Talmoud, ou que l'on fait face à une question non résolue ou post-talmudique. Mais ils ne sont pas au-dessus du Talmoud, en ce que si quelque chose a été tranché, ces livres ne peuvent contredire le Talmoud.