dimanche 27 mars 2016

Les Massôth doivent-elles être cuites en moins de dix-huit minutes ?

ב״ה

Exposer les fausses notions

Les Massôth doivent-elles être cuites en moins de dix-huit minutes ?


Cet article peut être téléchargé ici.

Le peuple juif doit se rendre compte qu'il est guidé et dirigé par bon nombre de personnes incompétentes, ignorantes des choses de la vie, de la science et de la Halokhoh basique, au point de se demander ce que ces gens qui se proclament « rabbin » ont réellement étudié à la Yashivoh. Un exemple supplémentaire de cette incompétence mêlée d'ignorance est la confection des Massôth pour Pésah.

L'un des mythes les plus répandues et enseignés par les rabbins contemporains est que tout le processus de préparation et cuisson des Massôth doit prendre au maximum dix-huit minutes. Depuis le moment où la farine est en contact avec l'eau, en passant par le pétrissage, la pression sous le rouleau à pâtisserie, et l'enroulement de la pâte, et jusqu'à ce que les Massôth soient enfournées, nous aurions dix-huit minutes, pas une seconde de plus, pour faire tout cela !

À première vue, c'est logique et normal pour la plupart des Juifs, puisque c'est ce qu'ils se sont vus enseigner à l'école et parce qu'on trouve une telle affirmation dans de nombreux ouvrages et sites Internet juifs. Voir, par exemple, sur les sites de Lubavitch.lu, Lamed.fr, ou encore sur celui de Hamodia.fr.

Le problème ne concerne pas le fait d'affirmer que dix-huit minutes est le temps qu'il faut pour que la pâte devienne Homés, mais plutôt le moment à partir duquel on doit commencer à compter ces dix-huit minutes. D'après l'opinion populaire rapportée dans les sources susmentionnées, le compte des dix-huit minutes commencerait aussitôt que l'eau entre en contact avec la pâte. Dès ce moment précis, nous n'aurions plus que dix-huit pour complètement cuire la pâte et en faire de la Massoh, car autrement elle deviendrait du Homés. Telle est la « Halokhoh » qui est enseignée par la majorité des rabbins !

Sauf que c'est totalement faux !

Le Talmoudh énonce une règle très importante concernant la manière dont la pâte peut devenir du Homés1 :

Il a été enseigné par nos Rabbins : ayant pétri [la pâte], elle lui donne une forme tandis que sa collègue pétrit à sa place ; ayant donné une forme [à sa pâte] elle la cuit, et sa collègue donne une forme [à sa propre pâte] à sa place, tandis que la troisième [femme] pétrit. [La première] ayant cuit [sa pâte], elle pétrit [à nouveau une autre pâte], et sa collègue cuit [sa propre pâte] à sa place, tandis que la troisième donne une forme [à sa pâte]. Et c'est ainsi que le circuit fonctionne. Tant qu'elles sont occupées [à travailler] la pâte, elle n'arrive pas à la fermentation.
תנו רבנן: לשה, היא מקטפת וחבירתה לשה תחתיה. מקטפת – היא אופה וחבירתה מקטפת תחתיה, והשלישית לשה. אופה – היא לשה, וחבירתה אופה תחתיה, והשלישית מקטפת, וחוזרת חלילה. כל זמן שעוסקות בבצק אינו בא לידי חימוץ

Est-ce que ces « rabbins » qui ont étudié à la Yashivoh depuis l'âge de 13 ans ont même réellement déjà étudié le Talmoudh ? Quiconque a étudié à la Yashivoh (comme moi) sait que le Talmoudh n'est pas étudié, juste feuilleté ! Comment s'appuyer sur des avis de personnes qui ne savent pas de quoi elles parlent ? D'où les faussetés abondantes enseignées par les rabbins contemporains ! Mais les gens leur font aveuglément confiance, juste à cause du titre qu'ils portent, et aussi parce qu'ils sont trop fainéants que pour étudier, vérifier ou réfléchir eux-mêmes !

S'appuyant sur la Halokhoh de nos Sages, le Ramba''m ז״ל clarifie dans son Mishnéh Tôroh ce que nous enseigne ce passage talmudique2 :

Tant que l’homme s’occupe de la pâte, même [si cela se prolonge] toute la journée, elle n’arrive pas à la fermentation. Et s’il a retiré sa main et l’a laissée, et que la pâte a reposé au point qu’on entende un bruit quand on la tape de la main, [cela est un signe qu’]elle a déjà fermenté et elle sera brûlée immédiatement. Et si on entend pas son bruit [quand on tape dessus], si elle a reposé le temps [nécessaire à un homme pour] marcher un Mil, elle a déjà fermenté et sera brûlée immédiatement. De même, si elle a blanchi comme [le visage d’]un homme [qui est pris d’une peur soudaine] dont les cheveux se dresse sur la tête, il est interdit de la consommer mais on n’est pas passible de Koréth.
כָּל זְמָן שֶׁאָדָם עוֹסֵק בַּבָּצֵק, אַפִלּוּ כָּל הַיּוֹם כֻּלּוֹ--אֵינוּ בָּא לִידֵי חִמּוּץ. וְאִם הִגְבִּיהַּ יָדוֹ וְהִנִּיחוֹ, וְשָׁהָה הַבָּצֵק עַד שֶׁהִגִּיעַ לְהַשְׁמִיעַ הַקּוֹל בִּזְמָן שֶׁאָדָם מַכֶּה בְּיָדוֹ עָלָיו--כְּבָר הִחְמִיץ, וְיִשָּׂרֵף מִיָּד; וְאִם אֵין קוֹלוֹ נִשְׁמָע--אִם שָׁהָה כְּדֵי שֶׁיְּהַלַּךְ אָדָם מִיל--כְּבָר הִחְמִיץ, וְיִשָּׂרֵף מִיָּד. וְכֵן אִם הִכְסִיפוּ פָּנָיו, כְּאָדָם שֶׁעָמְדוּ שְׂעָרוֹתָיו--הֲרֵי זֶה אָסוּר לְאָכְלוֹ, וְאֵין חַיָּבִין עָלָיו כָּרֵת

Ainsi, une Massoh n'a absolument pas à être faite en dix-huit minutes. Il n'y a en réalité aucune quantité de temps maximale pour la faire. Même si on devait pétrir la pâte toute une journée, cela ne cause aucun problème ! C'est seulement si la pâte a été laissée au repos pendant dix-huit minutes (le temps qu'il faut pour parcourir la distance d'un Mil) qu'elle aura le temps de fermenter ! Et c'est là que nos pseudos « rabbins » se sont complètement égarés ! Ils ont confondu le temps qu'il faut pour que la pâte fermente si on ne la travaille pas avec le temps qu'il faudrait pour faire une Massoh, ce qui n'a absolument rien à voir ! Et avec une telle ignorance, ils se permettent de nous dire quoi faire et comment, à cause de leur titre de « rabbin » ?

Même le Shoulhon ´oroukh, qu'ils prétendent pourtant suivre, est également très claire sur le sujet3 :

La pâte ne doit pas être laissée sans que l'on ne s'en occupe, même pour un instant, et tant que la pâte est travaillée, même si c'est durant toute la journée, elle n'arrive pas à la fermentation. Et si la pâte n'a pas été travaillée le temps [qu'il faudrait pour marcher] un Mil, elle a fermenté ! Et cette mesure d'un Mil correspond à un quart d'heure plus une portion d'un vingtième dans une heure.
לא יניחו העיסה בלא עסק ואפילו רגע אחד. וכל זמן שמתעסקים בו, אפילו כל היום אינו מחמיץ; ואם הניחו בלא עסק שיעור מיל, הוי חמץ. ושיעור מיל הוי רביעית שעה וחלק מעשרים מן השעה

Un quart d'heure = 15 minutes ; 1/20ème d'une heure = 3 minutes. 15 minutes + 3 minutes = 18 minutes ! Rabbi Yôséf Qa`rô ז״ל, comme le Ramba''m et le Talmoudh avant lui, nous informe donc que si la pâte n'a pas été travaillée durant dix-huit minutes, c'est seulement là qu'elle devient du Homés, et non pas qu'il faudrait dix-huit minutes pour cuire une Massoh depuis le moment où on a mélangé la pâte à l'eau. Ces gens qui se font appeler « rabbin » n'étudient pas même le Shoulhon ´oroukh. En réalité, ils ne font que répéter comme des moutons ce que leurs maîtres égarés leur ont transmis, perpétuant ainsi les erreurs qui leur ont été enseignées à la Yashivoh, sans aucun esprit d'analyse, ou critique ! J'ai souvent l'habitude de dire que même ceux qui prétendent que l'on devrait suivre le Shoulhon ´oroukh ne connaissent même le tiers de ce qu'il contient ! Ils ne suivent ni le Talmoudh, ni le Mishnéh Tôroh, ni le Shoulhon ´oroukh, mais la religion d'hommes qu'on leur a vendue, qui n'a rien à voir avec la religion Divine qu'est le Judaïsme.

Il n'existe aucune contradiction, ni opinion divergente dans nos sources traditionnelles sur ce sujet. Tous sont d'accord sur le fait que tant qu'on s'occupe de la pâte, la pâte ne peut pas devenir Homés. Les dix-huit minutes ne commencent pas lorsque l'eau est entrée en contact avec la pâte, mais lorsque la pâte a été laissée au repos, sans qu'on ne la travaille.

Pour certaines personnes, cela pourrait sembler être une distinction insignifiante. Je leur répondrais qu'elles sont tout autant illégitimes que les rabbins qu'elles suivent, car ne pas voir en quoi cette distinction est importante met à nu leur manque total de connaissance sur le sujet. Cette distinction a des conséquences très graves sur la façon dont les Massôth sont généralement faites aujourd'hui. Quiconque a une expérience basique sur la cuisine ou la cuisson sait qu'un aliment cuit plus intensément lorsqu'il est chauffé à une température plus basse pour une plus longue période de temps. Beaucoup de rabbins ayant ces connaissances basiques déclarent d'ailleurs que ceux qui consomment certaines des Massôth dures faites à la main de notre époque sont en réalité plus susceptibles que n'importe qui d'autre de consommer du Homés ! Certaines des Massôth dures d'aujourd'hui (qui ne sont d'ailleurs pas celles que consommaient nos ancêtres) sont cuites en quelques secondes à peine dans des fours ultra chauffés. Extérieurement, elles ont donc l'apparence d'être bien cuites, mais il se pourrait en réalité qu'elles soient Homés. C'est pour cela que certains préconisent avec insistance de les laisser cuire plus longtemps à des températures inférieures, plutôt que de précipiter le processus de cuisson pour respecter un délai qui n'est même pas halakhique et qui risque de nous faire manger des Massôth qui ne sont en fait même pas totalement cuites !

Cela ajoute des arguments supplémentaires pour préférer consommer des Massôth souples et épaisses plutôt que les biscottes dures et sèches, que certains ont le toupet d'appeler « Massôth » !

Ceux qui cuisent leurs propres Massôth, conformément à la tradition, peuvent être rassurés et garder à l'esprit qu'ils n'ont pas du tout à se presser quand ils le font.

1Pésahim 48b
2Hilkôth Homés Oumassoh 5:13

3`ôrah Hayim 459:2
Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...