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La
Tôroh et HaZa''l n'ont jamais demandé « Trois
Semaines » de deuil entre le 17 Tammouz et le 9 `ov
Deuxième
Partie
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De
façon relativement récente, la mode parmi les Sapharadhim
ashkénazifiés consiste à reproduire et imiter les Harédhim
`ashkanazim en interdisant pratiquement tout durant la période dite
des « Trois Semaines » entre le 17 Tammouz et le 9 `ov.
Or,
les Sapharadhim n'ont jamais connu cette période des « Trois
Semaines », également appelée בֵּין
הַמְּצָרִים « Bén
Hammasorim » et n'avaient aucun Minhogh de tristesse
durant cette période. Les seules choses qu'ils respectaient jusqu'à
relativement récemment étaient des restrictions à partir de Rô`sh
Hôdhash `ov et la semaine durant laquelle tombe le jeûne du
9 `ov.
Vous
pouvez faire des recherches dans les écrits des Ri`shônim
Sapharadhim, aucun ne fait référence à des Minhoghim se rapportant
aux « Trois Semaines ». Chaque communauté séfarade
adhérait à des Houmrôth et indulgences différentes, mais
il n'y avait pas de « Halokhoh » s'appliquant à tous les
Sapharadhim dans ce domaine précis.
En
fait, le tout premier Sapharadhi à mentionner cette période fut
Rabbi Yôséf Qa`rô (1488-1575) dans son Béth Yôséf, où il cite
une responsa ashkénaze qui mentionne le Séphar Hasidhim
de Rabbi Yahoudhoh ban Shamou`él Hahosidh (1148-1217) dans
lequel il est écrit : « Certains pieux parmi les Pieux
d'autrefois ne consomment pas de fruit nouveau durant les trois
semaines, car comment dirions-nous la bénédiction de
''Shahahayonou'' durant une période si triste
de l'année ? ». Premièrement, nous n'avons aucune
preuve que les Hasidhim Hori`shônim (les « Pieux
d'autrefois », une expression qui désigne les pieux de l'ère
de la Mishnoh) avaient une telle pratique. Ni la Mishnoh, ni le
Talmoudh, n'en parlent. Deuxièmement, la coutume consistant à
réciter la bénédiction de « Shahahayonou »
lors de la consommation d'un fruit nouveau ne remonte pas du tout au
Talmoudh mais est post-talmudique. Comment donc les Hasidhim
Hori`shônim auraient-ils pu avoir une telle pratique ?
Troisièmement, le passage du Séphar Hasidhim ne mentionne
que cette seule pratique durant les trois semaines. Nous sommes très
loin de toutes les interdictions ashkénazes que l'on connaît
aujourd'hui !
Mais
là encore, la source de Rabbi Yôséf Qa`rô est un texte rédigé
par l'un des Ri`shônim `ashkanazim. Il ne pouvait trouver aucun
texte rédigé par les Ri`shônim Sapharadhim, tout bonnement parce
que chez les Sapharadhim il n'y avait toujours eu que des Minhoghim
s'appliquant à la période de neuf jours entre Rô`sh Hôdhash
`ov et le jeûne, ainsi que d'autres lois et coutumes pour la semaine
du jeûne. C'est là la pratique séfarade d'origine !
Comment
les communautés séfarades passaient cette période ? Y
avait-il des Houmrôth respectées par certaines ou toutes les
communautés séfarades ?
- Izmir, en Turquie
Le
Grand-Rabbin Hayim ban Yisro`él Benbenisti (1603-1673) écrit
dans ses « Shi´ouré Kanasath Haggadhôloh » que
le Minhogh dans sa ville (et certaines autres villes turques)
était de ne simplement pas se fiancer ou se marier durant toute la
période des trois semaines. Rien de plus, rien de moins ! Il
n'y avait donc pas les interdictions d'écouter ou jouer de la
musique, de réciter la bénédiction de « Shahahayonou »,
d'acheter des vêtements neufs, etc.
Le
Rov Hayim Pal`aghi (1788-1869), un autre rabbin turque de la
ville de Smyrne, écrit la même chose dans le volume 2 de son « Lév
Hayim ».
- Le Caire, en Égypte
Le
Grand-Rabbin Rapho`él `aharôn ban Shim´ôn (1847-1928) ne fait
aucune mention de ces Minhoghim de deuil dans la section
relative aux jeûnes dans son « Néhar Misrayim ».
Par
contre, il fait mention du fait qu'il existe quelques communautés
qui récitent certaines Qinôth lors des trois Shabbothôth de la
période des « Trois Semaines », et que dans certaines
autres communautés on lit les Haftorôth de ces Shabbothôth-là
avec un air triste et déchirant. Mais il précise que rien de
tout cela n'est le Minhogh en Égypte. Shabboth est Shabboth, et
il ne doit y avoir aucune tristesse ou allusion à de la tristesse ce
jour-là.
Mais
là encore, rien n'est dit sur des interdictions d'écouter de la
musique, de célébrer des mariages, d'acheter des vêtements neufs,
de réciter « Shahahayonou », etc. La seule chose
que faisaient ces communautés non égyptiennes qu'il mentionne était
de réciter des Qinôth lors des trois Shabbothôth qui tombaient
durant les « Trois semaines ».
Il
vaut la peine de mentionner le fait que dans la section relative aux
lois sur la sorcellerie et la magie, il dit que le Minhogh en Égypte
consiste à se marier n'importe quel jour de l'année, mais que la
majorité de la communauté est hésitante à tenir des fiançailles
ou des mariages durant ces « Trois Semaines » parce que
ce n'est pas considéré comme un « bon signe » ou de
« bonne augure ». En mentionnant cela dans la section
relative aux lois sur la sorcellerie et l’idolâtrie, il veut nous
indiquer qu'hésiter à se fiancer ou se marier durant la période
des « Trois Semaines » est de la pure superstition !
Nous
voyons donc qu'en Égypte, il n'y avait aucune pratique de
deuil pendant la période dite des « Trois Semaines ».
- Bagdad, en Irak
Le
Rov ´abdallah Somakh (1813-1889) nous dit dans le volume 3 de son
« Zivé Sadhaq » que le
Minhogh dans sa ville consistait à suivre la recommandation faite
dans le Shoulhon ´oroukh de ne pas réciter « Shahahayonou »
durant l'entièreté de la période dite des « Trois
Semaines ». Pas plus, pas moins !
Le
Grand-Rabbin `alisho´ Nisim Sasson Dangoor (19ème siècle) nous
parle dans son « Gadhoulôth `alisho´ » du
Minhogh de Bagdad consistant à tenir une Barith Miloh (même durant
les neuf jours entre Rô`sh Hôdhash `ov et le jeûne) avec
des chants, des danses et des instruments de musique. Il questionne
la permissivité d'un tel Minhogh à la lumière de la recommandation
faite par HaZa''l de diminuer sa joie lorsqu'arrive le mois de
`ov, mais ne fit rien du tout pour y mettre fin.
Le
Rov Yôséf Hayim (1834-1909) nous dit dans son célèbre
ouvrage intitulé « Ban `ish Hay »
que bien que la Halokhoh n'interdit les mariages qu'à partir de
Rô`sh Hôdhash `ov, le Minhogh s'est développé de
l'interdire depuis le 17 Tammouz. Mais il précise que les
fiançailles étaient permises depuis le 17 Tammouz jusqu'à Rô`sh
Hôdhash `ov, moment à partir duquel elles
devenaient interdites. Il ajoute qu'il était interdit d'organiser la
moindre fête avec de la musique et des danses durant toute la
période des « Trois Semaines ».
Le
Rov ´ôvadhyoh Yôséf (1920-2013), qui était lui aussi de Bagdad,
cite un témoignage oral qu'il a entendu du Rov Sliman Houghi
`abboudhi, qui fut le `ov Béth Din de Bagdad, et qui rapporta qu'en
fait, le Minhogh de Bagdad consistait à autoriser les mariages
jusqu'à Rô`sh Hôdhash `ov.
Nous
avons donc quatre témoignages divergents quant à ce qu'était le
Minhogh de Bagdad. Cela nous permet de conclure qu'en réalité il
n'y avait pas un seul Minhogh pour toute la communauté séfarade de
Bagdad, mais que diverses communautés de la ville avaient
différentes pratiques quant à ce qui pouvait ou ne pouvait pas être
fait durant la période dite des « Trois Semaines ».
La
ville de Bagdad est donc un bel exemple montrant clairement qu'il n'y
a jamais eu de Minhogh universel parmi les Sapharadhim d'accepter des
pratiques de deuil depuis le 17 Tammouz !
- Meknès, au Maroc, et Tlemcen, en Algérie
Le
Rov Yôséf Messas (1892-1974), dans le volume 2 de son « Mayim
Hayim », répond à une question qui
lui a été soumise quant à savoir si l'on doit s'abstenir de se
marier dès le 17 Tammouz ou seulement dès Rô`sh Hôdhash
`ov. Il répond en citant le Shoulhon ´oroukh1,
qui interdit de réciter « Shahahayonou »
durant les trois semaines, et le commentaire du Ramo''`2,
qui interdit les mariages durant les trois semaines, et conclut que
la règle suit ce qu'a écrit le Ramo''`. Il répond également à
une autre question concernant la permissivité de se couper les
cheveux durant les trois semaines en disant qu'on doit l'interdire
durant les trois semaines, mais il ajoute qu'étant donné que les
Français ont envahi l'Afrique du Nord beaucoup sont retournés vers
le Minhogh consistant à ne l'interdire qu'à partir de Rô`sh
Hôdhash `ov. Il conclut qu'il ne faut pas protester contre
ceux qui sont retournés vers ce Minhogh, car interdire de se couper
les cheveux depuis le 17 Tammouz n'est qu'une Houmroh
et une pratique qui fut établie par les `ashkanazim qui s'est
lentement frayée un chemin chez les Sapharadhim !
Tout
est dit dans ces dernières lignes ! Bien qu'au Maroc et en
Algérie ils s'interdisaient les mariages et de se couper les cheveux
depuis le 17 Tammouz, ce n'était pas la pratique d'origine des Juifs
marocains et algériens, qui n'ont fait qu'imiter les `ashkanazim en
adoptant ces Houmrôth !
- Damas et Alep, en Syrie
Dans
le livre « Darakh
`amath », par le Rov `avrohom Ades de Bané Baraq,
qui rapporte toutes les pratiques des Juifs syriens lorsqu'ils
vivaient encore nombreux en Syrie, il est dit que certains
s'abstiennent de dire « Shahahayonou »
les jours de semaine, mais que même ces « individus pieux »
ne s'en abstiennent pas à Shabboth. Il ne dit rien sur d'autres
restrictions en vigueur durant les « Trois Semaines ».
Mais nous voyons qu'en Syrie, même l'interdiction de dire
« Shahahayonou » n'était
respectée que par certains, que le Rov Ades lui-même
décrit comme « ces individus pieux ».
- Djerba, en Tunisie
Dans
le livre « Barith Kahounnoh », par le Rov Môshah
Hakkôhén, il est rapporté ceci :
- aucun mariage n'est célébré durant l'entièreté de la période des « Trois Semaines », mais les fiançailles sont permises durant toute la période
- on ne se coupe pas les cheveux durant l’entièreté de la période des « Trois Semaines »
- durant toute cette période, le Minhogh entre Minhoh et ´arbith consiste à s'asseoir par terre et réciter le dernier chapitre de `ékhoh (Lamentations de Jérémie), ainsi que les Tahillim 137 et 79.
- la bénédiction de « Shahahayonou » n'est pas récitée sur un fruit nouveau, ni sur un vêtement neuf, durant l'entièreté de la période des « Trois Semaines ».
Comme
vous avez pu le voir, il n'y avait jamais eu de Minhoghim uniformes
parmi les Sapharadhim pour la période dite des « Trois
Semaines », car les communautés séfarades d'origine se
tenaient aux indications données dans le Talmoudh et par les
Ri`shônim Sapharadhim (voir la première
partie). Dès lors que Rabbi Yôséf Qa`rô alla emprunter
aux `ashkanazim certaines de leurs innovations, des divergences sont
nées chez les Sapharadhim, avec certains qui continuent à suivre
les prescriptions données par le Talmoudh et les Ri`shônim
Sapharadhim, d'autres qui reprennent certaines des restrictions des
`ashkanazim, et d'autres enfin qui n'ont aucun honneur ni attachement
aux pratiques de leurs ancêtres et préfèrent imiter les
`ashkanazim en tout au mépris de leurs propres traditions d'origine,
comme s'il fallait nécessairement être les plus rigoureux et
stricts pour être de bons Juifs !
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