vendredi 12 juin 2020

Le judaïsme orthodoxe n'est pas le judaïsme originel de nos ancêtres


בס״ד

Le judaïsme orthodoxe n'est pas le judaïsme originel de nos ancêtres


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Lorsqu'on lui a demandé de définir l'orthodoxie il y a 90 ans, le rabbin Leo Jung a expliqué que le mot « orthodoxe » était insuffisant pour expliquer la nature du judaïsme orthodoxe car le mot lui-même n'exprimait rien de positif sur la foi juive. (En effet, le terme « orthodoxe » fut donné de façon dénigrante par les Juifs libéraux aux Juifs qui rejetaient les changements que les libéraux tentaient d'introduire dans la pratique juive.)

Il a plutôt défini l'orthodoxie comme « la véritable foi historique d'Israël, basée sur la révélation du Sinaï, de la Ṭôroh, du ṬaNa''Kh, de l'enseignement des rabbins. L'orthodoxie est l'expression juive du judaïsme. L'orthodoxie englobe l'adoration et la charité, la justice publique et le dévouement privé, le service social et la pureté individuelle ». Il a défini l'orthodoxie comme le judaïsme « vrai basé sur la Ṭôroh ».

C'est la définition que tous les orthodoxes acceptent encore aujourd'hui, et il n'est pas rare d'entendre et de lire partout que le judaïsme orthodoxe est la continuité de la foi de nos ancêtres et la seule forme légitime et véritable du judaïsme. Raison pour laquelle ils rejettent toutes les autres branches du judaïsme (libéraux, massortim, reconstructionnistes, etc.).

Sauf que cette compréhension de ce qu'est le judaïsme orthodoxe est erronée.

Bien que le judaïsme orthodoxe se considère comme la forme la plus ancienne du judaïsme, la vérité est que ce n'est tout simplement pas le cas. Le judaïsme orthodoxe sous la forme que nous connaissons actuellement a vu le jour vers la fin du 19ème siècle, et était une réponse successive aux mouvements de la Hasqoloh, de la réforme et du sionisme laïc. Hillél ז״ל et Rabban Gamli`él ז״ל, Rash''i ז״ל et le Rambo''m ז״ל, Ribbi Yôséph Qa`rô ז״ל et Ribbi Möshah `issarles ז״ל n'étaient pas des Juifs orthodoxes. Prétendre l'inverse serait non seulement un anachronisme, mais tout simplement une fausseté, car il y a pas mal de différences entre ce que l'on pourrait considérer comme « orthodoxe » aujourd'hui et certaines des vues et pratiques des grands rabbins du passé. D'ailleurs, il n'est pas rare que les orthodoxes, qui se prétendent être une continuité des enseignements ancestraux, censurent les enseignements des grands rabbins du passé qui vont à l'encontre de leurs doctrines actuelles. Il existe des exemples par milliers de telles censures !

Il serait plus correct de définir l'orthodoxie comme la forme ACTUELLE du judaïsme qui se veut la plus proche de la Ṭôroh parmi les grands mouvements existant AUJOURD'HUI. C'est une tentative de préserver le judaïsme du passé en faisant le moins de concessions possibles avec la modernité (mais même là, cette définition serait erronée, car de plus en plus de Juifs orthodoxes renoncent à certains pratiques ou croyances lorsqu'elles ne seraient plus en phase avec le temps). C'est la façon dont cette préservation devrait se produire au 21ème siècle qui définit alors les différences entre les diverses tendances au sein du judaïsme orthodoxe (des orthodoxes modernes aux Ḥarédhim), car toutes luttent pour maintenir leur foi, leurs pratiques et leur identité à l'ère de la mondialisation, mais de diverses façons.

Non, le judaïsme orthodoxe n'est pas la forme originelle et authentique du judaïsme ; c'est seulement le mouvement juif actuel qui tente d'être le plus proche de la Ṭôroh et ses enseignements.

dimanche 7 juin 2020

Comment comprendre les enseignements des Sages


בס״ד

Comment comprendre les enseignements des Sages

Le Rambo’’m VS le Mahara’’l


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Le Rambo’’m ז״ל (Maïmonide) est connu comme le paradigme du judaïsme rationaliste. Chaque fois que quelqu'un veut montrer à quel point le judaïsme est rationnel, il se retrouve souvent à citer le Rambo’’m. D'un autre côté, le Mahara’’l ז״ל est le champion de l'approche non rationaliste (mystique) du judaïsme. On entendra souvent une Gamaro`, qui semble absurde, être expliquée allégoriquement en raison de l'approche du Mahara’’l. En outre, le fait que le Mahara’’l croyait en l'astrologie, les démons et autres créatures et méthodes mystiques, alors que le Rambo’’m rejetait leur réalité (ou les concevait différemment), sépare ces deux grands penseurs. Cependant, après avoir lu l’ « Introduction au chapitre de Ḥélaq » du Rambo’’m, nous pouvons voir que ces deux géants de la Ṭôroh, qui sont aux extrêmes opposées du conflit rationnel vs non rationnel, avaient une approche très similaire pour comprendre les parties `aggadiques de la Gamaro`.

Voyons tout d’abord ce que dit le Mahara’’l :[1]

Tu verras maintenant que la plupart des mots des Sages étaient sous forme de métaphores et d'analogies des sages ... à moins qu'ils ne déclarent qu'une histoire particulière n'est pas une métaphore, il faut supposer que c'est une métaphore. Les questions d'une grande profondeur ont été généralement exprimées par les Sages en utilisant des métaphores et doivent être comprises comme des métaphores à moins qu'elles ne soient explicitement indiquées comme devant être prises à la lettre. Et par conséquent, il ne faut pas s'étonner de trouver dans les paroles des Sages des choses qui semblent illogiques et éloignées de l'esprit. (Barokhôth 61a : le Yéṣar Hora´ ressemble à une mouche.)

Le Mahara’’l explique donc les parties `aggadiques de la Gamaro`, en règle générale, comme des allégories et des métaphores. C'est ce que l'on attend d'un non-rationaliste, car il essaie de montrer comment les Sages n'ont jamais eu tort. Par conséquent, tout ce qu'ils disent qui peut être mal interprété ou mal compris comme étant une erreur des Sages est automatiquement transformé en allégorie afin de montrer qu'ils avaient un sens plus profond, et ainsi ils sont sauvés de l'embarras d'être susceptibles de s’être trompés. Cependant, ne supposerions-nous pas qu'une approche rationaliste consisterait à supposer que les Sages ont fait des déclarations incorrectes ?

Il semble, en effet, que ce soit l’approche du Rambo’’m et de son fils, Ribbénou `avrohom ban HaRambo’’m ז״ל. Voici ce que ce dernier déclare dans son essai sur les parties `aggadiques de la Gamaro` (essai qui a été repris intégralement en introduction du ´én Ya´aqôv) :

Pour commencer, permettez-moi de souligner que si une personne avance une certaine théorie sans offrir de preuve, s'attendant à ce que les gens l'acceptent sans broncher simplement parce qu'ils le respectent, elle se trompe malheureusement; son approche va à la fois contre la Ṭôroh et le bon sens. Cela va à l'encontre du bon sens, car elle veut que les gens croient quelque chose sans évaluer et enquêter si cela correspond aux faits. Et cela va à l'encontre de la Ṭôroh, car cela va à l'encontre de la vérité et est contraire à l'éthique. La Ṭôroh [nous dit de ne favoriser personne], disant [à un juge] :[2] « Ne prêtes pas une attention particulière aux pauvres et ne respectes pas les grands ». Et il est également dit :[3] « Ne prêtes aucune attention particulière à qui que ce soit lors du jugement ». Et il n'y a pas de différence entre une personne qui croit une idée sans preuves à l'appui et une personne qui fait confiance à la déclaration d'une personne simplement parce qu'elle la respecte et soutient qu'elle doit être vraie car elle vient d'un grand savant. Cela ne prouve pas que la déclaration est vraie.

En conséquence, nous ne sommes pas tenus d'approuver toutes les théories des Sages du Ṭalmoudh sur la médecine, la physique et l'astronomie à tous égards simplement parce que nous savons que les auteurs sont des personnalités exceptionnelles et d'éminents érudits dans toutes les facettes de la Ṭôroh. Bien sûr, en ce qui concerne la connaissance de la Ṭôroh, l'érudition des Sages est inégalée, et c'est leur responsabilité de nous l'enseigner, comme il est dit :[4] « Tu garderas la Ṭôroh telle qu’ils l'interprètent pour toi », mais cela ne s'applique pas nécessairement à toutes les autres branches de la connaissance. Vous pouvez voir que même les Sages eux-mêmes, confrontés à un problème qui ne pouvait pas être prouvé par un débat et des arguments logiques, ont dit :[5] « Je jure, que même si Yahôshoua[UW1] ´  bin Noun l'avait dit, je ne lui aurais pas obéi ! ». Ce qui signifie : « Je ne le croirais pas bien qu'il était un prophète, car il ne peut pas prouver son point de vue par les règles talmudiques de l'argument logique ».

Permettez-moi de vous offrir une preuve concluante que personne ne réfutera. La voici : Nous constatons que les Sages eux-mêmes ont dit que les opinions exprimées dans la Gamaro` à propos de la médecine générale ne sont pas confirmées, comme par exemple lorsque la Gamaro` dit que le port d'une « pierre de conservation » est une garantie contre les fausses couches, ou d’autres choses mentionnées dans le traité Shabboth. Ils ont testé ces remèdes et ont constaté qu'ils n'avaient aucune valeur thérapeutique.

De plus, le Rambo’’m lui-même parle de la capacité des Sages à faire des erreurs en matière scientifique. Il dit :[6]

Cependant, tu ne dois pas t’attendre à ce que tout ce que nos Sages disent concernant les questions astronomiques soit en accord avec l'observation, car les mathématiques n'étaient pas entièrement développées à cette époque : et leurs déclarations n'étaient pas basées sur l'autorité des Prophètes, mais sur la connaissance qu’eux-mêmes possédaient ou ont déduite des hommes de science contemporains.

Nous voyons donc que Ribbénou `avrohom et son père, le Rambo’’m, admettent que les Sages pourraient se tromper dans des domaines non liés à la Ṭôroh. Cependant, cela ne signifie pas que nous sommes censés comprendre systématiquement leurs `aggodhôth de manière littérale. Car Ribbénou `avrohom dit aussi dans l’introduction sur son essai sur la `aggodhoh de la Gamaro :

Il est important de comprendre que les expositions et histoires homilétiques du Ṭalmoudh ont des significations sous-jacentes qui sont entourées de secret, et la plupart des commentateurs n'ont même pas tenté de sonder leur signification plus profonde.

.... Si vous suivez mes directives pour comprendre les enseignements `aggadiques des Sages, vous en arriverez à saisir leur signification plus profonde et, par conséquent, vous ne les prendrez pas à la légère ou ne nierez pas qu'ils sont vrais. Vous ne tomberez pas non plus dans le piège de penser que les miracles qui sont arrivés aux Sages sont aussi importants que ceux qui sont arrivés à Möshah et à Israël lors de la partition du Yam Souph, ou aussi remarquables que la partition du Yardén pour `alisho´ et `éliyohou. De telles idées fausses surviennent lorsque vous prenez le Darosh (c'est-à-dire les interprétations homilétiques) littéralement et n'acceptez que la signification superficielle du texte. Mais il existe de nombreuses preuves pour montrer que les histoires et les enseignements `aggadiques, en dehors de leur sens ordinaire, ont une profonde signification cachée.

Le Rambo’’m discute également de cette idée à différents endroits. Tout d'abord, le Rambo’’m dit plus loin dans le même chapitre du Môréh Navoukhim cité plus haut :

Mais je ne dénoncerai pas pour autant ce qu'ils disent correctement, conformément à la réalité, comme faux ou accidentellement vrai. Au contraire, chaque fois que les paroles d’une personne peuvent être interprétées de telle manière qu’elles concordent avec des faits pleinement établis, il est du devoir de tout homme instruit et honnête de le faire.

Le Rambo’’m souligne ici que, dans tous les cas où nous POUVONS interpréter les enseignements `aggadiques des Sages comme étant en harmonie avec les faits, nous devrions le faire. Cette idée est encore plus explicitement discutée dans l'introduction du Rambo’’m à son Péraq Ḥélaq.[7] Le Rambo’’m discute de trois groupes de personnes qui interprètent les paroles `aggadiques des Sages :

Ce que vous devez savoir, en ce qui concerne les questions relatives aux paroles des Sages (que l'on se souvienne d'eux pour leurs bénédictions), c'est qu'il y a trois groupes de personnes (qui interprètent leurs paroles).

1) Le premier groupe, et c'est la majorité de ce que j'ai vu [dans le sens où] j'ai vu leurs livres ou que j'ai entendu d’autres personnes ce qu'ils disent, [est composé de gens] qui interprètent les Sages sur la base sur leur simple lecture et ils ne croient pas que les Sages aient une signification cachée en aucune façon. [Les gens de ce groupe croient] que les choses impossibles que disent les Sages sont obligatoires pour l'existence. En effet, ces gens [interprètent les Sages de cette façon] parce qu'ils ne comprennent pas les Sciences et qu'ils sont loin de comprendre [des significations plus profondes]. Il n'y en a aucun parmi eux qui sont des hommes intègres qui peuvent s'en rendre compte par eux-mêmes (que certaines des paroles des Sages sont des comparaisons et donc le message caché est le point principal et non le sens simple) et il n'y a personne qui le signale pour eux. Les [gens de ce premier groupe] soutiennent que les Sages, qu'on se souvienne d'eux pour leurs bénédictions, avec toutes leurs paroles justes et douces, ne visaient que ce qui pouvait être compris en fonction de leurs connaissances, qui est la lecture simple (vulgaire. [Ils le croient] même si certains [des mots des Sages (compris selon le sens simple)] mènent à la calomnie contre les Sages et ils (les mots) semblent être loin d'être intelligents [à tel point que] s'ils étaient lus et expliqué selon leur signification simple et vulgaire à une personne ordinaire, encore plus à une personne sage, la [personne ordinaire ou la personne sage] se demanderait comment [quelqu’un pourrait penser cela] et ils diraient : « Comment se peut-il qu'il y ait un homme dans le monde qui pense comme ça?!?! Aussi, [comment pourrait-il être] que quelqu'un pense que c'est une croyance acceptable et encore plus que c'est une croyance appropriée ? ».

C'est le groupe qui a un manque de connaissances qui se met dans une situation difficile à cause de sa sottise parce qu'il honore et glorifie les Sages, selon leur compréhension, [mais vraiment] ils dénigrent les [Sages] sans les comprendre. Par la vie de D.ieu ! Ce groupe détruit la beauté de la Ṭôroh et assombrit son éclat et ils assignent à la Ṭôroh de D.ieu l'opposé de ce qu'elle est censée être. Car D.ieu a dit à propos de la Ṭôroh parfaite :[8] « [Les nations du monde] entendront tous ces décrets et diront : ‘’C'est sûrement un peuple sage et perspicace, une grande nation !’’ ». Cependant, ce groupe rapporte les mots littéraux (non pas selon l'allégorie et le vrai sens) de nos Sages, que l'on se souvienne d'eux pour les bénédictions, que lorsque d'autres nations entendent ces mots, elles disent : « Seule une nation de fous et de scélérats qui est une piètre nation [dirait cela] ».

La plupart du temps, c'est ce qui se passe avec les interprètes [de ce groupe] : ils expliquent et font connaître à la grande nation [des idées] qu'ils ne connaissent pas (ce qui leur fait déformer ces idées des Sages). Qui accorderait du crédit [aux gens de ce groupe], puisqu'ils ne savent pas ou ne comprennent pas, qu'ils devraient se taire [, ce serait sage pour eux]. De la même manière qu'il est dit :[9] « Qui pourrait faire que vous tombiez complètement dans le silence; ce serait une chose sage pour vous ! » Ou ils devraient dire : « Nous ne comprenons pas les intentions des Sages dans ce cas, et nous ne savons pas comment l'expliquer ». Cependant, ils pensent qu'ils le comprennent et essaient de le faire connaître et de l'expliquer à la nation en fonction de leurs faibles capacités mentales - ils n'expliquent pas ce que les Sages ont réellement dit. Ils prêchent à la tête de la nation [leur compréhension de la] Masakhath Barokhôth et du Péraq Ḥélaq et d'autres choses selon la compréhension littérale, mot pour mot.

Ce que le Rambo’’m dit ici est très claire. Nous devons comprendre les paroles des Sages, quand elles semblent contraires à la vérité, de manière allégorique et métaphorique lorsque cela est possible. Les Sages, par leurs enseignements `aggadiques, essayaient de nous enseigner des significations plus profondes et la simple lecture de leurs mots est sans valeur. Non seulement sans valeur, mais préjudiciable ! Le Rambo’’m insiste pour que nous comprenions les paroles des Sages d'une manière plus profonde et ne les rendions pas inintelligents. Or, c’est précisément le préjudice que causent bon nombre de Ḥarédhim et Ḥasidhim de notre temps, qui se bornent à prendre littéralement les enseignements de nos Sages, créant ainsi une moquerie de notre foi en les Sages ! Ils agissent exactement comme les gens de ce premier groupe décrit par le Rambo’’m, étant incapables de voir la profondeur des paroles des Sages.

Cette vision du Rambo’’m semble le placer presque dans le camp du Mahara’’l. Les deux croient que les paroles des Sages ont un sens plus profond et exclure ce sens plus profond est une façon incorrecte d'étudier la `aggodhoh. La seule chose qui sépare le Ramboo’m et le Mahara’’l est de savoir dans quelle mesure les paroles des Sages devaient être transformées en allégories. Le Rambo’’m et son fils, comme nous l'avons montré plus haut, croient que les Sages avaient tort de croire au pouvoir de l'astrologie et d'autres types de choses mystiques. Cependant, le Mahara’’l croit que l'astrologie et d'autres choses mystiques, comme les Shédhim, ont une réelle influence et un véritable pouvoir.

Par conséquent, le Mahara’’l et le Ramba’’m sont d'accord sur la plupart des choses dans la Gamaro` : lorsque les Sages disent quelque chose qui semble insoutenable, nous devons essayer de comprendre le sens plus profond de leurs paroles. Là où le Mahara’’l et le Rambo’’m semblent différer, c'est essentiellement leur propre point de vue sur certaines lois de la science. Le Mahara’’l croyait au mysticisme et, par conséquent, n'avait pas besoin de transformer les paroles des Sages en allégorie car elles l’étaient automatiquement, tandis que le Rambo’’m devait forcément faire de ces Gamarôth des allégories ou des opinions individuelles de Sages.

Cependant, que vous soyez un rationaliste comme le Rambo’’m ou un mystique comme le Mahara’’l, il semble que, contrairement à ce que font les Ḥarédhim et Ḥasidhim d’aujourd’hui, personne ne devrait tolérer une interprétation littéraliste simple des Gamarôth intenables à moins qu'il soit IMPOSSIBLE d'expliquer le contraire. Ce n'est qu'à ce moment-là que l'on peut affirmer, selon le Rambo’’m, que cette Gamaro` est un Da´ath Yoḥidh (opinion individuelle que nous ne suivons pas). Le Mahara’’l dit que les paroles des Sages doivent être comprises comme des métaphores « à moins qu’ils ne déclarent qu'une histoire particulière n'est pas une métaphore ». Montrant ainsi qu'il n'y a pratiquement aucune `aggodhoh de la Gamaro` que l'on puisse supposer littérale (puisqu’il n’y a que très peu d’endroits où il est explicitement dit qu’il ne s’agit pas d’une métaphore). Le Rambo’’m dit également (dans le Péraq Ḥélaq en traitant du troisième groupe, qui représente la bonne façon de comprendre les Sages) : « Tout ce que les Sages disent qui est impossible, nous devons les comprendre comme parlant à travers le langage des énigmes et des paraboles ».

Toutefois, il y a certaines Gamarôth que le Rambo’’m trouve impossible à expliquer en tant que paraboles et est prêt à accepter qu'il y a quelques croyances erronées pouvant être trouvées chez les Sages. Cependant, il explique que ces croyances ne sont pas des croyances communes des Sages. Quand il y a des croyances qu’ont les Sages et qu’elles contredisent la logique et la réalité ET qu'il est impossible de les relier par des allégories ou des métaphores ALORS le Rambo’’m attribue ces croyances à une opinion minoritaire parmi les Sages. Comme le dit le Rambo’’m dans sa lettre sur l'astrologie :

Je sais que vous pouvez rechercher et trouver des paroles de certains Sages dans le Ṭalmoudh et les Midhroshim dont les mots semblent maintenir qu'au moment de la naissance d'un homme, les étoiles lui feront telle ou telle chose. Ne considérez pas cela comme une difficulté, car il n'est pas approprié qu'un homme abandonne la loi en vigueur et soulève à nouveau les contre-arguments et les réponses (qui ont précédé sa promulgation). De même, il n'est pas approprié d'abandonner des questions de raison qui ont déjà été vérifiées par des preuves, de s'en débarrasser et de dépendre des paroles d'un seul des Sages dont le sujet lui était peut-être caché. Ou il peut y avoir une allusion dans ces mots; ou ils peuvent avoir été prononcés en fonction de l'époque et des conditions qui l'ont précédé. (Vous savez sûrement combien de versets de la sainte Ṭôroh ne doivent pas être pris au pied de la lettre. Puisqu'on sait par des preuves de raison qu'il est impossible que la chose soit littéralement ainsi, le targoumiste [`ounqalôs] l'a interprété sous une forme que la raison acceptera. Un homme ne devrait jamais jeter sa raison derrière lui, car les yeux sont fixés devant, pas derrière ...

Ce que nous voyons à partir de tout ceci, c'est que le Rambo’’m semble être presque identique au Mahara’’l dans sa compréhension des déclarations difficiles des Sages. Il semble que peu importe que vous soyez rationaliste ou non rationaliste, les sens simples problématiques des enseignements des Sages ne révèlent pas de réelle difficulté sur l'ensemble des Sages. Dans l'ensemble, les Sages ne se sont jamais trompés, selon le Rambo’’m et le Mahara’’l. Cependant, il y avait certains Sages qui, individuellement, avaient une mauvaise compréhension de certaines sciences. Cela expliquerait également pourquoi le Rambo’’m et son fils semblent attribuer des erreurs aux Sages. Ils voulaient juste dire qu'il y a des SAGES INDIVIDUELS qui se trompent et croient en la puissance de l'astrologie et d'autres choses mystiques. Mais pas que TOUS LES SAGES étaient ainsi. Et c’est un drame dans le judaïsme actuel où, lorsqu’on veut rapporter un enseignement talmudique que l’on apprécie, beaucoup ont tendance à dire « Les Sages ont enseigné ceci ou cela », alors que dans la plupart des cas il s’agit d’un enseignement individuel et non d’un enseignement des Sages. En outre, cela contrevient à l’enseignement talmudique selon quoi : « Il faut rapporter toute chose d’après le nom de son auteur ». Par conséquent, n’attribuez pas à TOUS les Sages les enseignements INDIVIDUELS de CERTAINS Sages, mais rapportez toute chose d’après le nom de son auteur. C’est ce que le Rambo’’m et son fils veulent nous faire comprendre.

Comme indiqué tout au long de cet article, il semble que le Rambo’’m et le Mahara’’l ne diffèrent pas dans la façon de comprendre la Gamaro`. Ils divergent plutôt sur des faits scientifiques. Le Mahara’’l croit au mysticisme et, par conséquent, croit que les Sages croyaient également au mysticisme et ne trouve aucune raison d’expliciter que ces enseignements des Sages sont des allégories. Le Rambo’’m n'est pas d'accord sur le mysticisme non enraciné dans la raison et, par conséquent, il rapporte ces déclarations des Sages comme des allégories.


[1] Ba`ér Haggôloh 4 (page 51)
[2] Wayyiqro` 19 :15
[3] Davorim 1 :17
[4] Ibid., 17 :11
[5] Barokhôth 24b
[6] Môréh Navoukhim, Volume 3, Chapitre 14
[7] Chapitre 10 de Sanhédhrin dans le Yaroushlami, et Chapitre 11 dans le Bavli.
[8] Davorim 4 :6
[9] `iyôv 13 :5


mercredi 3 juin 2020

Qui est le « serviteur souffrant » de Yasha´yohou 53 ? - Troisième Partie


בס״ד

Qui est le « serviteur souffrant » de Yasha´yohou 53 ?

Troisième Partie


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Pour (re)lire la première partie, voir ici. Pour (re)lire la deuxième partie, voir ici.

    V.            Segment 3 – Yasha´yohou 53:5-8

A.    Le texte hébreu avec les traductions juives et chrétiennes

Ésaïe
Louis Segond
La Bible du Rabbinat
Texte hébreu
53 :5
Mais il était blessé pour nos péchés, Brisé pour nos iniquités; Le châtiment qui nous donne la paix est tombé sur lui, Et c'est par ses meurtrissures que nous sommes guéris.
Et c'est pour nos péchés qu'il a été meurtri, par nos iniquités qu'il a été écrasé; le châtiment, gage de notre salut, pesait sur lui, et c'est sa blessure qui nous a valu la guérison.
וְהוּא מְחֹלָל מִפְּשָׁעֵנוּ, מְדֻכָּא מֵעֲוֺנֹתֵינוּ; מוּסַר שְׁלוֹמֵנוּ עָלָיו, וּבַחֲבֻרָתוֹ נִרְפָּא-לָנוּ.
53 :6
Nous étions tous errants comme des brebis, Chacun suivait sa propre voie; Et l'Éternel a fait retomber sur lui l'iniquité de nous tous.
Nous étions tous comme des brebis errantes, chacun se dirigeant de son côté, et Dieu a fait retomber sur lui notre crime à tous.
כֻּלָּנוּ כַּצֹּאן תָּעִינוּ, אִישׁ לְדַרְכּוֹ פָּנִינוּ; וַיהוָה הִפְגִּיעַ בּוֹ, אֵת עֲוֺן כֻּלָּנוּ.
53 :7
Il a été maltraité et opprimé, Et il n'a point ouvert la bouche, Semblable à un agneau qu'on mène à la boucherie, A une brebis muette devant ceux qui la tondent; Il n'a point ouvert la bouche.
Maltraité, injurié, il n'ouvrait pas la bouche; pareil à l'agneau qu'on mène à la boucherie, à la brebis silencieuse devant ceux qui la tondent, il n'ouvrait pas la bouche.
נִגַּשׂ וְהוּא נַעֲנֶה, וְלֹא יִפְתַּח-פִּיו, כַּשֶּׂה לַטֶּבַח יוּבָל, וּכְרָחֵל לִפְנֵי גֹזְזֶיהָ נֶאֱלָמָה; וְלֹא יִפְתַּח, פִּיו.
53 :8
Il a été enlevé par l'angoisse et le châtiment; Et parmi ceux de sa génération, qui a cru Qu'il était retranché de la terre des vivants Et frappé pour les péchés de mon peuple?
Faute de protection et de justice, il a été enlevé. Qui pourrait décrire sa destinée? Car il s'est vu retrancher du pays des vivants, les coups qui le frappaient avaient pour cause les péchés des peuples.
מֵעֹצֶר וּמִמִּשְׁפָּט לֻקָּח, וְאֶת-דּוֹרוֹ מִי יְשׂוֹחֵחַ:  כִּי נִגְזַר מֵאֶרֶץ חַיִּים, מִפֶּשַׁע עַמִּי נֶגַע לָמוֹ.

B.    Analyse de Yasha´yohou 53:5-8

L'étape de vérification de la méthode scientifique reprend avec le test de l'hypothèse sur les quatre versets du segment actuel du Quatrième Chant du Serviteur, Yasha´yohou 53:5-8. Des preuves tirées du ṬaNa’’Kh et des archives historiques sont utilisées pour vérifier si Israël = serviteur « colle » ay contexte.

L'importance de connaître l'identité des « locuteurs » a été soulignée au début de la première partie. Dans le premier passage, Yasha´yohou 52:13-15, c'était la « voix » de Hashshém telle qu'elle est rapportée par Yasha´yohou. Lorsque le chapitre 53 s'ouvre, un changement brusque se produit dans la « voix », et à présent le prophète transmet les paroles des nations (des Gôyim). Dans ce segment-ci, les nations (Gôyim) parlent encore et, tandis qu’elles commencent à reconnaître la place appropriée d’Israël et son rôle dans l’histoire, elles confessent leur culpabilité et admettent le traitement injuste auquel elles ont soumis Israël.

Yasha´yohou 53:5
Louis Segond
La Bible du Rabbinat
Texte hébreu
Mais il était blessé pour nos péchés, Brisé pour nos iniquités; Le châtiment qui nous donne la paix est tombé sur lui, Et c'est par ses meurtrissures que nous sommes guéris.
Et c'est pour nos péchés qu'il a été meurtri, par nos iniquités qu'il a été écrasé; le châtiment, gage de notre salut, pesait sur lui, et c'est sa blessure qui nous a valu la guérison.
וְהוּא מְחֹלָל מִפְּשָׁעֵנוּ, מְדֻכָּא מֵעֲוֺנֹתֵינוּ; מוּסַר שְׁלוֹמֵנוּ עָלָיו, וּבַחֲבֻרָתוֹ נִרְפָּא-לָנוּ.

Une remarque importante est nécessaire ici. Lorsque les missionnaires lisent « pour nos péchés » et « pour nos iniquités » au début de ce verset, ils imaginent directement une mort expiatoire. En d’autres mots, ils comprennent ces mots comme voulant dire que le sujet de ce verset (qu’ils imaginent être `ôthô Ho`ish) serait frappé POUR les péchés et iniquités d’autrui, comme si le sujet acceptait d’assumer sur lui toutes ces afflictions afin que d’autres puissent se faire expier leurs péchés et iniquités. Or, ce n’est pas ce que dit le texte hébreu ; d’où l’importance pour notre étude de constamment afficher le texte hébreu aux côtés des traductions, car sans cela n’importe quelle manipulation deviendrait possible. Que dit le texte hébreu ? מִפְּשָׁעֵנוּ et מֵעֲוֺנֹתֵינוּ. Dans les deux cas, la préposition מִן (qui se raccourci en מִ lorsqu’il est attaché à un mot ne commençant ni par une gutturale ni par un ר, ou en מֵ lorsqu’il est attaché à un mot commençant par une gutturale ou par un ר) est attaché aux mots « nos péchés » et « nos iniquités », et ne signifie pas « pour » mais « à partir de » ou « par ». Ainsi, cette partie du segment doit se comprendre, non pas par le fait que le serviteur aurait été frappé et affligé POUR les péchés et transgressions des autres, mais PAR les péchés et transgressions des autres ! Il n’y a donc AUCUNE souffrance expiatoire sous-entendue ici. Le verset signifie simplement que le serviteur fut frappé par les actes de péché et d’iniquité des nations (Gôyim). C’est-à-dire que cette souffrance fut causée par le comportement des nations (Gôyim) envers le serviteur. Non seulement l’idée de souffrance expiatoire que quelqu’un pourrait assumer pour sauver les autres ne se retrouve pas dans ce verset, mais pire encore, cette doctrine est contraire au ṬaNa’’Kh qui enseigne en de nombreux endroits que chaque être humain est responsable de ses propres péchés. Lisez par vous-mêmes, par exemple : Exode 32 :31-33, Nombres 35 :33, Deutéronome 24 :16, 2 Rois 14 :6, Jérémie 31 :29 (verset 30 dans les bibles chrétiennes), Ezéchiel 18 :4, 20 et Psaumes 49 :7-8.

La signification de ce verset, avec Israël comme serviteur, est cohérente avec l'histoire du peuple juif et avec son avenir promis, comme cela a déjà été montré dans le segment précédent. Les nations (Gôyim) se rendent compte que leur propre maladie (peut-être la maladie de l'antisémitisme) est devenue le véhicule pour opprimer le peuple juif au fil des ans. Ils ont fait souffrir les Juifs pour leurs propres fins égoïstes; ce n'était pas, comme ils l'avaient prétendu, Hashshém qui punissait Israël pour son propre comportement coupable, comme le revendiquent de nombreux Gôyim qui justifient les péripéties, mésaventures et afflictions du peuple juif à son rejet de la prétendu messianité de `ôthô Ho`ish. Alors que les nations (Gôyim) croyaient qu'Israël subissait une rétribution divine pour ses péchés, ils ont réalisé que la souffrance d'Israël était principalement due aux actions et au péché de ses oppresseurs. Ce thème est développé dans le ṬaNa’’KH en plusieurs endroits, comme par exemple dans les deux passages suivants :

Yirmayohou 10 :25
Déverse ton indignation sur les peuples qui ne te connaissent pas et sur les races qui n'invoquent pas ton nom; car ils ont dévoré Jacob, ils l'ont dévoré, anéanti, et ont ruiné ses foyers.
שְׁפֹךְ חֲמָתְךָ, עַל-הַגּוֹיִם אֲשֶׁר לֹא-יְדָעוּךָ, וְעַל מִשְׁפָּחוֹת, אֲשֶׁר בְּשִׁמְךָ לֹא קָרָאוּ:  כִּי-אָכְלוּ אֶת-יַעֲקֹב, וַאֲכָלֻהוּ וַיְכַלֻּהוּ, וְאֶת-נָוֵהוּ, הֵשַׁמּוּ.

Yirmayohou 50 :7
Tous ceux qui les rencontraient en faisaient leur pâture, et leurs ennemis disaient: "Nous ne faisons pas de mal, puisqu'ils ont péché contre l'Eternel, leur abri véridique, contre l'Eternel, espoir de leurs ancêtres."
כָּל-מוֹצְאֵיהֶם אֲכָלוּם, וְצָרֵיהֶם אָמְרוּ לֹא נֶאְשָׁם; תַּחַת, אֲשֶׁר חָטְאוּ לַיהוָה נְוֵה-צֶדֶק, וּמִקְוֵה אֲבוֹתֵיהֶם, יְהוָה

Dans ce dernier passage, nous voyons EXACTEMENT le même thème que Yasha´yohou, à savoir l’affirmation des Gôyim que c’est certainement pour ses propres péchés que le peuple juif souffre. En d’autres mots, les Gôyim pensaient qu’il était justifié de faire souffrir Israël, car ces souffrances n’étaient rien d’autres que leurs châtiments pour s’être rebellé contre Hashshém ! Mais Yasha´yohou nous a dévoilé qu’à la fin des temps les Gôyim se rendront compte de la fausseté de cette justification, et admettront que ce sont en fait leurs propres iniquités qui les ont amené à faire souffrir Israël.

Dans le segment précédent, il a été démontré comment Israël est souvent décrit dans ṬaNa’’Kh comme ayant été meurtri et blessé par les nations (Gôyim). Yasha´yohou nous parle donc ici de la guérison des Gôyim et non de celle d’Israël ! La guérison qu’ils ont connue pourrait être la fin de leur antisémitisme une fois qu'ils auront vécu cette magnifique révélation au sujet d’Israël.

Une question souvent posée est : comment les blessures d’Israël guériront-elles les nations (les Gôyim) ? En d'autres termes, quel est le processus par lequel cette guérison est effectuée ? C'est une bonne question, à laquelle la réponse donne un aperçu supplémentaire de l'éventuelle rédemption d'Israël et de son impact sur les nations (Gôyim) du monde.

Comme cela a été noté plus haut, les nations (Gôyim) ont cru, et beaucoup le croient encore, que les blessures et les souffrances du peuple juif ont été infligées par Hashshém parce que les Juifs ont été maudits. Ce n'est pas vrai. La souffrance qui était due à la rétribution divine fait en fait partie d'un processus de « raffinage » qui finira par provoquer la rédemption et une gloire supérieure. Le salaire de la désobéissance est décrit avec des détails atroces dans la section de la Ṭôroh appelée תּוֹכֵחָה « Ṭôkhéḥoh »[1] - les conséquences qui se produiront pour ceux qui transgressent les Miṣwôth. Cette réprimande, qui a entraîné des blessures et des souffrances, mènera le peuple à se repentir et, comme le conclut la « Ṭôkhéḥoh » (Wayyiqro` 26:40-43), le repentir apportera la restauration, il remettra Israël sur le droit chemin, auquel moment Israël méritera d'être guéri. Ceci est similaire à un parent qui punit un enfant pour des méfaits, en s'attendant à ce qu'un tel comportement soit corrigé et ne se répète pas à l'avenir.

En fin de compte, quand Israël méritera l'arrivée de l'ère messianique, les nations (Gôyim) en bénéficieront également - elles seront guéries de l'antisémitisme, de l'idolâtrie et d'autres abominations. En d’autres termes, la souffrance d’Israël (qui leur permet de s’endurcir et se renforcer dans leur attachement à la Ṭôroh et aux Miṣwôth, puisque les souffrances que leur font subir les Gôyim les amènent sans cesse à désirer se rapprocher de Hashshém) finira par conduire au rachat du monde, dont bénéficieront également les nations (les Gôyim).

Israël, en tant que serviteur de Hashshém, colle parfaitement au contexte de Yasha´yohou 53:5.

Yasha´yohou 53:6
Louis Segond
La Bible du Rabbinat
Texte hébreu
Nous étions tous errants comme des brebis, Chacun suivait sa propre voie; Et l'Éternel a fait retomber sur lui l'iniquité de nous tous.
Nous étions tous comme des brebis errantes, chacun se dirigeant de son côté, et Dieu a fait retomber sur lui notre crime à tous.
כֻּלָּנוּ כַּצֹּאן תָּעִינוּ, אִישׁ לְדַרְכּוֹ פָּנִינוּ; וַיהוָה הִפְגִּיעַ בּוֹ, אֵת עֲוֺן כֻּלָּנוּ.

Concernant la dernière partie de ce verset, les missionnaires le prennent comme indicateur d’une expiation vicaire. Mais voir plus haut ce que nous avions dit à ce sujet. D’autant qu’il a déjà été démontré qu’il s’agit ici de la confession des Gôyim.

Quand Hashshém punit Israël, Il utilise souvent les nations (Gôyim) pour qu’elles servent de « bâton de discipline » :

Yasha´yohou 10 :5
Malheur à Achour, instrument de ma colère, aux mains de qui mon courroux est un bâton vengeur!
הוֹי אַשּׁוּר, שֵׁבֶט אַפִּי; וּמַטֶּה-הוּא בְיָדָם, זַעְמִי

avaqqouq 1 :12
N'es-tu pas, de toute éternité, ô Seigneur, mon Dieu, mon Saint? Non, nous ne mourrons pas! Eternel, c'est pour faire justice que tu as commis ce peuple (les chaldéens)! O mon Rocher, c'est pour châtier que tu l'as établi!
הֲלוֹא אַתָּה מִקֶּדֶם, יְהוָה אֱלֹהַי קְדֹשִׁי--לֹא נָמוּת; יְהוָה לְמִשְׁפָּט שַׂמְתּוֹ, וְצוּר לְהוֹכִיחַ יְסַדְתּוֹ.

Les nations (Gôyim) ont été utilisées par Hashshém pour punir Israël, mais elles sont allées au-delà de leur mission spécifique, faisant ainsi souffrir Israël plus que nécessaire. C’est pourquoi elles admettent ici que, comme des brebis errantes, elles se sont écartées de la mission qui leur avait été assignée pour n’en faire qu’à leur tête.

Israël, en tant que serviteur de Hashshém, colle parfaitement au contexte de Yasha´yohou 53:6.

Yasha´yohou 53:7
Louis Segond
La Bible du Rabbinat
Texte hébreu
Il a été maltraité et opprimé, Et il n'a point ouvert la bouche, Semblable à un agneau qu'on mène à la boucherie, A une brebis muette devant ceux qui la tondent; Il n'a point ouvert la bouche.
Maltraité, injurié, il n'ouvrait pas la bouche; pareil à l'agneau qu'on mène à la boucherie, à la brebis silencieuse devant ceux qui la tondent, il n'ouvrait pas la bouche.
נִגַּשׂ וְהוּא נַעֲנֶה, וְלֹא יִפְתַּח-פִּיו, כַּשֶּׂה לַטֶּבַח יוּבָל, וּכְרָחֵל לִפְנֵי גֹזְזֶיהָ נֶאֱלָמָה; וְלֹא יִפְתַּח, פִּיו.

En ce qui concerne le contexte, le reste d'Israël a été massacré comme des moutons se faisant égorger, un symbolisme qui est courant dans le ṬaNa’’Kh :

Zakharyoh 11 :4-7
Ainsi parle l'Eternel, mon Dieu: "Mène paître ces brebis destinées à la boucherie, puisque leurs acquéreurs les égorgent, sans se croire en faute, et ceux qui les vendent s'écrient: "Dieu soit loué! J'ai fait fortune!" Et leurs pasteurs ne les épargnent point. C'est que désormais je n'aurai plus de ménagement pour les habitants de ce pays, dit l'Eternel; je vais, au contraire, livrer ces hommes aux entreprises de l'un sur l'autre et au pouvoir de leur roi. Ils couvriront le pays de ruines, et je ne le sauverai pas de leurs mains." Je menai donc paître ces brebis destinées à la boucherie, à savoir les plus faibles du troupeau; et je me munis de deux bâtons, dont j'appelai l'un "Bienveillance" et l'autre "Liens". Tandis que je faisais paître les brebis,
כֹּה אָמַר, יְהוָה אֱלֹהָי:  רְעֵה, אֶת-צֹאן הַהֲרֵגָה. אֲשֶׁר קֹנֵיהֶן יַהַרְגֻן, וְלֹא יֶאְשָׁמוּ, וּמֹכְרֵיהֶן יֹאמַר, בָּרוּךְ יְהוָה וַאעְשִׁר; וְרֹעֵיהֶם, לֹא יַחְמוֹל עֲלֵיהֶן. כִּי לֹא אֶחְמוֹל עוֹד, עַל-יֹשְׁבֵי הָאָרֶץ--נְאֻם-יְהוָה; וְהִנֵּה אָנֹכִי מַמְצִיא אֶת-הָאָדָם, אִישׁ בְּיַד-רֵעֵהוּ וּבְיַד מַלְכּוֹ, וְכִתְּתוּ אֶת-הָאָרֶץ, וְלֹא אַצִּיל מִיָּדָם. וָאֶרְעֶה אֶת-צֹאן הַהֲרֵגָה, לָכֵן עֲנִיֵּי הַצֹּאן; וָאֶקַּח-לִי שְׁנֵי מַקְלוֹת, לְאַחַד קָרָאתִי נֹעַם וּלְאַחַד קָרָאתִי חֹבְלִים, וָאֶרְעֶה, אֶת-הַצֹּאן.

ahillim 44 :12, 23
Tu nous livres comme des troupeaux dont on se nourrit, et nous éparpilles parmi les nations… Mais pour toi nous subissons chaque jour la mort; on nous considère comme des brebis destinées à la boucherie.
תִּתְּנֵנוּ, כְּצֹאן מַאֲכָל;    וּבַגּוֹיִם, זֵרִיתָנוּ. כִּי-עָלֶיךָ, הֹרַגְנוּ כָל-הַיּוֹם;    נֶחְשַׁבְנוּ, כְּצֹאן טִבְחָה.

Le Ṭahillim 44 décrit de manière vivante l'oppression et la persécution récurrentes du peuple juif en exil, Israël plaidant pour la force de tenir jusqu'à sa rédemption.

Tout au long du ṬaNa’’Kh, sans qu’il n’y ait la moindre exception, les brebis destinées à la boucherie sont TOUJOURS le peuple d’Israël ! C’est seulement en ignorant tous ces passages parallèles tout au long du ṬaNa’’Kh, et même dans d’autres chapitres de Yasha´yohou, que les missionnaires sont capables de prétendre qu’on parlerait d’autre chose que d’Israël. Mais une fois que le travail de vérité est fait, et que chaque verset est analysé comme nous le faisons, tout est clair, net, précis et indiscutable !

Le fait que le peuple juif ait souffert des péchés des nations (Gôyim) n'est guère contestable. Pourtant, malgré tous les ennuis qui ont frappé le peuple juif tout au long de son histoire, il y a toujours eu un résidu de Juifs justes qui n'a jamais blâmé Hashshém pour ses ennuis. En ce qui concerne leur relation avec Hashshém, ils n'ont exprimé aucun ressentiment et, bien qu’étant conduits à leur mort, ils sont restés doux comme des moutons, acceptant leur sort avec droiture et foi ! L’histoire juive est remplie de tels martyrs.

Israël, en tant que serviteur de Hashshém, colle parfaitement au contexte de Yasha´yohou 53:7.

Yasha´yohou 53:8
Louis Segond
La Bible du Rabbinat
Texte hébreu
Il a été enlevé par l'angoisse et le châtiment; Et parmi ceux de sa génération, qui a cru Qu'il était retranché de la terre des vivants Et frappé pour les péchés de mon peuple?
Faute de protection et de justice, il a été enlevé. Qui pourrait décrire sa destinée? Car il s'est vu retrancher du pays des vivants, les coups qui le frappaient avaient pour cause les péchés des peuples.
מֵעֹצֶר וּמִמִּשְׁפָּט לֻקָּח, וְאֶת-דּוֹרוֹ מִי יְשׂוֹחֵחַ:  כִּי נִגְזַר מֵאֶרֶץ חַיִּים, מִפֶּשַׁע עַמִּי נֶגַע לָמוֹ.

La fin de ce verset est problématique et inexacte dans les deux traductions, aussi bien celle de Louis Segond que celle du Rabbinat. Le mot le plus important de cette partie du verset est le mot hébreu לָמוֹ « Lomô », qui est le dernier du texte en hébreu. N’importe quel bon dictionnaire hébreu identifiera לָמוֹ comme étant le synonyme du pronom hébreu לָהֶם « Loham », qui signifie « pour eux », « vers eux » ou « à eux ».

Le livre de Yasha´yohou confirme également le fait qu’il s’agit d’un pluriel, en dépit de sa terminaison étrange faisant penser à un singulier, puisque le prophète emploie ce terme à 11 reprises tout au long de son livre, et chaque fois le contexte et grammaire démontrent constamment qu’il se comprend au pluriel. Vérifiez par vous-mêmes : Isaïe 16 :4, 23 :1, 26 :14, 26 :16, 30 :5, 35 :8, 43 :8, 44 :7, 48 :21 et 53 :8.

Enfin, dans l’hébreu biblique le suffixe poétique מוֹ est fréquemment employé dans le ṬaNa’’Kh à la place du suffixe plus courant qu’est הֶם, qui se trouve généralement à la fin des verbes et noms conjugués à la 3ème personne du masculin pluriel. Cela se produit principalement dans les passages qui, comme Yasha´yohou 53, ont une structure poétique. Prenez par exemple le Cantique de la Mer (Exode 15 :1-19) qui contient six exemples de verbe se terminant par le suffixe מוֹ, et qui sont chaque fois pluriel et non singulier ! (Il s’agit des versets 7, 9, 10, 12, 15 et 17.)

La fin de notre verset doit donc plus correctement se traduire littéralement de la manière suivante :

Par péché, mon peuple les a frappés.
מִפֶּשַׁע עַמִּי נֶגַע לָמוֹ.

(N’oubliez pas à nouveau la préposition מִן qui a été attachée au mot « péché » ; ce qui signifie donc « par péché » et non « pour les péchés ». Ce qui annule à nouveau la théorie d’expiation vicaire défendue par les missionnaires lorsqu’ils falsifient ces versets.)

Maintenant que le problème grammatical a été résolu, la signification de ce verset peut être expliquée. Comme indiqué plus haut, un changement d'attitude des nations (Gôyim) a lieu dans Yasha´yohou 53:4-7, alors qu'une nouvelle prise de conscience de la grandeur d'Israël s'installait dans leur esprit. Dans Yasha´yohou 53:8, les chefs des nations admettent (individuellement ou par l’intermédiaire de leur porte-parole) que « les iniquités de mon peuple ont infligé de la souffrance à Israël ». Lorsque l'exil d'Israël prendra enfin fin, les dirigeants des nations (Gôyim) s'émerveilleront d'un peuple qui a survécu à toutes les tentatives de l’exclure de la terre des vivants; une expression constamment utilisée dans le ṬaNa’’Kh pour désigner la Terre d'Israël (voyez, par exemple, Ézéchiel 26:20, 32:23,24,25,26,27,32), et qui a survécu à tous les traitements injustes et iniques qu’on lui a fait subir tout au long de son séjour en exil. Ainsi, les nations (Gôyim) s’extasient, car ils pensaient qu’exclure le peuple d’Israël de la Terre d’Israël et lui faire subir de lourds châtiments en exil finiraient par anéantir totalement ce peuple qui, croyaient-elles, ne pourrait pas tenir si longtemps et loin de sa terre.

Israël, en tant que serviteur de Hashshém, colle parfaitement au contexte de Yasha´yohou 53:8.

La supercherie de l’interprétation messianique des missionnaires devrait, à ce stade, devenir une évidence aux yeux de tous.

À suivre…


[1] Wayyiqro` 26 :14-43 ; voir aussi Davorim 28 :15-68.

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