ב״ה
Nous
ne sommes pas liés par les passages `aggadiques du Talmoudh
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Il
y a une erreur qui est fréquemment commise par bon nombre de Juifs,
et plus particulièrement dans les milieux Harédhi. Cette
erreur récurrente consiste à prendre tout ce qui se trouve dans le
Talmoudh comme faisant partie de la Tôroh Orale, et cela inclut même
les récits `aggadiques et midrashiques contenus dans le Talmoudh.
Nous
avons déjà expliqué à travers divers articles que les Midhroshim
n'avaient aucune nature contraignante, et qu'ils ne devaient surtout
pas être compris littéralement, mais comme des homélies faites par
nos Sages afin de nous transmettre des leçons et messages moraux. De
ce fait, lorsqu'on est confronté à un Midhrosh sur un passage
biblique, la question n'est pas de savoir si le récit rapporté est
vrai, car ce n'est jamais le cas, mais plutôt ce qu'ont tenté de
nous faire comprendre nos Sages à travers cette histoire
parabolique.
Quant
aux `aggodhôth (histoires) rapportées dans le Talmoudh, elles ne
sont elles non plus pas du tout contraignantes. Parfois, ces
histoires sont vraies, parfois pas du tout, parfois il s'agit
d'exagérations. De même, le fait que des passages bibliques se
retrouvent cités dans des `aggodhôth n’indique pas non plus qu'il
s'agit d'une `aggodhoh rapportant une tradition orale. Il s'agit bien
souvent de raisonnements personnels faits par certains Sages et
rabbins, qui interprétaient un certain verset d'une certaine manière
afin de soutenir leur opinion. Leur interprétation personnelle
pouvait ainsi tout à fait être correcte, tout comme elle pourrait
ne pas du tout l'être. Nous avons de nombreux cas tout au long du
Talmoudh d'interprétations de versets rejetées ou auxquelles
d'autres Sages se sont opposés. De ce fait, il est erroné de penser
que tout ce qui est rapporté dans le Talmoudh est contraignant. En
fait, le Ramba''m זצ״ל
(et
d'autres) est très clair dans son Mishnéh Tôroh (Hilkhôth
Talmoudh Tôroh) sur le fait que la Tôroh Orale n'inclut que ce qui
se trouve dans la Mishnoh, alors que la Gamoro` n'est qu'un
commentaire et développement de la Mishnoh, et n'est donc pas
incluse dans l'expression « Tôroh Orale ». De ce fait,
tout ce qui se trouve dans la Gamoro` n'est pas contraignant. Il faut
faire le tri entre le contenu halakhique de la Gamoro` et son contenu
midrashique et `aggadique.
Les
Juifs qui croient que toute chose rapportée dans le Talmoudh est
contraignante et vraie citent fréquemment le passage de Bakhôrôth
8a
comme preuve de la capacité de nos Sages de déduire des faits
scientifiques à partir uniquement de la Tôroh. Sur cette page du
Talmoudh est rapporté un débat sur le temps de gestation du
serpent, et le Talmoudh y affirmerait que le temps de gestation du
serpent serait de sept ans. Et il y a deux semaines, j'ai reçu
l'e-mail suivant de quelqu'un qui me demandait ceci : « Dans
le commentaire de référence Bekhorot 8a sur Bereshit 3:14, Hazal
enseignent que la gestation du serpent dure 7 ans. Or, la durée
maximale de la gestation du serpent est inférieure à cela. Comment
le Rov explique cela ? ».
C'est une excellente question qu'a posée là cette personne.
Premièrement,
ce passage de la Gamoro` attribut cette affirmation selon laquelle le
temps de gestation d'un serpent serait de sept ans à Rébbi
Yahôshoua´ ban Hananyo`
ז״ל.
Il n'a jamais été dit dans ce passage que ce serait la conclusion
de HaZa''l
ou même une tradition orale.
Deuxièmement,
nous sommes face à une interprétation personnelle de Baré`shith
3:14
par Rébbi Yahôshoua´. Le Hotho''m
Sôfér1
זצ״ל
et
le Ramba''m2,
entre autres, affirment sans détour que ce genre de déduction est
d'origine humaine et non Divine. Lorsque nos Sages expriment des
positions scientifiques, ils peuvent avoir raison comme ils peuvent
avoir tort, car ces déductions et interprétations ne sont pas
d'origines Divines. Par exemple, l'exégèse talmudique faite sur la
nature du firmament n'est absolument pas correcte, et ne peut donc
être une tradition remontant au Sinaï. D'ailleurs, le Talmoudh dit
noir sur blanc que cette exégèse sur la gestation du serpent est un
enseignement qui remonte jusqu'à Rébbi Yahôshoua´ ban Hananyo`,
sous-entendant par-là que personne avant lui n'avait jamais avancé
une telle hypothèse sur la base de ce verset de Baré`shith
3:14.
Cela est encore plus clair dans le Yalqout Shim´ôni3,
qui rapporte une version différente de la Gamoro` susmentionnée :
Un
certain philosophe cherchait à connaître la période de gestation
du serpent. Il en observa certains qui s'accouplaient, les captura,
les plaça dans un ustensile, et les nourrit. Lorsque les anciens
arrivèrent à Rome, ils virent Rabbon Gamli`él et lui demandèrent
« Après
combien de temps un serpent donne-t-il naissance ? ».
Il fut incapable de leur répondre, et son visage tomba4.
Rébbi Yahôshoua´ le rencontra et lui demanda pourquoi il était si
abattu. Il répondit : « On
m'a posé une question, et je fus incapable d'y répondre ! ».
Rébbi Yahôshoua´ lui demanda : « Et
quelle était-elle ? ».
Il répondit : « Après
combien de temps un serpent donne-t-il naissance ? ».
Rébbi Yahôshoua´ dit : « Après
sept ans ! ».
Rabbon Gamli`él lui demanda : « Comment
le sais-tu ? ».
Rébbi Yahôshoua´ répondit : « Le
chien est un animal sauvage impur et donne naissance après cinquante
jours, et un animal domestique impur donne naissance donne naissance
après douze mois. Or, il est dit [au sujet du serpent] :
''Maudit sois-tu parmi tous les animaux domestiques et parmi tous les
animaux sauvages des champs''.5
Tout comme un animal domestique est maudit sept fois plus qu'un
animal sauvage, de même, le serpent est maudit sept fois plus qu'un
animal domestique ».
Vers la soirée, Rabbon Gamli`él sortit et leur répondit. [le
philosophe] commença à cogner sa tête contre un mur et dit :
« J'ai
travaillé et me suis consacré à cela pendant sept ans, et voici
que celui-ci vient et parvient à répondre aisément ! »
Nous
pouvons clairement voir que cette conclusion de sept ans de gestation
chez le serpent n'est pas une tradition orale remontant au Sinaï,
mais bien le fruit des propres déductions et interprétations de
Rébbi Yahôshoua´, à tel point que même Rabbon Gamli`él n'en
avait jamais entendu parler avant que Rébbi Yahôshoua´ ne la lui
apprenne.
Troisièmement,
le Talmoudh lui-même affirme que les Sages n'avaient aucune
tradition orale, ni même de sources de connaissances spéciales,
concernant le monde naturel. Par exemple, le Talmoudh rapporte que
les rabbins apprenaient de nombreuses informations relatives à
l'agriculture auprès des descendants de Sé´ir. À une autre
occasion, le Talmoudh rapporte que Rov ז״ל
passa
dix-huit mois avec un berger afin d'apprendre les différentes plaies
pouvant affecter les brebis. Ailleurs, le Talmoudh rapporte que Rébbi
Shim´ôn ban Halafto`
ז״ל
faisait
de nombreuses expériences pour découvrir certaines informations. Le
Talmoudh signale que le manque de connaissances que Rébbi Zéro` ז״ל
avait
des sciences naturelles le rendirent incapable de prendre des
décisions halakhiques sur le sang menstruel. (Et cela dit en
passant, le manque de connaissances scientifiques de l'écrasante
majorité des rabbins d'aujourd'hui les discrédite totalement
lorsqu'ils prennent des décisions relatives à la technologie, alors
qu'ils ne savent pas de quoi ils parlent. De même, puisque les
Harédhim
n’observent pas la création et ne s'y intéressent pas, allant
jusqu'à bannir la science, ils ne sont pas crédibles dans bon
nombre de domaine, comme par exemple lorsqu'il s'agit de déterminer
la mesure de la taille d'une olive ou d'un œuf.) Et enfin, le
Talmoudh lui-même rapporte que Rébbi Yahoudhoh Hannosi` ז״ל
(le
compilateur de la Mishnoh) considérait que plusieurs savants non
Israélites avaient démontré que certains Sages étaient dans
l'erreur concernant des sujets fondamentaux relatifs à l'astronomie.
Dans la version même rapportée dans le Yalqout, nous voyons
clairement que tous les Sages n'étaient pas capables de déduire de
la Tôroh des choses relatives à la biologie, la zoologie, etc.
Après
avoir dit tout cela, la gestation du serpent dure-t-elle réellement
sept ans ?
Pour
éviter de dire que des Sages ont pu commettre des erreurs, se
tromper, etc. (alors que le Talmoudh contient un traité entièrement
consacré aux erreurs halakhiques de nos Sages et la façon dont on
les corrigeait, indiquant par-là qu'ils n'étaient pas infaillibles,
contrairement à ce que croient les Harédhim,
qui attribuent une qualité d'infaillibilité même aux rabbins
d'aujourd'hui et à leurs Rébbé im. Les Sages étaient des êtres
humains, et donc capables d'erreurs, et le Talmoudh n'a pas peur de
l'affirmer), certains comme le Rov Shaya font des acrobaties pour ne
pas répondre clairement à la question (voir ici).
Il
a été confirmé que les serpents femelles donnent parfois naissance
quelques années après l'accouplement. Cela semble dû à leur
capacité à stocker du sperme. Il a été avancé que dans certains
cas extrêmes, cela résultait même de la « momification »
à long terme des embryons. Dans d'autres cas, il a été observé
que des serpents étaient capables de se reproduire par
parthénogenèse, c'est-à-dire sans mâle. Certains scientifiques
avançaient dans le passé que tous les cas de femelles enceintes
seules sont à la parthénogenèse, et non pas au stockage de sperme
ou d'embryons d'une copulation antérieure. Mais récemment, des
recherches génétiques ont montré que dans au moins certains cas,
du sperme avait été stocké de copulations antérieures.
Néanmoins,
bien que l'affirmation de Rébbi Yahôshoua´ semble être un exemple
étonnant d'une information scientifique déduite à partir de la
Tôroh elle-même, elle pose de nombreuses difficultés.
Premièrement,
bien que dans un cas il fut rapporté qu'un acrochordus arafurae
accoucha exactement sept ans après la copulation, ce fut un cas
unique. Le temps de gestation maximum à avoir été observé est de
neuf ans, et c'est produit avec un thamnophis. Là encore, un cas
unique. La majorité des serpents ne stockent pas du tout de sperme,
et même dans le cas de ceux qui le font, c'est généralement pour
une période inférieure à sept ans. Il n'existe aucun type se
serpent ayant une gestation de sept ans. Par contre, des serpents à
un niveau individuel peuvent donner naissance n'importe quel nombre
d'années après la copulation, de quelques semaines à neuf ans ou
plus.
Deuxièmement,
la source talmudique de l'affirmation faire par Rébbi Yahôshoua
est une exégèse basée sur la comparaison de la gestation du
serpent avec celle d'un âne, et la gestation d'un âne par rapport à
celle d'un chat (ou d'un chien, dans la version du Yalqout), et il y
est dit que la gestation d'un âne durant un an, celle d'un serpent
dure sept fois plus, c'est-à-dire sept ans. Mais bien que la
gestation d'un âne est bien d'un an, la période de gestation des
chats dure entre 61 et 69 jours, tandis que celle des chiens dure
entre 59 et 65 jours, ce qui est beaucoup plus que les 52 et 50 jours
mentionnés dans ce passage de la Gamoro (le passage étant assez
long, je ne l'ai pas traduit ici, mais j'invite tous ceux qui sont
capables de lire Bakhôrôth 8a-b par eux-mêmes de le faire, même
via un texte traduit. Certains sites proposent de lire le Talmoudh en
anglais pour ceux qui ne seraient pas capables de le lire en
araméen). Dans ce cas, les données sur les animaux utilisées par
Rébbi Yahôshoua´ comme base de son exégèse sont incorrectes !
En
conclusion, comme je l'ai dit à la personne qui m'a soumis cette
question :
- Ce n'est pas HaZa''l qui ont dit que le serpent avait une gestation de sept ans, mais Rébbi Yahôshoua´ ban Hananyo` ;
- c'est une interprétation personnelle du verset de Baré`shith 3:14 que fit Rébbi Yahôshoua´, et non pas une tradition sinaïtique. Par conséquent, l'opinion qu'il avance n’implique que lui, et non HaZa''l ;
- le Hotho''m Sôfér et le Ramba''m (et d'autres Ri`shônim et `aharônim) que ce genre de passages talmudiques sont des déductions humaines et non pas d'origines Divines. Par conséquent, si ce genre de propos sont scientifiquement corrects, on peut les accepter, sinon on doit les rejeter. Il ne s'agit en aucun cas de passages halakhiques ;
- il ne faut pas croire que parce que quelque chose est rapporté dans le Talmoudh c'est que cela signifie qu'il s'agit d'une vérité absolue ou qui engage HaZa''l dans leur ensemble.
Dans
le cas de la gestation du serpent, bien que parfois il peut être
vrai qu'un serpent peut être en gestation pendant sept ans, en fin
de compte il est faux d'affirmer que les serpents ont une période de
gestation de sept ans, d'autant plus que les données sur lesquelles
se base ce calcul n'étaient pas correctes.
La
Tôroh Orale est la tradition qui s'est transmise sur l'application
des Miswôth.
Tout le reste rapporté dans le Talmoudh n'a pas de valeur
contraignante. Voilà pourquoi les Ga`ônim et les Ri`shônim ne
reprenaient du Talmoudh que le contenu halakhique, laissant de côté
le contenu `aggadique et midrashique. C'est pour cela, par exemple,
qu'il n'y a aucune `aggodhoh dans le Mishnéh Tôroh. Par contre,
ceux qui veulent lire les `aggodhôth et les Midhroshim du Talmoudh,
sans le contenu halakhique, peuvent évidemment lire le célèbre
ouvrage intitulé עין
יעקב
« ´én
Ya´aqôv » (que vous pouvez acheter en français notamment ici
ou encore ici).
Il
n'y a donc pas de honte à dire que certains de nos Sages ont pu
commettre des erreurs ou se tromper, surtout dans des domaines
n'ayant rien à voir avec la Halokhoh ! Vous pouvez donc dormir
tranquille, car tout ce qui est dans le Talmoudh n'est pas
contraignant. Ce sont en fait ceux qui ne reconnaissent pas cela,
mais attribuent une origine Divine à chaque affirmation contenue
dans le Talmoudh, qui sont dans des problèmes et sont confrontés à
des contradictions entre ce qu'ils croient être Divin et la réalité.
C'est ainsi qu'au lieu de reconnaître que certains Sages se sont
trompés, bon nombre de Harédhim
diront que ce sont simplement les scientifiques qui sont en retard et
qui se trompent. Ironique de la part de gens qui, eux-mêmes, ne
connaissent rien à la science !
1Dans
son commentaire sur Béso` 5a
2Dans
son introduction à son « Commentaire sur la Mishnoh »
3Baré`shith
3, `ôth 30
4C'est-à-dire
qu'il en fut affligé
5Baré`shith
3:14