dimanche 22 novembre 2015

Devons-nous suivre la majorité et les Minhoghim de notre époque ?

ב״ה

Devons-nous suivre la majorité et les Minhoghim de notre époque ?


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Certaines personnes, qui contestent les positions des Talmidhé HaRamba''m, Rambamistes et Dôr Da´im qui vont à l'encontre des positions dominantes d'aujourd'hui, avancent des arguments fallacieux et risibles pour défendre les pratiques anti-halakhiques et anti-talmudiques auxquelles ils adhèrent. Ils disent : « Nous devons suivre le Shoulhon ´oroukh ! ». Qui a dit que le Shoulhon ´oroukh incombait à l'ensemble du peuple juif ? Y a-t-il eu une concertation des rabbins du monde entier qui a débouché sur une résolution imposant à l'ensemble des Juifs de suivre le Shoulhon ´oroukh ? En outre, il a déjà été démontré à travers divers articles publiés sur ce blog que même ceux qui soutiennent une telle approche s'arrangent pour s'appuyer sur d'autres sources lorsque ce que tranche le Shoulhon ´oroukh ne leur convient pas ou qu'ils préfèrent faire autrement. Par exemple, bien qu'ils prétendent suivre tout ce qui est dit dans le Shoulhon ´oroukh, la majorité des Safaradhim s'appuient sur la Qabboloh du `ari chaque fois qu'il y a une divergence entre le Shoulhon ´oroukh et le `ari ou que la « Qabboloh » tranche des choses ne se trouvant pas dans le Shoulhon ´oroukh.

Un autre argument est que « Nous devons suivre les rabbins ! ». Un tel « argument » ne veut rien dire et est trop vague. En effet, de quels rabbins parle-t-on ? Et de quelle époque ? Si l'on parle des rabbins contemporains, sur quels sujets devons-nous les suivre ? Sur tous ? Or, nous savons tous qu'ils divergent sur d'innombrables sujets ! Donc, comment peut-on dire que « Nous devons suivre les rabbins » ? Un sondage a-t-il déjà été organisé pour savoir quelle est la position majoritaire des rabbins sur chaque sujet de Halokhoh ? C'est absurde !

Un autre argument est que « Nous devons écouter les Grands de la Génération ». Cet argument est en partie lié au précédent, et est un non sens plus grand encore. Qui décide et sur base de quels critères qui est inclus dans le club fermé des « Grands de la Génération » ? D'où provient ce faux concept des « Grands de la Génération » ? Et les rabbins qui sont inclus dans la liste des « Grands de la Génération » sont-ils d'accord sur tous les sujets ? Chaque communauté adhère à ses propres « Grands de la Génération », précisément parce que ces pseudos « Grands de la Génération » ne s'accordent pas entre eux sur une gamme très vaste de sujets. Prétendre suivre les « Grands de la Génération » est une aberration totale !

Un autre argument est qu'il faut faire comme les autres Juifs religieux. Là encore, d'où provient une telle affirmation ? Et qui dit que tous les Juifs religieux font pareil sur tous les points ? Sur quels Juifs religieux devons-nous baser ? Sur les Harédhim Hasidhim en long manteau noir, chapeau noir, chemise blanche et Shtreimel ? (Et sachant qu'il existe des centaines de sectes hassidiques différentes, avec chacune des normes et coutumes différentes sur e nombreux points, laquelle choisir ?) Sur les Harédhim Litvaqim ? Sur les « Orthodoxes Modernes » ? Sur les Loubavitchers ? Sur les Harédhim Safaradhim (qui ont de nombreuses différences avec les Harédhim `ashkanazim ? Sur les Témonim (les Yéménites) ? Il n'existe pas qu'un seul modèle de Juif religieux. Dire qu'il faut suivre ce que font les autres Juifs religieux est un non sens. Il n'existe pas une seule communauté pouvant prétendre au monopole sur le Judaïsme, et nulle part il est dit que nous devons suivre comme des moutons ce que font les autres.

Un autre argument est que « Nous avons l'obligation de suivre la majorité dans chaque génération ». Cette affirmation est à la fois erronée et hypocrite. Erronée, parce que cette règle ne s'applique qu'aux Sages du Grand Sanhédhrin. Et hypocrite, parce que les Juifs `ashkanazim n'abandonnèrent pas leurs pratiques aux époques où les Juifs des terres musulmanes constituaient la majorité. De même, lorsque les Juifs `ashkanazim devinrent dominants, les Juifs non-`ashkanazim ne se sentirent pas et ne se sentent pas obligés d'adopter les Minhoghim `ashkanazim. Cependant, il est clair et évident qu'une pratique majoritaire crée une influence puissante à laquelle il est difficile de résister. Ceux qui soutiennent une pratique majoritaire tendent à être plus confiants et s'inquiètent moins du fait d'être discriminés, tandis que ceux qui se trouvent dans la minorité se sentent sous pression, voire même, dans certaines circonstances, forcés de se conformer aux pratiques populaires dominantes. En réalité, la pression ne se trouve pas vraiment du côté de la minorité, mais de celui de la majorité. Lorsqu'ils sont acculés et mis face à leurs nombreuses contradictions, les gens de la majorité ont énormément de mal à trouver des preuves crédibles et solides légitimant leurs positions. En fait, il est même facile de démontrer sur de très nombreux points qu'ils ne suivent pas du tout la position majoritaire parmi les Pôsqim de leur propre version de l'Orthodoxie ! Boroukh HaShem, de nombreux Juifs sincères et réellement attachés à la Tôroh aspirent simplement à suivre la Halokhoh, non pas d'après les positions dites majoritaires, mais d'après les positions de l'expert en Tôroh qu'ils auront choisi. Mais ceux qui prétendent qu'il y aurait une obligation de « suivre la majorité » devraient soit appliquer ce qu'ils prêchent, ou adhérer à une plus logique et cohérente.

L'approche des Talmidhé HaRamba''m, Rambamistes et Dôr Da´im (pour une explication de ces termes, voir l'article intitulé « Que signifie être Rambamiste ? ») est celle présentée par le Ramba''m ז״ל. Il explique que l'on a l'obligation d'adhérer à la pratique majoritaire en l'absence du Grand Sanhédhrin que sur les sujets pour lesquels HaZa''l ont dit que la Halokhoh dépend de la pratique majoritaire en vigueur. Or, HaZa''l n'ont affirmé cela que pour un nombre très limité de sujets, et seulement pour des pratiques majoritaire dans une localité spécifique, et non pour des pratiques majoritaires suivant l'origine ethnique ou ancestrale. C'est-à-dire que cela n'a rien à voir avec le fait d'être `ashkanazi, Safaradhi ou Témoni, ni le fait que les `ashkanazim, Safaradhim ou Témonim seraient majoritaires, mais à avoir avec ce qui se fait majoritairement dans une certaine localité. Et il va de soi que c'est seulement à la condition que la pratique majoritaire locale ne transgresse ni une loi de la Tôroh ni une Halokhoh talmudique que HaZa''l ont institué indépendamment de là où on vit. Par exemple, il y a une loi de la Tôroh et une Halokhoh qui stipule que les femmes doivent se couvrir la tête. C'est le Din, et nous ne pouvons aller à l'encontre de cela, même si la pratique majoritaire dans la localité où l'on se trouve est que les femmes ne se couvrent pas la tête. C'est un point où la pratique majoritaire n'a aucune pertinence, car elle va à l'encontre d'un Din. De même, si la pratique locale des femmes est de se raser la tête, une femme qui ne désire pas le faire en a parfaitement le droit, car se raser la tête lorsqu'on est une femme va à l'encontre de la Halokhoh de HaZa''l (voir l'article intitulé « Les femmes qui se rasent la tête »). C'est un autre cas où la pratique majoritaire locale va à l'encontre du Din. À l'inverse, la Halokhoh stipule que les mesures de rigueur relatives à l'habillement des femmes dépendent de la pratique de chaque localité. De ce fait, si dans une certaine localité la pratique des femmes consiste à porter un long voile en plus du foulard, une femme qui s'y installe devra se tenir à cette règle. De même, si dans une certaine localité, comme c'était le cas au Yémen, les hommes sortent toujours avec un Tallith sur les épaules, un homme qui s'installe dans une telle localité devra se tenir à cette pratique.

En outre, lorsque quelqu'un vient d'une localité où la pratique consiste à suivre l'opinion indulgente donnée dans un débat non résolu traité dans le Talmoudh, et se rend vers une localité où la pratique consiste à suivre l'opinion plus stricte donnée dans le Talmoudh, il doit également suivre l'opinion talmudique plus stricte tout le temps qu'il se trouve là. Mais cela ne s'applique que pour les débats talmudiques non résolus ! S'il s'agit, par contre, de divergences d'opinions sur des sujets non-talmudiques, il n'y a aucune obligation d'adhérer à la pratique plus stricte de la nouvelle localité où l'on est allé s'établir. Ainsi, si quelqu'un, dans son ancienne localité, était accoutumé à couper ses ongles dans n'importe quel ordre, et se retrouve dans une localité où la majorité des gens se coupent les ongles suivant un ordre spécifique déterminé par la Qabboloh, il n'a aucune obligation de se plier à la pratique dominante de cette localité, car HaZa''l n'ont jamais traité de l'ordre dans lequel les ongles devaient être coupés. De même, si la pratique dominante de sa nouvelle localité consiste à faire les Kapporôth entre Rô`sh Hashonoh et Yôm Hakkippourim, il n'est pas tenu de le faire, car cette pratique est post-talmudique (voir l'article intitulé « Le rituel des Kapporôth »). Il en est de même dans tout cas semblable. Dans ces situations de pratiques post-talmudiques, chaque individu est libre de faire ce qu'il estime être le plus raisonnable.

D'autres contestent les approches des Talmidhé HaRamba''m, Rambamistes et Dôr Da´im, en invoquant l'interdiction de לֹא תִתְגֹּדְדוּ « Lô` Thithgôdhadhou » (ne pas se diviser en factions). Ils prétendent qu'en ayant notre propre approche de la Halokhoh et en refusant celle de la majorité, nous transgressons cette interdiction et créons des factions au sein du peuple juif. Or, nos Sages expliquent dans le Talmoudh1 que l'interdiction de se diviser en factions ne s'applique que dans le cas où il n'y a qu'un seul Béth Din dans la même localité, et où la moitié des juges tranche suivant une certaine opinion et l'autre moitié suivant une autre opinion. Et le Talmoudh conclut cette discussion en disant que dans le cas de deux Bathé Dinim au sein d'une même ville, si un Béth Din opine dans un sens et l'autre Béth Din dans le sens inverse, c'est-à-dire qu'il y a une différence de résolution entre les deux Bathé Dinim, cela ne pose aucun problème ! En d'autres mots, l'interdiction de « Lô` Thithgôdhadhou » ne s'applique qu'aux divergences de résolution au sein d'un même Béth Din, et non pas aux détails relatifs à la pratique religieuse. Le fait de faire différemment de la majorité au niveau de la pratique religieuse n'est en rien une transgression de « Lô` Thithgôdhadhou ». Par contre, lorsque des juges du même Béth Din sont incapables de se mettre d'accord sur une résolution, et qu'à cause de cela ils se fractionnent en deux groupes, c'est bel et bien une transgression de « Lô` Thithgôdhadhou ». Il est important de bien comprendre les notions halakhiques que l'on invoque avant d'en faire usage.

Un dernier argument est souvent invoqué : la transgression de l'interdiction de פּוֹרֵשׁ מִן הַצִּבּוּר « Pôrésh Min Hassibbour » (se séparer de la communauté). Ceux qui ne font pas comme les autres se rendraient coupables de la transgression de se séparer de la communauté. Là encore, cet argument est basé sur une méconnaissance totale de cette notion de « Pôrésh Min Hassibbour ». Voici ce que le Ramba''m, qui est très précis, explique dans son Mishnéh Tôroh sur cette notion2 :

Celui qui se sépare des voies de la communauté [est considéré comme tel] même s'il n'a commis aucune transgression. Plutôt, [il s'agit de celui qui] se distingue de l'assemblée d'Israël et n'accomplit pas les Miswôth en s'incluant avec eux, qui ne partage pas leurs malheurs, et ne se joint pas à leurs jeûnes, mais suit sa propre voie comme s'il faisait partie des nations de la terre, comme s'il n'était pas l'un d'entre eux.
הַפּוֹרֵשׁ מִדַּרְכֵי צִבּוּר: אַף עַל פִּי שֶׁלֹּא עָבַר עֲבֵרוֹת, אֵלָא נִבְדַּל מֵעֲדַת יִשְׂרָאֵל וְאֵינוּ עוֹשֶׂה מִצְווֹת בִּכְלָלָן וְלֹא נִכְנָס בְּצָרָתָן וְלֹא מִתְעַנֶּה בְּתַעְנִיתָן, אֵלָא הוֹלֵךְ בְּדַרְכּוֹ כְּאֶחָד מִגּוֹיֵי הָאָרֶץ, וּכְאִלּוּ אֵינוּ מֵהֶן

C'est plus que clair. Se séparer de la communauté, c'est mener sa vie comme si on ne faisait plus partie du peuple d'Israël, comme si on était un non Israélite. Ainsi, on ne se considère plus lié à l'accomplissement des Miswôth comme le sont les Israélites, on ne respecte pas les jours de jeûne comme si cela ne nous concernait pas, on est indifférent aux malheurs qui s'abattent sur le peuple d'Israël comme si on n'en faisait plus partie, et on décide de mener sa vie comme on l'entend, comme si on était un Gôy et plus un Israélite. C'est cela la définition de « se séparer de la communauté », et cela n'a rien à voir avec l'approche défendue par les Talmidhé HaRamba''m, les Rambamistes et les Dôr Da´im. Ainsi, faire différemment du reste des Juifs n'équivaut pas du tout à se séparer de la communauté. C'est là encore un concept qui a été dénaturé pour culpabiliser tout Juif pratiquant qui refuserait de se plier aux erreurs de la majorité, préférant suivre une voie différente qui est plus en phase avec la Tôroh et la Halokhoh de HaZa''l. Ce n'est pas se séparer de la communauté, mais aspirer à s'approcher davantage d'HaShem, de la vérité et de l'intégrité !

Il existe une liberté dans la Tôroh et la Halokhoh que peu de gens soupçonnent. Et le jour où cela sera compris, un fardeau énorme tombera sur les épaules de beaucoup et pratiquer la vraie foi sera source d'un bonheur inimaginable. Comme l'a dit Shalômôh Hammalakh au sujet de la sagesse de la Tôroh3 :

Ses voies sont des voies d'aménité, et tous ses sentiers [mènent à] la paix ; elle est l'arbre de vie pour ceux qui l'embrassent, quiconque la saisit est heureux. Par la sagesse `adhônoy a fondé la terre, Il a consolidé les cieux par l'intelligence ; par Sa science, les profondeurs se sont divisées et les nuages ont distillé la rosée. Mon fils, qu'ils ne s'éloignent pas de tes yeux, le conseil et la réflexion ; garde-les ! Ils seront la vie de ton âme et l'ornement de ton cou. Alors tu avanceras dans ton chemin avec sécurité et ton pied ne chancellera pas.
דְּרָכֶיהָ דַרְכֵי-נֹעַם; וְכָל-נְתִיבוֹתֶיהָ שָׁלוֹם. עֵץ-חַיִּים הִיא, לַמַּחֲזִיקִים בָּהּ; וְתֹמְכֶיהָ מְאֻשָּׁר. יְהוָה--בְּחָכְמָה יָסַד-אָרֶץ; כּוֹנֵן שָׁמַיִם, בִּתְבוּנָה. בְּדַעְתּוֹ, תְּהוֹמוֹת נִבְקָעוּ; וּשְׁחָקִים, יִרְעֲפוּ-טָל. בְּנִי, אַל-יָלֻזוּ מֵעֵינֶיךָ; נְצֹר תֻּשִׁיָּה, וּמְזִמָּה. וְיִהְיוּ חַיִּים לְנַפְשֶׁךָ; וְחֵן, לְגַרְגְּרֹתֶיךָ. אָז תֵּלֵךְ לָבֶטַח דַּרְכֶּךָ; וְרַגְלְךָ, לֹא תִגּוֹף

1Yavomôth 14a
2Hilkôth Tashouvoh 3:20

3Mishlé 3:17-23