mercredi 13 juillet 2016

La Paroshoh avec le Ramba''m : Houqqath

ב״ה

La Paroshoh avec le Ramba''m

Parashath Houqqath


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La première section de la Parashath Houqqath nous initie aux instructions de base relatives au statut halakhique de la טֻמְאַת מֵּת « Toum`ath Méth », l' « impureté » spirituelle qui résulte d'un contact avec un cadavre. Parmi les Halokhôth qui sont traitées dans notre Paroshoh nous retrouvons celle qui concerne la טֻמְאַת אֹהֶל « Toum`ath `ôhal », qui stipule que les personnes et objets qui se trouvaient sous le même toit qu'un cadavre contractent le statut de Toum`ath Méth. La Tôroh introduit cette Halokhoh en disant1 : זֹאת, הַתּוֹרָה, אָדָם, כִּי-יָמוּת בְּאֹהֶל « Zô`th Hattôroh `odhom Ki Yomouth Ba`ôhal – Ceci est la loi/procédure [concernant] un homme qui meurt dans une tente ». Mais la Gamoro`2 cite Résh Laqqish ז״ל comme ayant offert une lecture homilétique bien connue de ce verset, par laquelle le mot הַתּוֹרָה « Hattôroh » ne se réfère non pas à « la loi » ou à « la procédure », mais plutôt à l'étude de la Tôroh. Résh Laqqish lit notre verset comme sous-entendant ceci : אין דברי תורה מתקיימין אלא במי שממית עצמו עליה « Les paroles de la Tôroh ne se maintiennent qu'en celui qui se tue pour elle ». La situation décrite concernant un homme qui « meurt dans une tente » pourrait être prise comme faisant allusion à un étudiant qui « se tue » dans la « tente » de l'académie. Et le verset commence par les mots זֹאת, הַתּוֹרָה « Zô`th Hattôroh – Ceci est la Tôroh », suggérant par-là qu'il s'agit du seul moyen possible d'acquérir une connaissance profonde de la Tôroh.

Le Ramba''m ז״ל cite ce passage talmudique dans son Mishnéh Tôroh, lorsqu'il décrit le mode de vie requis de מִי שֶׁנְּשָׂאוֹ לִבּוֹ לְקַיַּם מִצְוָה זוֹ כָּרָאוּי לָהּ, וְלִהְיוֹת מֻכְתָּר בְּכִתְרָהּ שֶׁלַּתּוֹרָה « Celui dont le cœur l'a inspiré à accomplir cette Miswoh [de l'étude de la Tôroh] comme elle devrait l'être et se faire couronner de la couronne de la Tôroh ».3 Il écrit ceci4 :

12. Les paroles de Tôroh ne se maintiendront pas dans celui qui s'y applique faiblement, ni dans ceux qui étudient au milieu du plaisir et au milieu de la nourriture et de la boisson. [Elles ne se maintiendront] plutôt que dans celui qui renonce à lui-même pour elles, restreignant constamment son corps, et n'accordant pas de sommeil à ses yeux, ni la torpeur à ses paupières.
יב  אֵין דִּבְרֵי תּוֹרָה מִתְקַיְּמִין בְּמִי שֶׁמַּרְפֶּה עַצְמוֹ עֲלֵיהֶן, וְלֹא בְּאֵלּוּ שֶׁלּוֹמְדִין מִתּוֹךְ עִדּוּן וּמִתּוֹךְ אֲכִילָה וּשְׁתִיָּה--אֵלָא בְּמִי שֶׁמֵּמִית עַצְמוֹ עֲלֵיהֶן, וּמְצַעֵר גּוּפוֹ תָּמִיד, וְלֹא יִתֵּן שְׁנַת לְעֵינָיו, לְעַפְעַפָּיו תְּנוּמָה
13. Les Sages ont dit par la voie de l'allusion : « ''Ceci est la Tôroh : l'homme qui mourra dans une tente''5 ; [c'est-à-dire,] la Tôroh ne sera préservée qu'en celui qui se tue dans les tentes de la sagesse ».
יג  אָמְרוּ חֲכָמִים דֶּרֶךְ רְמָז, "זֹאת, הַתּוֹרָה, אָדָם, כִּי-יָמוּת בְּאֹהֶל" --אֵין הַתּוֹרָה מִתְקַיֶּמֶת, אֵלָא בְּמִי שֶׁמֵּמִית עַצְמוֹ בְּאָהֳלֵי הַחָכְמָה

D'après le Ramba''m, lorsque Résh Laqqish parle de quelqu'un qui « se tue » pour la Tôroh, le se réfère au fait de se priver de confort et de luxe. Celui qui souhaite réellement לִהְיוֹת מֻכְתָּר בְּכִתְרָהּ שֶׁלַּתּוֹרָה « être couronnée de la couronne de la Tôroh » doit être prêt à se soumettre à un degré d'inconfort dans sa quête de maîtrise de l'immense corpus que constitue la connaissance de la Tôroh.

Comment est-il possible de réconcilier ces commentaires du Ramba''m avec une Mishnoh que l'on retrouve dans le dernier chapitre de `ovôth ?6 Là, la Mishnoh énumère les quarante-huit choses par lesquelles la Tôroh est acquise, et inclut dans cette liste la condition de יִשׁוּב « Yishouv ». D'après de nombreux commentateurs, « Yishouv » se réfère au יִשׁוּב הַדָּעַת « Yishouv Haddo´ath », c'est-à-dire à l'esprit tranquille. Une bonne concentration sur ce que l'on étudie nécessite une tranquillité d'esprit. Un étudiant qui doit constamment se soucier de ses besoins de base ne pourra pas prendre le temps et avoir la concentration nécessaire pour maîtriser un corpus si large composé de lois complexes et si nombreuses. Comment le Ramba''m peut-il donc exiger que l'étudiant sérieux « se tue » מְצַעֵר גּוּפוֹ תָּמִיד, וְלֹא יִתֵּן שְׁנַת לְעֵינָיו, לְעַפְעַפָּיו תְּנוּמָה « restreignant constamment son corps, et n'accordant pas de sommeil à ses yeux, ni la torpeur à ses paupières » ?

En fait, le Ramba''m instruit dans ce passage l'étudiant sérieux sur la façon par laquelle il pourra libérer son esprit pour correctement se concentrer sur ses études. Tout simplement, l'étudiant doit baisser ses attentes dans le domaine du confort physique ; il doit accorder au luxe et aux plaisirs une importance secondaire, et orienter son ambition et son énergie exclusivement sur l'acquisition de la connaissance de la Tôroh. C'est précisément à travers le fait d'avoir sacrifier le confort et le luxe qu'un étudiant pourra atteindre le niveau désiré de « Yishouv Haddo´ath », puisqu'il est capable de se satisfaire d'un confort limité et se détacher des choses superflues.

Il est clair de la façon dont le Ramba''m a organisé ses Hilkôth Talmoudh Tôroh qu'il n'attend pas cela de tout à chacun. Peu avant, il avait écrit que chaque Israélite a seulement l'obligation de se réserver un peu de temps durant la journée et durant la nuit pour l'étude de la Tôroh.7 Néanmoins, bien qu'étudier un peu le matin et la nuit soit le minimum requis, la valeur qu'il y a à « se tuer » pour l'étude de la Tôroh est applicable même à ceux qui sont au niveau minimum. L'attachement à l'étude de la Tôroh, peu importe le niveau auquel on se trouve, implique nécessairement un certain degré de sacrifie. Il nous est enjoint de nous détacher de toute autre occupation (comme par exemple les activités professionnelles, récréatives ou encore sociales) au moins le temps d'étudier la Tôroh. Même si la majorité d'entre nous ne nous « tuons » pas de la façon décrite par le Ramba''m, nous sommes toutefois tous inclus dans l'obligation de faire des sacrifices pour l'étude de la Tôroh, de nous priver d'un certain degré de luxe et de plaisir afin de nous réserver du temps pour l'étude.

1Bamidhbor 19:14
2Shabboth 83b
3Hilkôth Talmoudh Tôroh 3:5
4Ibid., 3:12-13
5Bamidhbor 19:14
6`ovôth 6:5 (6:6, dans d'autres éditions)

7Hilkôth Talmoudh Tôroh 1:11