mardi 15 septembre 2015

Le jeûne de Gadhalyoh

ב״ה

Le jeûne de Gadhalyoh


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Le jeûne de Gadhalyoh est un jour mis à part dans notre calendrier pour commémorer l'assassinat de Gadhalyoh ban `ahiqom ע״ה, le fonctionnaire Israélite désigné par Babylone et chargé d'administrer la population israélite restée en Judée après la destruction du Béth Hammiqdhosh et l'exil en l'an 586 avant l’Ère Courante. Il est observé le 3 Tishri par un jeûne du lever au coucher du soleil, et, comme pour tous les autres jeûnes, par une prière particulière (le עננו « ´anénou ») et la lecture de passages bibliques spécifiques (Shamôth 32:14, 34:1-10). Les années où Rô`sh Hashonoh (qui dure deux jours) tombe un Mercredi soir, le jeûne est reporté au Dimanche, étant donné qu'à l'exception de Yôm Hakkippourim il nous est interdit de jeûner à Shabboth.

Ce jour de jeûne est mentionné à deux reprises dans le livre du Prophète Zakharyoh ע״ה :

Zakharyoh 7:4-5
La parole de `adhônoy Savo`ôth me parvint en dosant : « Dis à tout le peuple du pays et aux Kôhanim, savoir : Quand vous avez jeûné et pleuré le cinquième et le septième mois, et cela depuis 70 ans, est-ce pour Moi que vous avez jeûné ? »
ויהי דבר-יהוה צבאות, אלי לאמר. אמר אל-כל-עם הארץ, ואל-הכהנים לאמר: כי-צמתם וספוד בחמישי ובשביעי, וזה שבעים שנה--הצום צמתני, אני

Ibid., 8:18-19
La parole de `adhônoy Savo`ôth me parvint en disant : « Ainsi dit `adhônoy Savo`ôth : Le jeûne du quatrième mois, le jeûne du cinquième, le jeûne du septième et le jeûne du dixième, seront pour la maison de Yahoudhoh une réjouissance et une allégresse et des solennités joyeuses ; mais chérissez la vérité et la paix ».
ויהי דבר-יהוה צבאות, אלי לאמר. כה-אמר יהוה צבאות, צום הרביעי וצום החמישי וצום השביעי וצום העשירי יהיה לבית-יהודה לששון ולשמחה, ולמעדים, טובים; והאמת והשלום, אהבו

Dans ces deux passages, le jeûne de Gadhalyoh est appelé צום השביעי « le jeûne du septième [mois] », tout simplement parce que Tishri est le septième mois de notre calendrier.

Les événements ayant amené à l'institution de ce jeûne sont rapportés en détails dans la Bible, une première fois dans 2 Malokhim Chapitre 25 et une seconde fois dans Yirmayohou Chapitres 40 et 41.

Gadhalyoh ban `ahiqom faisait partie des chefs de sa génération. Mais ce que peu savent, c'est qu'il était également reconnu et compté parmi les Prophètes. Quant au symbolisme de cet assassinat, il marquait la fin de la monarchie judéenne, et mena à la destruction de ce qu'il restait de peuplement israélite en Terre Sainte. Tout cela se produisit peu après que le Béth Hammiqdhosh ne soit détruit. Cela renforça le sentiment de désespoir, et c'est pourquoi, le jour de son assassinat fut élevé au rang de jour de deuil national.

Les Sages et les Prophètes décrétèrent un jour de jeûne pour commémorer l'assassinat de Gadhalyoh. Et pourtant, ce jeûne a toujours semblé quelque peu déroutant par rapport aux autres jeûnes dits « rabbiniques ». Les autres jeûnes rabbiniques sont tous liés à des catastrophes nationales (réelles ou potentielles) profondes : les jeûnes du 10 Tévéth, du 17 Tammouz et du 9 `ov sont tous connectés à la destruction du centre spirituel national, le Béth Hammiqdhosh. Quant au jeûne d'Esther, il se rapporte au « miracle caché » de la survie du peuple juif face à une extermination de masse programmée de longue date. À l'inverse, le jeûne de Gadhalyoh semble relativement petit, puisqu'il ne se rapporte qu'au minuscule reste du peuple israélite qui avait pu rester en Terre Sainte après la destruction du Béth Hammiqdhosh et de la Ville Sainte, ce qui, à première vue, n'a pas d'impact historique comparable.

Dans son Mishnéh Tôroh, aux Hilkhôth Ta´aniyôth 5:1, le Ramba''m זצ״ל discute du concept général de jeûner lors des jours de tragédie nationale afin d'éveiller nos cœurs à la repentance. Puis, dans Ta´aniyôth 5:2, il commence la liste de ces jours de jeûne par une référence au jeûne de Gadhalyoh : ואלו הן: יום שלושה בתשרי--שבו נהרג גדליה בן אחיקם « Et les voici : le troisième jour dans [le mois de] Tishri, où Gadhalyoh ban `ahiqom fut tué ». Et voici ce que nous disent les Sages dans le Talmoudh Bavli1 et Yarousholmi2 : צום השביעי זה ג' בתשרי שבו נהרג גדליה בן אחיקם ומי הרגו ישמעאל בן נתניה הרגו ללמדך ששקולה מיתתן של צדיקים כשריפת בית אלהינו « Le jeûne du septième [mois] est le troisième [jour] dans [le mois de] Tishri, où Gadhalyoh ban `ahiqom fut tué. Et qui l'a tué ? Yishmo´`él ban Nathanyoh l'a tué. [Et un jeûne fut décrété ce jour-là] afin que tu apprennes que la mort des justes est comparable à la destruction par le feu de la maison de notre Dieu ».

Le Ramba''m poursuit et introduit alors une idée nouvelle qui n'est pas mentionnée ici dans le Talmoudh, mais qui magnifie l'impact historique de cet événement. Il écrit : יום שלושה בתשרי--שבו נהרג גדליה בן אחיקם, ונכבת גחלת ישראל הנשארה, וסיבב להתם גלותן « le troisième jour dans [le mois de] Tishri, où Gadhalyoh ban `ahiqom fut tué ; et la braise de ce qui restait d'Israël s'est éteinte, ce qui scella leur exil ».

Sur la base de cette déclaration du Ramba''m, le Maharsha''` זצ״ל (Rabbi Shamou`él `ali´azar `édels, 1555-1631) explique que nous ne jeûnons pas en ce jour seulement parce que Gadhalyoh a été tué. Il est vrai que l'assassinat de Gadhalyoh en lui-même fut une tragédie, car c'était un Saddiq. Mais c'est à cause de l'effet qu'a eu sa mort (tous les Juifs quittèrent la Terre Sainte et allèrent en exil) que nous jeûnons. Nous voyons à quel point la mort d'un Saddiq est une tragédie par le fait que le Prophète Zakharyoh cita le jeûne de Gadhalyoh aux côtés des autres jeûnes institués pour commémorer la destruction du Béth Hammiqdhosh. Le dénominateur commun entre ces quatre jeûnes cités dans le verset est le fait que l'étendu de la tragédie de chacun d'eux est équivalent, parce que la mort d'!un Saddiq est au même niveau que la destruction du Béth Hammiqdhosh. Mais bien que ce soit le cas, nous ne jeûnons pas, et ne pourrions de toute façon pas le faire, chaque jour qu'un Saddiq meurt. Nous sommes donc contraint d'admettre que les conséquences de la mort de Gadhalyoh sont sans pareilles par rapport au décès d'autres Saddiqim, car la mort de Gadhalyoh a mis fin à la présence israélite en Terre Sainte et scellé complètement l'exil.

Mais il y a un autre aspect de ce jeûne que nous nous devons de considérer. La Bible nous explique que Gadhalyoh fut averti du fait que Yishmo´`él ban Nathanyoh complotait pour le tuer, mais Gadhalyoh ne fit rien. Bien au contraire, plutôt que de prendre en compte cette information et prendre les mesures appropriées, il la considéra comme du Loshôn Horo´ (médisance). Et il fut tué en raison de son inaction. Les effets de cette inaction se répandirent et touchèrent des milliers d'autres Israélites. Peut-être que Gadhalyoh refusa de croire ce rapport qui lui avait été fait parce qu'il pensait inimaginable que se réalisent complètement les prophéties qui annonçaient que les Israélites iraient en exil. Cela eut pour conséquence de se croire invulnérable. Les effets de son inaction furent si graves que le Talmoudh considère Gadhalyoh comme étant celui qui a tué tous les autres Israélites :

Talmoudh, Niddoh 61a
Il a été enseigné : `abbo` Sho`oul a dit : Il est une fois arrivé qu'une gaine à Béth Hôrôn fut laissée dans un état d'impureté présomptif, et les Sages ne parvenaient pas à correctement l'examiner, parce que sa zone était large. Mais il y avait là un homme âgé qui s’appelait Rébbi Yahôshoua´ ban Hananyoh qui leur dit : « Apportez-moi quelques feuilles ! ». Ils lui apportèrent des feuilles et il les trempa dans l'eau et les étendit sur la gaine. La zone pure resta sèche, tandis que la zone impure devint humide. Et l'ayant examinée, ils trouvèrent une grande fosse remplie d'ossements. Quelqu'un a enseigné qu'il s'agit de la fosse que Yishmo´`él a remplie des cadavres de ceux qui ont été abattus, car il est écrit3 : « La fosse dans laquelle Yishmo´`él jeta tous les cadavres des gens qu'il avait abattus par la main de Gadhalyoh ». Mais est-ce Gadhalyoh qui les a tués ? N'était-ce pas Yishmo´`él qui les a tués ? Plutôt, étant donné qu'il aurait dû prendre en considération le conseil de Yôhonon ban Qoréah, mais qu'il ne l'a pas pris en considération, l’Écriture le considère comme s'il les avait tués.
תניא אבא שאול אומר מעשה בסלע בית חורון שהיו מחזיקין בה טומאה ולא יכלו חכמים לבדוק מפני שהיתה מרובה והיה שם זקן אחד ורבי יהושע בן חנניא שמו אמר להן הביאו לי סדינים הביאו לו סדינים ושראן במים ופרסן עליהם מקום טהרה יבש מקום טומאה לח ובדקו ומצאו בור גדול מלא עצמות תנא הוא הבור שמילא ישמעאל בן נתניה חללים דכתיב והבור אשר השליך שם ישמעאל את כל פגרי אנשים אשר הכה ביד גדליה וכי גדליה הרגן והלא ישמעאל הרגן אלא מתוך שהיה לו לחוש לעצת יוחנן בן קרח ולא חש מעלה עליו הכתוב כאילו הרגן

C'est aussi ce que nous dit le Yarousholmi ! Gadhalyoh a causé sa propre mort. Il était le seul à blâmer, non seulement pour sa propre mort, mais également pour celle de milliers d'autres.

Le futur du peuple d'Israël était entre les mains de ce grand Saddiq. Les décisions qu'il prenait était d'une énorme importance. En dépit de sa grandeur et piété, et malgré qu'il était un prophète d'HaShem, nos Sages nous disent clairement qu'il a commis une erreur cruciale. Il a refusé de faire ce qu'il fallait lorsqu'il fut averti par Yôhonon ban Qoréah du complot fomenté contre lui. Les conséquences furent dramatiques. Lui et tous ses hommes furent brutalement massacrés.

Nos Sages placent toute la faute de cette tragédie sur Gadhalyoh. L'avertissement qu'il avait reçu aurait dû être écouté. S'il l'avait fait, des milliers de vie aurait été épargnées et les Israélites auraient pu continuer à vivre en Terre Sainte pacifiquement sous les Babyloniens.

Tous ces événements se reproduisent à notre époque, quoique différemment, avec la grande hérésie de notre génération, le sionisme ! Nos Sages, par l'inspiration Divine qui les animait, nous ont averti que depuis que l'exil a été divinement décrété, les Juifs ne doivent plus tenter de rétablir la moindre souveraineté en Terre Sainte, ni même d'y monter en masse. La conséquence du non respect du décret de l'exil sera que les Juifs deviendront des proies pour les nations du monde, qui nous traiteront comme du gibier. Si les sionistes et les rabbins qui les soutiennent avaient écouté cet avertissement et respecté le décret de l'exil, nous n'aurions pas connu la majorité des drames actuels, la haine du Juif n'aurait pas atteint le niveau dramatique que l'on connaît aujourd'hui, et des milliers de vies auraient été épargnées. Ils pleurent et mettent tout sur le dos des non Juifs, les accusant de tous les maux, d' « antisémitisme », d'assassins, etc., mais ils sont ceux qui ont provoqué tous ces événements et ce déferlement de haine et de violence. Ce sont eux, et les rabbins qui les soutiennent, qui sont à blâmer pour la mort de milliers de gens depuis que les sionistes ont désiré un État. Ce sont eux qu'il faut premièrement blâmer pour les attaques contre les Juifs en Terre Sainte ou ailleurs. Ce sont eux qui ont creusé les tombes de tous ceux qui sont tombés depuis qu'ils ont entrepris de se rebeller contre Dieu et Ses décrets !

Par notre repentance véritable, puissions-nous prochainement connaître la réalisation de la prophétie annonçant que ces jours de jeûne se transformeront en occasion de joie et d’allégresse, en fêtes solennelles, avec la venue de notre juste Messie. Mais comme le dit le Prophète, en attendant que cela se produise, chérissons la vérité et la paix !

1Rô`sh Hashonoh 18b
2Ta´anith 4:5

3Yirmayohou 41:9

mercredi 2 septembre 2015

Le turban dans la tradition juive

ב״ה

Le turban dans la tradition juive


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Il arrive fréquemment que des gens (Juifs ou pas) se demandent pourquoi les hommes Juifs portent une Kippoh/Yarmoulko` sur leurs têtes. Les réponses classiques les plus données à cette question sont :
  • c'est un rappel constant du fait que les Juifs doivent se soumettre au Créateur, qui est au-dessus d'eux ;
  • c'est un symbole pour distinguer les Juifs des autres peuples et nations ;
  • avoir la tête découverte est considéré être une marque d'arrogance et d'irrespect.

Mais ce que la plupart des gens Juifs ou pas tendent à oublier est que la Kippoh ou Yarmoulko` n'a pas toujours été le couvre-chef de prédilection des Juifs, et est en fait une évolution ou un changement relativement moderne. Nos ancêtres n'ont jamais porté ce type de couvre-chef !

Dans les temps bibliques, les Lawiyim et les Kôhén Godhôl portaient, comme faisant partie de leurs vêtements sacerdotaux, un turban. Sans ce turban, ils ne pouvaient officier (tout comme s'il manquait l'un des autres vêtements sacerdotaux). La Tôroh est remplie de références au turban du Kôhén. Voici quelques exemples :

  • Shamôth 28:4

Et voici les vêtements qu'ils feront : le pectoral, l'éphod, le manteau, la tunique brodée, le turban et la ceinture. Ils seront des vêtements sacrés pour `aharôn, ton frère, et pour ses fils, pour Me le destiner à Mon service.
וְאֵלֶּה הַבְּגָדִים אֲשֶׁר יַעֲשׂוּ, חֹשֶׁן וְאֵפוֹד וּמְעִיל, וּכְתֹנֶת תַּשְׁבֵּץ, מִצְנֶפֶת וְאַבְנֵט; וְעָשׂוּ בִגְדֵי-קֹדֶשׁ לְאַהֲרֹן אָחִיךָ, וּלְבָנָיו--לְכַהֲנוֹ-לִי

  • Shamôth 29:6

Tu mettras sur sa tête le turban et placeras la couronne de sainteté sur le turban.
וְשַׂמְתָּ הַמִּצְנֶפֶת, עַל-רֹאשׁוֹ; וְנָתַתָּ אֶת-נֵזֶר הַקֹּדֶשׁ, עַל-הַמִּצְנָפֶת

  • Wayyiqro` 8:9

Et il mit le turban sur sa tête, mit sur le turban, vers le visage, le diadème d'or, la couronne sacrée, comme `adhônoy l'avait ordonné à Môshah.
וַיָּשֶׂם אֶת-הַמִּצְנֶפֶת, עַל-רֹאשׁוֹ; וַיָּשֶׂם עַל-הַמִּצְנֶפֶת אֶל-מוּל פָּנָיו, אֵת צִיץ הַזָּהָב נֵזֶר הַקֹּדֶשׁ, כַּאֲשֶׁר צִוָּה יְהוָה, אֶת-מֹשֶׁה

Sur sa tête le Kôhén Godhôl portait un turban fait de fin lin qui était attaché autour de sa tête en anneaux ou cercles. À l'avant du turban, sur le front, attachée par un ruban de dentelle bleu, il y avait une couronne dorée sur laquelle étaient gravés les mots קֹדֶשׁ לַיהוה « Qôdhash Ladhônoy – Sainteté pour `adhônoy. »1 C'était un rappel constant de la sainteté du peuple d'Israël et du Kôhén Godhôl dans sa vocation, car HaShem ית׳ a dit à Môshah Rabbénou ע״ה2 :

Parle à toute la réunion des Bané Yisro`él et dis-leur : « Vous serez saints, car Je suis saint, `adhônoy, votre Dieu. »
דַּבֵּר אֶל-כָּל-עֲדַת בְּנֵי-יִשְׂרָאֵל, וְאָמַרְתָּ אֲלֵהֶם--קְדֹשִׁים תִּהְיוּ: כִּי קָדוֹשׁ, אֲנִי יְהוָה אֱלֹהֵיכֶם

Le Kôhén Godhôl était marqué d'un symbole d'identification de sa consécration à HaShem. Mais puisque l'intégralité des Israélites formait une sainte nation appelée à une prêtrise collective, les Israélites jusqu'à ce jour portent un couvre-chef pour imiter cette distinction et afficher leur prêtrise au monde et leur consécration à HaShem, le terme « sainteté » provenant du mot hébreu קְדוּשָׁה « Qadhoushoh », qui signifie « mis à part. » De nos jours, l'écrasante majorité des Juifs portent la Kippoh/Yarmoulko` comme identifiant distinct qui sépare les Juifs des autres peuples et nations.

Illustration : La tenue des Lawiyim

Néanmoins, la pratique des anciens Israélites consistant à également porter un turban, comme le Kôhén Godhôl, sur une base quotidienne est établie dans de nombreux passages bibliques, comme ceux-ci :

  • Yahazqé`l 24:17

Soupire en silence, ne prends pas le deuil comme pour des morts, attache sur toi ta coiffure, mets tes sandales à tes pieds. Tu ne t'envelopperas pas jusqu'aux lèvres et tu ne mangeras pas le pain des hommes.
הֵאָנֵק דֹּם, מֵתִים אֵבֶל לֹא-תַעֲשֶׂה--פְּאֵרְךָ חֲבוֹשׁ עָלֶיךָ, וּנְעָלֶיךָ תָּשִׂים בְּרַגְלֶיךָ; וְלֹא תַעְטֶה עַל-שָׂפָם, וְלֶחֶם אֲנָשִׁים לֹא תֹאכֵל

  • Yahazqé`l 24:23

Votre coiffure [sera] sur vos têtes, vos sandales à vos pieds ; vous ne vous lamenterez pas, vous ne pleurerez pas, mais vous sécherez par vos iniquités et vous soupirerez chaque homme contre son frère.
וּפְאֵרֵכֶם עַל-רָאשֵׁיכֶם, וְנַעֲלֵיכֶם בְּרַגְלֵיכֶם--לֹא תִסְפְּדוּ, וְלֹא תִבְכּוּ; וּנְמַקֹּתֶם, בַּעֲו‍ֹנֹתֵיכֶם, וּנְהַמְתֶּם, אִישׁ אֶל-אָחִיו

Nous voyons implicitement des passages susmentionnés que le fait de retirer son turban en public est une marque de deuil, voire même d'humiliation. D'autres passages nous l'indiquent également.3 Voici d'autres références au turban porté par les hommes :

  • `iyôv 29:14

Je me revêtais de justice et elle se revêtait de moi, ma droiture était [pour moi] comme un manteau et un turban.
צֶדֶק לָבַשְׁתִּי, וַיִּלְבָּשֵׁנִי; כִּמְעִיל וְצָנִיף, מִשְׁפָּטִי

  • Yasha´yohou 61:3

Pour présenter, pour donner aux endeuillés de Sion une coiffe à la place de la cendre, l'huile de la joie à la place du deuil, un vêtement magnifique à la place d'un esprit abattu, afin qu'on les appelle « les béliers de la justice », plantation de `adhônoy par laquelle Il Se glorifie.
לָשׂוּם לַאֲבֵלֵי צִיּוֹן, לָתֵת לָהֶם פְּאֵר תַּחַת אֵפֶר שֶׁמֶן שָׂשׂוֹן תַּחַת אֵבֶל--מַעֲטֵה תְהִלָּה, תַּחַת רוּחַ כֵּהָה; וְקֹרָא לָהֶם אֵילֵי הַצֶּדֶק, מַטַּע יְהוָה לְהִתְפָּאֵר

  • Yasha´yohou 61:10

Je me réjouirai pleinement en `adhônoy, mon âme se délectera en mon Dieu, car Il m'a revêtu des vêtements du salut, m'a enveloppé du manteau de la justice, comme un fiancé orne [sa tête] d'une coiffe, comme une fiancée parée d'ornements.
שׂוֹשׂ אָשִׂישׂ בַּיהוָה, תָּגֵל נַפְשִׁי בֵּאלֹהַי--כִּי הִלְבִּישַׁנִי בִּגְדֵי-יֶשַׁע, מְעִיל צְדָקָה יְעָטָנִי: כֶּחָתָן יְכַהֵן פְּאֵר, וְכַכַּלָּה תַּעְדֶּה כֵלֶיהָ

Comme cela a été dit plus haut, bien qu'il soit désormais devenue la norme actuelle et dominante de porter une Kippoh/Yarmoulko` en remplacement de la pratique authentique et antique consistant à porter plutôt un turban, le turban était porté par de très nombreux Juifs jusqu'au 20ème siècle.

Illustration : Le Ban `Ish Hoy (1834-1909)

Illustration : Des Juifs portant le turban à Jérusalem, en 1895

Illustration : Un Juif algérien (20ème siècle)

Illustration : Un Juif yéménite (entre 1898 et 1914)

Illustration : Rabbins de Bagdad, dans les années 1930

Excepté dans les milieux yéménites et Talmidhé HaRambo''m, très peu de Juifs aujourd'hui poursuivent cette coutume millénaire et ancestrale consistant à porter le turban. Certains s'en abstiennent sur base de raisonnements et conclusions totalement erronés. Par exemple, certains objecteront à la pratique du turban et justifieront celle de la Kippoh/Yarmoulko` en arguant que le turban est un vêtement associé à l'islam, et affirment donc que quiconque porterait un turban serait identifié comme un musulman. Moi qui porte le turban quotidiennement, je peux affirmer que l'écrasante majorité des gens qui me croisent dans la rue me reconnaissent immédiatement comme un Juif, en dépit de mon turban. Deuxièmement, le turban n'est absolument pas un vêtement propre à l'islam. En effet, le turban est un couvre-chef porté par des hommes de différentes cultures et religions : les musulmans, les hindous, les sikhs, en Afrique, etc. De la même manière, un Qamis n'est en rien un vêtement propre à l'islam. Troisièmement, voir un musulman en turban est une chose extrêmement rare en occident. Vous avez en fait plus de chances de croiser un sikh en turban dans les rues de Paris ou Bruxelles qu'un musulman en turban ! Quatrièmement, quand bien même les autres peuples et religions prôneraient le port du turban, dès lors que cela fait également partie de notre tradition y renoncer sous prétexte que d'autres le font aussi n'est en rien un argument recevable. Les prêtres catholiques et les musulmans pieux portent également sur leurs têtes une calotte. Pourquoi ne renonçons-nous pas alors à porter une Kippoh/Yarmoulko` sur nos têtes ? Les femmes gitanes couvrent généralement leurs cheveux d'un foulard qui ressemble très souvent à ceux portés par des femmes séfarades. Devrions-nous dire à nos femmes que puisque les gitanes portent aussi le foulard, elles devraient se découvrir la tête ? Nous ne sommes même pas censés nous intéresser à ce qui se fait dans les autres religions et cultures. La seule chose qui doit compter pour nous est notre tradition, nos propres textes religieux, et rien d'autre.

Le port du turban est si central à notre tradition que nos Sages ont demandé expressément qu'une bénédiction soit faite au moment où l'on enroule son turban autour de la tête chaque matin. En effet, dans la liste des bénédictions du matin rapportée par le Talmoudh nous retrouvons ceci4 : כי פריס סודרא על רישיה לימא ברוך עוטר ישראל בתפארה « Quand il étend un tissu autour de sa tête il dira : ''Boroukh ´ôtér Yisro`él Bathiph`oroh''. » Bien qu'à nos époques la majorité des Juifs récitent cette bénédiction à la synagogue avec l'ensemble des autres bénédictions du matin, nous avions déjà expliqué que la pratique authentique consistait à ne réciter ces bénédictions que si on accomplissait vraiment l'acte pour lequel on bénissait, et au moment même où on l'accomplissait. C'est la pratique authentique telle qu'exigée par le Talmoudh et rapportée également par le Rambo''m ז״ל dans son Mishnéh Tôroh. Ainsi, c'est au moment où l'on enroule son turban autour de la tête (ou qu'on le dépose sur sa tête, si c'est un turban déjà fait) que cette bénédiction doit être faite. Et telle est encore jusqu'à nos jours la pratique des Dôr Da´im et Talmidhé HaRambo''m (de même, les Juifs du rite Hispano-Portugais récitent également les bénédictions du matin s'ils font les actes pour lesquels ils bénissent et au moment où ils les accomplissent). (Voir ici et .)

Le turban est d'une telle importance dans notre tradition que les Juifs vivant dans les pays musulmans ont parfois risqué leurs vies pour continuer à le porter. Avec la montée de l'islam, le turban commença à être perçu en terre d'islam comme étant « la couronne des arabes » et « l'insigne de l'islam. » La splendeur que la tradition juive accorde au turban causa aux Juifs de sérieux problèmes en terre d'islam.

Officiellement, les Juifs étaient considérés comme une minorité tolérée dont l'infériorité sociale devait se refléter dans la loi. Au 7ème siècle, le « Pacte d'Omar », qui définissait le statut des non musulmans en terre d'islam, contenait une clause selon laquelle les Juifs et les chrétiens s'engageaient à « ne pas tenter de ressembler aux musulmans de quelque façon que ce soit concernant l'habillement, comme par exemple avec...le turban... »

Comme pour les restrictions vestimentaires similaires qui furent souvent imposées aux Juifs dans l'Europe chrétienne, cette loi s'avéra rapidement être difficile à imposer, étant donné que les Juifs développaient fréquemment des relations personnelles amicales avec bon nombre de musulmans. Les autorités officielles répondaient souvent à ce mélange social en insistant que les Juifs portent des vêtements spécifiques qui indiquerait de façon évidente leur position sociale inférieure.

Les turbans juifs devinrent une cible fréquente du zèle réformateur musulman. Parfois, les Juifs recevaient l'ordre d'afficher des marques distinctes sur leurs turbans ; à d'autres occasions une limite était fixée à la longueur du tissu utilisé comme turban (10 aunes maximum, d'après un décret du sultan al-Malik al-Salih en 1354). Au 16ème siècle, le sultan Mourad III interdit tout simplement aux Juifs de porter des turbans, mais cela ne servit à rien puisque les Juifs continuèrent à le faire jusqu'au 20ème siècle.

La fréquence à laquelle de tels décrets devaient être répétés en terre d'islam indique clairement à quel point ils n'étaient pas efficaces et à quel point les Juifs furent tenaces, refusant d'abandonner leurs traditions ! Il est donc doublement ironique d'assimiler le turban à l'islam et exiger des Juifs qu'ils renoncent à cette tradition !

L'ignorance est une réalité avec laquelle nous devons vivre, mais lorsqu'on a accès à la connaissance l'ignorance des autres n'est pas un argument valable pour renoncer à appliquer ce que l'on sait être une tradition juive authentique et ancestrale. En outre, le fait que la majorité des Juifs, même séfarades, se sentent quasiment dans l'obligation de s'ashkénazifier n'est là encore pas une raison suffisante pour faire comme la majorité. Qui a dit qu'il fallait adopter l'allure ashkénaze ou ressembler à un ashkénaze pour être un bon Juif ? (Voir ici et .) Qui détermine nos lois, pratiques et coutumes ? Les Harédhim ashkénazes ou nos Sages, de mémoire bénie ?

1Voir dans Shamôth 28:36
2Wayyiqro` 19:2
3Voir par exemple Yasha´yohou 3:18-23

4Barokhôth 60b