ב״ה
Prier
sur les tombes des Saddiqim
Cinquième
Partie
- Est-il approprié de visiter les cimetières le trentième jour après le décès ou à la date du Yohrzeit, même juste pour honorer le défunt, comme ceux qui visitent la tombe du Mahara''l ז״ל à Prague, celle du Go`ôn de Wilno` ז״ל à Vilnius, etc. ?
Aussi
courante que cette pratique puisse -être de nos jours, nous voyons
que les Pôsqim les plus éminents la méprisaient. Le Hofés
Hayim ז״ל
écrit1 :
Et ce qui vient
d'être dit, à savoir, visiter les tombes, ne se peut que lorsqu'on
se tient à quatre pas de la tombe, même des tombes juives, car nous
craignons les Mauvais Esprits.
Nous voyons dans
les écrits du `ariZa''l que l'on ne doit se rendre au cimetière que
pour la cérémonie d'enterrement [mais pas à d'autres moments], et
cela est plus particulièrement vrai si l'on ne s'est pas repenti du
péché des émissions nocturnes, car alors le Mauvais Esprit
s'attache à lui.
Le
Ba`ér Hétév3
ז״ל
cite
également les propos du Moghén `avrohom. Ce qui est paradoxal dans
toute cette histoire est que la Hasidhouth
est principalement basée sur la Qabboloh lurianique, c'est-à-dire
les pratiques mystiques du `ari, alors qu'il était opposé au fait
de se rendre régulièrement dans les cimetières. Or, s'il y a bien
quelque chose qui caractérise aujourd'hui les Hasidhim,
c'est bien le fait de se rendre régulièrement sur les tombes des
rabbins et Saddiqim.
Le `ariZa''l était
opposé au fait de visiter les tombes à un moment autre que
l'enterrement. Nous avons déjà fait remarquer que de nos jours, des
gens s'y rendent en groupes et s'adonnent à des discussions futiles.
Il est préférable de ne pas y aller.
La
source du Pasaq du `ari se trouve dans Sha´ar Rouah
Haqqôdhash5,
où il est rapporté que Rov Hayim Vital ז״ל
demanda
conseil auprès du `ari concernant l'obligation de se rendre au
cimetière et demander pardon auprès du défunt que l'on avait
insulté. Le `ari lui conseilla de marcher autour de l'entièreté du
cimetière, des quatre côtés, et de prendre soin de ne pas
s'approcher à au moins quatre pas de n'importe laquelle des tombes,
afin que les Mauvais Esprits ne se saisissent pas de lui, et plus
particulièrement les esprits causés par les émissions séminales
impures.
De
même, le Go`ôn de Wilno` ז״ל
était
catégoriquement opposé au Minhogh de visiter les tombes. Dans la
fameuse lettre d'au revoir qu'il rédigea à destination de sa femme
et ses enfants lorsqu'il se rendit en Terre Sainte, il leur écrivit
ceci :
Prenez grandement
soin de ne pas du tout vous rendre au cimetière, car là les Mauvais
Esprits s'attachent à vous, et plus particulièrement aux femmes.
Tous les problèmes et péchés découlent de cela.
Maintenant,
si quelqu'un ne prie pas dans le cimetière, mais ne s'y rend que
pour honorer le défunt, est-ce un Minhogh Koshér ?
Le
Hatho''m Sôfér6
ז״ל
y
était opposé, et décrivit même cette pratique comme faisant
partie des דַרְכֵי
אֱמוֹרִי « Darakhé
`amôri », expression qui signifie littéralement « les
voies des Émoréens », et qui désigne un rite superstitieux
et idolâtre. Il cite même la Halokhoh suivante que rapporte le
Ramba''m ז״ל
dans
son Mishnéh Tôroh7 :
Nous
marquons les tombes et construisons une pierre tombale sur la
tombe. Quant aux Saddiqim, nous ne construisons pas pour
eux de pierre tombale sur leurs tombes. Leurs paroles sont leur
souvenir. Un homme ne visitera pas les
tombes.
|
וּמְצַיְּנִין
אֶת הַקְּבָרוֹת,
וּבוֹנִין
נֶפֶשׁ עַל הַקֶּבֶר;
וְהַצַּדִּיקִים,
אֵין
בּוֹנִים לָהֶם נֶפֶשׁ עַל
קִבְרוֹתֵיהֶן--דִּבְרֵיהֶם
הֶם זִכְרוֹנָם.
וְלֹא
יִפְנֶה אָדָם לְבַקַּר הַקְּבָרוֹת
|
Le
Hatho''m Sôfér
note que la source de cette Halokhoh du Ramba''m est la Mishnoh de
Samohôth 8:1. Il rapporte8 :
Dans le traité
Samohôth (Chapitre 8, Mishnoh 1), HaZa''l
ont enseigné : « On ne peut pas se rendre au cimetière
pour vérifier le mort au-delà de trois jours [après le décès]
sans craindre que cela soit du Darakhé `amôri. Il est une fois
arrivé que des vivants aient visité la tombe et découvert un [mort
présumé] qui vécut après cela pendant vingt-cinq ans ».
Ainsi,
il est clair et net que pour nos Sages du Sanhédhrin, visiter les
tombes une fois que trois jours sont passés après le décès est
une pratique idolâtre.
Dans
les trois premiers jours du décès de quelqu'un, on visitait sa
tombe pour vérifier le mort. Qu'est-ce que cela signifie-t-il ?
Le
Nahalath Ya´aqôv ז״ל
(un
commentaire contemporain imprimé sur la page du traité Samohôth)
a écrit ceci :
La visite consiste
à vérifier si celui que l'on pensait mort avait perdu connaissance
ou était réellement mort. Le Parishoh9
Yôréh Dé´oh 394:3 écrit que cette Halokhoh n'était
d'application que du temps de HaZa''l,
étant donné que durant cette période-là les morts étaient placés
dans des grottes (et n'étaient pas recouverts de terre), et la
visite n'avait pour unique but que de retirer le gros bloc de pierre
de l'entrée de la grotte et regarder à l'intérieur10.
Mais à notre époque où les morts sont couverts dans la terre, il
n'y a plus aucune nécessité d'aller le visiter et vérifier.
Et
la raison pour laquelle cette visite de vérification ne pouvait se
faire que dans les trois premiers jours après le décès est que
nous avons une tradition selon laquelle ressusciter n'est possible
que dans les trois jours qui suivent le décès. Seul Moshiah
pourra ressusciter quelqu'un mort depuis plus de trois jours.
Ce
passage du Nahalath Ya´aqôv est commenté de la façon
suivante par le Hatho''m
Sôfér :
D'après le
Parishoh11,
visiter la tombe est une fois de plus du Darakhé `amôri. Et c'est
là la source des paroles du Ramba''m.
Certains
réinterprètent les propos du Ramba''m et du Hatho''m
Sôfér en disant qu'ils ne pensent pas du tout qu'ils aient
considéré le fait de visiter les tombes comme faisant partie des
Darakhé `amôri. Sur la phrase du Ramba''m, וְלֹא
יִפְנֶה אָדָם לְבַקַּר הַקְּבָרוֹת
« Et
un homme ne visitera pas les tombes », ils font remarquer
que plusieurs explications y ont été apportées. La première étant
que le Ramba''m ne parlait pas ici de se rendre au cimetière, mais
de la pratique consistant à ouvrir les tombes pour vérifier si les
personnes s'y trouvant étaient bien mortes.12
C'est cela que le Ramba''m et le Hatho''m
Sôfér auraient considéré comme faisant partie des Darakhé
`amôri, et non le fait de visiter les tombes. Le Radba''z ז״ל
est
convaincu que c'est là l'intention des propos du Ramba''m et déclare
explicitement dans son commentaire sur le Mishnéh Tôroh du Ramba''m
que le Minhogh du peuple d'Israël est de permettre la visite des
tombes.
La
deuxième explication a été donnée par Rabbi Yôséf Qa`rô ז״ל.
Dans son Kasaf Mishnéh13
(son commentaire sur le Mishnéh Tôroh du Ramba''m), il se base sur
le Riva''sh ז״ל,
et écrit que lorsque le Ramba''m a déclaré que וְלֹא
יִפְנֶה אָדָם לְבַקַּר הַקְּבָרוֹת
« Et
un homme ne visitera pas les tombes », son intention était
de décourager tout attachement à la tombe, mais pas nécessairement
le fait de la visiter. Il conclut en disant que visiter une tombe
n'est en rien du Darakhé `amôri.
Je
vous laisse le soin de consulter et lire par vous-mêmes ces sources
et vous faire votre propre idée. Mais lorsqu'on regarde le passage
du Mishnéh Tôroh susmentionné dans son contexte et le commentaire
du Hatho''m Sôfér,
il est clair et évident qu'ils veulent dire ce qu'ils disent,
c'est-à-dire qu'on ne doit pas se rendre au cimetière visiter les
tombes. (Visiter le cimetière pour entretenir la tombe lorsqu'il n'y
a pas quelqu'un qui s'en occupe à plein temps est différent.)
- En conclusion
Les plus grands
des Pôsqim de premier plan s'opposent tous au fait de visiter les
tombes. Le Hatho''m Sôfér
considère cette pratique comme n'étant rien d'autre que de
l’idolâtrie. Quant au Ramba''m, il considère cette pratique comme
étant une interdiction catégorique.
Par conséquent,
bien que ceux qui visitent les tombes s'appuient sur des rabbins
influents qui leur enseignent à le faire, celui qui désire agir
100% d'une façon appropriée, et qui ne souhaite pas faire quelque
chose qui pourrait potentiellement être interdit, devrait prendre en
compte les grands maîtres cités tout au long de ces cinq parties.
Tout cela nous
montre que la majorité des Juifs de notre temps ont fait le choix de
perpétuer leurs Minhoghim au dépend de la Halokhoh.
1Mishnoh
Barouroh 559:41
2À
la fin du Chapitre 559
3Chapitre
559
4559:7
5Page
49
6Shou''th
Yôréh Dé´oh, Responsa 338
7Hilkôth
`éval 4:4
8Shou''th
Yôréh Dé´oh, Responsa 338
9Un
commentaire sur le `arbo´oh Tourim
10Pour
vérifier si celui qui s'y trouvait s'était juste évanoui et
s'était à présent réveillé.
11Qui
dit qu'à notre époque il n'y a plus lieu de vérifier si le mort
est bien mort, étant donné que même si un homme présumé mort
était réellement vivant et que nous avons pensé à tort qu'il
était mort, après qu'il ait été recouvert de terre durant plus
de dix minutes, il n'y a plus d'intérêt à vérifier, car la
personne n'a pratiquement plus aucune chance de survie après cela.
12Radba''z
sur Hilkôth `éval 4:4 ; Tashouvath HaRiva''sh 421
13Sur
Hilkôth `éval 4:4