ב״ה
Prier
sur les tombes des Saddiqim
Troisième
Partie
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- Même lorsque cela honore le défunt
Dans
la première partie de cette série d'articles, nous avions cité le
passage talmudique suivant1 :
והתניא
לא יהלך אדם בבית הקברות ותפילין בראשו
וספר תורה בזרועו וקורא ואם עושה כן
עובר משום (משלי
יז)
לועג
לרש חרף עושהו
|
D'après
ce passage, l'une des raisons pour lesquelles il n'est pas permis
d'avoir Sa Tafillin Shal Rô`sh ou un Séfar Tôroh dans un
cimetière, ainsi que d'y réciter le Shama´ ou la ´amidhoh, est
que cela est une moquerie à l'égard des morts qui, eux, ne peuvent
plus accomplir ces Miswôth. Certains s'appuient sur ce
passage pour affirmer que dans le cas des Saddiqim et
d'éminents rabbins, les choses seraient différentes, car il est
évident d'accomplir ces Miswôth sur leurs tombes ne leur
fera pas honte, mais qu'au contraire, cela les honorera. D'où la
raison pour laquelle ils le permettent dans les cas de défunts
Saddiqim ou qui furent d'éminents rabbins.
Mais
le Talmoudh Yarousholmi n'accepte de toute façon pas ce passage du
Talmoudh Bavli, et dit que la raison pour laquelle nous ne pouvons
pas accomplir ces Miswôth dans un cimetière, ce n'est pas
pour ne pas faire honte aux morts, mais tout simplement parce que les
cimetières sont des lieux impurs5 :
Celui
qui est occupé à enterrer le défunt dans sa tombe et que
l'heure de la récitation du Shama´ est arrivée, doit se
déplacer vers un autre lieu pur, mettre ses Tafillin, réciter le
Shama´ et faire la Tafilloh.
|
הֲרֵי
שֶׁהָיָה עָסוּק עִם הַמֵּת בַּקֶּבֶר,
וְהִגִּיעָה
עוֹנַת קִרְיַת שְׁמַע,
הֲרֵי
זֶה פּוֹרֵשׁ לִמְקוֹם טָהֳרָה,
וְלוֹבֵשׁ
תְּפִלִּין וְקוֹרֵא אֶת שְׁמַע
וּמִתְפַּלֵּל
|
Dans
le contexte, le Yarousholmi parle de la récitation du Shama´ dans
un lieu impur. Sous le sol d'un cimetière se trouvent de la chair
décomposée, du sang et des restes d'ossements. C'est par conséquent
considéré comme un lieu d'impureté. D'ailleurs, ce qui est
paradoxal est que dans tous les cimetières israélites, il y a un
robinet et un Kéli à la sortie du cimetière, afin de faire ses
ablutions en sortant, précisément parce que le cimetière est un
lieu d'impureté. Cela est reconnu par tout le monde, même ceux qui,
étrangement, organisent des Minyonim en plein cimetière ! Cela
est également exprimé par HHorov Yôséf Qappa`h ז״ל,
dans son pamphlet « Qiryath Shama´ et Tafilloh dans un lieu
d'impureté », qu'il répéta dans son commentaire sur le
Mishnéh Tôroh du Ramba''m ז״ל.6
Le Ramba''m mentionne aussi le fait que ces Miswôth
sont interdites dans un cimetière, non pas pour ne pas insulter les
morts, mais en raison du fait que le cimetière est un lieu
d'impureté.7
Le
Rov Qappa`h explique qu'il est possible que les rabbins aient
employé l'expression « ne pas se moquer des morts »
comme une figure de style qui avait pour but de s'assurer que même
les ´amé Ho`oras (ignorants et gens peu instruits)
adhéreraient correctement à cette loi. En effet, il arrive très
souvent que les rabbins du Talmoudh emploient un langage imagé
extrême pour éloigner au maximum les gens d'une transgression,
comme lorsqu'ils disent que si la main sert à verser la semence en
vain il faut la couper sur son ventre, ou encore lorsqu'ils disent
que le Loshôn Hora´ est comparable au meurtre, à l'inceste et à
l’idolâtrie. Toutes ces choses ne sont que des figures de style
des rabbins pour s'assurer que les gens, même les plus simples,
comprennent la gravité de l'acte qu'ils ont interdit.
Cette
attitude du Ramba''m, qui consiste à s'appuyer sur le raisonnement
du Yarousholmi plutôt que sur celui du Bavli, fut également adoptée
par le Sama''g ז״ל.8
De même, Rov Ya´aqôv ban ´oshér ז״ל,
l'auteur des « `arbo´oh Tourim » (qui deviendront la
base de la structure du Shoulhon ´oroukh de Rabbi Yôséf
Qa`rô ז״ל)
a interdit de prier ou d'étudier dans les quatre `ammôth d'un mort,
sans mentionner l'explication selon laquelle ce serait pour ne pas
« insulter les morts ».9
D'après
cette compréhension, cette règle s'applique à tous les défunts,
qu'ils soient de grands enseignants ou de simples Israélites, étant
donné qu'ils sont tous rituellement impurs une fois qu'ils ne sont
plus en vie. Par conséquent, il n'existe aucune exception à la
règle pour permettre de faire des Barokhôth, des prières ou encore
des Divré Thôroh en l'honneur d'un défunt près de son corps ou de
sa tombe. Arguer que cela est acceptable parce que ce n'est pas une
insulte faite au mort, n'est pas soutenable étant donné que cette
raison n'est pas acceptée par le Yarousholmi, le Ramba''m, etc.
Le
Shoulhon ´oroukh, comme nous l'avons vu dans la deuxième
partie de ce cette série d'articles, semble trancher vers une
permission concernant certaines activités religieuses dans un
cimetière. Mais sa position n'est pas très claire, et il est très
courant de trouver des contradictions au sein du Shoulhon
´oroukh, pour la simple raison qu'en même temps qu'il essayait de
rester fidèle aux Trois Grands Ri`shônim, il n'était pas désireux
non plus de se mettre à dos toute une partie de la communauté ayant
adoptée des pratiques contraires à ce qui devrait être fait.
Nous
allons voir ici un bon exemple de l'ambivalence du Mahabbér.
Nous sommes tous familiers avec la pratique contemporaine inventée
par les `ashkanazim qui consiste à réciter le Qaddish tout en étant
debout près du cercueil durant la Lawwayath Hamméth (l'escorte du
mort jusqu'à sa tombe), et une seconde fois après l'enterrement
dans le cimetière. Mais peu de gens savent que bien que le Mahabbér
ait permis de réciter quelques versets et de faire des Daroshôth de
Tôroh dans un cimetière, il a interdit cette pratique de la
récitation du Qaddish dans un cimetière ou en présence du mort10 :
On
doit s'éloigner du cimetière et dire le Qaddish.
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ומרחיקין
מעט מבית הקברות ואומרים קדיש
|
Cette
interdiction de réciter le Qaddish dans un cimetière est réitérée
par le Sha''h11
ז״ל,
qui cite à cet effet le Maharsha''l ז״ל.
Clairement, ces Pôsqim sont ambivalents et très souvent incohérents
sur la permissivité ou pas de réciter des Divré Thôroh dans un
cimetière.12
Concluons
cette troisième partie par le témoignage de Horov Môshah
Sternbuch, l'actuel vice-président et ancien dirigeant de la ´édhoh
HaHarédhith,
qui rapporte que lorsque le Hozzôn
`ish ז״ל
accompagnait
un cercueil dans une escorte funèbre, il gardait toujours le silence
et ne récitait pas avec la foule יֹשֵׁב,
בְּסֵתֶר
עֶלְיוֹן « Yôshév
Baséthar ´alyôn »13,
ni aucun des autres versets bibliques qui sont généralement récités
lors de funérailles, car la Halokhoh interdit de réciter des
paroles de sainteté dans un cimetière.
L'être
humain a toujours le choix soit de s'aligner avec la majorité même
lorsqu'il sait qu'elle se trompe, soit de faire ce que HaZa''l
ont dit même s'il se trouve à cause de cela dans le camp de la
minorité. La balle est dans le camp de chacun. Mais quand on se
présentera devant HaShem, l'argument de la majorité ne sera pas
pris en compte, car vous avez vu et entendu ce qu'ont dit HaZa''l,
mais avez fait sciemment le choix de faire l'opposé.
1Barokhôth
18a
2Et
il en est ainsi, quand bien même il n'aurait pas sa Tafillin de la
tête, ni de Séfar Tôroh dans ses mains
3Mishlé
17:5
4Le
Talmoudhh explique que le terme
רָשׁ
« Rosh »
(employé ici pour désigne un pauvre, alors que le mot le plus
courant est עָנִי
« ´oni »)
désigne également un mort et déduit de ce verset de nombreuses
Halokhôth concernant le comportement à avoir en présence d'un
cadavre, comme l'interdiction de porter des Tafillin ou de tenir un
Séfar Tôroh dans un cimetière, étant donné que, d'une certaine
manière, on se moque ainsi du défunt, qui n'est plus capable
d'accomplir les Miswôth. C'est également le cas pour la récitation
du Shama´.
5Talmoudh
Yarousholmi, Barokhôth 2:3
6Hilkôth
`éval 14:14, page 218
7Môréh
Navoukhim 3:43. Page 389, dans
la traduction du Rov Qappa`h
8Miswôth
´Aséh n° 18 et 22
9`arbo´oh
Tourim Chapitre 45
10Yôréh
Dé´oh 376:4
11367:3
12Cette
permission est basé sur de nombreux passages du Zôhar.. Les
contemporains de Rabbi Yôséf Qa`rô avaient décidé de baser
leurs pratiques religieuses et quotidiennes sur le Zôhar, lui
donnant même la priorité sur le Talmoudh. C'est également le cas
dans le mouvement Hassidique, où les pratiques « mystiques »
priment sur la Halokhoh
13Tahillim
91