ב״ה
Le
récit de la création de l'homme et de la femme vu par le Ramba''m
Deuxième
Partie
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La
deuxième fois que le Ramba''m ז״ל
aborde
le sujet dans son Môréh Navoukhim, c'est au chapitre 30 du deuxième
volume, où il va plus en profondeur dans l'analyse de l'histoire
racontée par la Tôroh.
Ce
qui doit être un sujet de sérieuse méditation, c'est qu'après
avoir parlé de la création de l'homme, dans les six jours de la
création, en disant : זָכָר
וּנְקֵבָה,
בָּרָא
אֹתָם « Il
les créa mâle et femelle »1,
et après avoir entièrement conclu [le récit de] la création, en
disant : וַיְכֻלּוּ
הַשָּׁמַיִם וְהָאָרֶץ,
וְכָל-צְבָאָם
« Ainsi
furent achevés le ciel et la terre et toute leur armée »2,
on ouvre un nouveau chapitre, [pour raconter] comment Hawwoh
fut créée de `odhom. On y parle de l'arbre de la vie et de l'arbre
de la science,
de l'aventure du serpent et de ce qui en arriva, et on présente tout
cela comme ayant eu lieu après que `odhom eut été placé dans le
Gan ´édhan. Tous les docteurs tombent d'accord que tout cet
événement eut lieu le vendredi, et que rien ne fut changé, en
aucune façon, après les six jours de la création. Il ne faut donc
rien voir de choquant dans aucune de ces choses ; car, comme
nous l'avons dit, il n'y avait encore jusque-là aucune nature fixe.3
Outre
cela, ils ont dit d'autres choses que je dois te faire entendre, en
les recueillant dans différents endroits, et je dois aussi appeler
ton attention sur certains points, comme ils ont fait eux-mêmes à
notre égard.4
Il faut savoir que tout ce que je vais te citer ici des discours des
docteurs sont des paroles d'une extrême perfection, dont
l'interprétation était claire pour ceux à qui elles s'adressaient,
et qui sont d'une très grande précision. C'est pourquoi je n'en
pousserai pas trop loin l'explication et je ne les exposerai pas
longuement, afin de ne pas révéler
un secret5 ;
mais il suffira, pour les faire comprendre à un homme comme toi, que
je les cite dans un certain ordre et avec une rapide observation.
HaZa''l
disent que toute l'histoire rapportée aux chapitres 2 et 3 de
Baré`shith s'est passée au sixième jour. Le Ramba''m déclare
qu'il n'y a « rien
de choquant dans aucune de ces choses ; car il n'y avait encore
jusque-là aucune nature fixe ».
Ce qu'il veut dire c'est que l'histoire du péché dans le Gan ´édhan
fait partie de la création, d'un récit de la nature fondamentale de
la réalité, mais n'est pas un récit historique sur un individu !
Dans la Tôroh, la partie historique commence à partir du chapitre
5. Les déclarations de nos Sages sur les trois premiers chapitres de
la Tôroh ne sont donc pas à prendre au sens littéral, mais sont
des enseignements d'une grande profondeur, dont le Ramba''m va nous
donner des avant-goûts. (Nous avons déjà insisté à de
nombreuses reprises sur la non littéralité des Midhroshim de nos
Sages. Voir par exemple l'article intitulé « Que
sont les Midhroshim ? ».)
C'est
ainsi qu'ils disent6
que `odhom et Hawwoh
furent créés ensemble, unis dos contre dos ; [cet homme
double] ayant été divisé, Il [Dieu] en prit la moitié, qui fut
Hawwoh,
et elle fut donnée à l'autre [à `odhom] pour compagne. Les mots
אַחַת
מִצַּלְעֹתָיו
« `ahath
Missal´ôthow »7
signifie « un
de ses deux côtés »,
et on a cité pour preuve צֶלַע
הַמִּשְׁכָּן
« Sala´
Hammishkon »8,
que le Targoum rend par סְטַר
מַשְׁכְּנָא
« côté
du tabernacle »,
de sorte, disent-ils, qu'ici [il faudrait traduire] : מִן
סִטְרוֹהִי
« de
ses côtés ».
Comprends bien comment on a dit clairement qu'ils étaient en quelque
sorte deux
et que cependant ils ne formaient qu'un,
selon ces mots : עֶצֶם
מֵעֲצָמַי,
וּבָשָׂר
מִבְּשָׂרִי
« un
membre de mes membres et une chair de ma chair »9,
ce qu'on a encore confirmé davantage, en disant que les deux
ensemble étaient désignés par un seul nom : לְזֹאת
יִקָּרֵא אִשָּׁה,
כִּי
מֵאִישׁ לֻקְחָה-זֹּאת
« Elle
sera appelée `ISHOH, parce qu'elle a été prise du `ISH »10 ;
et, pour faire mieux encore ressortir leur union, on a dit :
וְדָבַק
בְּאִשְׁתּוֹ,
וְהָיוּ
לְבָשָׂר אֶחָד
« Il
s'attachera à sa femme, et ils seront une seule chair »11.
Combien est forte l'ignorance de ceux qui ne comprennent pas qu'il y
a nécessairement au fond de tout cela une certaine idée !
Voilà donc qui est clair.12
HaZa''l
nous disent que contrairement à ceux qui croient que Dieu aurait
créée la femme à partir de la « côte » de l'homme, le
terme צֶלַע
« Sala´ »
ne désigne pas du tout une côte, ni quelque os que ce soit, mais
plutôt un צַד
« Sadh »,
un côté, dans le sens de « aspect ». Le Ramba''m cite
toutes ces choses afin de nous dire que la femme ici est un aspect de
l'homme. Bien avant, au chapitre 6 du premier volume de son Môréh
Navoukhim, il avait expliqué une autre signification de ce même
terme. Là-bas, le Ramba''m disait que אִשָּׁה
« `ishoh »
peut se référer à un être humain féminin et également à un
animal féminin. Mais il nous donna également un troisième sens :
celui de quelque chose qui doit être joint à un partenaire.
Au
chapitre 17 du premier volume, le Ramba''m présentait la position de
Platon selon quoi le mâle est une forme tandis que la femelle est
une substance. La substance de l'or peut prendre de nombreuses
formes : un anneau, une statue, un sceptre, etc., mais elle ne
peut jamais devenir une grenouille. Le Ramba''m y introduisait
également le concept de הֶעְדֵד
« Ha´adhér ».
Tout dans le monde possède trois composants fondamentaux : sa
substance (« `ishoh »), sa forme (« `ish » ;
cette forme que prend la substance), et « Ha´adhér »
(c'est-à-dire son potentiel à adopter des formes alternatives). Une
chair possède son aspect féminin (par exemple, du métal ou du
bois), son aspect masculin (la forme d'une chaise) et son potentiel
pour être transformée en quelque chose d'autre.
Mettant
tout cela ensemble, nous voyons que le récit de la création de
l'homme au chapitre 2 de Baré`shith développe le récit donné au
chapitre 1. Il nous dit qu'à l'intérieur de chaque personne, il
existe un aspect mâle et un aspect femelle. Il n'y a jamais de forme
sans substance ou de substance sans forme. `odhom ע״ה
est
l'intellect. Hawwoh
ע״ה
est
la substance. Et tout comme le terme « `ishoh »
se réfère à quelque chose qui cherche constamment à être joint à
un partenaire, une substance nécessite toujours une forme. Ainsi,
dans l'histoire, c'est la femme qui est sujette à la tentation.
Alors que la forme essentielle et originelle de l'homme est son
intellect, la tentation de Hawwoh
consiste à prendre différentes formes, celle de la passion, du
désir et de l'imagination.
Un
autre sujet qu'ils ont exposé dans le Midhrosh et qu'il faut
connaître est celui-ci : Le serpent, disent-ils, était monté
par un cavalier, et il était aussi grand qu'un chameau ; ce fut
son cavalier qui séduisit Hawwoh,
et ce cavalier fut Sammo`él.13
Ce nom, ils l'appliquent au Soton : ils disent, par exemple,
dans plusieurs endroits, que le Soton voulait faire faillir notre
père `avrohom, en sorte qu'il ne consentit pas à offrir Yishoq
[en holocauste], et de même il voulut faire faillir Yishoq,
en sorte qu'il n'obéit pas à son père ; et, dans cette
occasion, je veux dire, au sujet du sacrifice de Yishoq,
ils s'expriment ainsi : « Sammo`él
se rendit auprès de notre père `avrohom et lui dit : Eh quoi,
vieillard, tu as donc perdu ton bon sens, etc. »14.
Il est donc clair que Sammo`él est le Soton. Ce nom, de même que
celui du נָחָשׁ
« Nohosh »
(serpent), indique une certaine idée ; en rapportant comment ce
dernier vint tromper Hawwoh,
ils disent : « Sammo`él
était monté sur lui ; mais le Très-Saint Se riait du chameau
et de son cavalier ».15
Ce
qui mérite encore de fixer ton attention, c'est que le serpent n'eut
aucune espèce de rapport avec `odhom et ne lui adressa pas la
parole, mais qu'il ne conversa et n'eut de communication qu'avec
Hawwoh ;
ce fut par l'intermédiaire de Hawwoh
qu'il arriva du mal à `odhom et que le serpent le perdit. La
parfaite inimitié n'a lieu qu'entre le serpent et Hawwoh,
et entre la postérité de l'un et celle de l'autre, bien que sa
postérité
à elle
soit indubitablement celle de `odhom.16
Ce qui est encore plus remarquable, c'est que ce qui enchaîne le
serpent à Hawwoh,
c'est-à-dire la postérité de l'un à celle de l'autre, c'est
[d'une part] la tête
et [d'autre part] le talon,
de sorte qu'elle le dompte par
la tête17,
tandis que lui il la dompte par
le talon.18
Voilà donc qui est également clair.
Sammo`él
est le Soton, qui d'après HaZa''l
est un aspect de l'homme. Dans l'histoire de la ´aqédhoh (ligature
d'Isaac), le Soton prend différentes formes pour parler à `avrohom
`ovinou ע״ה
et
le détourner de sa mission. Il est la force qui dirige l'homme loin
du bien, ce que l'on appelle communément le יֵצֶר
הָרַע
« Yésar
Hora´ » (mauvais penchant). (Voir l'article intitulé « Qui
est le Soton dans la tradition juive ? ».)
Lorsque le Yésar
Hora´ implante ses dents dans l'aspect matériel de l'homme (la
« `ishoh ») le péché se produit.
Au
tout début de ses « Shamônah Paraqim », le Ramba''m
explique que l'être humain est doté de cinq facultés :
nutritives, sensorielles, imaginatives, appétitives et rationnelles.
- La faculté nutritionnelle (כֹּחַ הַזָּן « Kôah Hazzon ») : elle existe également chez les animaux, et même chez les plantes.
- La faculté sensorielle (כֹּחַ הַחוֹשׁ « Kôah Hahôsh ») : elle inclut les cinq sens, et existe aussi chez les animaux.
- La faculté imaginative (כֹּחַ הַדִּימְיוֹן « Kôah Haddimyôn ») : elle est basée sur une combinaison de l'imagination et de la mémoire (elle ne peut( imaginer que ce avec quoi on a eu une certaine expérience). Les animaux supérieurs en sont également dotés.
- La faculté appétitive (כֹּחַ הַמִּתְעוֹרֵר « Kôah Hammith´ôrér ») : comme le Ramba''m l'écrit dans ses Shamônah Paraqim : « L'appétitif est cette faculté par laquelle l'homme désire, ou exècre une chose, et de laquelle émane les activités suivantes : la poursuite d'un objet ou le fait de s'en éloigner, l'attirance et l'évitement, la colère et l'affection, la peur et le courage, la cruauté et la compassion, l'amour et la haine, et de nombreuses autres qualités psychiques similaires. Toutes les parties du corps sont soumises à ces activités, telle que la capacité de la main à saisir, celle du pied à marcher, celle de l’œil à voir, et celle du cœur à rendre quelqu'un audacieux ou timide. De même, les autres membres du corps, qu'ils soient externes ou internes, sont des instruments de la faculté appétitive ».
- La faculté rationnelle (כֹּחַ הַשֶּׂכֶל « Kôah Hassakhal ») : elle est unique à l'être humain. C'est normalement cette faculté qui doit toujours guider quelqu'un.
Le
Ramba''m cite HaZa''l
comme ayant décrit le Soton en train de monter le serpent.
« Monter »
peut signifier « contrôler ».19
Il assimile la faculté imaginative au Soton.20
Le serpent (la faculté appétitive) était contrôlé par la faculté
imaginative au lieu de l'être par l'intelligence. L'homme prenait
des décisions sur la base de ce qui l'attirait, de ce qui était
désirable à ses yeux. Par les paroles : הוּא
יְשׁוּפְךָ רֹאשׁ,
וְאַתָּה
תְּשׁוּפֶנּוּ עָקֵב
« elle
t'écrasera la tête et tu la mordras au talon »21,
HaShem voulait dire qu'il nous incombe de tenter de contrôler la
faculté imaginative qui nous assaille en nous attachant ardemment à
notre faculté rationnelle.
Voici
encore un de ces passages étonnants, dont le sens littéral est
extrêmement absurde, mais [dans lesquels], dès que tu auras
parfaitement bien compris les chapitres de ce traité, tu admireras
l'allégorie pleine de sagesse et conforme à [la nature de] l'être.
« Au
moment, disent-ils, où le serpent s'approcha de Hawwoh, il l'entacha
de souillure. Les Israélites s'étant présentés au Mont Sinaï,
leur souillure a été enlevée ; quant aux Gôyim, qui ne se
sont pas présentés au Mont Sinaï, leur souillure n'a pas été
enlevée ».22
Médite aussi là-dessus.
Certaines
personnes peuvent se libérer d'un mode de vie animal, tel `avrohom
`ovinou (qui, d'après le Ramba''m, n'avait pas et ne suivait pas la
Tôroh, mais mena néanmoins une vie élevée. Voir à ce titre
l'article intitulé « `avrohom
`ovinou a observé l'intégralité de la Tôroh »).
Mais la plupart ne le peuvent pas. Un code de Mafoursomôth, une
convention de normes morales, n'est pas l'idéal, mais chaque culture
et société en a besoin afin de réguler le comportement et empêcher
l'anarchie. Une fois que l'homme a quitté le domaine de
l'intelligence, et que la passion domine, l'ordre a besoin d'être
imposé. Lorsqu'il y a un désir pour le matériel, il doit y avoir
des règles régissant les droits de propriété et le vol.
Au
chapitre 40 du volume 2 de son Môréh Navoukhim, le Ramba''m parle
de trois sortes d'autorité : celle des dirigeants, celle des
érudits et celle des prophètes. Les dirigeants peuvent conduire le
peuple au moyen de leur faculté imaginative, mais pas au moyen de
leur intelligence rationnelle. Qu'est-ce qui fait que le vol est
mal ? On peut dire que l'interdiction du vol fut donnée par
intérêt personnel : je ne veux pas que les gens s'emparent de
ce qui est à moi, je ne vais donc pas voler ce qui appartient à
autrui. Il peut y avoir d'autres types d'intérêts personnels ;
un puissant dirigeant n'a pas du tout peur que les gens volent ce qui
est à lui, mais il pourrait tout à fait interdire le vol parce
qu'il désire qu'on l'honore et le considère comme un dirigeant bien
disposé envers son peuple. On peut donc avoir un dirigeant et un
système de règles qui crée de façon efficace une moralité
sociétale, mais qui est basé sur l'intérêt personnel.
Par
contre, les érudits peuvent conduire les gens au moyen de leur
intelligence rationnelle, mais pas au moyen de leur faculté
imaginative. Ils ne sont par conséquent appréciés que par l'élite,
puisque le petit peuple désire qu'on le fasse rêver et non pas qu'on le fasse réfléchir.
De
l'autre côté, les prophètes peuvent conduire les gens au moyen des
deux facultés : ils savent comment se rapporter à la faculté
imaginative du peuple et ses désirs. C'est l'autorité de la Tôroh.
Elle tire l'homme hors de son état animal (en parlant son langage)
et lui permet de mener une vie basée sur l'intelligence rationnelle.
L'idée
du serpent qui souille l'humanité par son venin est que les gens
naissent en pensant à ce qu'ils veulent, à ce qui leur paraît
désirable, et ainsi de suite. Ce poison fut retiré au Sinaï ;
la Tôroh régule nos vies et nous permet par-là de nous focaliser
exclusivement sur ce qui est vrai ou faux, pas sur ce qui est
désirable ou indésirable. La Tôroh est donc le moyen d'une fin, et
non une fin en elle-même.
Un
autre passage qu'il faut connaître est celui-ci : « L'arbre
de la vie a [une étendue de] cinq cent ans de marche, et toutes les
eaux de la création se répandent de dessous lui ».23
On y a déclaré qu'on a pour but [de désigner] par cette mesure
l'épaisseur de son corps, et non pas l'étendue de ses branches :
« Le
but de cette parole, disent-ils, n'est pas son branchage, mais c'est
son tronc (Qôrtô) qui a [une étendue de] cinq cent ans de
marche ».
Par קוֹרְתּוֹ
« Qôrtô »,
on entend son bois épais qui est debout ; ils ont ajouté cette
phrase complémentaire, pour compléter l'explication du sujet et lui
donner plus de clarté. Voilà donc qui est clair aussi.24
Au
chapitre 14 du troisième volume de son Môréh Navoukhim, le
Ramba''m se réfère également à une distance de cinq cent ans de
marche, qui est la mesure donnée par le Talmoudh comme correspondant
à l'épaisseur de chacune des sphères. La connaissance des sphères
est la première étape vers la métaphysique, que le Ramba''m
considère être la forme de connaissance la plus élevée. Ainsi, le
tronc de l'arbre de vie est l'astronomie, et les branches sont la
métaphysique.
Au
chapitre 30 du premier volume, le Ramba''m expliquait que « manger »
peut se référer à l'acquisition de la connaissance intellectuelle,
et que « l'eau » fait allusion à la sagesse. De ce fait,
l'idée selon laquelle les eaux de la création se répandent de
dessous l'arbre est que l'arbre est la source de la sagesse, et en
manger se réfère au fait d'acquérir la connaissance. L'arbre de
vie est donc le symbole de la façon dont on se connecte à Dieu
(atteignant par-là la vie éternelle) au moyen de l'absorption en
nous de la connaissance. Quelqu'un peut consommer de l'Arbre de Vie
et vivre pour toujours. Quand Dieu déclare concernant l'Arbre de
Vie : וְעַתָּה
פֶּן-יִשְׁלַח
יָדוֹ,
וְלָקַח
גַּם מֵעֵץ הַחַיִּים,
וְאָכַל,
וָחַי
לְעֹלָם
« Et
maintenant, il pourrait étendre sa main et cueillir aussi du fruit
de l'arbre de vie ; il en mangerait et vivrait à jamais »25,
ce n'est pas négatif, c'est juste la déclaration d'une possibilité.
Il
faut aussi connaître le passage suivant : « Quant
à l'arbre de la science, le Trés-Saint n'a jamais révélé cet
arbre à aucun homme et ne le révélera jamais ».26
Et cela est vrai ; car la nature de l'être l'exige ainsi.27
Concernant
l'Arbre de la Science (ou Connaissance), l'homme l'atteint au moyen
de ses désirs. מִמֶּנּוּ,
לָדַעַת,
טוֹב
וָרָע
« de
lui-même, il y a une connaissance du bien et du mal »28.
Ces états n'existent pas avec Dieu. (Voir ce que nous avions
expliqué dans la première
partie.)
Le
passage suivant mérite également que tu l'apprennes :
« וַיִּקַּח
ה׳ אֱלֹהִים,
אֶת-הָאָדָם
''Et
HaShem Dieu prit l'homme''29,
c'est-à-dire, Il l'éleva ; וַיַּנִּחֵהוּ
בְגַן-עֵדֶן
''et
Il l'établit (Wayyanihéhou)
dans le Gan ´édhan'', c'est-à-dire, Il lui donna le repos (Haniah
Lô)30 ».31
On n'a donc pas entendu le texte [dans ce sens] qu'Il [Dieu] l'aurait
retiré d'un endroit et placé dans un autre endroit, mais [dans ce
sens allégorique] qu'Il éleva le rang de son être, au milieu de
ces êtres qui naissent et périssent, et qu'Il l'établit dans une
certaine position.32
מָקוֹם
« Moqôm »
(un endroit, une place, un lieu) peut désigner une situation de la
vie ainsi qu'un lieu physique.33
L'homme se trouvait à l'origine dans un état idyllique où la
faculté rationnelle régnait en maître. Être expulsé du Gan
´édhan signifie être réduit à un état inférieur. Le récit de
`odhom dans l’Éden n'est pas le récit historique d'un individu
spécifique qui a échoué dans une épreuve (ce qui n'en aurait pas
fait un récit pertinent pour tout le monde au message éternel) mais
plutôt une description de la nature de tout être humain. Nous avons
été créés comme des êtres se trouvant en-dehors du Gan ´édhan.
1Baré`shith
1:27
2Ibid.,
2:1
3C'est-à-dire :
jusqu'à la fin du sixième jour, la nature des choses n'était pas
encore établie par des lois immuables ; il n'y a donc rien de
choquant dans les relations du 2ème chapitre de Baré`shith, dès
qu'on admet que tout se passa dans le courant du sixième jour
4Le
Ramba''m veut dire qu'il fera comme ont fait les docteurs, en se
bornant à appeler l'attention du lecteur sur certains points, sans
développer ses idées
5Une
allusion à Mishlé 11:13
6Le
Ramba''m se réfère à un passage du Midhrosh Baré`shith Rabboh,
où il est dit que `odhom fut créé à la fois homme et femme, et
qu'il avait deux visages, tournés de deux côtés. Ce Midhrosh est
également rapporté dans le Talmoudh (´érouvin
18a)
7Baré`shith
2:21
8Shamôth
26:20
9Baré`shith
2:23
10Ibid.
11Ibid.,
verset 24
12Le
Ramba''m veut dire : Il est clair que ce récit renferme une
certaine idée philosophique ; il se contente de l'indiquer,
mais ne juge pas convenable de l'exposer clairement
13Le
Ramba''m se réfère ici aux Pirqé Darébbi `ali´azar Chapitre
13
14Midhrosh
Baré`shith 56
15Encore
ici, le Ramba''m ne se prononce pas sur l'idée philosophique qui
est cachée sous ce récit et indiquée par les noms qui y sont
employés. Ce qu'ils veut nous dire est ceci (et nous développerons
davantage) : Le mot נָחָשׁ
« Nohosh » (serpent)
indique la faculté imaginative et est en rapport avec le mot נַחַשׁ
« Nahash » qui
désigne la divination, où l'imagination joue un grand rôle ;
le nom de סַמָּאֵל
« Sammo`él »
provient du verbe סמא
« aveugler », et indique donc la faculté
appétitive, ou la concupiscence, qui aveugle l'homme ; enfin,
Dieu qui Se rit du chapeau (serpent) et de son cavalier, c'est
l'intelligence
16Il
faut se rappeler que Dieu dit au serpent : וְאֵיבָה
אָשִׁית,
בֵּינְךָ
וּבֵין הָאִשָּׁה,
וּבֵין
זַרְעֲךָ,
וּבֵין
זַרְעָהּ « Et
Je mettrai une inimitié entre toi et la femme, entre ta postérité
et la sienne » (Baré`shith 3:15).. Ainsi que
nous l'expliquerons, le serpent représente la faculté
imaginative ; le Ramba''m veut indiquer ici ce sens
allégorique : Que l'imagination n'affecte pas directement
l'intelligence, représentée par `odhom, et qu'elle ne trouble
cette dernière que par un intermédiaire, qui est, ou la matière,
ou la faculté sensible, représentée par Hawwoh
17C'est-à-dire,
en le frappant sur la tête
18La
postérité de la femme, ou l'être humain, par sa faculté
rationnelle et spéculative, ou par son intelligence, l'emporte sur
l'imagination, qui a son siège dans la tête et en détruit
les fantômes. Mais souvent la faculté imaginative et les passions
qui en naissent frappent l'homme au talon, c'est-à-dire
l'empêchent de marcher en avant, de développer ses facultés
intellectuelles et d'arriver à la conception des choses
intelligibles
19Voir
Môréh Navoukhim, Volume 1, Chapitre 70
20Voir,
Ibid., Volume 2, Chapitre 12
21Baré`shith
3:15
22Le
Ramba''m se réfère à deux passages talmudiques : Shabboth
146a et Yavomôth 103b. Le sens à leur donner, d'après
le Ramba''m, est celui-ci : La faculté imaginative, en
éveillant les passions, entache l'homme de souillure ; les
Israélites, en recevant une loi morale qui dompta leurs passions,
se sont purifiés de cette souillure, dont les Gôyim restaient
toujours entachés
23Midhrosh
Baré`shith Rabboh 15 ; cité également dans le Talmoudh
Yarousholmi (Barokhôth Chapitre 1)
24Le
Ramba''m voyait dans l'arbre de la vie la science qui est la
véritable vie de l'âme humaine. Cette science embrasse une étendue
de cinq cent ans de marche, c'est-à-dire elle s'étend sur tout ce
qui existe au-dessus de la sphère de la lune ; car selon les
Sages, il y a cinq cent ans de chemin de la terre au ciel ou à la
dernière des sphères célestes (Talmoudh Bavli, Haghighoh
13b). Ces choses sublunaires, qui seules sont complètement
accessibles à la science humaine, sont désignées par le tronc
de l'arbre ; ses branches, qui s'étendent bien au-delà de la
sphère de la lune, représentent la science des sphères célestes
et la métaphysique, dont l'homme ne peut acquérir qu'une
connaissance plus ou moins imparfaite
25Baré`shith
3:22
26Midhrosh
Baré`shith Rabboh 15, à la fin, où, après avoir rapporté
les opinions de plusieurs Sages sur l'espèce à laquelle
appartenait l'arbre de la science, on cite celle de Rébbi
Yahôshoua´ ban Léwi, qui disait que l'arbre de la science ne
devait jamais être désigné avec précision, afin qu'aucun homme
ne pût connaître le fruit qui avait conduit au péché
27Pour
comprendre ce passage, il faut se rappeler la distinction que le
Ramba''m a établie, au chapitre 2 du premier volume, entre la
connaissance du vrai et du faux et celle du bien et du mal. (Voir la
première
partie.) L'intelligence, par laquelle l'homme connait le
vrai et le faux, fut donnée à l'homme dès le moment de la
création, et c'est elle qui le rendait semblable à Dieu ;
mais la connaissance de ce qui est beau ou laid, bien ou mal, n'est
qu'une suite du péché de l'homme et de la perte de son état
d'innocence. D'après le Ramba''m donc, le passage du Midhrosh qui
vient d'être cité veut dire que ce n'est pas Dieu qui révèle
directement à l'homme, en lui donnant l'intelligence, la
connaissance de ce qui est beau ou laid, bienséant ou inconvenant,
et que les objets de cette connaissance n’existeraient pas pour
lui, s'il n'avait pas péché et s'il n'était pas entraîné par
ses désirs et ses mauvais penchants
28Baré`shith
3:22
29Ibid.,
2:15
30Les
verbes « établir » et « se reposer »
ont exactement la même racine
31Midhrosh
Baré`shith Rabboh 16
32C'est-à-dire,
dans une situation morale qui l'élevait au-dessus de tous les être
d'ici-bas, et c'est cette situation qui est désignée
allégoriquement par les mots « Gan ´édhan – Jardin
d’Éden »
33Voir
Môréh Navoukhim, Volume 1, Chapitre 10