ב״ה
Le
Shoulhon ´oroukh autorise-t-il les femmes non mariées à ne
pas se couvrir les cheveux ?
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Même
ceux qui disent qu'une femme non mariée ne doit pas se couvrir les
cheveux admettent que dans les temps passés il n'en était pas ainsi
et qu'ils ne savent pas depuis quand cela a changé ni même
pourquoi. Mais ils disent qu'à partir du moment où la « coutume »
s'est développée de faire la distinction entre les femmes mariées
et celles qui ne l'étaient pas en n'exigeant que seules les femmes
mariées se couvrent la tête, il n'y aurait plus d'« interdiction »
pour les femmes non mariés de ne pas se couvrir la tête en public
(ils admettent donc implicitement qu'avant ce changement, dont ils ne
connaissent ni l'origine ni les raisons, cela était bien une
interdiction halakhique). Vous pouvez lire cela notamment
ici : http://www.dinonline.org/2011/07/18/hair-covering-for-unmarried-girls/
Ce
qui est « drôle », c'est qu'ils admettent que même le
Shoulhon
´oroukh ne permet pas aux femmes non mariées de sortir en public
avec les cheveux non couverts (voir le passage du Shoulhon
´oroukh, `avan
Ho´azar 21:2,
que j'avais d'ailleurs cité vers la fin de l'article intitulé
« Kisouy
Horô`sh : les sources »).
Mais ils disent néanmoins se baser sur le passage suivant du
Shoulhon
´oroukh pour permettre aux femmes non mariées de ne pas se couvrir
les cheveux1 :
Les cheveux d'une femme
dont l'habitude est de les couvrir, il est interdit de réciter
[le Shama´] en leur présence2.
Par contre, pour les vierges, dont l'habitude est de marcher la
tête sauvage, c'est permis. |
שער
של אשה שדרכה לכסותו אסור לקרות כנגדו.
אבל
בתולות שדרכן לילך פרועות הראש מותר
|
Ce
passage ne signifie absolument pas que les vierges ont la permission
de ne pas se couvrir la tête. Cette erreur de compréhension sur le
sens de ce passage du Shoulhon
´oroukh est due au fait que ceux qui le lisent supposent faussement
que marcher la « tête sauvage » signifie « marcher
la tête découverte ». Mais il n'en est pas ainsi ! Comme
nous l'avions expliqué dans l'article intitulé « Kisouy
Horô`sh : une obligation ou une option ? »,
cette expression (qui est employée dans la Mishnoh, la Gamoro`,
ainsi que dans le Mishnéh Tôroh) désigne une femme qui porte bien
un foulard, mais qui laisse certains de ses cheveux ressortir du
foulard à l'arrière, car elle ne les a pas attachés sous son
foulard.
Ce
que Rabbi Yôséf Qa`rô ז״ל
veut
donc dire ici c'est que la pratique des femmes (terme qui désigne
ici, comme on le comprend du contexte, des femmes mariées) est de se
couvrir intégralement les cheveux. C'est pourquoi, on a l'obligation
d'attendre qu'une femme (et le Ramo''` ז״ל
commente
en disant que cela s'applique également à sa propre épouse) se
couvre les cheveux avant de pouvoir réciter le Shama´. Par contre,
les vierges, dans les temps talmudiques, avaient l'habitude, le jour
de leur mariage, de ne pas se couvrir intégralement les cheveux.
Elles portaient bien un foulard, mais n'attachaient pas leurs cheveux
sous le foulard, ce qui faisait qu'elles laissaient donc pendre
quelques cheveux à l'arrière du foulard. Cette pratique est
mentionnée dans la Mishnoh et la Gamoro` du traité Kathoubbôth,
qui tranchent que si un homme va accuser sa femme le lendemain du
mariage en disant qu'elle n'était pas vierge (alors qu'elle avait
prétendue l'être, ce qui a une incidence sur la valeur de la
Kathoubboh qu'il s'était engagé à lui verser), si des témoins
attestent que la veille (le jour du mariage) ils ont bien vu la femme
sortir de la maison de son père avec une Hinoumo` (un voile spécial
que seules les
femmes vierges portaient dans les temps talmudiques le jour de leur
mariage) et qu'ils ont vu également qu'elle avait la tête sauvage,
parce que certains de ses cheveux pendaient de son foulard, le Béth
Din doit en conclure qu'elle était bien vierge lorsqu'elle s'est
mariée, et par conséquent elle est innocentée de la calomnie de
son mari !3
Nous
pouvons donc bien voir que même les vierges portaient un foulard (si
être « la tête sauvage » signifie avoir la tête
découverte, on n'aurait alors pas dit qu'elles portaient également
une Hinoumo`). Néanmoins, pour qu'il y ait des signes extérieurs
permettant d'indiquer qu'elles étaient bien vierges le jour de leur
mariage, la pratique était qu'elles laissent pendre ce jour-là un
peu de leurs cheveux de leurs foulards. C'est pourquoi, dans ce
cas-ci, les quelques cheveux qui pendent du foulard d'une vierge ne
sont pas considérées comme une ´arwoh. D'où la raison pour
laquelle le Shoulhon ´oroukh tranche, à juste titre, que si
une femme vierge a la « tête sauvage », il est néanmoins
permis de réciter le Shama´ en sa présence puisqu'il est normal
pour une femme vierge de laisser pendre quelques cheveux de sous son
foulard pour la distinguer de la femme non vierge le jour de son
mariage !
De
ce fait, ils ne peuvent pas utiliser ce passage du Shoulhon
´oroukh pour permettre aux femmes non mariées de ne pas se couvrir
la tête ! D'ailleurs, le commentaire même du Ramo''` sur ce
Pasaq du Shoulhon ´oroukh ne laisse place à aucun doute sur
le fait que Rabbi Yôséf Qa`rô parlait bien de femmes vierges ayant
la tête couverte mais dont certains cheveux ressortent du foulard.
En effet, le Ramo''` écrit :
Et c'est [aussi] le Din
pour les poils des femmes qui dépassent de l'arrière de leur
foulard (le Béth Yôséf au nom du Rashba''`), et encore plus
pour les cheveux étrangers, même s'ils sont d'habitude couverts. |
והוא
הדין השערות של נשים שרגילין לצאת מחוץ
לצמתן (בית
יוסף בשם הרשב"א)
וכל
שכן שער נכרית אפילו דרכה לכסות
|
En
d'autres mots, le Ramo''` explique que lorsque Rabbi Yôséf Qa`rô a
rapporté le Pasaq selon quoi il était permis de réciter le Shama´
en présence d'une vierge qui laisse pendre quelques cheveux de sous
son foulard, car il est normal pour une femme vierge d'agir ainsi, il
incluait également d'autres cas. Le premier cas mentionné est celui
d'une femme qui ne couvre pas les poils qui sont au bas de l'arrière
de sa tête. Ces poils n'ont pas le statut halakhique de « cheveux ».
Par conséquent, il n'est pas nécessaire qu'ils sont couverts sous
le foulard et un homme peut donc réciter le Shama´ même lorsqu'il
voit que les poils du bas de l'arrière de la tête d'une femme ne
sont pas couverts sous le foulard. Et le Ramo''` cite en cela le Béth
Yôséf, qui est un ouvrage rédigé par Rabbi Yôséf Qa`rô
lui-même !
Le
deuxième cas mentionné est celui d'une femme qui porte des cheveux
étrangers (une expression qui désigne une perruque). Le Ramo''`
tranche qu'il est permis de réciter le Shama´ également en
présence d'une femme qui porte une perruque, même si elle n'a pas
couvert sa perruque d'un foulard ! (Certaines femmes portent une
perruque sous le foulard car elles n'arrivent pas à couvrir tous
leurs cheveux naturels sous le foulard. De ce fait, pour éviter que
leurs vrais cheveux soient visibles, elles mettent en-dessous du
foulard une perruque, car elles estiment que puisque ce ne sont pas
leurs vrais cheveux ce n'est pas considéré qu'elles les ont
exposés.)
Le
point commun entre ces deux cas mentionné par le Ramo''` est que
toutes ces femmes ont bel et bien la tête couverte par quelque chose
(dans le premier cas c'est un foulard et dans le deuxième cas c'est
une perruque). De même, dans le cas mentionné par Rabbi Yôséf
Qa`rô, la vierge a également la tête couverte d'une Hinoumo`, mais
certains cheveux ressortent de son foulard. De ce fait, ce passage du
Shoulhon ´oroukh ne parle en aucun cas du fait que les femmes
non mariées peuvent se permettre de ne pas se couvrir la tête !
En
outre, le lien mentionné au début de cet article rapporte que même
les Safaradhim avaient la pratique de couvrir les cheveux de toutes
les femmes et jeunes filles, indépendamment du fait qu'elles étaient
mariées ou pas. Or, le Shoulhon ´oroukh est considéré par
la majorité des Safaradhim comme étant l'autorité halakhique
absolue, et il est donc évident qu'ils avaient bien compris que
Rabbi Yôséf Qa`rô ne voulait pas dire ce qu'on lui fait dire
aujourd'hui. D'ailleurs, c'est essentiellement depuis que les
Safaradhim ont quitté les pays arabes qu'ils ont accepté la
pratique des `ashkanazim de ne couvrir que les cheveux des femmes
mariées !
1`ôrah
Hayim 75:2
2C'est-à-dire,
tant qu'ils ne sont pas couverts
3Voir
la Mishnoh de Kathoubbôth 2:1