ב״ה
Le
livre de `Iyôv soutient-il la doctrine de la réincarnation ?
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Question :
Que
pense les rav (chlitta) des chapitres 33:29-30 du sefer Iyyove qui
soutiendraient la théorie de la réincarnation ?
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Réponse :
La
doctrine de la réincarnation est née des Kabbalistes au 13ème
siècle. Avant cela, bien qu'une petite poignée de gens y croyaient
à l'époque des Ga`ônim, ils n'y croyaient pas sur base de preuves
textuelles mais pour d'autres raisons, car il n'y a aucune trace de
réincarnation dans nos textes, que ce soit le TaNa''Kh ou le
Talmoudh ! C'est seulement depuis l'ère des Kabbalistes, avec le
Ramba''n זצ״ל
en
tête, que certains passages commencèrent à être interprétés
comme se référant à la réincarnation. Les passages de `Iyôv
33:29-30 sont un cas
d'école de passages ayant toujours été compris dans un sens bien
particulier et sans équivoque par tous, mais qui depuis l'ère des
kabbalistes reçurent un tout autre sens que l'on considère comme
allant de soi. De ce fait, la vraie question à se poser est :
comment ces passages étaient-ils interprétés du temps de nos Sages
et les générations pré-kabbalistiques ?
Avant
de répondre à la question, reproduisons ces versets bibliques :
`Iyôv
33:29-30
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Voyez,
tout cela, Dieu le fait deux ou trois fois en faveur de l'homme,
pour
ramener son âme des bords de l'abîme, et l'éclairer de la
lumière des vivants.
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הן-כל-אלה,
יפעל-אל--
פעמים
שלוש עם-גבר
להשיב נפשו,
מני-שחת--
לאור,
באור
החיים
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Le
Ramba''n fut le tout premier à voir dans ses versets une preuve de
la doctrine de la réincarnation. Mais ce ne fut jamais le sens
qu'ont eu ces versets avant lui. Voici ce que nous lisons dans le
Talmoudh Bavli :
Yômo`
86b
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Il
a été enseigné : Rébbi Yôsé bar Yahoudhoh dit :
« Si un homme commet une transgression, la première fois
on lui pardonne, la deuxième fois on lui pardonne, la troisième
fois on lui pardonne, la quatrième fois on ne lui pardonne pas,
car il est dit1 :
''Ainsi parle HaShem : pour trois péchés d'Israël, et à
cause du quatrième, Je ne renverserai pas [Mon décret]'', et il
est dit [aussi]2 :
''Voyez, tout cela, Dieu le fait deux ou trois fois en faveur de
l'homme''. Bien. À quoi sert le ''et il est dit [aussi]'' On
aurait pu penser que cela ne s'applique qu'à une communauté,
mais pas à un individu3 ;
c'est pourquoi, viens entendre [le verset supplémentaire] :
''Voyez, tout cela, Dieu le fait deux ou trois en faveur de
l'homme''. »4
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תניא
רבי יוסי בר יהודה אומר אדם עובר עבירה
פעם ראשונה מוחלין לו שניה מוחלין לו
שלישית מוחלין לו רביעית אין מוחלין לו
שנאמר כה אמר ה'
על
שלשה פשעי ישראל ועל ארבעה לא אשיבנו
(ונאמר)
[ואומר]
הן
כל אלה יפעל אל פעמים שלש עם גבר מאי
ואומר וכי תימא הני מילי בציבור אבל
ביחיד לא תא שמע הן כל אלה יפעל אל פעמים
שלש עם גבר
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Ces
versets de `Iyôv n'ont absolument rien à voir avec la réincarnation
mais le nombre de fois que l'on est pardonné pour avoir commis le
même péché à plusieurs reprises. Notez d'ailleurs que les versets
ne disent pas qu'HaShem ית׳
ramène
l'homme de la mort mais « du bord de l’abîme », ce qui
signifie que l'homme n'y est pas tombé, juste qu'il est sur le point
d'y tomber. On ne parle pas d'un homme qui est mort, mais d'un homme
sur le point de tomber dans l’abîme, sur le point de s’enfoncer,
sur le point d'atteindre le point de non retour. Par amour et
miséricorde, HaShem nous pardonne maximum trois fois les péchés
les plus graves. Si ce péché grave est commis une quatrième fois,
c'est le point de non retour où Il nous laisse nous enfoncer et
mourir dans notre péché, tout comme Il n'a pas pardonné la
quatrième fois que les Israélites s'étaient collectivement adonnés
à l’idolâtrie et les a donc laissé s'enfoncer ou périr dans
leurs fautes, sans plus aucune possibilité de pardon.
Nos
Sages s'appuient en outre sur des passages du TaNa''Kh qui démontrent
qu'HaShem considère comme morts les gens qui vivent dans le péché
comme une routine de vie. Bien qu'ils soient physiquement vivants,
ils sont spirituellement morts. Voilà pourquoi celui qui est
pardonné de ses péchés péchés graves et ne les commet pas une
quatrième fois est considéré comme ayant joui de la lumière des
vivants, car se repentir du péché pour ne plus le commettre est une
renaissance spirituelle. C'est aussi simple que cela. C'est également
de cette façon que sont interprétés ces versets dans le Talmoudh
Yarousholmi5.
Voilà
pourquoi, en commentant ces versets de `Iyôv, Rash''i זצ״ל
écrit
ceci :
Deux
ou trois fois : Il le châtie pour ses iniquités
par sa maladie [dont il est atteint] afin de ne pas le détruire,
mais s'il Le provoque davantage, il doit s'inquiéter du Géhinnom
ou de la mort, car il est dit : « et à cause du
quatrième, Je ne renverserai pas [Mon décret] ».
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פעמים
שלש -
מייסרו
על עונותיו בחליו שלא להשחיתו ואם יותר
יכעיס לפניו ידאג מן גיהנם ומן המיתה
שנאמר ועל ארבעה לא אשיבנו
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Rash''i
ne fait que confirmer tout ce qui a été dit plus haut dans le
Talmoudh ! HaShem nous punit par des plaies, comme la maladie,
des malheurs, etc., les deux ou trois premières fois que l'on commet
un péché grave. Mais à partir de la quatrième fois, il est
possible qu'Il ne pardonne plus et nous condamne à la mort ou au
Géhinnom ! Et c'est également de cette manière que ces
versets sont expliqués par le Ramba''m זצ״ל
et
tous ceux qui ont précédé l'ère des Kabbalistes, qui commence à
partir du 13ème siècle. Donc, rien à voir avec la réincarnation
soutenue et développée par le Ramba''n !
En
outre, tous les versets de ce chapitre 33 de `Iyôv qui précèdent
les versets 29 et 30 démontrent par eux-mêmes que le thème de ce
chapitre est le pardon des péchés de l'homme. Il est très facile
d'isoler des versets de leur contexte environnants et leur faire dire
ce qu'ils ne disent pas !
Cela
doit nous servir de leçon sur l'attitude à adopter vis-à-vis des
enseignements et doctrines défendus dans tout milieu, mouvement
religieux ou communauté post-talmudique. Nous ne devons pas croire
quelque chose sur la seule base qu'un éminent rabbin ou un Rebbe a
défendu cette position, ni sur la base qu'un très grand nombre de
Juifs soutiennent cette position. Ce qui doit compter pour nous est
ce que dit la Tôroh et comment nos Sages de mémoire bénie ont
interprété et expliqué la chose. La Qabboloh n'a pas toujours fait
partie du Judaïsme, tout comme le Hassidisme n'a pas toujours fait
partie du Judaïsme. Le premier est un mouvement né à partir du
13ème siècle, tandis que le deuxième est un mouvement né à
partir du 18ème siècle. De ce fait, ils contiennent forcément des
faussetés, des inexactitudes philosophiques et doctrinales quelques
part, ainsi que des innovations. Ce qui est bien et vrai dans ces
courants du Judaïsme doit être accepté, mais ce qui n'est pas
conforme à la Tôroh ou aux enseignements de nos Sages de mémoire
bénie doit être rejeté, même si cela vient d'éminents hommes
comme le Ramba''n, le Ba´al Shém Tôv ou encore Rabbi Nahmon
de Breslev.
Nous
ne sommes pas des suiveurs d'hommes mais des suiveurs d'HaShem
Concluons
en rappelant que la doctrine de la réincarnation n'a pas toujours
fait partie de la Qabboloh. En effet, parmi les premiers kabbalistes,
beaucoup rejetaient la doctrine de la réincarnation. Aucun texte
traditionnel n'avait jamais soutenu la véracité d'une telle
doctrine avant le Ramba''n. Par conséquent, plusieurs kabbalistes la
rejetèrent.
1´Omôs
2:6
2`Iyôv
33:29
3Le
premier verset cité parle de péchés collectifs du peuple
d'Israël. On pourrait donc penser que ce principe consistant à
être pardonné pas plus de trois fois ne s'appliquait que pour les
péchés de la collectivité et non pour les péchés individuels
4C'est-à-dire
que le même principe s'applique également pour les péchés
individuels
5Sanhédhrin
10:1