lundi 14 novembre 2016

Couvrir sa tête constamment

ב״ה

Exposer les fausses notions

Est-il réellement défendu à un homme de ne pas couvrir sa tête ?


Cet article peut être téléchargé ici.

L'un des mythes les plus répandus par le judaïsme dit « orthodoxe » est que les hommes auraient une obligation religieuse d'avoir constamment la tête couverte, que ce soit lorsqu'ils sont seuls chez eux ou en public. Ils prétendent même qu'il serait défendu de faire la moindre bénédiction en ayant la tête découverte, ou encore de parcourir ne serait-ce que quatre `ammôth (1,80 mètre) la tête découverte. C'est pour toutes ces raisons que vous ne verrez jamais un Juif qui se dit « Orthodoxe » la tête découverte. Il porte toujours soit uniquement une Kippoh/Yarmoulko`/Kappele (vous l'appelez comme vous le voulez), soit une Kippoh/Yarmoulko`/Kappele avec un chapeau par-dessus, soit encore une Kippoh/Yarmoulko`/Kappele avec un Shtreimel par-dessus (généralement pour le Shabboth et Yôm Tôv chez les Hasidhim). Mais est-ce réellement la Halokhoh telle que nous l'avons reçue de nos Sages, de mémoire bénie ?

Les « Orthodoxes » citent généralement comme Halokhoh Rabbi Yôséph Qa`rô ז״ל, qui a écrit ceci dans son Shoulhon ´oroukh1 : ולא ילך ארבע אמות בגילוי הראש (מפני כבוד השכינה « Et il ne parcourra pas quatre `ammôth la tête découverte (par respect pour la Shakhinoh). » Ils vous diront donc qu'étant donné que c'est écrit dans le Shoulhon ´oroukh c'est qu'il y aurait une obligation de respecter cette règle (alors qu'il y a de nombreuses règles mentionnées dans le Shoulhon ´oroukh qu'ils ne respectent pas, comme nous l'avons démontré à maintes reprises à travers divers articles). Mais sur quoi cela repose-t-il ?

Voici ce que nous lisons dans l'ouvrage intitulé « Shoulhon ´oroukh Hammaqousér »2 (qui est un abrégé du Shoulhon ´oroukh reprenant les us et coutumes des communautés juives yéménites s'étant détournées en pratiques originelles des Yahoudhé Témon et du Mishnéh Tôroh pour adopter le Shoulhon ´oroukh et bon nombre des pratiques séfarades) :

Il est défendu de parcourir quatre `ammôth ou de faire sortir de sa bouche une parole de sainteté la tête découverte. Les mineurs aussi il est nécessaire de les habituer à couvrir leurs têtes afin qu'ils aient la crainte des Cieux, comme ce que nous trouvons au sujet de Rov Nahmon bar Yishoq : les astrologues [Chaldéens] avaient dit à sa mère que son fils serait un voleur. Et elle ne le laissait pas découvrir sa tête et lui disait de couvrir sa tête afin que la crainte des Cieux soit sur lui. Et c'est une mesure de piété d'avoir sa tête couverte durant la nuit comme durant le jour, c'est-à-dire pendant que l'on dort. Et on s'est accoutumé ainsi.
אסור לילך ארבע אמות, או להוציא מפיו דבר שבקדושה, בגילוי הראש. וגם הקטנים צריך להרגילם לכסות ראשם, כדי שיהיו יראי־שמים. וכמו שמצינו ברב נחמן בר יצחק, שאמרו החוזים בכוכבים לאמו שבנה יהיה גנב. ולא הניחתו לגלות ראשו, והיתה אומרת לו שיכסה ראשו כדי שתהיה עליו יראת שמים. ומדת חסידות להיות ראשו מכוסה בלילה כמו ביום דהיינו בשעת שינה, וכן נוהגים

Ce paragraphe susmentionné fait référence à une histoire rapportée dans le Talmoudh3 pour justifier le fait d'éduquer les enfants à eux aussi se couvrir constamment la tête. Or, ce récit talmudique fut précisément rapporté pour nous faire comprendre qu'il s'agissait là d'un acte exceptionnel, qui n'était pas la norme ! Que se couvrir la tête constamment n'était pas la norme même pour les adultes dans les temps talmudiques se démontre aisément. Dans un autre passage du Talmoudh nous lisons ceci4 :

Ribbi Yahôshoua´ ban Léwi a dit : « Il est défendu à un homme de parcourir quatre `ammôth dans une posture droite5, ainsi qu'il est dit6 : ''La terre entière est remplie de Sa gloire''. » Rov Houno`, le fils de Rov Yahôshoua´, ne parcourait pas quatre `ammôth la tête découverte. Il disait : « La Shakhinoh est au-dessus de ma tête ! »
אמר רבי יהושע בן לוי אסור לאדם שיהלך ארבע אמות בקומה זקופה שנא' מלא כל הארץ כבודו רב הונא בריה דרב יהושע לא מסגי ארבע אמות בגילוי הראש אמר שכינה למעלה מראשי

De ce passage, il apparaît clairement que ce qui a été défendu est le fait de parcourir quatre `ammôth en donnant une impression d'arrogance. Sur base de cette interdiction, Rov Houno` ז״ל s'imposa lui-même la rigueur de ne jamais parcourir quatre `ammôth en ayant la tête découverte, de façon à constamment être animé d'un sentiment d'humilité et ne jamais en arriver à avoir un comportement hautain ou arrogant. De par le fait que le Talmoudh prenne le temps de nous décrire ce que faisait Rov Houno` il ressort plus que clairement que l'écrasante majorité des gens n'agissaient pas comme lui, et que ce n'était qu'une Houmroh personnelle !

Dans un autre passage talmudique7, il est rapporté que Rov Houno`, toujours, demanda à être béni pour n'avoir jamais parcouru quatre `ammôth la tête découverte. Là encore, il est plus qu'évident que si le Talmoudh le rapporte c'est que c'était un comportement exceptionnel que l'on ne voyait pas chez tout le monde, ou la majorité des gens.

Ailleurs dans le Talmoudh8, il est rapporté que Rov Hisdo` ז״ל fit à Rov Houno` (encore lui) l'éloge de Rov Hamnouno` ז״ל pour sa grandeur. Rov Houno` demanda à Rov Hisdo` de le prévenir la prochaine fois que Rov Hamnouno` lui rendrait visite, afin qu'il puisse également le rencontrer. Lorsqu'il le vit, Rov Houno` remarqua que Rov Hamnouno` ne portait pas de turban sur sa tête, et il lui demanda « Comment se fait-il que tu n'aies pas de turban sur ta tête ? » Il lui répondit : « C'est parce que je ne suis pas encore marié ! » Sur ce, Rov Houno` détourna son regard de Rov Hamnouno` et déclara : « Prends garde à ne plus te présenter devant moi avant que tu ne sois marié ! » De ce passage, nous voyons qu'à Babylone, il y avait un Minhogh selon quoi les hommes mariés devaient couvrir leurs têtes d'une certaine façon, et cela sous-entend que les hommes non mariés ne couvraient pas leurs têtes. Mais rien n'est dit sur le fait que les hommes mariés avaient constamment ce couvre-chef sur leurs têtes. Au contraire, le Talmoudh insiste à plusieurs reprises pour nous dire que l'attitude de Rov Houno` faisait partie des cas d'exception. En d'autres mots, bien qu'à Babylone on ne commençait à se couvrir la tête qu'une fois marié, il n'y avait néanmoins pas d'obligation pour un homme marié de toujours avoir sur sa tête un couvre-chef.

Par contre, en `Aras Yisro`él, aussi bien les hommes mariés que ceux qui ne l'étaient pas pouvaient porter un turban. Nous le voyons notamment de part la bénédiction que HaZa''L ont demandé de faire lorsqu'on met son turban sur la tête le matin.9 Néanmoins, le porter constamment n'était pas non plus une obligation. Par contre, c'était la pratique des Talmidhé Hakhomim d'avoir presque tout le temps la tête couverte en public. Quant aux autres, cela n'était recommandé que pour la prière. C'est ainsi que le Ramba''m ne mentionne jamais une obligation de se couvrir la tête même dans le contexte de la prière et précise qu'avoir constamment la tête couverte en public n'est exigé que pour les Talmidhé Hakhomim. Mais certaines personnes pour vous convaincre que se couvrir la tête lorsque l'on prie est une obligation halakhique vous citerons le passage suivant du Mishnéh Tôroh du Ramba''m10 : וְלֹא יַעֲמֹד לַתְּפִלָּה בַּאֲפֻנְדָּתוֹ, וְלֹא בְּרֹאשׁ מְגֻלֶּה « On ne se lèvera pas pour la prière [uniquement] dans son tricot de corps, ni avec la tête découverte. » Ils vous diront : « Vous voyez, même le Ramba''m écrit que l'on doit se couvrir la tête en priant. » Mais ce qu'ils ne vous disent pas est que le chapitre 5 des Hilkôth Taphilloh Ouvirakhath Kôhanim est consacré à des pratiques liées à la prière qui ne sont que recommandées mais ne sont pas obligatoires en elles-mêmes. C'est ainsi qu'à la Halokhoh 1, il écrit ceci :

Celui qui prie a besoin de veiller à huit choses, et les accomplir. Mais s'il était dans une situation de difficulté, ou dans un cas de force majeure, ou qu'il a transgressé et ne les a pas accomplies, cela n'empêche pas [la prière d'être valide]. Et les voici : 1) être debout, 2) la direction du Sanctuaire, 3) la préparation du corps, 4) la préparation de la tenue, 5) la préparation du lieu, 6) le contrôle de la voix, 7) l'inflexion, et 8) la prosternation.
שְׁמוֹנָה דְּבָרִים, צָרִיךְ הַמִּתְפַּלֵּל לְהִזָּהֵר בָּהֶן וְלַעֲשׂוֹתָן; וְאִם הָיָה דָּחוּק, אוֹ נֶאֱנָס, אוֹ שֶׁעָבַר וְלֹא עָשָׂה אוֹתָן--אֵינָן מְעַכְּבִין. וְאֵלּוּ הֶן--עֲמִידָה, וְנֹכַח הַמִּקְדָּשׁ, וְתִקּוּן הַגּוּף, וְתִקּוּן הַמַּלְבּוּשׁ, וְתִקּוּן הַמָּקוֹם, וְהַשְׁוָיַת הַקּוֹל, וְהַכְּרִיעָה, וְהַהִשְׁתַּחֲוָיָה

La recommandation de couvrir sa tête en priant est inclue par le Ramba''m au point 4, celui qui concerne la préparation de la tenue. Mais bien que cela soit fortement recommandé, celui qui n'aura pas couvert sa tête, que ce soit volontairement ou involontairement, sa prière reste valable. Pourquoi ? Parce que du point de la vue de la Halokhoh, il n'y a que deux parties du corps qu'il est obligatoire de couvrir lorsqu'on fait la prière : les parties génitales et la poitrine. C'est ainsi qu'au chapitre 4, qui rapporte les règles obligatoires (et non des recommandations, contrairement au chapitre 5), le Ramba''m écrit ceci :

7. Le recouvrement de la nudité : Comment [s'applique-t-elle] ? Même si on a couvert sa nudité de la manière dont on la couvre pour la récitation du Shama´11, on ne doit pas prier tant que l'on n'aura pas couvert son cœur12. Et si on n'a pas couvert son cœur, ou qu'on est dans une situation de contrainte, puisqu'on a couvert sa nudité et prié, on est quitte. Mais Lakhattahilloh, on ne le fera pas.
ז  כִּסּוּי הָעֶרְוָה כֵּיצַד: אַף עַל פִּי שֶׁכִּסָּה עֶרְוָתוֹ כְּדֶרֶךְ שֶׁמְּכַסֶּה לְקִרְיַת שְׁמַע, לֹא יִתְפַּלַּל, עַד שֶׁיְּכַסֶּה אֶת לִבּוֹ; וְאִם לֹא כִסָּה לִבּוֹ, אוֹ שֶׁנֶּאֱנַס וְאֵין לוֹ בְּמַה יְכַסֶּה, הוֹאִיל וְכִסָּה עֶרְוָתוֹ וְהִתְפַּלַּל, יָצָא; וּלְכַתְּחִלָּה, לֹא יַעֲשֶׂה

Cela se trouve dans le Talmoudh lui-même, que la seule chose exigée lorsque l'on prie est de couvrir ses parties génitales et aussi, de préférence, sa poitrine.13

Pour de plus amples informations, je vous renvoies à la lecture de la série d'articles intitulés « Les lois relatives à la prière », que vous pourrez trouver sur le blog sur la colonne de droite, et dans lesquels on été détaillées chacune des Halokhôth des six premiers chapitres des Hilkôth Taphilloh Ouvirakhath Kôhanim..

De tout cela, nous pouvons clairement voir qu'il n'y a aucune obligation pour un homme d'avoir constamment la tête couverte, aucune obligation non plus de la couvrir même pour la prière (et encore moins pour réciter des bénédictions), et pas d'interdiction de parcourir quatre `ammôth sans rien sur la tête.

Notez que seuls des individus d'une extrême piété et crainte des Cieux se couvraient constamment la tête dans les temps talmudiques, car ce n'est pas quelque chose qui est à la portée du premier venue. Malheureusement, de nos jours, étant donné que tout le monde, sous la pression « orthodoxe », a pris l'habitude de se couvrir constamment la tête pour indiquer qu'il est religieux ou pratiquant, nous voyons énormément de personnes, même (et surtout) parmi les Harédhim/Hasidhim qui commettent des péchés terribles même en ayant la tête couverte ! Rien que ce seul fait démontre à lui tout seul qu'il n'existe aucun lien de causalité entre le fait de se couvrir la tête et le niveau de religiosité de quelqu'un. En d'autres mots, ce n'est pas parce que quelqu'un se couvre la tête que tout d'un coup il est un être d'une piété extraordinaire. En réalité, à moins d'avoir atteint à niveau spirituelle réellement élevé, comme celui de Rov Houno`, il pourrait être un Hilloul HaShem de constamment se couvrir la tête ; puisque c'est le symbole de la crainte des Cieux exceptionnelle d'une personne, commettre des fautes la tête couverte est pire que les commettre la tête découverte.

Il serait de loin préférable que l'écrasante majorité des Juifs n'aient pas constamment la tête couverte, que ce soit en privé ou en public, parce qu'ils donnent d'eux une image qui est complètement fausse ou pas en phase avec qui ils sont vraiment ! (Voir l'article intitulé « Dis peu mais fais beaucoup. ») Beaucoup d'hommes se sentent oppressés par la pression communautaire, qui les oblige à se couvrir tout le temps la tête, même lorsqu'ils comprennent au fond d'eux qu'ils ne sont pas au niveau requis pour le faire. Certains développent une grande hypocrisie en se couvrant la tête en public pour être tranquille, mais restent têtes découvertes à la maison. Ce n'est pas pour rien que dans le Talmoudh et le Mishnéh Tôroh l'acte de couvrir la tête n'a pas été demandé à tous, mais uniquement aux Talmidhé Hakhomim. Il est plus qu'essentiel de comprendre cela.

La prochaine fois que vous vous trouverez quelque part sans rien sur la tête et désirez faire une bénédiction, ne faîtes pas comme ceux qui ridiculisent sans le savoir notre foi en plaçant leur main ou un mouchoir sur la tête pour pouvoir faire une bénédiction. C'est un acte complètement stupide et inutile. Gardez donc à l'esprit qu'en dépit de tous les discours que vous entendez auprès des « Orthodoxes », il n'existe aucune interdiction de prononcer une bénédiction sans s'être couvert la tête, tout comme vous ne faîtes rien de mal à paraître en public la tête découverte.

N'oubliez pas que les voies de la Tôroh ne sont que délices et plaisirs et que tous ses sentiers ne mènent qu'à la paix14, et non à la frustration, à l'hypocrisie ou à l'imposture !

1`ôrah Hayim 2:4
2`ôrah Hayim 3:5
3Shabboth 156b
4Qiddoushin 31a
5C'est-à-dire d'une façon arrogante
6Yasha´yohou 6:3
7Shabboth 118b
8Qiddoushin 29b
9Barokhôth 60b
10Hilkôth Taphilloh Ouvirakhath Kôhanim 5:5
11C'est-à-dire, en couvrant les parties génitales, qui est le minimum requis pour pouvoir réciter le Shama´.
12C'est-à-dire, sa poitrine.
13Voir Barokhôth 24b-25a

14Mishlé 3:17