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Pourquoi
peut-on enseigner la Tôroh aux chrétiens mais pas aux musulmans
d'après le Rambo''m ?
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article peut être téléchargé ici.
Il
y a quelques temps j'avais publié un article intitulé « Musulmans
et Chrétiens : Peut-on leur enseigner la Tôroh ? »,
dans lequel je rapportais une Tashouvoh du Rambo''m où il tranchait
que bien qu'il était permis d'enseigner la Tôroh aux Chrétiens,
nous ne devons pas l'enseigner aux Musulmans. Certaines raisons
avaient été données, et je vais davantage développer ce sujet
dans le présent article.
Au
cours des dernières années, j'ai beaucoup échangé oralement et
par courriers électroniques avec des musulmans chiites et sunnites.
Nos conversations abordaient aussi bien la religion que la politique.
Quand on parle de religion avec un musulman, on comprend vite que
l'Islam, tout en se référant aux Juifs (et aux chrétiens) en tant
que « peuples du Livre » (le livre étant la Bible),
considère les écritures juives comme ayant été complètement
corrompues au fil du temps et même délibérément adultérées par
les Juifs, le tout dans le but supposé de cacher de prétendus
passages qui annonceraient Mouhammad et l'islam.
Voici
d'ailleurs ce qui est dit dans le hadith suivant (citant
Mouhammad)1 :
Rapporté
par Ubaidullah bin ‘Abdullah: ‘Abdullah bin ‘Abbas a déclaré:
« Ô le groupe des musulmans! Comment pouvez-vous interroger
les gens des Écritures sur quoi que ce soit alors que votre Livre
qu'Allah a révélé à votre Prophète contient les dernières
informations d'Allah et qu'il est pur et non déformé ? Allah
vous a dit que les peuples des Écritures (Juifs et Chrétiens) ont
modifié certains Livres d'Allah, les ont déformé, ont écrit
quelque chose de leurs propres mains et ont déclaré: ''Cela vient
d'Allah'', de manière à obtenir un gain mineur. Les connaissances
qui vous sont parvenues de devraient-elles pas vous empêche de les
questionner? Non, par Allah, nous n’avons jamais vu un homme
d’entre eux vous poser des questions à ce sujet (le Livre
Al-Qur`an) qui vous a été révélé.
En
d’autres termes, le Qur`an enseigne que la Bible juive, bien que
pouvant contenir quelques allusions au fait qu’elle a été révélée
par Dieu, est à présent totalement peu fiable. Une telle attitude
freine presque immédiatement la recherche d’un terrain d'entente
commun entre Juifs et musulmans; il devient impossible de faire
valoir des arguments et des significations plus précises sur base
des Écritures. Les prophéties bibliques sur l’avenir glorieux du
peuple d'Israël n’ont aucune signification pour un musulman (et
sont même exaspérantes, car elles contredisent la conquête
prophétique du monde par l’islam), tout comme les prétentions
bibliques juives concernant la Terre d’Israël.
S'étant
complètement coupé des sources bibliques juives (tout en
prétendant se fonder sur elles), il n'est donc pas étonnant que
l'Islam n'ait pas encore fait de recherches approfondies sur leur
propre version de la théologie du remplacement, ainsi que sur
l'anti-judaïsme omniprésent dans la société musulmane en général.
Les musulmans sont généralement silencieux au sujet des maux causés
aux Juifs au nom de leur religion depuis le fondement même de
l'islam, alors que beaucoup de chrétiens font cet examen de
conscience depuis des décennies. Les chrétiens respectent les
Écritures juives en tant que sainte Parole de Dieu et, pour certains
d'entre eux, cette révérence leur permet de réexaminer leurs
propres croyances chrétiennes et de les confronter à la Bible
hébraïque.
Le
Rambo''m (Maïmonide), l'un des plus grands commentateurs Juifs de la
Tôroh et de la philosophie, n'a pas ignoré ces différentes
approches sur les Écritures juives.
Halakhiquement
parlant, à cause du culte qu'ils rendent à un homme qu'ils
considèrent comme un dieu, le Rambo''m considérait les chrétiens
comme des adorateurs d'idoles (´ôvadhé
´avôdhoh Zoroh). Il a écrit dans son commentaire sur la
Mishnoh2 :
Sache
que cette nation chrétienne, qui revendique un messie, ainsi que ses
nombreuses sectes différentes, est une adoratrice des idoles et que
toutes ses fêtes sont interdites. Nous les traitons comme des païens
pour les questions religieuses. Par conséquent, il faut savoir que
dans chacune des villes de la nation chrétienne qui possède un
autel, qui indique leur lieu de culte, il s’agit sans aucun doute
d’une maison païenne d’idolâtrie.
Dans
son Mishnéh Tôroh, émet le décret suivant3 :
Les
Nôsariyim (chrétiens) sont des
´ôvadhé ´avôdhoh Zoroh, et le
dimanche est le jour de leur `édh (fête). Par conséquent, il
est `osour de commercer avec eux en `aras Yisro`él le
jeudi et le vendredi de chaque semaine, et inutile de mentionner
le dimanche lui-même, où cela est `osour en tout lieu. Et c'est
ainsi qu'ils se conduisent avec eux lors de chacun de leurs fêtes.
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הַנּוֹצְרִיִּים
עוֹבְדֵי עֲבוֹדָה זָרָה הֶן,
וְיוֹם
רִאשׁוֹן יוֹם אֵידָם הוּא.
לְפִיכָּךְ
אָסוּר לָשֵׂאת וְלָתֵת עִמָּהֶן
בְּאֶרֶץ יִשְׂרָאֵל,
יוֹם
חֲמִישִׁי וְיוֹם שִׁשִּׁי שֶׁבְּכָל
שַׁבָּת וְשַׁבָּת;
וְאֵין
צָרִיךְ לוֹמַר יוֹם רִאשׁוֹן עַצְמוֹ,
שְׁהוּא
אָסוּר בְּכָל מָקוֹם.
וְכֵן
נוֹהֲגִין עִמָּהֶן,
בְּכָל
אֵידֵיהֶן
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Sa
vision du christianisme en tant qu’idolâtrie était inébranlable.
Vivre en dehors de la chrétienté et à l’écart de la censure de
l’Église lui a permis de parler beaucoup plus librement du
christianisme que ses frères européens ne pourraient jamais le
faire. De l'autre côté, le Rambo''m considérait l’islam (au
milieu duquel il vivait) comme une foi non idolâtre, car,
contrairement au christianisme, il n’associait aucun partenaire à
Dieu, ni ne vénérait les statues ou les images de divinités ou de
personnes saintes (choses courantes dans la chrétienté). Pour cette
raison, l'Islam, avec son rejet de l'idolâtrie, occupait une place
privilégiée pour le Rambo''m parmi toutes les religions non juives
(qu'il considérait toujours comme fausse). Il a écrit
dans sa lettre
à ´ôvadhyoh le Converti :
Ces
Ismaélites ne sont pas du tout des adorateurs d'idoles. Le paganisme
est depuis longtemps retranché de leur bouche et de leur cœur et
ils vénèrent le Dieu unique correctement et sans aucune tache.
Néanmoins,
tout en accordant un statut monothéiste à l’islam, le Rambo''m
n’avait finalement pas beaucoup d'estime pour l’islam ni pour son
fondateur, qualifiant Mouhammad de « faux prophète »
et de « fou », écrivant ceci dans son épître
au Yémen :
Après
[Jésus] s'est levé le fou qui a imité son précurseur [Jésus],
puisqu'il lui a ouvert la voie. Mais il a ajouté l'objectif
supplémentaire consistant à obtenir la domination et la soumissions
[talb al-mulk; poursuite de la souveraineté] et il a inventé ce qui
était bien connu [l'islam].
Le
christianisme et l'islam étaient à ses yeux de fausses religions,
mais pour le Rambo''m, les chrétiens avaient un avantage
considérable sur les musulmans. De manière tout à fait
remarquable, considérant sa faible opinion du christianisme, le
Rambo''m pensait clairement que c’était les chrétiens, et non les
musulmans purement monothéistes, qui avaient beaucoup plus de
chances de découvrir les vérités enfermées dans la Tôroh et
d’autres écritures juives. Tout cela était dû au fait que les
chrétiens, contrairement aux musulmans, considéraient que les
Écritures juives avaient une validité continue, n'ayant pas été
corrompues par les Juifs, mais préservées de manière surnaturelle
par Dieu Lui-même. (Bien qu'il faille noter qu'historiquement,
certains chrétiens accusaient les Juifs de corrompre leurs propres
Écritures pour cacher les allusions qui s'y trouveraient sur Jésus
et la Trinité, et préféraient des traductions grecques ou latines
« supérieures », écrites par l'Église, renonçant au
texte hébreu utilisé par les Juifs) . Puisque les musulmans ont
rejeté l'authenticité des Écritures juives, les considérant comme
fausses et mensongères, mais que les chrétiens leur accordaient un
grand respect et une grande vénération, le Rambo''m a donné son
accord pour enseigner la Tôroh et le judaïsme aux chrétiens mais
pas aux musulmans, permettant ainsi de rapprocher les chrétiens de
la foi juive :
Il
est permis d'enseigner les commandements aux chrétiens et de les
attirer dans notre religion, mais il n'est pas permis de faire la
même chose avec les Ismaélites.
La
vision infiniment plus révérencielle des écritures juives dans le
christianisme aide à expliquer le nombre beaucoup plus important de
chrétiens qui se convertissent au judaïsme ou qui adhèrent aux
lois Noahides telles qu'elles ont interprétées par les
rabbins.
1Boukhari,
Volume 9, Livre 93, n°614
2´avôdhoh
Zoroh 1:3
3´avôdhoh
Zoroh Wahouqqôth Haggôyim 9:4