בס״ד
Le rituel simple de la Haṭṭorath Nadhorim
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L’un des rituels les plus populaires en préparation de
Rô`sh Hashshonoh consiste à organiser, la veille, une cérémonie de Haṭṭorath Nadhorim
(annulation des promesses). L’origine talmudique de la Haṭṭorath Nadhorim
fut déjà mentionnée dans l’article intitulé « La
formule du Kol Nidhré ». Ce rituel est l’un des plus mécompris, et
la forme qu’il a de nos jours ne correspond pas à celle qu’elle avait dans les
temps anciens du judaïsme. Nous allons donc ajouter de la lumière sur le sujet,
et voir comment, d’après notre tradition ancienne, le rituel devrait se faire.
Premièrement, il convient de signaler que la Haṭṭorath
Nadhorim ne fut jamais instituée pour automatiquement annuler le
moindre Nédhar (promesse) qui aurait été fait durant l’année. En d’autres mots,
contrairement à la croyance populaire qui prévaut de nos jours, il ne suffit
pas de simplement réciter le rituel devant trois hommes pour se voir
automatiquement annuler ses Nadhorim. En effet, il existe deux
moyens pour qu’une annulation d’une promesse puisse être effective. L’un
consiste à trouver un פֶּתַח « Pathaḥ », une ouverture, de sorte que si la
personne avait connu l’existence d’une telle ouverture (ou faille), elle
n’aurait jamais fait cette promesse. Le deuxième consiste à introduire sa
demande d’annulation par une חֲרָטָה « Ḥarotoh » (regret).
Deuxièmement, la formule populairement utilisée par
les trois « juges » après la requête de celui qui veut voir ses
promesses annulées est problématique, et n’est pas en phase avec la pratique
originelle. Voici ce que rapporte le Rambo’’m sur la cérémonie de la Haṭṭorath
Nadhorim :[1]
Comment délient-ils [des vœux] ? Celui qui
a juré viendra chez le Ḥokhom distingué ou chez trois Hidhyôtôth[2] s’il n’y a pas là un
expert. Et il dit : « J’avais juré concernant ceci ou cela, et
j’ai regretté. Et si j’avais su que je serai perturbé par cette affaire jusqu’à ce point, ou qu’il me serait arrivé
ceci ou cela, je n’aurais pas juré. Et si ma connaissance au moment du
serment avait été comme à présent, je n’aurai pas juré ». Alors le Ḥokhom
ou le plus grand des trois lui dit : « Regrettes-tu
déjà ? », et il dit : « Oui ! » [Alors le Ḥokhom
ou le plus grand des trois] reprend et dit : « Il t’est libéré »,
ou « Il t’est délié », ou « Il t’est absout »,
ou toute autre phrase ayant la même intention dans n’importe quelle langue. |
כֵּיצַד מַתִּירִין: יָבוֹא הַנִּשְׁבָּע
לֶחָכָם הַמֻּבְהָק, אוֹ לִשְׁלוֹשָׁה הִדְיוֹטוֹת אִם אֵין שָׁם מֻמְחֶה;
וְאוֹמֵר אֲנִי נִשְׁבַּעְתִּי עַל כָּךְ וְכָּךְ, וְנִחַמְתִּי, וְאִלּוּ
הָיִיתִי יוֹדֵעַ שֶׁאֲנִי מִצְטַעֵר בְּדָבָר זֶה עַד כֹּה אוֹ שֶׁיֵּארַע לִי
כָּךְ וְכָּךְ, לֹא הָיִיתִי נִשְׁבָּע, וְאִלּוּ הָיְתָה דַּעְתִּי בְּעֵת
הַשְּׁבוּעָה כְּמוֹ עַתָּה, לֹא הָיִיתִי נִשְׁבָּע. וְהֶחָכָם אוֹ
גְּדוֹל הַשְּׁלוֹשָׁה אוֹמֵר לוֹ, וּכְבָר נִחַמְתָּ, וְהוּא אוֹמֵר הִין;
חוֹזֵר וְאוֹמֵר שָׁרוּי לָךְ, אוֹ מֻתָּר לָךְ, אוֹ מָחוּל לָךְ, וְכֵן כָּל
כַּיּוֹצֶא בְּעִנְיָן זֶה בְּכָל לָשׁוֹן. |
Notez la présence de Hatoroh susmentionnée,
mais également le fait que la promesse ou le serment peut être annulé même par
un seul Ḥokhom s’il y en a. C’est seulement dans le cas où il n’y a pas de Ḥokhom
disponible que l’on doit procéder à l’annulation d’un vœu, d’une promesse ou
d’un serment en présence de trois hommes qui ne sont pas des Ḥakhomim.
Enfin, notez que le Rambo’’m rapporte clairement que le Ḥokhom ou les trois hommes
libèrent la personne en prononçant une seule formule d’absolution, qu’ils ne
prononcent qu’une seule fois, et qu’ils peuvent faire dans toute langue que
comprend celui qui cherche à être absout. Ils peuvent donc dire : שָׁרוּי לָךְ, אוֹ מֻתָּר לָךְ, אוֹ
מָחוּל לָךְ « ‘’Il t’est libéré’’,
‘’Il t’est délié’’ ou ‘’Il t’est absout’’ ». C’est en opposition
totale avec la pratique courante de prononcer ces trois formules d’absolution
et de les répéter à trois reprises.
Le Tour diverge légèrement du Rambo’’m. Là encore, il
stipule que l’on ne doit prononcer qu’une seule des trois formules, mais qu’il
faudrait la répéter trois fois.[3]
Le Shoulḥon ´oroukh rapporte l’approche du Tour, à savoir qu’une seule formule
doit être prononcée, mais à trois reprises.[4]
Néanmoins, le Sha’’Kh écrit que la triple répétition d’une des trois formule n’est
pas strictement requis par la Halokhoh.[5]
En d’autres mots, la vraie pratique d’après le Din suit ce que tranche le Rambo’’m,
à savoir une seule formule d’absolution prononcée qu’une seule fois.
Il n’existe aucune source halakhique ancienne prescrivant
la pratique courante d’aujourd’hui, à savoir l’emploie des trois formules répétées
à trois reprises. Cela fait donc un total de neuf déclarations ! En outre,
toute personne ayant déjà procédé à la Haṭṭorath Nadhorim
contemporaine sait que ce ne sont pas seulement les trois formules qui sont
répétées à trois reprises, mais l’intégralité du paragraphe d’absolution des vœux
qui est répétée trois fois, créant ainsi un rituel particulièrement long et
fastidieux si un grand nombre de personnes attendent leur tour pour faire annuler
leurs vœux, promesses, serments prononcés durant l’année écoulée !
Troisièmement, toutes les sources susmentionnées sous-entendent
clairement que la personne cherchant à se faire absoudre pour un vœu, une
promesse ou un serment qu’elle aurait prononcé doit stipuler devant le Ḥokhom
ou les trois hommes la teneur de la promesse, du vœu ou du serment, et pas
seulement réciter une formule, contrairement à la pratique contemporaine. La
raison à cela est que le Ḥokhom ou les trois hommes doivent pouvoir évaluer si
la personne entre dans les conditions pour se faire délier de sa promesse, son vœu
ou serment, et si son cas nécessiterait effectivement une Haṭṭorath Nadhorim.
D’ailleurs, le Rambo’’m s’étend longuement sur cela dans son Commentaire sur la
Mishnoh,[6]
où il rapporte le dialogue qu’il doit y avoir entre la personne et celui ou
ceux qui l’absolvent de ses vœux ou serments. Le fait que le rituel d’aujourd’hui
soit de la simple récitation sans la moindre explicitation de ce qu’on voudrait
voir délié vide complètement le rituel de sa substance et raison d’être.
Quatrièmement, comme mentionné plus haut, aussi bien par
le Rambo’’m que par le Shoulḥon ´oroukh, la réponse d’absolution du Ḥokhom ou
des trois hommes peut se faire dans n’importe quelle langue. Cela sous-entend
qu’en réalité, ils doivent s’adresser à la personne dans la langue que celle-ci
comprend. Or, là encore, le rituel tel qu’il est accompli de nos jours est
totalement insignifiant et vide, car il se fait en hébreu et araméen, deux
langues qu’est loin de maîtriser une partie importante du peuple juif.
Nous pouvons donc voir que la cérémonie appelée de nos
jours « Haṭṭorath Nadhorim » est en décalage
complet par rapport à ce qu’elle devrait véritablement être, mais aussi avec la
façon dont elle est censée se dérouler.
Enfin, il semble que Lahalokhoh,
le Ḥokhom ou les trois hommes puissent annuler les vœux de plusieurs personnes,
tout comme ils peuvent annuler plusieurs vœux simultanément. De ce fait, le
processus tel qu’il se déroule typiquement à la synagogue, où chacun passe l’un
après l’autre, et où il faut refaire à chaque fois toute la récitation du
début, est peut-être une perte de temps énorme. Si les gens se regroupent, par
exemple, par trois, ils sortent assez rapidement. De plus, puisque la cérémonie
telle qu’elle a lieu généralement de nos jours n’est rien d’autre que de la
simple récitation de texte, une alternative acceptable consisterait à laisser
plusieurs personnes faire leurs récitations en même temps, et de laisser le « Béth
Din » leur accorder ensuite l'annulation à toutes en une seule fois.
[1] Mishnéh Ṭôroh, Hilkôth Shavou´ôth
6 :4
[2] Un terme qui désigne des personnes
ordinaires, qui ne sont pas des Rabbonim, ni des Ṭalmidhé Ḥakhomim,
ni des Kôhanim, mais ont un minimum de connaissances halakhiques.
[3] Tour, Yôréh Dé´oh Simon 228
[4] Shoulḥon ´oroukh, Yôréh Dé´oh Simon
228
[5] Sha’’Kh, Yôréh Dé´oh Simon 228
[6] Nadhorim 10 :8