mercredi 3 juin 2015

Qu'est-ce qui ne va pas avec le Zôhar ? - 4ème Partie

בס״ד

Qu'est-ce qui ne va pas avec le Zôhar ?


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Opposition rabbinique au Zôhar

Le premier récit que nous avons sur l'origine du Zôhar et une analyse critique de son autorité proviennent du Rov Yishoq ban Shamou`él d'Acre (1250-1340), un Maqqoubbol disciple d'un autre Maqqoubbol répondant au nom de Rabbi Mé`ir, lui-même disciple d'un célèbre Maqqoubbol nomé Rabbi Yôséf ban `Avrohom Giqatiloh (deux Halokhôth du Shoulhon ´Oroukh viennent de lui : entendre les Qaddishin en ayant sur soi les Tafillin et ne pas réciter le Qiddoush Lavonoh avant sept jours), qui lui-même fut un disciple de Rabbi `Avrohom `Abboul´af´yoh (surnommé « le prophète d'Ávila ». Il demanda au Pape de se convertir au Judaïsme et fut jeté pour cela en prison pour une période d'un mois).

Le récit de Rov Yishoq d'Acre est rapporté dans le livre « Séfar Hayyokhshin » du Rov `Avrohom Zacuto, qui vécut à l'époque de l'expulsion espagnole. Il fut retouché dans certaines éditions, et les pro-zôharistes préfèrent citer le texte manipulé. Mais voici le texte original :

ולמען תספרו לדור אחרון אודיעכם מה שמצאתי כתוב. שר' יצחק דמן עכו (תלמיד הרשב"א ומקובל היה) הלך לחקור על ספר הזוהר שכנראה שהיו דבריו מופלאים ישאבו ממקור עליון. ואשר הוא לשון ירושלמי- נראה שדבריו דברי קבלה ואמת. ואשר הם לשון הקודש- הם דברי זיוף. אמר- ושאלתי את התלמידים אשר נמצאו בידיהם ספר הזהר מאין בו להם. ולא מצאתי דבריהם מכוונים. יש מי שאמר שהרמב"ן מצא אותו בארץ ישראל ושלחו לקטלוניא והביאו הרוח לארגון ונפל ביד הר' משה דיליאון. ויש אומרים שמעולם לא היה חיבור של רשב"י, רק שר' משה ידע שם הכותב (=שם משמות המפורשים של הקב"ה שבהם אפשר לקבל כח גדול בכתיבה) ובכוחו יכתוב דברים מופלאים. ולמען יקח בהם מחיר רב, היה תולה עצמו באילן גדול שהוא רשב"י ור"א בנו וחביריו. ואבוא אל עיר ואליאדוליד, ואמצא שם ר' משה די ליאון. וישבע לי שספר רשב"י הנו בביתו (=כלומר נשבע - לא שיש עמו ספר שחברו רשב"י, אלא הנקרא ספר רשב"י הנו בביתו- שכך קראו ר"מ דיליאון בעצמו! ובכך נמלט משבועת שקר, דלא כמו שכתב בעל ההגהות על ספר מגן וצנה שלא ראה נוסח זה) באוילא (=עיר בספרד), שיראהו לי בלכתי שמה. ובשוב לביתו מת (ר' משה) באדיבאל. ואבוא אל עיר אוילא ואמצא שם חכם זקן, ושמו ר' דוד רפאן, קרובו (של ר' משה די ל') ואמצא חן בעיניו. ואשביעהו לאמר אם היה יודע אמיתות ספר הזוהר אם היה אמת או לא. ויאמר החכם, כי נתברר לו בודאי שר' משה בשם הכותב היה בודאם. וסיבת האמיתות היא כי ר' משה הנז' היה כותב סודות ונפלאות לעשירים אשר במלכות ההוא, ולוקח בהם מתנות רבות זהב וכסף. ואותו היום, כל מה שהיה מרויח היה מפזר. עד שביום מותו לא נשאר לו אפילו פרוטה. ואשתו ובניו ברעב ובצמא ובערום ובחוסר כל. וכשמעי מתתו, קמתי אל הר' יוסף די אוילא שהיה עשיר גדול, ובחייו לקח ממנו ממון גדול. ואומר לו- עתה היא עתך עת דודים, תזכה לספר הגדול ותקח את הספר מיד אשתו במנה יפה שתשלח ביד אשתך, שהיא (אשתו של ר"מ ד"ל) כעת ערומה. וכן עשה. וישלח מתנות ביד אשתו אל אשת ר"מ הנז'. ותשבע לה אשת ר' משה הנז' שמעולם לא היה לו ספר לאישי, רק מלבו ודעתו היה כותב. ואומר לאישי- למה אתה תולה עיונך בחכם אחר (=רשב"י)? הלא טוב היה לך לאמר כי משכלך אתה כותב ויודוך כי תיטיב לך. ואישי ענני- שאם הייתי אומר שמדעתי הם, לא יחשיבו אותם ולא יתנו לי מתנות אמר יצחק- ואסע מאוילא ואבוא עד טאלאבירה. ומצאתי שם חכם מופלא, ושמו ר' יוסף הלוי בן ר' טודרוס המקובל. ואחקרה ממנו לדעת מה שידו מגעת בידיעת ספר הזוהר. ויאמר אלי- דע באמת כי היה ביד ר' משה הנז' ספר הזוהר אמיתי, וסבות אמיתות דברי הוא כי היה נותן לי קונטרסים, ואני לבחון הספק הזה לקחתי קונטריס אחד מן הקונטרסים ואמרתי לו שנאבד ממני, שיתן לי ממלא מקומו. ויאמר לי- הראה לי אחרית הקונרטס הקודם לו וראשית הקונטרס המתאחר. ויכתוב לי קונטרס, וארא ואין ביניהם שינוי כלל. אפילו תיבה אחת. רק שפה אחת ודברים אחדים. היש נסיון גדול מזה? אח"כ באתי לטוליטולה ואמרו לי שבחינת החכם ר' יוסף הלוי אינה בחינה, שאולי קודם נתון הקונטרסים לאדם, היה מעתיק אחד לעצמו, ואח"כ מתוך אותם קונטרסים אשר בביתו היה כותב לאחרים. (=כלומר אפשר שעותקים היו עוד בביתו אחר מותו, רק ניכרים כולם שחדשים זה מכבר נכתבו) ע"כ.

Pour faire court, il rapporte comment la propre épouse et la propre fille de Môshah de Lé`ôn ont avoué que Rabbi Môshah de Lé`ôn lui-même est l'auteur du Zôhar, et qu'il l'a rédigé et attribué à Rébbi Shim ôn ban Yôho`y afin de se faire de l'argent. Peu importe que l'on croit sa femme et sa fille ou qu'on ne les croit pas, ou même qu'on les croit en partie, et peu importe qu'il soit juste de dire qu'il l'ait rédigé pour se faire de l'argent ou pas, une chose est certaine : c'est bien Môshah de Lé`ôn qui a présenté le Zôhar au monde ! Pas un seul contemporain de Môshah de Lé`ôn n'a jamais prétendu avoir vu ou entendu parler du Zôhar avant lui ! Pas un seul dirigeant, pas même parmi les kabbalistes, pas un seul rabbin ! Et encore moins un seul Gôy, ni même le moindre Roi d'Orient (contrairement à ce que le Hydh''`oh tente de nous faire croire. En effet, il raconte que c'est un roi Gôy d'Orient qui aurait découvert le livre). Rien ! Le Zôhar aurait dû susciter de l'agitation parmi les gens qui l'avait gardé secret toutes ces années ou même parmi ceux qui l'avaient découvert. Il y aurait dû avoir une sorte de communiqué de la part des ésotériques qui, plusieurs siècles plus tard, firent comme s'il existait une espèce de tradition ancienne concernant l'existence du Zôhar. Après tout, même d'après le point de vue pro-zôhariste le plus conservateur, le Zôhar aurait été étudié déjà du temps des Ga`ônim, et il ne fait aucun doute que si des kabbalistes pouvaient avoir été dignes de connaître les secrets les plus profonds sur la création de l'univers, on aurait pu tout simplement leur faire confiance s'ils s'étaient exprimés sur l'existence de ce livre. Mais nada, rien du tout !

On ne pouvait entendre que de la surprise et de l'excitation de diverses natures de la part de tous face à la nouvelle découverte qu'un homme présenta de nulle part. Et rien que cela est la preuve la plus accablante de la supercherie que constitue ce livre, et ajoute du poids aux témoignages de la propre épouse et de la propre fille de Môshah de Lé`ôn, en dépit du récit que rapportent les versions censurées et édulcorées des kabbalistes.

Un point à considérer est qu'il aurait été très anormal pour l'auteur d'une œuvre anonyme ou pseudo épigraphique de ne pas même donner quelques indices permettant de deviner qu'il est lui-même l'auteur de cette œuvre. Et c'est en fait ce que Môshah de Lé`ôn lui-même a fait dans le Zôhar. En effet, nous lisons ceci dans le Zôhar :

Rébbi Shim´ôn a dit : « Il est vrai que le Saint, béni soit-Il, a consenti à ce que les mondes supérieurs et inférieurs soient avec nous dans ce livre. Heureuse est la génération durant laquelle cela est révélé, et tout cela sera renouvelé par la main de Môshah, à la fin des jours, dans la dernière génération ».
אמר רבי שמעון חבריא בודאי קודשא בריך הוא אסתכם עמנא עלאין ותתאין למהוי בהאי חבורא. זכאה דרא דהאי
אתגלייא ביה. דעתיד כולי האי לאתחדשא על ידא דמשה בסוף יומיא בדרא בתראה

Le « Môshah » dont on parle ici est Môshah de Lé`ôn ! Concernant le fait qu'il décrive la génération durant laquelle il révéla le Zôhar comme étant celle de la fin des jours, la toute dernière génération, Môshah de Lé`ôn s'était basé sur le calcul fait par le Ramba''n dans son Séfar Hawwikouah, où il écrit que Moshiah viendra durant l'année 1353. Néanmoins, Môshah de Lé`ôn lui-même est décédé cinquante ans avant cette date.

Que la vérité soit dite, il semblerait que les témoignages rapportés par Rabbi Yishoq ban Shamou`él d'Acre n'eurent aucun impact sur le Zôhar, du moins pas avant que 400 ans plus tard lorsque Rabbi Yahoudhoh `Aryéh de Modène ne décide de les publier à nouveau dans sa polémique anti-kabbalistique intitulée « `Ari Nôhém » (qui est téléchargeable intégralement en Hébreu ici).

Durant tout ce temps, il semblerait qu'il existait un mouvement philosophique (qui, à un moment, va progressivement se rassembler autour de la personne et des écrits du Ramba''m) qui rejetait la Qabboloh dans son ensemble.

Nous savons que le Ramba''m, dans son Môréh Navoukhim (Guide des Égarés), moque une idée qui est pourtant centrale pour le dogme des kabbalistes, à savoir, le pouvoir des permutations des lettres du Nom Divin que les kabbalistes prétendent maîtriser, ainsi que d'autres dogmes périphériques telle que les pouvoirs indépendants que les kabbalistes attribuent aux Démons.

Dans une célèbre Responsa du Riva''sh, le Riva''sh nous parle d'un philosophe anonyme et le cite comme ayant dit que tout comme les Chrétiens croient en la Trinité, les Maqqoubbolim (kabbalistes) croient la Décinité, l'Homme Divin fractionné en dix éléments. Toujours dans cette même Responsa, le Riva''sh rapporte que son propre maître, le Ra''n, lui a une fois dit ceci : הרבה יותר מדאי תקע עצמו הרמב"ן ז"ל להאמין בענין הקבלה ההיא « le Ramba''n de mémoire bénie s'est ligoté trop intensément au point d'en arriver à croire en cette prétendue Qabboloh ! ». Le Riva''sh lui-même conclut sa Responsa par les paroles suivantes : אך בעצם הספירות...אני אומר, שאין לסמוך בדברים כאלו אלא מפי חכם מקובל, ועדיין אולי « Mais concernant la structure des Safirôth... je dis qu'on ne doit accorder du crédit à cela que si l'on se fait instruire par un sage Maqqoubbol, et encore ce n'est qu'un peut-être ! ».

Cela dit en passant, la croyance dans le גילגול « Gilgoul » (réincarnation) ne faisait pas partie de la Qabboloh, ou n'était pas du moins un élément nécessaire de la Qabboloh, puisque nous trouvons de nombreuses personnes qui croyaient en la Qabboloh mais pas dans le concept de Gilgoul, comme par exemple le Rashém Tôv ban Shém Tôv (auteur du Séfar Ho`amounôth) ou encore le `Abbarban`él. Celui qui popularisa cette doctrine du Gilgoul fut le `AriZa''l (1534-1572), et depuis lors elle fut intégralement intégrée à la Qabboloh.

Pour revenir au Zôhar, dès lors qu'il se fraya un chemin dans la littérature rabbinique, l'opposition à la Qabboloh diminua.

Les trois premières personnes les plus célèbres à citer des passages du Zôhar furent probablement Rabbi Ménahém ban Binyomin Réqanati (1250-1310), dans son commentaire sur la Tôroh, Rabbi Yôséf ban `Avrohom Gikatilla (1248-1310, dans son Séfar Hahashmal, et Rabbénou Béhayyé (1255-1340), un disciple du Rashb''`o, qui publia son commentaire en 1291. Tous les trois furent contemporains.

Un siècle plus tard, le Zôhar fut cité et utilisé par le Rashba''s (Rabbi Shim´ôn ban Samah Dour`an, 1361-1444) dans ses Tashouvôth, Rabbi Yôséf `Albô (1380-1444), ainsi que très brièvement dans le Mahari''l (Rabbi Ya´aqôv ban Môshah Halléwi Môlin, 1355-1427).

Mais même plus tard, au 16ème siècle, lorsque le Zôhar avait déjà séduit une grande partie du peuple juif, les Pôsqim rechignèrent à changer la Halokhoh pour promouvoir les pratiques des Maqqoubbolim. En d'autres mots, ils acceptaient la philosophie kabbalistique, ses enseignements, etc., mais pas sa pratique, notamment à cause du fait que le Zôhar recommande de ne pas trop étudier le Talmoudh (ce qui est un comble) et que certaines des Halokhôth kabbalistiques étaient en opposition avec ce qui s'était toujours fait jusqu'à la publication du Zôhar. Autrement dit, il y avait de nombreuses contardictions entre le Zôhar et le Talmoudh au niveau pratique et halakhique. Ainsi, bien que les Maqqoubbolim avaient gagné la guerre des idées, ils ne détenaient pas encore le pouvoir politique nécessaire pour lancer une campagne destinée à s'emparer de l'autorité des Pôsqim.

Même Rabbi Yôséf Qa`rô (1488-1575), qui prétendit avoir étudié la Qabboloh avec un ange, qui avait des expériences très mystiques (voir ici), qui imprégna son Béth Yôséf de nombreux enseignements kabbalistiques, et cite le Zôhar à de nombreuses reprises, se refusa à octroyer aux kabbalistiques le pouvoir de changer le Judaïsme.

Et il en fut ainsi jusqu'à l'apparition soudaine d'un homme pas encore âgé de trente ans appelé Yishoq Louria` ban Shalômôh, mais plus connu sous le surnom de « `AriZa''l », c'est-à-dire, « le `Ari de mémoire bénie », `Ari pouvant être l'acronyme de :
  • `Ashkanazi Rabbi Yishoq (Rabbi Yishoq l'Ashkénaze)
  • Ho`alôqi Rabbi Yishoq (Rabbi Yishoq le Divin)
  • Ho`adhôn Rabbi Yishoq (Rabbi Yishoq le Maître)
  • `Adhônénou Rabbi Yishoq (Rabbi Yishoq notre Maître).


Nous en reparlerons dans la prochaine partie.
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