dimanche 10 mars 2019

Talmoudh Tôroh pour les Gôyim


ב״ה

Talmoudh Tôroh pour les Gôyim



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Il existe une distinction qualitative entre la Tôroh écrite et la Tôroh orale, en ce que seule cette dernière reflète la relation d'alliance unique liant HaShem et le peuple Juif. Nous allons donc explorer une interdiction très claire dans la tradition Juive, qui est celle de l'étude de la Tôroh par les Gôyim. À cette fin, nous passerons en revue les deux écoles de pensée qui existent concernant la base de cette interdiction et sa portée.

Le Talmoudh Bavli cite deux textes du TaNa''Kh pour établir le lien unique du peuple Juif avec la Tôroh :

Davorim 33:4

Môshah nous a ordonné la Tôroh ; un héritage de l'Assemblée de Ya´aqôv.
תּוֹרָה צִוָּה-לָנוּ, מֹשֶׁהמוֹרָשָׁה, קְהִלַּת יַעֲקֹב

Tahillim 147:19-20

Il a raconté Ses paroles à Ya´aqôv, Ses décrets et Ses jugements à Yisro`él. Il n'a pas agi de la sorte envers aucune [autre] nation ; elles ne connaissent pas [Ses] jugements. Louez Yoh !
מַגִּיד דְּבָרָו לְיַעֲקֹב;    חֻקָּיו וּמִשְׁפָּטָיו, לְיִשְׂרָאֵל. לֹא עָשָׂה כֵן, לְכָל-גּוֹי--    וּמִשְׁפָּטִים בַּל-יְדָעוּם: הַלְלוּ-יָהּ

Le premier passage est cité dans Sanhédhrin 59a, et la Gamoro` explore deux façons de le comprendre, soit littéralement, auquel cas la Tôroh n'est l'héritage ( מוֹרָשָׁה « Môroshoh ») exclusif que du peuple Juif, soit homilétiquement, auquel cas il ne faudrait pas lire « Môroshoh » mais plutôt מְאֹרָשָׂה « Ma`ôrosoh » (fiancée), ce qui signifie que la Tôroh est la fiancée exclusive du peuple Juif.

La Gamoro` se demande alors pourquoi l'interdiction d'étudier la Tôroh pour les Gôyim ne fut pas incluse dans les Lois Noahides, et offre deux réponses :

  1. si le verset susmentionné est lu comme décrivant la Tôroh comme un héritage (Môroshoh) exclusif du peuple Juif, cela voudrait dire que le Gôy qui l'étudie se rendrait coupable de l'interdiction du vol (puisqu'il se serait emparé de ce qui ne lui appartenait pas), qui fait partie des Lois Noahides ;
  2. si le verset susmentionné est lu comme décrivant la Tôroh comme la fiancée (Ma`ôrosoh) exclusive du peuple Juif, cela voudrait dire que le Gôy qui l'étudie se rendrait coupable de l'interdiction de l'adultère (puisqu'il aurait eu une « relation » avec une « jeune femme » fiancée à autrui), ce qui fait également partie des Lois Noahides, et qui rend passible de la lapidation.

La Gamoro` cite alors une Barayatho` qui semble contredire cette interdiction pour les Gôyim d'étudier la Tôroh puisqu'elle enseigne que le Gôy qui étudie la Tôroh est aussi élevé que le Kôhén Godhôl. Mais il n'y a pas de contradiction, car, comme l'explique la Gamoro` elle-même, cette Barayatho` ne se référait qu'à un Gôy qui n'étudie que les parties de la Tôroh se rapportant aux Sept Lois Noahides. Nous apprenons donc qu'il est une Miswoh pour un Gôy de n'étudier que les Halokhôth qui se rapportent aux Sept Lois Noahides, et que tout Gôy qui agirait de la sorte doit être traité avec le plus grand respect.

Cette référence talmudique est importante, et ce, pour de nombreuses raisons :

  1. La Gamoro` souligne la gravité de l'interdiction pour les Gôyim d'étudier la Tôroh en stipulant que ceux qui le font mériteraient la mort ;
  2. comme nous le verrons un peu plus tard, le fait que la Gamoro` compare ce problème à un vol ou à un adultère nous permettra de comprendre la logique de cette interdiction ;
  3. bien qu'il y ait une interdiction stricte pour les Gôyim d'étudier la Tôroh, ils sont néanmoins encouragés et félicités s'ils s'adonnent à l'étude des lois qui ne se rapportent qu'à eux, à savoir les Lois Noahides.

Quant au deuxième passage biblique, il est cité dans Haghighoh 13a, qui l'utilise pour enseigner que les enseignements de la Tôroh ne peuvent pas être transmis à un Gôy.

Les Tôsophôth disent que le premier verset biblique aurait suffit pour nous convaincre qu'enseigner la Tôroh aux Gôyim était interdit, puisqu'il déclare qu'elle n'appartient qu'à l'Assemblée de Ya´aqôv. Pourquoi était-il donc nécessaire que le Talmoudh rapporte un deuxième verset ? Les Tôsophôth concluent que le deuxième passage talmudique vient nous apprendre qu'un Juif ne pourrait pas enseigner la Tôroh à un Gôy, même lorsque l'interdiction de « Liphné ´iwwér Lô` Thittén Mikhshol » ne s'applique pas. En principe, on aurait pu penser qu'étant donné que les Gôyim ont l'interdiction d'étudier la Tôroh, il aurait mieux valu qu'ils se fassent enseigner par un Juif, car si un Juif ne les instruit pas peut-être que cela pourrait les pousser à transgresser l'interdiction pour eux d'étudier la Tôroh, notre refus de les instruire pourrait alors être considéré comme une pierre d'achoppement que nous aurions placée sur leur chemin. Et bien, même si cela pourrait les pousser à étudier par eux-mêmes, ou que cela les amènerait à se tourner vers un autre Gôy pour se faire enseigner (avec le risque d'erreurs que cela comprend), il restera interdit à un Juif de leur enseigner la Tôroh ! Étant donné que de toute façon le Gôy qui désire étudier la Tôroh finira par trouver un moyen de parvenir à ses fins (par Internet, par exemple, ou par d'autres moyens alternatifs), notre refus de lui enseigner la Tôroh n'équivaudra pas au fait de placer une pierre d'achoppement, car la source tirée du Séphar Tahillim nous interdirait catégoriquement de leur enseigner quoique ce soit ! D'après les Tôsophôth, il y aurait donc deux interdictions distinctes et indépendantes par rapport à ce sujet : celle pour les Gôyim d'étudier la Tôroh, et celle pour les Juifs d'enseigner la Tôroh aux Gôyim ! Le Rambo''m mentionne lui aussi ces deux interdictions, en expliquant que le Gôy qui étudie des domaines de la Tôroh qui ne le concernent pas mériterait d'être exécuté (Mishnéh Tôroh, Hilkôth Malokhim Chapitre 10), et en rapportant qu'il était défendu à un Juif d'enseigner la Tôroh à un esclave Gôy (Mishnéh Tôroh, Hilkôth ´avodhim Chapitre 8).

Quelle est la raison de l'interdiction pour un Gôy d'étudier la Tôroh ? Il existe deux écoles de pensée à ce propos. Le Mé`iri suggère que la raison de cette interdiction est que la communauté Juive pourrait être trompée et croire à tort que ce Gôy est en fait Juif, « et [la communauté] en viendrait à s'égarer en suivant les propres voies de cet individu ». En d'autres mots, avec sa connaissance supposée, le Gôy pourrait en arriver à déformer certaines pratiques, et la communauté Juive finirait par être trompée sur d'importantes questions halakhiques à cause du fait qu'elle aura supposé à tort que cet individu érudit est un Juif pratiquant.

Dans le même ordre d'idée, Ribbénou Yahi`él Weinberg comprend cette interdiction d'étude de la Tôroh pour les Gôyim comme faisant partie de l'interdiction plus large de donner aux Gôyim les moyens d'établir une religion nouvelle et indépendante, mélangeant le judaïsme et d'autres croyances, ce qui ajouterait de la confusion dans le monde.

Mais si l'on se base sur le langage de la Gamoro` elle-même, une compréhension plus profonde de cette interdiction émerge. Souvenez des propos de la Gamoro` qui décrit l'étude de la Tôroh d'un Gôy comme un vol de l'héritage des Juifs et de l'adultère avec la fiancée des Juifs. Les deux condamnations ont pour but de souligner que l'interdiction découle de la relation unique entre HaShem et le peuple Juif, et que la Tôroh sert de contrat ou de signe de cette relation d'alliance entre les deux.

L'écrasante majorité des Ri`shônim souscrivent à cette deuxième école de pensée. Si nous retournons vers les Tôsophôth (qui étaient les disciples et gendres de Rash''i), leur lecture de Haghighoh 13a est significative. En particulier le verset tiré des Tahillim, qui met clairement en avant qu'HaShem donne Ses lois uniquement aux Juifs, ce qui soutient sans ambiguïté cette compréhension de l'interdiction.

En outre, le Mé`iri lui-même, ainsi que le Maharsha, renvoient au contexte du deuxième chapitre du traité Haghighoh, qui discute des parties secrètes de la Tôroh qui sont sujets à des restrictions importantes. Ils concluent donc que ce traité vient interdire aux Gôyim l'étude des secrets profonds de la Tôroh.

Cela concorde parfaitement avec l'approche de la deuxième école, majoritaire, à savoir que les parties ésotériques de la Tôroh ne sont uniquement réservées qu'aux Juifs, et ne doivent pas être rendues accessibles aux autres ! C'est dans ce même ordre d'idée que le ´iyoun Ya´aqôv attire notre attention sur les termes employés par le Talmoudh lui-même, à savoir que « Les enseignements de la Tôroh ne peuvent pas être transmises à un Gôy ». L'emploi du verbe « transmettre » renvoie au domaine de la Tôroh Orale. Et le ´iyoun Ya´aqôv poursuit en déclarant qu'il est donc défendu de remettre à des Gôyim des livres de Tôroh (des commentaires sur la Tôroh, des écrits des Rabbonim, etc.), car ces livres contiennent toujours des secrets Divins et enseignements tirés de la Tôroh Orale !

Cette approche, qui voit le `issour (interdiction) d'enseigner la Tôroh aux Gôyim comme tirant son origine dans le concept selon lequel la Tôroh est le don exclusif donné par HaShem au peuple Juif, symbolisant par-là leur relation d'alliance, nous permet de comprendre un certain nombre d'autres sources. Premièrement, le Mahara''s Hayyôth, le Yahoudhoh Ya´alah et le Nésiv, affirment que l'interdiction est limitée à la Tôroh Orale ; la Tôroh Écrite pourrait être enseignée sans aucune retenue. Bien que cette affirmation fasse l'objet d'une grande divergence, elle s'accorde parfaitement avec la notion rabbinique selon laquelle l'alliance tourne principalement autour de la Tôroh Orale.

Cela nous permet également de comprendre l'enseignement talmudique selon lequel un Gôy qui s'abstient d'accomplir des Malo`khôth à Shabboth est passible de la mort, comme Résh Laqqish le déclare dans Sanhédhrin 58b. Le dénominateur commun entre le Shabboth et l'étude de la Tôroh est que les deux sont emblématiques de l'alliance entre HaShem et Son peuple ; il s'en suit donc tout logiquement que c'est pour cela que la Gamoro` exclut les Gôyim de ces deux préceptes essentiels de l'identité Juive.

Enfin, un certain nombre de `aharônim font la suggestion frappante qu'un Gôy n'est pas exclus de toute forme de Limoudh Tôroh. Ainsi, le Tiph`arath Yisro`él et le Maharsha affirment qu'un Gôy qui étudie sans analyses profondes n'entre pas dans la catégorie visée par cette interdiction. C'est également la position du Yahoudhoh Ya´alah.

Cette suggestion frappante s'accorde également très bien avec l'approche de la deuxième école que nous avons précédemment expliquée. Comme le Midhrosh Tanhoumo` (Nôah 3) l'enseigne, ce n'est pas seulement le contenu de la Tôroh, mais également son étude intensive, qui forme la colonne vertébrale de notre relation d'alliance avec HaShem.

Nous avons donc vu que la notion selon laquelle la Tôroh est le signe essentiel de notre Barith (alliance) avec HaShem est transmise dans cette section du Talmoudh parlant du Talmoudh Tôroh pour les Gôyim. Non seulement cette approche découle tout droit du langage du Talmoudh dans les deux traités (Sanhédhrin et Haghighoh), mais elle est également enracinée dans les commentaires des Ri`shônim et `aharônim. Et cette approche fait également la distinction entre les Juifs et les Gôyim, ainsi qu'entre la Tôroh Écrite et la Tôroh Orale.

Qu'est-ce qu'un « ami » du point de vue du judaïsme ?



Qu'est-ce qu'un « ami » du point de vue du judaïsme ?



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Pour beaucoup de gens, la définition d'un ami est quelqu'un avec qui on peut bien rigoler, passer du bon temps, raconter tous ses secrets, passer des heures à discuter, etc. Toutes ces définitions de l'amitié sont basées sur des concepts étrangers au judaïsme ! Quiconque donne ce genre de définitions expose devant tous qu'il est étranger à la notion Israélite de ce qu'est réellement l'amitié. Comme je dis souvent, une langue influence le processus de penser. L'amitié en Français n'est pas la même que celle en Hébreu.

Ce qui est extraordinaire dans la foi Israélite c'est que chaque terme possède une définition claire et précise qui, très souvent, est cachée dans l'étymologie même du mot. Ou dans les lettres qui composent le mot. L'un des mots hébreux pour dire « ami » est רֵעַ « Réa´ », comme dans le verset : וְאָהַבְתָּ לְרֵעֲךָ כָּמוֹךָ « Wa`ohavto Laré´akho Komôkho – et tu aimeras ton ami/semblable comme toi-même » (Wayyiqro` 19:18). Ce mot, רֵעַ « Réa´ », provient exactement de la même racine que le mot תְּרוּעָה « Tarou´oh », comme dans le verset : יוֹם תְּרוּעָה, יִהְיֶה לָכֶם « Yôm Tarou´oh Yihyah Lokham – ce sera pour vous un jour de Tarou´oh » (Bamidhbor 29:1 ; en référence à Rô`sh Hashshonoh). Le Targoum traduit et interprète « Yôm Tarou´oh » par יוֹם יַבָּבָא « Yôm Yabbovo` », c'est-à-dire « un jour de gémissement ». C'est pourquoi, le son principal du Shôphor ressemble à une série de gémissements entrecoupés, ou d'espèce de petits cris entrecoupés.

Ainsi, de nombreux Rabbonim nous expliquent que l'étymologie de Tarou´oh, qui est la même que le mot רֵעוּת « Ré´outh – amitié », nous indique que cela se rapporte au fait de briser ou casser quelque chose. Le Rav Hutner, sur base de cela, explique notamment que c'est la raison pour laquelle un ami est appelé « Réa´ », car le but d'un ami (d'un VRAI ami) est « de vous briser » et « de vous châtier » pour vous amener à vous améliorer, à vous rendre meilleur. Un vrai ami doit vous stopper dans votre folie et même vous donner un bon coup de pied dans le derrière lorsque cela est nécessaire. Un vrai ami n'est pas un hypocrite qui vous pardonne peu importe ce que vous faîtes ou ferme les yeux sur vos manquements. Un vrai ami n'est pas quelqu'un qui vous fait toujours une tape dans le dos pour vous montrer que peu importe ce qu'il se passe, ou ce que vous faîtes, il sera toujours là pour vous. Un vrai ami, ce n'est pas quelqu'un qui vous met constamment de la pommade ou vous caresse dans le sens du poil pour éviter des disputes ou faire semblant qu'il n'y a rien eu. Un vrai ami ne sera jamais quelqu'un qui passera son temps à vous dire à quel point vous êtes génial. Un vrai ami, ce n'est pas quelqu'un qui tolère tout ce que vous faîtes. Ça, ce ne sont pas des amis, mais des hypocrites. Des gens qui vivent sur les apparences, et sont superficiels. Et avec ce genre de personnes, il sera impossible de développer une amitié véritable. Le but d'un ami, exactement comme pour la sonnerie de la Tarou´oh à Rô`sh Hashshonoh, est de vous dire parfois : « Tu ne sais pas de quoi tu parles », « Là, tu fais n'importe quoi ! », « Je ne peux pas tolérer un tel comportement », etc. Le Talmoudh nous enseigne à chérir un ennemi qui nous dit la vérité en face plutôt qu'un soi-disant ami qui ne nous fait que des louanges et semble accepter tout ce qu'on fait.

Évidemment, quelqu'un qui est critique et ne cache pas ce qu'il pense ne restera pas longtemps un ami aux yeux de certains. Car la plupart des gens ne supportent pas les critiques ou la vérité. C'est pourquoi, quelqu'un doit avoir développé un certain degré de confiance en quelqu'un avant d'être prêt à entendre des critiques de sa part. Ainsi, lorsque quelqu'un se fâche, s'emporte, nie, cherche constamment des excuses et des réponses aux critiques qu'on lui fait, c'est qu'en réalité il n'a pas confiance en la personne qui la critique. C'est pourquoi cette personne préférera s'entourer de soi-disant « amis » qui tolèrent ce qu'ils font sans broncher, ou qu'il peut, à la limite, manipuler à son avantage jusqu'à un certain degré. Sachez que ce genre d'amis qui ne vous remette pas en place lorsque cela est nécessaire n'auront aucune honte de parler sur vous dans votre dos, car ce qu'ils n'osent pas vous dire en face, ils le disent à d'autres ! Ce n'est donc pas de l'amitié, mais de la pure hypocrisie ! Un vrai ami ne se cache pas. Il doit être capable de vous stopper et parfois même de vous briser.

Dans l'une des sept bénédictions que nous récitons le jour d'un mariage, nous faisons référence aux mariés comme étant des רֵעִים אֲהוּבִים « Ré´im `ahouvim – des amis amoureux ». Il y a un message profond caché derrière cette expression : afin qu'un homme et sa femme soient des « amis amoureux », ils doivent avoir la capacité de se dire l'un l'autre « Ce n'est pas comme ça qu'on fait les choses », « Ce n'est pas ainsi qu'on agit ». Car c'est par les critiques pour l'amélioration de l'autre qu'on développe une véritable amitié et un amour véritable, car c'est quand on n'aime pas quelqu'un que l'on tolère tout ce qu'il fait, même quand c'est mal. Ce n'est pas de l'amour de tout accepter.

De même, le Netsiv explique sur le verset וַיֹּאמֶר יְהוָה אֱלֹהִים, לֹא-טוֹב הֱיוֹת הָאָדָם לְבַדּוֹ; אֶעֱשֶׂה-לּוֹ עֵזֶר, כְּנֶגְדּוֹ « Et HaShem `alôhim dit : Il n'est pas bon que l'homme soit seul. Je lui ferai une aide à l'opposé de lui » (Baré`shith 2:18) que parfois, afin que quelqu'un soit véritablement une aide ( עֵזֶר « ´ézar »), la personne a besoin d'être un adversaire (כְּנֶגְדּוֹ « Kanaghdô »). Cela ne doit pas toujours être « Chéri, tu es merveilleux ! », ou « Chéri, tu as toujours raison ». Quelques fois, ça doit être « Chéri, tu es un idiot ! ». C'est un véritable cas de רֵעִים אֲהוּבִים « Ré´im `ahouvim – des amis amoureux ». Nos Sages nous enseignent dans le Talmoudh que même si on doit critiquer un ami trois fois ou plus, on a l'obligation de continuer à le critiquer jusqu'à ce que la personne se mette à nous insulter ou à nous frapper ! Vous voulez donc savoir si quelqu'un est véritablement un ami ? Critiquez-le quand c'est nécessaire, et voyez sa réaction. S'il ne reconnaît pas ses torts, cherche constamment à se justifier, se fâche, commence à vous éviter, garde de la rancune, etc., ce n'est pas un ami, et son comportement « amical » est en réalité basé sur autre chose qu'une véritable amitié.

vendredi 8 mars 2019

Yishoq et les puits


בס״ד

La Sidhroh Triennale
Sidhrath Wayyizra´ Yishoq – Yishoq et les puits

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Bien. À partir de la Sidhroh de Tôladhôth Yishoq, la Tôroh nous rapporte l'histoire de Yishoq `ovinou ע״ה, et nous dit que la famine fut la raison pour laquelle il se rendit chez `avimalakh à Garor. HaShem ית׳ ordonna alors à Yishoq de ne pas descendre en Égypte, car en dépit de la famine, Il assura à Yishoq qu'Il pourvoirait à ses besoins. La Tôroh observe que cette famine n'était pas comme celle qui se produisit durant les jours de `avrohom `ovinou ע״ה. Rash''i ז״ל explique que la première famine du temps de `avrohom était une épreuve pour lui. Ramba''n ז״ל commente que `avrohom eut tort de descendre en Égypte et aurait dû avoir foi en la Providence Divine, malgré la famine. Mais concernant Yishoq, Ramba''n ne dit rien sur la décision pourtant identique qu'il prit de descendre en Égypte. Par conséquent, quitter un pays lorsqu'il est frappé d'une famine n'est pas intrinsèquement mauvais. Si HaShem ne S'était pas révélé à Yishoq, il aurait sembler être correct pour Yishoq de se rendre en Égypte, loin d'un pays affligé.

Nous voyons que la Providence continue de HaShem envers Yishoq dépendait de son obéissance de la garde de la Parole de HaShem par `avrohom. Toutefois, chaque patriarche méritait de voir le Nom de HaShem lui être connecté. Yishoq ne faisait pas que perpétuer les études reçues de son père `avrohom ; il ajouta également une dimension nouvelle, et déduisit ses convictions de son propre raisonnement. HaShem fit une promesse à Yishoq, pas seulement parce qu'il était le fils de `avrohom, mais plutôt parce qu'il l'avait mérité par ses propres vertus.

Lorsque Yishoq arriva à Garor, il fit exactement comme son père, et affirma que Rivqoh était sa sœur, afin de protéger sa vie. Après qu'un certain temps fut passé, nous avions lu dans la précédente Sidhroh que le roi, `avimalakh, regardait par sa fenêtre, et surprit Yishoq en train de s'amuser avec Rivqoh, ce qui montrait que leur relation n'était pas une relation de frère et sœur, mais de mari et femme. `avimalakh réprimanda Yishoq pour avoir mis en danger son peuple, car l'un d'eux aurait pu prendre Rivqoh, causant ainsi un péché sur eux tous. Il ordonna ensuite à son peuple de ne faire aucun mal à Yishoq et Rivqoh.

Puis, dans la Sidhroh de cette semaine, la Sidhrath Wayyizra´ Yishoq, nous lisons que Yishoq récolta plus de cent fois plus que ce qu'il avait semé, et eut beaucoup de succès. Ses réussites étaient illimitées. Les Philistins l'envièrent à cause de cela. Il y a un commentaire très intéressant de Rash''i sur Baré`shith 26:13. En citant le Midhrosh1, il déclare : זֶבֶל פִּרְדוֹתָיו שֶׁל יִצְחָק וְלֹא כַּסְפּוֹ וּזְהָבוֹ שֶׁל אֲבִימֶלֶךְ « Mieux vaut le fumier des mules de Yishoq, que l'argent et l'or de `avimalakh ». C'est une idée étrange : pourquoi les gens préféreraient-ils le premier au deuxième ? Ensuite, la Tôroh déclare2 : וְכָל-הַבְּאֵרֹת, אֲשֶׁר חָפְרוּ עַבְדֵי אָבִיו, בִּימֵי, אַבְרָהָם אָבִיו--סִתְּמוּם פְּלִשְׁתִּים, וַיְמַלְאוּם עָפָר « Et tous les puits que les serviteurs de son père avaient creusés durant les jours de `avrohom son père, les Philistins les bouchèrent et les remplirent de poussière ». Pour quelle raison la Tôroh nous informe-t-elle de ce fait obscur ?

Ramba''n déclare qu'il n'y a aucun honneur pour Yishoq dans toute cette histoire. Pourquoi fut-elle donc rapportée ? Il répond que le but de cette Sidhroh est de faire allusion à quelque chose de caché : ces trois puits font allusion aux trois Botté Hammiqdoshim. Le premier puits fut nommé ´ésaq, qui signifie « contention ». Le premier Béth Hammiqdosh fut bâtit au milieu de beaucoup de contentions. Le deuxième puits que Yishoq creusa fut nommé Sitnoh, à cause de l'adversité et haine dont les Philistins firent preuve à son égard. De même, il y eut beaucoup de haine et d'adversité durant l'époque du Bayith Shéni. Rahôvôth fut le nom du troisième puits, pour lequel les Philistins ne s'opposèrent pas à Yishoq. Rahôvôth signifie « largesses », en raison des largesses (tranquillités) désormais accordées à Yishoq. Et durant l'ère du troisième Béth Hammiqdosh, il y aura de la paix.

Dans quel sens `avrohom et son fils Yishoq étaient-ils des patriarches ? Yishoq différait de `avrohom. `avrohom se distinguait par sa capacité à interagir avec le monde. Il débattait avec beaucoup de personnes, et bien qu'il finit par s'exiler, il reprit ses enseignements. Cependant, il y a un autre élément responsable de leur réussite à répandre la connaissance de HaShem : la Divine Providence. HaShem sauva miraculeusement `avrohom à de nombreuses occasions, dégageant ainsi la route pour qu'il puisse continuer à enseigner, tout en aidant à créer sa réputation sans pareille. Yishoq était différent. C'était une « ´ôloh Tamimoh » (un holocauste entier). Ses énergies n'étaient pas orientées vers le monde ni vers le social, mais exclusivement vers la connaissance. Passer si près de la mort lorsqu'il fut élevé sur l'autel eut un effet profond sur la personnalité de Yishoq. Ainsi, HaShem ordonna à Yishoq de ne pas descendre en Égypte. Comment donc Yishoq a-t-il pu jouer un rôle de patriarche ?

Les deux famines étaient le résultat de la Providence. Mais dans le cas de Yishoq, elle n'avait pas pour objectif de servir d'épreuve, contrairement au cas de `avrohom. Durant la famine du temps de Yishoq, HaShem l'instruisit de rester dans le pays. Pourquoi cela était-il nécessaire ?

Les puits étaient essentiels pour que Yishoq émerge comme un patriarche indépendant. On nous dit qu'il devint très riche. Mais sa richesse ne cessa jamais de croître, contrairement à celle de `avimalakh. Ce dernier stagnait dans sa richesse. C'est pourquoi, les Philistins dirent qu'ils préféraient le fumier des mules de Yishoq aux richesses de `avimalakh. Cela signifie qu'ils respectaient Yishoq qui pouvait prendre du fumier (la famine) et en tirer du succès. Cette richesse créa un grand respect envers Yishoq. `avimalakh demanda alors à Yishoq de quitter Garor, car sa présence là rendait minable `avimalakh, le roi, par rapport à lui.

Mais les Philistins finirent par être envieux de Yishoq. Nous apprenons qu'ils bouchèrent les puits de `avrohom. Cela démontrait qu'ils dénonçaient et rejetaient la philosophie de `avrohom. Mais pourquoi les Philistins n'avaient pas bouché les puits de `avrohom plus tôt ? C'est parce que lorsqu'ils virent la grandeur de Yishoq, ils comprirent que l'idéologie de `avrohom n'était pas un mouvement centré sur un homme, mouvement qui a tendance à disparaître une fois que la figure charismatique meurt. Le fait que Yishoq poursuivait la philosophie de `avrohom créait donc à présent des frictions à Garor, car ils ne pouvaient plus considérer que l'ère de `avrohom était terminée. Sa philosophie survivait à travers Yishoq ; il y avait donc une dynastie. L'idée de voir les enseignements de `avrohom se poursuivre était inacceptable pour les Philistins au vue de leur mode de vie débridé. Si les opinions monothéistes de `avrohom étaient mortes avec lui, ils auraient pu rester tranquilles. Mais cela n'était plus le cas. Ils désirèrent donc se rebeller contre la poursuite des idéologies de `avrohom. Mais les Philistins ne pouvaient pas nuire à Yishoq. Ils respectaient sa richesse. C'est pourquoi, ils attaquèrent `avrohom en bouchant ses puits.

Yishoq partit, puis retourna. Pourquoi ? Il agit ainsi afin d'exprimer l'importance de rouvrir les puits de `avrohom. Il refit un voyage de retour à Garor après s'en être allé, précisément pour démontrer la raison de son retour : ressusciter la gloire et les enseignements de `avrohom. Quelle fut la réponse des Philistins ? Ils contestèrent contre Yishoq au sujet de ses nouveaux puits. Ils tentèrent de nier la grandeur de Yishoq. Contrairement au premier puits pour lequel ils dirent « L'eau est à nous », cette fois-ci ce n'était pas l'eau qui les intéressait, mais c'était la célébrité de Yishoq qu'ils déploraient. Après un certain temps, ils comprirent qu'ils ne pourraient pas vaincre Yishoq. Ils succombèrent alors à une autre émotion ; leur respect sous-jacent pour la réussite de Yishoq. Le dicton « Si tu ne peux les vaincre, joins-toi à eux » illustre bien le changement d'attitude des Philistins. Ainsi, le dernier puits, que creusèrent les serviteurs de Yishoq, fut nommé « largesses ». Yishoq n'était plus attaqué, étant donné que l'émotion d'adulation remplaça la répulsion que ressentaient au début les Philistins. C'est à ce moment-là que `avimalakh désira assurer une trêve. La richesse attire les gens. Ce fut par cette méthode que Yishoq devint célèbre.

HaShem orchestra une famine, car c'était le moyen le plus parfait pour rendre utile la richesse de Yishoq. Personne à part lui ne prospéra durant la famine. Pour finir, Yishoq retourna au lieu d'enseignement de `avrohom, à savoir Ba`ér Shova´. C'était pour indiquer qu'après avoir prospérer matériellement, il retournait désormais à l'étude et enseignement des paroles de HaShem. C'est pourquoi, le verset déclare3 : וַיִּקְרָא בְּשֵׁם ה׳ « et il invoqua dans le nom de HaShem » ; c'est-à-dire qu'il recommença à enseigner au sujet de HaShem, son objectif principal. Nous pouvons voir que le plan de HaShem fut couronné de réussite puisque `avimalakh se déplaça jusqu'à Yishoq, reconnaissant sa grandeur. La renommée de Yishoq était désormais positive. `avimalakh ne désirait aucune trêve avec Yishoq tant que ce dernier vivait à Garor. C'est seulement après ses réussites, après son exil, que Yishoq devint très riche, et cette richesse était une préparation nécessaire pour que d'autres puissent reconnaître la véracité et profondeur de la philosophie de Yishoq.

Les Philistins se rendirent compte qu'en mettant en application la philosophie de Yishoq, on pouvait atteindre la réussite dans ce monde-ci. Ce fut exceptionnellement profond, alors qu'ils subissaient une famine.
1Baré`shith Rabboh 64:7
2Baré`shith 26:15
3Ibid., 25

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