בס״ד
Emission de semence en vain : Une approche
rationaliste
L’influence du christianisme
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Pour (re)lire :
J'ai évoqué à quelques reprises l'idée
qu'au moins une partie de l'attitude négative halakhique envers la masturbation
était le résultat d'une influence culturelle chrétienne et générale. J'ai
plaidé dans le dernier
article en faveur de l'adoption de l'approche du PMO (Paradigme Maïmonidien
Orignal) sur la masturbation au lieu de l'approche du PSA (Paradigme du Shoulḥon
´oroukh). C’est quelque peu facile et gratifiant de mettre la faute sur les
autres (les chrétiens) et d’exonérer les Juifs.
Mais je suis désolé de dire que dans ce
cas, nous ne pouvons pas blâmer les chrétiens. Du moins pas le développement du
PSA que j'ai décrit en détail auparavant. Le PSA a été fortement influencé par
le Zôhar. Le Zôhar s'impose comme la condamnation la plus sévère de la pratique
de la masturbation dans toute l'histoire religieuse humaine. C'était l'œuvre
religieuse la plus complète, la plus zélée et la plus énergique dans le traitement
du sujet, et le premier texte religieux à en discuter avec autant de détails.
Bien qu'il y ait des références et des
condamnations de la masturbation éparpillées ici et là dans les écrits
chrétiens à partir du deuxième siècle, cela ne semble pas avoir été
particulièrement important pour les chrétiens jusqu'au milieu du 1 8ème
siècle. Il existe des exceptions, comme le pape Léon II (né en 1002, décédé en 1054)
qui a écrit durement à ce sujet, mais cela n'est jamais devenu une référence. Le
monde antique se souciait peu du sujet. La grande obsession du sujet a vraiment
commencé avec la publication d'un tract anonyme appelé « Onania »
en Angleterre vers 1722.
C’est justement à ce moment-là que
l'influence du monde chrétien et du monde universitaire a commencé à se faire
sentir sur le monde juif. Il me semble que l'acceptation généralisée du PSA et
les opinions strictes concernant la masturbation ont été aidées par la forte
rhétorique anti-masturbation qui a envahi le monde chrétien, philosophique et
scientifique à partir du début des années 1700. À partir de cette période, tant
dans le monde protestant que catholique, l'onanisme est devenu synonyme de
masturbation (alors que bibliquement parlant, cela n’a rien à voir comme nous l’avions
démontré) et il est devenu accepté comme un péché terrible. Dans le monde
philosophique, personnalité aussi influente qu'Emmanuel Kant a condamné
fermement la pratique. Dans le monde scientifique, il est devenu admis à cette
époque-là que la masturbation était à la fois le signe d'un trouble mental et
la cause de toutes sortes de maladies physiques. Ce n'est qu'au milieu du 20ème
siècle que ces idées ont commencé à changer, et la masturbation a commencé à
être comprise comme une partie normale du développement sexuel.
La plus forte influence halakhique sur
le judaïsme orthodoxe contemporain d'après la Seconde Guerre mondiale vient des
traditions ḥassidiques de l'Europe de l'Est et du monde non ḥassidique de la Yashivoh
de Lituanie. Ces deux traditions ont commencé et ont été nourries dans une
culture environnante qui pensait que la masturbation était un signe de maladie
mentale, qu'elle était médicalement malsaine et que c'était une abomination et
une perversion pour lesquelles Hashshém a condamné à mort ´ér et ˋônon. Il n'est pas surprenant que les Pôsaqim
et les maîtres du Mousor de l'époque n'aient pas prêté grande attention aux
opinions du R’’i Hazzoqén et d'autres et aient accepté le paradigme du Shoulḥon
´oroukh. C’est en ce sens que l’on parle d’influences chrétiennes et générales.
Un indicateur que tel est le cas, est
que les opinions exprimées par les partisans du PMO n'ont pas disparu
immédiatement lorsque le Shoulḥon ´oroukh les a supprimées. Le PSA a mis un
certain temps à s'implanter. Comme nous le verrons, immédiatement après la
publication du Shoulḥon ´oroukh, de nombreuses autorités rabbiniques se sont
opposées à la négation des opinions du R’’i Hazzoqén, du Ṭôsophôth Ri’’d et du
Rambo’’m.
Il est logique qu'il n'ait pas été
facile pour le Shoulḥon ´oroukh de supprimer l'opposition en omettant le R’’i Hazzoqén.
Cette opinion représentait la position traditionnelle conforme au Ṭalmoudh, et
non une opinion isolée. De nombreuses autorités halakhiques parmi les Riˋshônim (autorités halakhiques qui se sont succédées à
partir de +/- l’an 1100 jusqu’à 1550) et les premiers ˋaḥarônim (autorités halakhiques qui se sont
succédées à partir de +/- 1550 jusqu’à 1800) ont soutenu l'opinion du R’’i Hazzoqén.
En voici quelques-uns : Ribbénou Môrdokhay ban Hillél Hakkôhén (Allemagne,
1250-1298, connu sous le nom du « Môrdokhay »)[1] ;
Ribbénou Baṣalˋél
ban ˋavrohom
ˋashkanazi (Israël,
1520-1592)[2] ;
Ribbénou ˋoshér ban
Yaḥiˋél (« Le
Roˋ’’sh » Allemagne puis Espagne, 1250-1327)[3] ;
Ribbénou Méˋir Hakkôhén
de Rothenburg (Allemagne, fin du 13ème siècle)[4] ;
Ribbénou Yasha´yohou DiTrani « le plus jeune » (Italie fin
13ème - début du 14ème siècle)[5] ;
Ribbénou Shalômôh Louriyoˋ (Pologne 1510-1573, « Le Maharsha’’l)[6] ;
Rov ˋavrohom
Ḥayyim Shour (Belz, Pologne fin 16ème, début du 17ème
siècle)[7].
Tout ce qui précède et bien d’autres au moins soutiennent l’opinion du R’’i Hazzoqén
comme une alternative viable à l’interdiction stricte de « répandre de
la semence ».
C'est pour cette raison que le
commentaire important sur le Shoulḥon ´oroukh, le Béth Shamouˋél (fin du 17ème siècle) nuance
immédiatement la déclaration du Shoulḥon ´oroukh selon laquelle la masturbation
serait le péché « le plus grave de la Ṭôroh » en disant que le
Shoulḥon ´oroukh ne pensait pas vraiment ce qu’il a dit. (À mon humble avis, le
Shoulḥon ´oroukh le pensait clairement, puisqu’il a trouvé dans le Zôhar à quel
point ce « péché » était grave.)
Malgré cette opposition solide et
robuste au PSA, dans les siècles qui ont suivi la publication du Shoulḥon ´oroukh,
le PSA est finalement devenu le paradigme prédominant. Le PMO est retourné dans
le passé presque comme s’il n'avait jamais existé. Au fur et à mesure que la
communauté juive européenne (au moins d'Europe de l'Est) se développa en
branches ḥassidiques et « lituaniennes » avant la Seconde Guerre
mondiale, le PSA devint fermement ancré. Je crois que c'était en grande partie
parce que la même chose se passait dans le monde extérieur. Pourquoi le monde
juif ignorerait-il presque complètement une tradition majeure de la société
générale et l'échangerait contre une autre ? De toute évidence, la pensée
chrétienne, philosophique et médicale de l'époque concernant les « horreurs »
de la masturbation dominaient la communauté juive de la même manière qu'elle
dominait la pensée occidentale en général.
Donc, en conclusion, je ne crois pas que
nous puissions blâmer « les autres » d'avoir imposé cette rigueur au
judaïsme. Nous l’avions fait nous-mêmes en premier. Cependant, le fait que ce
soit devenu le paradigme halakhique prédominant a été presque certainement
fortement influencé par des facteurs extérieurs.
Le seul aspect positif auquel je puisse
penser, c'est que peut-être l'inverse pourrait être vrai. Si l'aversion de la
société générale pour la masturbation a contribué à nous pousser vers une
attitude halakhique stricte, peut-être que la reconnaissance par la science
moderne que la masturbation occasionnelle est normale peut nous ramener au
paradigme halakhique original qui acceptait aussi en effet que cela est vrai.
Peut-être. Peut-être. Avec l'aide de Hashshém et avec le bon sens et la force
des sources de la Ṭôroh que j'ai citées dans cette série d’articles, cela peut
peut-être fonctionner.
Merci d'avoir lu mes dix-sept articles
sur ce sujet, je pense que je peux maintenant passer à d'autres tout aussi
importants.