dimanche 29 janvier 2017

Jeûner lorsqu'on fait tomber les Taphillin

ב״ה

Exposer les fausses notions

Jeûner lorsqu'on fait tomber les Taphillin


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Nous lisons ceci dans le Mishnoh Barouroh du Hofés Hayim ז״ל1 :

נוהגים העולם להתענות כשנופל תפילין מידו על הארץ בלא נרתיקן וה"ה כשנופל ס"ת אפילו בנרתיקן. ועיין בא"ר שכתב דאפילו תפילין בנרתיקן יתן פרוטה לצדקה
Le monde s'est accoutumé à jeûner lorsque les Taphillin tombent des mains de quelqu'un sur le sol sans leur couverture, et il en est de même lorsqu'un Séphar Tôroh tombe même dans sa couverture. Et voir dans le `éliyohou Rabboh qui a écrit que même si les Taphillin tombent dans leur couverture, on donnera une Paroutoh à la Sadhoqoh.

Premièrement, remarquez la phrase נוהגים העולם « le monde s'est accoutumé. » Cela indique clairement qu'il ne s'agit pas d'un Din, et encore moins d'une Halokhoh, mais d'un Minhogh s'étant développé bien des siècles après l'ère talmudique. Deuxièmement, comment le Mishnoh Barouroh peut-il affirmer que cette pratique est suivie par « le monde » ? S'est-il rendu en personne dans toutes les communautés juives de son époque ? A-t-il organisé un sondage ?

La plupart des « Orthodoxes » vous diront qu'il est défendu d'innover ainsi que d'abolir des pratiques remontant aux temps talmudiques, et pourtant non seulement ils ne suivent pas bon nombre de pratiques prescrites dans le Talmoudh mais en plus une grande quantité de Minhoghim suivis de nos jours n'ont pas de base talmudique. Vous ne trouverez pas un seul passage talmudique préconisant de jeûner lorsqu'on fait tomber ses Taphillin, ou encore un Séphar Tôroh !

En outre, les « Orthodoxes » disent fréquemment qu'il y aurait une obligation de suivre le Shoulhon ´oroukh de Rabbi Yôséph Qa`rô ז״ל, dont le contenu constituerait la Halokhoh définitive pour tout le monde (chose même que Rabbi Yôséph Qa`rô n'a jamais demandée). Or, il n'existe aucun passage du Shoulhon ´oroukh faisant allusion au fait de jeûner lorsqu'on fait tomber des Taphillin ou un Séphar Tôroh. Nous n'en trouvons pas non plus dans les commentaires du Ramo''` ז״ל sur le Shoulhon ´oroukh ! Que veulent donc dire les « Orthodoxes » lorsqu'ils parlent de suivre le Shoulhon ´oroukh, chose qu'eux-mêmes ne font pas ? Mieux encore, vous ne trouverez aucun passage dans le Tour parlant de jeûner dans de telles situations ! Ce qui est ironique, c'est qu'afin de donner davantage de poids à cette pratique, certains rabbins n'hésitent pas à citer le passage du Mishnoh Barouroh susmentionné en l'attribuant au Shoulhon ´oroukh !

D'autres justifient cette pratique de la manière suivante : nous lisons ceci dans le Talmoudh2 : לא יאחז אדם תפילין בידו וספר תורה בחיקו ויתפלל « Un homme ne tiendra pas les Taphillin dans sa main ni un Séphar Tôroh sur ses girons pendant qu'il prie. » Rash''i ז״ל commente ce passage en expliquant que la raison pour laquelle on ne devrait pas le faire, c'est afin que le Séphar Tôroh et les Taphillin ne tombent pas, car ce serait alors une disgrâce. Mais comme vous pouvez le voir, ni le Talmoudh, ni Rash''i, n'affirment que s'ils tombaient il faudrait jeûner ! La seule chose que l'on puisse déduire de Rash''i est qu'il y a une part d'humiliation envers les Taphillin lorsqu'on les fait tomber.

La source la plus ancienne qui mentionne le fait de jeûner lorsqu'on fait tomber des Taphillin est le Moghén `avrohom (1633-1683), qui cite un ouvrage appelé « Mishpaté Shamou`él » composé par le Rov Shamou`él Qali´ à la fin du 16ème siècle. Personne n'en avait jamais fait mention avant lui !

Il n'y a clairement aucune Halokhoh selon quoi on devrait jeûner dans de telles situations. Il faudrait veiller à ne pas confondre « pratiques populaires » avec « Halokhoh » ou « obligations », surtout lorsqu'elles n'ont aucune base dans la littérature traditionnelle authentique. Et sachez, en outre, que la plupart des pratiques que l'on attribut au Shoulhon ´oroukh n'y sont même pas mentionnées !

Les « Orthodoxes » devraient une bonne fois pour toute définir ce qu'ils entendent par « tradition. » Il pourrait convenir de (re)lire les articles intitulés « L'orthodoxie est traditionaliste, pas traditionnelle » et « Renverser la hiérarchie. »

1Mishnoh Barouroh 40:3

2Soukkoh 41b

dimanche 15 janvier 2017

De l'interdiction de s'adonner aux augures

ב״ה

De l'interdiction de s'adonner aux augures


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La Tôroh nous raconte l'histoire de `ali´azar, le principal serviteur de `avrohom `ovinou ע״ה, qui fut notamment envoyé pour trouver une épouse à Yishoq `ovinou ע״ה dans la famille du frère de `avrohom, à Horon. `ali´azar élève une prière à HaShem ית׳ lorsqu'il approche de la ville, dans laquelle il demande la Siya´to` Dishamayo` (assistance céleste) et établit les termes par lesquels il choisira l'épouse la plus appropriée pour le fils de son maître : il s'approchera d'un puits et demandera à l'une des femmes de la ville un peu d'eau à boire. La fille qui répondra favorablement et lui offrira de l'eau ainsi qu'à ses chameaux sera l'élue destinée à épouser Yishoq.

Le Ramba''m ז״ל fait mention de cet incident dans son Mishnéh Tôroh, dans sa discussion sur l'interdiction de נִחוּשׁ « Nihoush – augurer. » Il écrit ceci1 :

On ne doit pas se livrer aux augures, comme les Gôyim, ainsi qu'il est dit2 : « vous ne vous livrerez pas aux augures. » Qu’est-ce qu'augurer ? Par exemple, ceux qui disent : « Puisque mon morceau de pain est tombé de ma bouche » ou « [Puisque] mon bâton m’a échappé de la main, je n’irai pas à tel endroit aujourd’hui, car si je m’y rends, je ne réussirai pas dans mon entreprise. » [Ou encore :] « Puisqu’un renard est passé à ma droite, je ne franchirai pas le seuil de ma maison aujourd’hui, car si je sors, je serai abordé par un escroc. » De même en est-il de ceux qui écoutent les gazouillements des oiseaux et disent : « Ceci aura lieu » ou « cela n’aura pas lieu », « Il convient de faire ceci » ou « Il ne convient pas de faire cela. » De même, [sont inclus] ceux qui disent : « Égorge ce coq, car il a chanté comme un corbeau », « Égorge cette poule car elle a chanté comme un coq. » De même, celui qui établit des signes pour lui-même, [disant :] « S’il m’arrive ceci, je ferais cela. Et si cela ne m’arrive pas, je ne ferai pas », comme `ali´azar, l’esclave de `avrohom, et de même toutes [les pratiques] semblables, tout ceci est défendu. Quiconque accomplit un acte en fonction d’une de ces augures se voit infliger la flagellation.
אֵין מְנַחֲשִׁין כַּגּוֹיִים, שֶׁנֶּאֱמָר "לֹא תְנַחֲשׁוּ". כֵּיצַד הוּא הַנִּחוּשׁ: כְּגוֹן אֵלּוּ שֶׁאוֹמְרִין הוֹאִיל וְנָפְלָה פִּתִּי מִפִּי, אוֹ נָפַל מַקְלִי מִיָּדִי, אֵינִי הוֹלֵךְ לְמָקוֹם פְּלוֹנִי הַיּוֹם, שְׁאִם אֵלֵךְ אֵין חֲפָצַי נַעֲשִׂין; הוֹאִיל וְעָבַר שׁוּעָל מִיְּמִינִי, אֵינִי יוֹצֶא מִפֶּתַח בֵּיתִי הַיּוֹם, שְׁאִם יָצָאתִי, יִפְגָּעֵנִי אָדָם רַמָּאי. וְכֵן אֵלּוּ שֶׁשּׁוֹמְעִין צִפְצוּף הָעוֹפוֹת וְאוֹמְרִין יִהְיֶה כָּךְ וְלֹא יִהְיֶה כָּךְ, טוֹב לַעֲשׂוֹת דָּבָר פְּלוֹנִי וְרָע לַעֲשׂוֹת דָּבָר פְּלוֹנִי. וְכֵן אֵלּוּ שֶׁאוֹמְרִין שְׁחֹט תֻּרְנְגוֹל זֶה שֶׁקָּרָא עַרְבִּית, שְׁחֹט תֻּרְנְגֹלֶת זוֹ שֶׁקָּרָאת כְּמוֹ תֻּרְנְגוֹל. וְכֵן הַמֵּשִׂים לְעַצְמוֹ סִימָנִים, אִם יֵארַע לִי כָּךְ וְכָּךְ אֶעֱשֶׂה דָּבָר פְּלוֹנִי, וְאִם לֹא יֵארַע לֹא אֶעֱשֶׂה, כֶּאֱלִיעֶזֶר עֶבֶד אַבְרָהָם. וְכָל כַּיּוֹצֶא בַּדְּבָרִים הָאֵלּוּ, הַכֹּל אָסוּר; וְכָל הָעוֹשֶׂה מַעֲשֶׂה מִפְּנֵי דָּבָר מִדְּבָרִים אֵלּוּ, לוֹקֶה

Établir des « signes » pour soi-même, en disant « Si telle ou telle chose m'arrive, je ferai ceci ou cela, et si cela n'arrive pas, alors je ne le ferai pas », est, du point de vue du Ramba''m, défendu à titre de Nihoush, et il mentionne explicitement l'exemple du « signe » de `ali´azar.

Le Ra´ava''dh ז״ל et d'autres ne sont pas d'accord avec l'approche du Ramba''m d'inclure le « signe » de `ali´azar dans le Nihoush défendu par la Tôroh, faisant remarquer la fameuse tradition rabbinique qui vante la piété de `ali´azar. Est-il possible, se demandent les opposants du Ramba''m, qu'un Saddiq tel que `ali´azar, que le Midhrosh décrit comme étant un homme qui « puisait de l'enseignement de son maître et le versait pour d'autres personnes », ait pu transgresser cette grave interdiction biblique de Nihoush ?

Mais plusieurs autres autorités défendent l'approche du Ramba''m et offrent de nombreuses explications pour la justifier. La plus connue est certainement celle du Ra''n ז״ל. Dans sa collection de Daroshôth3, il explique qu'en vérité le Ramba''m ne désapprouve pas le signe de `ali´azar. Il défend plutôt uniquement des signes qui n'ont aucune relation logique avec la décision à prendre. Par exemple, le Ramba''m mentionne dans le passage susmentionné la croyance superstitieuse selon laquelle on ne doit pas sortir de chez soi si un renard est passé à sa droite. Quel lien y a-t-il entre le fait qu'un renard soit passé à notre droite et le fait de s'interdire alors de sortir de chez soi ? Aucun ! De même, il mentionne la croyance superstitieuse selon quoi, puisque notre pain a glissé de notre bouche lorsqu'on mangeait, on doit s'interdire ce jour-là de s'adonner à une activité professionnelle ou financière, car on échouera dans tout ce que l'on entreprendra. Là encore, il n'y aucun lien entre l'événement et la décision que l'on a prise. Mais `ali´azar a pris sa décision sur la base d'un indicateur intrinsèquement logique, à savoir, la Middoh de Hasadh (bonté, générosité) de la jeune femme. Il recherchait une femme bonne et généreuse, et par conséquent il a décidé qu'il choisirait une femme qui lui proposerait généreusement plus d'eau que ce dont il avait réellement besoin. Le Ramba''m ne renvoyait au « signe » de `ali´azar, non pas pour nous dire qu'il a transgressé l'interdiction de Nihoush, mais pour nous expliquer que la définition même de Nihoush implique de prendre des décisions sur la base d'une certaine occurrence. En règle générale, une telle tactique est défendue, car dans la plupart des cas il n'y a pas de lien entre l'événement et la décision prise. Mais dans ce cas-ci, elle était permise à cause du lien logique qui existait entre l'événement en question et la décision qui en a résulté. En incluant le signe de `ali´azar, le Ramba''m veut attirer notre attention sur le fait que la frontière entre ce qui est permis ou défendu en matière de Nihoush est très mince, et beaucoup, en se basant sur l'exemple de `ali´azar, pourraient en arriver à tomber dans un Nihoush prohibé, étant incapables de comprendre la limite de l'usage de telles tactiques pour prendre des décisions.

Cette distinction entre ces deux sortes de Nihoush nous aide à clarifier l'idée sous-jacente de cette interdiction. Les gens doivent prendre des décisions sur la base de raisonnements solides et minutieux. Lorsque quelqu'un prend une décision sur la base d'événements arbitraires, il se dédouane en fait de toute responsabilité personnelle pour les choix qu'il a faits. De même en est-il de celui qui se lance à l'aventure, sans penser à l'avenir, ni prendre le temps de se préparer comme il faudrait, en se disant tout simplement « HaShem s'occupera de tout ! » Si un agriculteur n'a pas pris le temps de travailler son champ, prier HaShem pour la pluie est une folie, car à quoi lui servira la bénédiction de la pluie alors qu'il n'a pas travaillé son champ ? Au lieu d'être une bénédiction, ce sera pour lui une malédiction ! La bénédiction ne peut tomber que dans un Kali (réceptacle) bien préparé !

Plutôt que de penser en fonction de la situation afin de décider de la suite des événements et des mesures à prendre, l'individu recourt à des tactiques hasardeuses, à du « pile ou face », à du « Tant pis, ça marche ou ça casse », qui ne donnent pas nécessairement le résultat le plus désirable. Et même se lancer à l'aventure sans prendre la peine de réfléchir à toutes les conséquences et problèmes pratiques, mais en se disant qu'HaShem s'occupera de tout, est une forme de superstition. C'est pourquoi HaZa''l nous ont dit : « Qui est sage ? C'est celui qui voit les conséquences de ses actes avant de les accomplir », c'est-à-dire, celui qui prend le temps de peser tous les pour et les contre, les bienfaits et les éventuelles conséquences, et qui se prépare du mieux possible avant de finalement passer à l'acte. En réalité, il est même défendu de prendre une décision irrationnelle ou dangereuse en comptant sur un miracle du Ciel, car c'est ce qui s'appelle mettre HaShem à l'épreuve, ce qui est strictement défendu.4

La superstition dépouille l'être humain de sa faculté la plus vitale, à savoir son intellect, et cela devient alors pour lui une excuse pour ne pas assumer sa part de responsabilité dans ses échecs. Il se rassure en se disant que s'il a échoué c'est parce qu'il y a eu ceci ou cela, ou simplement parce qu'HaShem voulait qu'il échoue. Mais il ne se dira pas « J'ai échoué, car je n'ai pas analysé la situation comme il fallait » ou « parce que je me suis basé sur quelque chose de complètement irrationnel ou inapproprié », ou « parce que je n'ai pas pris la peine de bien préparer ce que je voulais faire », ou « parce que je n'ai pas voulu regarder la réalité des conséquences possibles en face. » D'autres se rassurent en disant que c'est le hasard ou le destin !

C'est pourquoi le Ramba''m permet de déterminer la suite à donner à des événements uniquement sur la base de décisions bien réfléchies et de raisonnements solides et minutieux, comme dans le cas de `ali´azar, et non sur la base de « signes » aléatoires, hasardeux et superstitieux.

1Hilkôth ´avôdhoh Zoroh Wahouqqôth Haggôyim 11:4
2Wayyiqro` 19:26
3Daroshoh n°12

4Davorim 6:16

dimanche 8 janvier 2017

Placer des Mazouzôth partout est absurde

ב״ה

Placer des Mazouzôth partout est absurde

Illustration : Le Rabbi de la secte hassidique de Belz fixant une Mazouzoh dans une nouvelle clinique

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Dans le judaïsme falsifié de notre époque, appelé « judaïsme orthodoxe », une Mazouzoh est placée n'importe où. C'est ainsi que vous pouvez trouver des Mazouzôth aux portes d'universités juives, d'hôpitaux juifs, d'écoles juives, de Miqwo`ôth, de Batté Midhroshim, de Batté Kanasiyôth, de Yashivôth, de commerces tenus par des Juifs, ou encore même à la porte d'un bureau occupé par un Juif. Les Mazouzôth sont littéralement. Mais ce que les « Orthodoxes » ne réalisent pas, c'est que fixer des milliers de Mazouzôth à tous les endroits possibles et imaginables est non seulement une absurdité mais cela n'a également aucune source dans la Halokhoh !

Dans les Hilkôth Taphillin Oumazouzoh Waséphar Tôroh, au Chapitre 6, à la Halokhoh 1, le Ramba''m ז״ל énumère les dix conditions qui doivent être respectées pour qu'une maison nécessite une Mazouzoh, et il précise que si même une seule de ces dix conditions n'était pas respectée, on est exempt d'y fixer une Mazouzoh. Et voici les quatre dernières de ces dix conditions :

La maison sera profane1, elle devra avoir été faite pour [servir de] résidence humaine, elle devra avoir été faite pour [servir de] résidence digne, et elle devra avoir été faite pour [servir de] résidence permanente.
וְיִהְיֶה בֵּית חֹל, וְיִהְיֶה עָשׂוּי לְדִירַת אָדָם, וְעָשׂוּי לְדִירַת כָּבוֹד, וְעָשׂוּי לְדִירַת קְבָע

On ne peut pas être plus clair que cela ! Seul un lieu de résidence destiné à servir d'habitation permanente nécessite une Mazouzoh d'après la Halokhoh. Les Batté Kanasiyôth, les Batté Midhroshim, les universités, les Miqwo`ôth, un commerce, son bureau au travail, une école, etc., ne sont pas des lieux de résidence et n'ont pas vocation à servir de domiciles permanents ! Et comme l'a dit le Ramba''m, l'absence ne serait-ce que d'une seule de ces conditions suffit pour exempter de la Mazouzoh. Et ici, nous avons au moins deux conditions qui ne sont pas remplies !

Dans le même chapitre, à la Halokhoh 6, le Ramba''m explique que les entrées des Batté Kanasiyôth (synagogue) et des Batté Midhroshim (maisons d'étude) qui ne possèdent pas d'appartements dans lesquels des gens vivent ne nécessitent pas de Mazouzôth, parce qu'il s'agit alors de lieux consacrés ! Or, la plupart des synagogues n'ont pas d'appartements de résidence, mais les gens y fixent quand même, de façon insensée, des Mazouzôth ! (Dans la même Halokhoh, le Ramba''m déclare que si la synagogue ou la maison d'étude est effectivement dotée d'un appartement dans lequel des gens résident, alors elle nécessite une Mazouzoh.)

Noyez également que le Talmoudh, dans Manohôth 33a, rapporte que la porte par laquelle Ribbi Yahoudhoh Hannosi` ז״ל passait pour entrer dans son Béth Midhrosh n'avait pas de Mazouzoh ! Pour les « Orthodoxes » d'aujourd'hui, ce serait un sacrilège, un blasphème, une insulte, une preuve que l'on est « libéral », « pas religieux » ! Mais leurs synagogues et écoles sont-elles plus saintes que le Béth Midhrosh de Ribbi Yahoudhoh Hannosi`, qui est nul autre que le compilateur de la Mishnoh ?

Pourquoi des milliers de Mazouzôth sont-elles fixées partout sans justification ? En outre, sachant que les Mazouzôth d'aujourd'hui (parchemins + boîtes) coûtent très chères (ce qui n'est même pas justifié), qui achète des milliers de Mazouzôth inutiles ? Qui les vend ? D'où vient l'argent et où va-t-il ? Cela n'est rien d'autre qu'un business et une arnaque, comme le fait de vérifier les Mazouzôth et les Taphillin !


1C'est-à-dire qu'il ne doit pas s'agir d'une maison consacrée

mercredi 4 janvier 2017

Trois des quatre jeûnes publics ne sont plus obligatoires

ב״ה

Trois des quatre jeûnes publics ne sont plus obligatoires


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Comme vous le savez, en-dehors de Yôm Hakkippourim qui est le seule jeûne obligatoire d'origine biblique, nous avons quatre autres jeûnes publics mentionnés par Zakharyoh Hannovi`. À leur sujet, voici ce que nous pouvons lire dans le Talmoudh1, dans un passage dont les rabbins « Orthodoxes » ne vous parleront jamais :

Rov Hanno` bar Bizno` a dit au nom de Ribbi Shim´ôn le Pieux : « Quelle est la signification de ce qui est écrit [dans le verset suivant2 :] ''Ainsi a parlé HaShem Savo`ôth : le jeûne du quatrième [mois], le jeûne du cinquième [mois], le jeûne du septième [mois] et le jeûne du dixième [mois] deviendront pour la Maison de Yahoudhoh une allégresse et une réjouissance'' ? [Le Prophète] appelle ces jours à la fois des jours de jeûne et des jours d'allégresse et de réjouissance, ce qui signifie qu'à une époque où y a la paix ils serviront à l'allégresse et à la réjouissance, mais [à une époque où] il n'y a pas de paix [ils serviront de jours de] jeûne. » Rov Pappo` a dit : « Il veut dire qu'à une époque où il y a la paix ils serviront à l'allégresse et à la réjouissance, s'il y a un décret gouvernemental [ils serviront] au jeûne, s'il n'y ni décret gouvernemental ni paix, ceux qui le désirent [jeûner] jeûnent et ceux qui désirent [ne pas jeûner] ne jeûnent pas. » S'il en est ainsi, Tish´oh Ba`ov aussi [devrait être optionnelle] ! Rov Pappo` a dit : « Tish´oh Ba`ov est dans une catégorie différente, parce que plusieurs malheurs s'y sont produits, car l'a dit un Maître3 : ''À Tish´oh Ba`ov le Sanctuaire fut détruit aussi bien la première fois que la deuxième foi, Béthor fut capturé et la ville [de Yarousholayim] fut labourée.'' »
אמר רב חנא בר ביזנא אמר רבי שמעון חסידא מאי דכתיב כה אמר ה' צבאות צום הרביעי וצום החמישי וצום השביעי וצום העשירי יהיה לבית יהודה לששון ולשמחה קרי להו צום וקרי להו ששון ושמחה בזמן שיש שלום יהיו לששון ולשמחה אין שלום צום אמר רב פפא הכי קאמר בזמן שיש שלום יהיו לששון ולשמחה יש גזרת המלכות צום אין גזרת המלכות ואין שלום רצו מתענין רצו אין מתענין אי הכי תשעה באב נמי אמר רב פפא שאני תשעה באב הואיל והוכפלו בו צרות דאמר מר בתשעה באב חרב הבית בראשונה ובשניה ונלכדה ביתר ונחרשה העיר

Cette même page du Talmoudh rapporte une divergence d'opinion entre Ribbi ´aqivoh ז״ל et Ribbi Shim´ôn ban Yôho`y ז״ל concernant la date exacte du jeûne du dixième mois. Pour rappel, voici la liste :

  1. Le jeûne du quatrième mois : 9 Tammouz4
  2. Le jeûne du cinquième mois : 9 `ov
  3. Le jeûne du septième mois : 3 Tishri
  4. Le jeûne du dixième mois : 10 Tévéth d'après Ribbi ´aqivoh, 5 Tévéth d'après Ribbi Shim´ôn.

Pour revenir au passage rapporté plus haut, nous voyons clairement que le Talmoudh parle de trois situations différentes nécessitant trois approches distinctes :

  1. si nous nous trouvons à une époque de paix pour les Israélites, tous ces jeûnes, excepté celui de Tish´oh Ba`ov (le neuf `ov), sont abolies ;
  2. si nous nous trouvons à une époque où l’État impose un mauvais décret aux Israélites et les persécute pour leur foi, tous ces jeûnes sont obligatoires ;
  3. si nous nous trouvons à une époque où il n'y a ni persécutions de la part de l’État ni la paix non plus pour les Israélites, jeûner ces jours-là devient optionnel (excepté à Tish´oh Ba`ov, qui reste obligatoire) : ainsi, ceux qui désirent jeûner peuvent le faire, tandis que ceux qui ne le désirent pas peuvent s'en abstenir.

L'écrasante majorité des Israélites dans le monde d'aujourd'hui vivent soit dans des pays où ils vivent en paix, soit dans des pays où il n'y a ni persécution d’État ni paix non plus pour les Israélites (ou du moins, une paix relative). Mais il y a très peu de pays dans lesquels les Israélites peuvent dire subir des persécutions d’État. Par conséquent, à notre époque, dans certains pays il sera défendu de jeûner ces jours-là (excepté à Tish´oh Ba`ov), tandis que dans d'autres cela sera laissé à l'appréciation de chacun.

Tish´oh Ba`ov est une exception, car les conséquences des événements ayant eu lieu ce jour-là se font ressentir (jusqu'à aujourd'hui, nous sommes en exil et n'avons toujours plus de Béth Hammiqdosh, ce qui fait que notre pratique religieuse n'est plus complète, car plusieurs préceptes de la Tôroh sont inapplicables). En outre, contrairement aux trois autres jours de jeûne qui commémorent des événements s'étant produits uniquement à l'époque du premier Béth Hammiqdosh, Tish´oh Ba`ov concerne à la fois l'époque du premier Béth Hammiqdosh et celle du deuxième.

Puissions-nous mériter de voir le jour où même Tish´oh Ba`ov sera changé en un jour d'allégresse et de réjouissance, avec la venue de Moshiah Sidhqénou, qui nous sortira de cet exil pour la rédemption complète et véritable et construira le troisième Béth Hammiqdosh final et éternel. `omén, Kén Yahi Rosôn !

1Rô`sh Hashonoh 18b
2Zakharyoh 8:19
3Ta´anith 20b
4De nos jours, ce jeûne est commémoré le 17 Tammouz. Le 9 Tammouz est le jour où les murailles de Yarousholayim furent ébréchées à l'époque du premier Béth Hammiqdosh, tandis qu'à l'époque du deuxième Béth Hammiqdosh ce même événement se reproduisit, mais cette fois-ci le 17 du même mois. Afin de ne pas avoir deux jeûnes le même mois à des dates différentes commémorant le même événement, ce fut la date du 17 Tammouz qui s'imposa pour commémorer les deux événements

mardi 3 janvier 2017

Dormir dans deux lits séparés durant la période de Niddoh

ב״ה

Exposer les fausses notions

Dormir dans deux lits séparés durant la période de Niddoh


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Nous lisons dans le Talmoudh le passage suivant1 :

Ils ont exposé [ceci] : Une Niddoh peut-elle dormir avec son mari, elle dans son vêtement et lui dans son vêtement ?2 Rov Yôséph a dit : « Viens écouter ! Une volaille peut être servie avec du fromage à la [même] table, mais elle ne peut pas être consommée [avec lui]. C'est l'opinion de Béth Shamma`y. Béth Hillél tranchent : Elle ne peut ni être servie ni être consommée [à la même table que le fromage] ! »3 Mais il y a une différence [entre les deux cas,] parce qu'il n'y a pas d'esprits [distincts].4 On peut donc aussi raisonner que lorsqu'il a des esprits [distincts] c'est différent, parce que la deuxième phrase enseigne : « Rabban Shim´ôn ban Gamli`él a dit : ''Deux pensionnaires5 mangeant à la même table, l'un peut consommer de la viande et l'autre du fromage, et nous n'avons aucune crainte !6'' » Mais n'a-t-il pas été enseigné : « Rov Hanin bar `ammi a dit au nom de Shamou`él : ''Cela ne fut enseigné que lorsqu'ils ne se connaissent pas7 ; mais s'ils se connaissent, c'est défendu !'' » ? Or, ici aussi, ils se connaissent !8 Pourquoi comparer ? Là, nous avons des esprits [distincts] mais pas un changement9, tandis qu'ici, il y a des esprits [distincts] et un changement !10 D'autres déclarent : « Viens écouter ! Rabban Shim´ôn ban Gamli`él a dit : ''Deux pensionnaires peuvent manger à la même table, un de la viande et l'autre du fromage.'' Et il a été dit à ce sujet : Rov Hanin bar `ammi a dit au nom de Shamou`él : ''Cela ne fut enseigné que s'ils ne se connaissent pas ; mais s'ils se connaissent, c'est défendu. Or, ces deux-là se connaissent !'' [Non !] Là, nous avons des esprits [distincts] mais pas de changement, tandis qu'ici, il y a des esprits [distincts] et un changement ! » Viens écouter : [La Mishnoh déclare :] « Un Zov ne doit pas dîner avec une Zovoh, de peur que cela ne mène au péché ! »11 [Non, car] ici aussi il y a des esprits [distincts] mais pas de changement.12 Viens écouter : [Il est écrit ceci13 :] « qui ne mange pas sur les montagnes, et ne lève pas les yeux vers les idoles de la maison d'Israël, qui ne déshonore pas la femme de son prochain et ne s'approche pas d'une femme Niddoh » ; ainsi, une femme qui est Niddoh est assimilée à l'épouse de son prochain ; tout comme l'épouse de son prochain, lui dans son vêtement et elle dans son vêtement c'est défendu, de même si son épouse est Niddoh, elle dans son vêtement et lui dans son vêtement c'est défendu.14 Cela le démontre ! Néanmoins, cela s'oppose aux propos de Ribbi Péddath, car Ribbi Péddath a dit : « La Tôroh n'a défendu que de se rapprocher du dévoilement d'une ´arwoh, ainsi qu'il est dit15 : ''Aucun homme n'approchera de tout membre de sa chair pour en dévoiler la nudité.'' »16
איבעיא להו נדה מהו שתישן עם בעלה היא בבגדה והוא בבגדו אמר רב יוסף תא שמע העוף עולה עם הגבינה על השלחן ואינו נאכל דברי בית שמאי בית הלל אומר לא עולה ולא נאכל שאני התם דליכא דיעות הכי נמי מסתברא דהיכא דאיכא דיעות שאני דקתני סיפא רבן שמעון בן גמליאל אומר שני אכסניים אוכלין על שלחן אחד זה אוכל בשר וזה אוכל גבינה ואין חוששין ולאו אתמר עלה אמר רב חנין בר אמי אמר שמואל לא שנו אלא שאין מכירין זה את זה אבל מכירין זה את זה אסורים והני נמי מכירין זה את זה נינהו הכי השתא התם דיעות איכא שינוי ליכא הכא איכא דיעות ואיכא שינוי איכא דאמרי תא שמע רבן שמעון בן גמליאל אומר שני אכסניים אוכלין על שלחן אחד זה בשר וזה גבינה ואתמר עלה אמר רב חנין בר אמי אמר שמואל לא שנו אלא שאין מכירין זה את זה אבל מכירין זה את זה אסור והני נמי מכירין זה את זה נינהו התם דיעות איכא שינוי ליכא הכא איכא דיעות ואיכא שינוי תא שמע לא יאכל הזב עם הזבה משום הרגל עבירה הכי נמי דיעות איכא שינוי ליכא תא שמע אל ההרים לא אכל ועיניו לא נשא אל גלולי בית ישראל ואת אשת רעהו לא טמא ואל אשה נדה לא יקרב מקיש אשה נדה לאשת רעהו מה אשת רעהו הוא בבגדו והיא בבגדה אסור אף אשתו נדה הוא בבגדו והיא בבגדה אסור שמע מינה ופליגא דרבי פדת דאמר רבי פדת לא אסרה תורה אלא קורבה של גלוי עריות בלבד שנאמר איש איש אל כל שאר בשרו לא תקרבו לגלות ערוה

Les rabbins « Orthodoxes » utilisent généralement ce passage pour déclarer que le Talmoudh établit la Halokhoh qui défend à un couple de dormir dans le même lit durant la période de Niddoh. Mais en réalité, en lisant tout le passage et non en ne citant qu'une seule partie (comme le font souvent les « Orthodoxes » pour tromper leur audience), nous nous rendons compte que le Talmoudh n'offre aucune décision sur le sujet ! En d'autres mots, la question est ouverte ; le Talmoudh ne fait que rapporter les arguments des deux camps, mais n'émet aucune décision, de sorte que, en réalité, chacun pourrait décider d'adopter l'approche qui lui convient ou lui semble la plus appropriée. Je trouve personnellement plus logiques et convaincants les arguments de ceux qui permettent à un couple de dormir dans le même lit durant la période de Niddoh, à partir du moment où ils dorment habillés (ce qui est un changement pouvant leur rappeler qu'ils sont interdits l'un à l'autre, contrairement aux autres nuits où ils dorment nus) et qu'ils évitent tout contact pouvant mener à une excitation et, à Dieu ne plaise, un rapport sexuel défendu. Et nous verrons plus bas que c'est également la position du Ramba''m ז״ל !

Pour davantage soutenir leur position selon quoi le Talmoudh défendrait à un couple de dormir dans le même lit lorsque la femme est Niddoh, les « Orthodoxes » citent une anecdote que l'on retrouve au bas de la même page talmudique et qui se poursuit au début de la page suivante. Voici le passage dans son intégralité17 :

Il a été enseigné par l’École de `éliyohou : Il arriva une fois qu'un certain disciple qui avait étudié beaucoup la Mishnoh et beaucoup lu l’Écriture, et il avait beaucoup servi les Talmidhé Hakhomim. Pourtant, il mourra à la fleur de l'âge. Sa femme prit les Taphillin [de son mari] et les apporta dans les synagogues et maisons d'étude et se plaignaient devant eux : « Il est écrit dans la Tôroh18 : ''Car elle [la Tôroh] est ta vie et la longueur de tes jours.'' Mon mari, qui a beaucoup lu l’Écriture et beaucoup étudié la Mishnoh, et a beaucoup servi les Talmidhé Hakhomim, pourquoi est-il mort à la fleur de l'âge ? » Et aucun homme ne pouvait lui répondre. Je fus invité dans sa maison, et elle me rapporta toute l'histoire. Je lui dis : « Ma fille ! Comment était-il avec toi durant ta Niddoh ? » Elle lui dit : « Que Dieu préserve ! Il ne me touchait pas, même avec son auriculaire ! » « Et comment était-il avec toi durant tes jours de [vêtements] blancs ? » « Il mangeait avec moi, buvait avec moi et dormait avec moi dans un contact corporel, mais il ne lui vint jamais l'idée de faire autre chose. » Il lui dit : « Béni soit l'Omniprésent pour l'avoir tué, car Il n'a pas fermé les yeux en raison de la Tôroh.19 Car, voici, la Tôroh a dit20 : ''D'une femme dans la Niddoh de son impureté tu n'approcheras point !'' » Lorsque Rov Dimi vint, il dit : « C'était un large lit ! » À l'Ouest21, ils ont dit : « Rov Yishoq bar Yôséph a dit : ''Un tablier faisait une séparation entre eux !'' »
תני דבי אליהו מעשה בתלמיד אחד ששנה הרבה וקרא הרבה ושימש תלמידי חכמים הרבה ומת בחצי ימיו והיתה אשתו נוטלת תפיליו ומחזרתם בבתי כנסיות ובבתי מדרשות ואמרה להם כתיב בתורה כי הוא חייך ואורך ימיך בעלי ששנה הרבה וקרא הרבה ושימש תלמידי חכמים הרבה מפני מה מת בחצי ימיו ולא היה אדם מחזירה דבר פעם אחת נתארחתי אצלה והיתה מסיחה כל אותו מאורע ואמרתי לה בתי בימי נדותך מה הוא אצלך אמרה לי חס ושלום אפילו באצבע קטנה לא נגע [בי] בימי לבוניך מהו אצלך אכל עמי ושתה עמי וישן עמי בקירוב בשר ולא עלתה דעתו על דבר אחר ואמרתי לה ברוך המקום שהרגו שלא נשא פנים לתורה שהרי אמרה תורה ואל אשה בנדת טומאתה לא תקרב כי אתא רב דימי אמר מטה חדא הואי במערבא אמרי אמר רב יצחק בר יוסף סינר מפסיק בינו לבינה

Les « Orthodoxes » citent ce passage de façon à démontrer l'importance de la supposé interdiction de dormir dans le même lit que son épouse lorsqu'elle est Niddoh. Mais cette histoire est complètement prise hors contexte ! La faute du mari n'était pas qu'il dormait dans le même lit que sa femme. Lorsqu'elle était Niddoh (dans le contexte, cela désigne les jours durant lesquels la femme saigne réellement), il prenait soin de ne pas avoir de contacts physiques avec elle. Par contre, durant les jours blancs (lorsque les saignements menstruels cessaient, les femmes Israélites avaient pris sur elles de s'habiller en blanc jusqu'à la fin de leur période, de façon à signaler que bien qu'elles ne saignaient plus, elles étaient encore Niddôth. C'est ce que l'on appelle les jours blancs), il dormait avec elle tandis que leurs deux corps se touchaient. C'est cela sa faute, même s'il n'eut jamais le désir d'avoir un rapport avec elle ! Nous ne pouvons donc pas déduire de cette anecdote que ce soit le fait d'avoir dormi avec son épouse qui fut considéré fautif.

Mais le Talmoudh poursuit et déclare clairement qu'il existe différentes versions de cette anecdote. Dans la version rapportée ici, la femme aurait déclaré que leurs corps se touchaient. Or, le Talmoudh rapporte que Rov Dimi avait entendu une version disant qu'ils dormaient dans un large lit, indiquant par-là qu'ils ne se touchaient pas. De même, le Talmoudh rapporte que la version rapportée ici était celle qui avait été entendue à Babylone. Par contre, la version connue en Palestine disait qu'ils dormaient dans le même lit, mais avec un tablier qui faisait séparation entre eux, de sorte que leurs corps ne se touchaient pas ! Par conséquent, non seulement nous ne pouvons réellement savoir pourquoi cet homme est mort dans la fleur de l'âge, mais en plus des deux autres versions rapportées sur l'histoire de ce couple nous pourrions conclure que l'homme a perdu la vie pour une raison autre que le fait d'avoir dormi dans le m^me lit que sa femme durant sa Niddoh !

Il ressort même que si le lit est suffisamment large pour qu'ils ne se touchent pas, ou si une séparation a été placée dans le lit qui permet à leurs deux corps de ne pas se toucher, dormir dans le même lit que sa femme Niddoh n'est pas un problème. Nous voyons donc que l'on ne peut conclure de ces deux passages talmudiques qu'il serait défendu pour un couple de dormir dans le même lit lorsque l'épouse est Niddoh. D'ailleurs, le Béth Yôséph lui-même22 cite Rabbénou Yarouhom ban Mashoullom (1290-1350) comme ayant tranché qu'un couple peut dormir ensemble lorsque la femme est Niddoh, mais à condition que le lit soit suffisamment large pour qu'ils ne se touchent pas et qu'ils dorment habillés (ce qui signifie qu'ils ne doivent pas être nus, car dormir nu est, autrement, la façon normale de dormir).

Quant au Ramba''m, il ne mentionne jamais dans son Mishnéh Tôroh l'obligation de dormir dans des lits différents lorsque l'épouse est Niddoh. Ce qu'il écrit dans les Hilkôth `issouré Bi`oh 11:18-19 c'est que durant les jours blancs, le mari doit se comporter avec son épouse comme il le ferait durant sa Niddoh. L'un des exemples qu'il rapporte est qu'il ne doit pas s'attacher à elle, même s'il est habillé et qu'elle aussi est habillée. Cela signifie que quand bien même ils dormiraient dans le même lit et qu'ils seraient habillés, il ne doit pas « s'attacher » à elle ; cette expression signifie clairement qu'il ne doit pas l'enlacer dans le lit. Ne pas enlacer sa femme dans le lit n'équivaut pas à interdire de dormir avec elle dans le même lit ! Et le Ramba''m poursuit en interdiction les contacts physiques. À la Halokhoh 19, il conclut que tout cela fut défendu afin qu'ils n'en arrivent pas au péché. Nous pouvons donc voir qu'il soutient la même approche que Rabbénou Yarouhom ban Mashoullom ז״ל.

Il convient de conclure en rappelant que plusieurs passages talmudiques démontrent qu'à ces époques-là la pratique ordinaire était qu'une famille entière dormait dans le même lit. Les gens n'avaient pas de grandes maisons et de nombreuses pièces comme c'est le cas de nos jours. Ils ne pouvaient donc se permettre d'avoir plusieurs lits. On comprend ainsi mieux pourquoi le Talmoudh ne tranche pas du tout explicitement que dormir dans le même lit que sa femme lorsqu'elle est Niddoh est défendu, car l'écrasante majorité des couples n'avaient pas deux lits. C'est pourquoi, tant que le lit est large ou qu'il est possible de placer quelque chose entre eux qui les séparera, et qu'ils dorment habillés, rien ne pourrait leur interdire, d'un point de vue talmudique, de dormir dans le même lit.

1Shabboth 13a
2Dans les temps talmudiques, les gens dormaient nus. Par conséquent, peut-être que le fait de dormir habillés durant la période de Niddoh leur rappellera que la femme est interdite à son mari
3Et dans le cas de la volaille et du fromage la Halokhoh suit Béth Hillél. Ainsi, par analogie, la réponse à notre question est négative ; une femme Niddoh ne pourrait pas dormir avec son mari, dans le même lit, même si les deux sont habillés
4Lorsque la Halokhoh a tranché comme Béth Hillél dans le cas de la volaille et du fromage à la même table, c'est parce qu'il n'y avait personne pour restreindre le dîneur de consommer ensemble la volaille et le fromage. Mais ici, dans le cas d'un couple, chacun pourrait restreindre l'autre si l'autre souhaitait avoir des rapports
5Ou voyageurs logeant dans une auberge
6La raison est que nous supposons que l'un sera restreindre l'autre si l'autre désirait manger dans son assiette
7Ne se connaissant pas, l'un n'osera pas essayer de manger dans l'assiette de l'autre
8Et on devrait donc défendre au couple de dormir dans le même lit lorsque la femme est Niddoh, même lorsqu'ils sont habillés, car se connaissant l'un n'osera pas forcément restreindre l'autre
9C'est-à-dire que dans le cas des deux personnes qui mangent à la même table des aliments distincts que l'on n'a pas le droit de mélanger (c'est-à-dire, l'un mange de la viande et l'autre du fromage), il n'y a rien sur la table pour leur rappeler que l'un ne doit pas manger dans l'assiette de l'autre
10Comme il a été dit, normalement les couples dormaient nus. Le fait qu'ils dorment habillés et évitent tout contact corporel peut être considéré comme un changement significatif pour leur rappeler de ne pas avoir de rapports sexuels
11On pourrait appliquer la même chose dans le cas du couple où la femme est Niddoh : ils ne devraient pas dormir ensemble, même habillés, car cela pourrait mener au péché
12Par conséquent, on ne peut pas appliquer cela au cas du couple où la femme est Niddoh, car étant habillés cela fait un changement, tandis que dans le cas du Zov et de la Zovoh il n'y a pas de changement
13Yahazqé`l 18:6
14En d'autres mots, tout comme il serait défendu à un homme de dormir dans le même lit que l'épouse de son prochain même s'ils étaient tous les deux habillés, de même en est-il avec sa propre épouse lorsqu'elle est Niddoh, car le verset susmentionné fait un parallèle entre une femme Niddoh et l'épouse de son prochain
15Wayyiqro` 18:6
16En d'autres mots, la Tôroh n'a pas défendu tout type de contact avec une ´arwoh, mais uniquement les contacts de nature à mener à une relation sexuelle illicite. De ce fait, un couple pourrait parfaitement dormir dans le même lit en étant habillés, à partir du moment où ils veillent à ne pas avoir des contacts pouvant créer une excitation et mener à une relation sexuelle
17Shabboth 13a-b
18Davorim 30:20
19C'est-à-dire, Dieu n'a pas fait de favoritisme à l'égard de cet homme, en dépit de la Tôroh qu'il avait étudiée
20Wayyiqro` 18:19
21Cela désigne la Palestine, qui est à l'Ouest e Babylone

22Béth Yôséph, Yôréh Dé´oh 195

lundi 2 janvier 2017

L'obligation de Sholôsh Sa´ôdhôth

ב״ה

L'obligation de Sholôsh Sa´ôdhôth


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La Tôroh nous parle de la manne, la nourriture miraculeuse par laquelle les Bané Yisro`él furent nourris tout au long de leur quarante années de voyage dans le désert inhospitalier. En général, chaque individu recevait une portion quotidienne le matin, qui pourrissait si on la gardait jusqu'au lendemain. L'exception à la règle était le vendredi, où la portion de deux jours tombait, dont l'une pouvait, sans risque, être mise de côté pour le lendemain, Shabboth. Le tout premier Shabboth, lorsque le peuple se réveilla et découvrit que leur portion supplémentaire était encore intact, Môshah Rabbénou ע״ה leur ordonna de la consommer sans inquiétude1 :

Et Môshah dit : « Mangez-la aujourd'hui, car c'est aujourd'hui Shabboth pour `adhônoy ; aujourd'hui, vous n'en trouverez point aux champs ! »
וַיֹּאמֶר מֹשֶׁה אִכְלֻהוּ הַיּוֹם, כִּי-שַׁבָּת הַיּוֹם לַיהוה: הַיּוֹם, לֹא תִמְצָאֻהוּ בַּשָּׂדֶה

Le Talmoudh2 comprend ce verset comme établissant un protocole général de Shabboth pour tous les temps, et pas seulement vis-à-vis de la manne. D'après le Talmoudh, Môshah Rabbénou introduit ici l'obligation de manger à Shabboth. Plus précisément, la triple répétition du mot הַיּוֹם « Hayyôm – aujourd'hui », que l'on retrouve dans ce verset, fait allusion à l'obligation de consommer trois repas distincts à Shabboth. Sur la base de ce passage talmudique, certains Ri`shônim soutiennent que consommer trois repas à Shabboth constituerait une obligation Min Hattôroh (une obligation d'origine toranique).

Mais à l'évidence, le Ramba''m ז״ל interprète complètement différemment les propos du Talmoudh. Il rapporte l'obligation des trois repas de Shabboth dans le dernier chapitre des Hilkôth Shabboth de son Mishnéh Tôroh3 dans le cadre de sa discussion sur le concept de עֹנֶג שַׁבָּת « ´ônagh Shabboth » (l'obligation de se délecter à Shabboth). Comme il l'écrit en introduction de ce chapitre, l'obligation de ´ônagh Shabboth ne provient pas de la Tôroh mais découle de la prophétie de Yasha´yohou Hannovi` ע״ה, qui dit4 : וְקָרָאתָ לַשַּׁבָּת עֹנֶג, לִקְדוֹשׁ יהוה מְכֻבָּד « Et tu appelleras le Shabboth un délice, une sainteté de `adhônoy, digne d'honneur. » Le Ramba''m ne fait aucune mention du verset de la Tôroh sur la manne, que le Talmoudh cite comme source de l'obligation de שָׁלוֹשׁ סְעוֹדוֹת « Sholôsh Sa´ôdhôth » (les trois repas [de Shabboth]). Plutôt, il l'inclut simplement comme l'un des quelques détails faisant partie de la Miswoh de ´ônagh Shabboth établie par Yasha´yohou Hannovi`.

Il ressort que le Ramba''m voyait la déduction du Talmoudh basée sur ce verset du Séphar Shamôth comme n'étant rien d'autre qu'une אַסְמַכְתָּא « `asmakhto` », une allusion subtile dans le texte biblique à une pratique instituée plus tard. D'après lui, la source réelle de cette exigence est l'obligation générale de ´ônagh Shabboth plutôt qu'un commandement spécifique émis dans la Tôroh.

Le point de vue du Ramba''m sur l'obligation de Sholôsh Sa´ôdhôth a de nombreuses implications pratiques très intéressantes. Premièrement, elle affecte la question de savoir si quelqu'un doit consommer trois repas même si cela lui causera un inconfort ou un déplaisir. À l'évidence, une fois que nous classons les Sholôsh Sa´ôdhôth dans la catégorie générale de ´ônagh Shabboth, par définition ces repas ne peuvent alors pas être pris au dépend de son plaisir ou bien-être physique. En effet, le Ramba''m écrit ceci : וְאִם הָיָה חוֹלֶה מֵרֹב הָאֲכִילָה, אוֹ שֶׁהָיָה מִתְעַנֶּה--פָּטוּר מִשָּׁלוֹשׁ סְעוֹדוֹת « Mais s'il est malade de beaucoup manger ou s'il jeûne [régulièrement], il est exempt des Sholôsh Sa ôdhôth. »5 Par contre, d'après la position des autres Ri`shônim qui considèrent les Sholôsh Sa´ôdhôth comme une Miswoh Min Hattôroh indépendante, il semblerait qu'il devrait néanmoins prendre ces repas même si cela lui causerait un inconfort ou déplaisir (sauf si cela met sa vie en danger), car les obligations Min Hattôroh ne sont pas levées par souci d'inconfort ou de déplaisir.

Une deuxième application pratique de la position du Ramba''m concerne un Minhogh, qui était apparemment très courant à certaines périodes, consistant à partager le repas principal de Shabboth en deux plutôt que de prendre un troisième repas. Plus particulièrement en hiver, lorsque prendre deux repas avant le coucher du soleil n'est pas toujours faisable, certaines personnes récitaient simplement la Birakhath Hammozôn en plein milieu du deuxième repas de Shabboth, puis récitait une nouvelle bénédiction sur le pain. Elles étaient alors considérées comme ayant pris les deux repas de ce jour (en plus de celui du vendredi soir), accomplissant par-là l'obligation de Sholôsh Sa´ôdhôth.

Mais d'après la perspective du Ramba''m, il n'y aurait aucune utilité à partager le repas principal de Shabboth en deux. En effet, si les Sholôsh Sa´ôdhôth sont requises en vertu de l'obligation de ´ônagh Shabboth, il est alors logique d'affirmer que chaque repas doit apporter une certaine dimension supplémentaire de délectation. Si le repas de quelqu'un se prolonge jusque tard l'après-midi, il n'expérimente pas un ´ônagh supplémentaire en s'arrêtant de manger, en récitant la Birakhath Hammozôn, et en consommant un autre morceau de pain. Dans une telle situation, le Ramba''m conseillerait probablement à cette personne de simplement poursuivre son repas comme d'ordinaire plutôt que d'user d'un tel subterfuge. Et s'il n'y a pas assez de temps pour qu'elle ait le temps de développer un nouvel appétit pour le troisième repas, elle n'aura alors même pas besoin de prendre un troisième repas car, comme nous l'avons vu, le Ramba''m exempte de cette obligation si cela causera un inconfort, déplaisir, etc.

À l'inverse, si nous suivons l'approche des autres Ri`shônim qui considèrent les Sholôsh Sa´ôdhôth comme une obligation Min Hattôroh, nous devrions alors effectivement exiger de quelqu'un qui se retrouverait dans une telle situation de partager en deux son repas, de façon à ce qu'il soit considéré comme ayant formellement pris trois repas distincts. Ou on pourrait arguer que l'obligation de consommer trois repas se réfère à trois repas pris à trois moments différents du jour de Shabboth. Et effectivement, Rabbénou Ya´aqôv de Marvège ז״ל (un des Tôsophôth du 13ème siècle) rapporte dans son ouvrage intitulé Min Hashomayim6 qu'il aurait reçu une vision nocturne dans laquelle on lui aurait dit que tout comme le mot הַיּוֹם « Hayyôm – aujourd'hui » apparaît à trois occasions distinctes dans le verset, de même, les trois repas de Shabboth devraient être pris à trois moments distincts durant le Shabboth, à savoir le soir, le matin et l'après-midi. Mais évidemment, pour nous qui suivons le Ramba''m, le mot הַיּוֹם « Hayyôm – aujourd'hui » n'a aucune incidence ni portée sur cette Halokhoh, puisque ce verset n'est pas vraiment la source de l'obligation des Sholôsh Sa´ôdhôth.

Il est intéressant de noter que dans le même passage du Mishnéh Tôroh le Ramba''m ajoute que les Sholôsh Sa´ôdhôth s'appliquent même lors des Yomim Tôvim. À la lumière du fait que le Ramba''m décrit les Sholôsh Sa´ôdhôth comme une Halokhoh découlant du ´ônagh Shabboth, nous devons conclure que les Yomim Tôvim aussi incluent une obligation de ´ônagh, comme Shabboth. Mais une telle conclusion est quelque peu surprenante et problématique, sans compter qu'elle n'a aucune base dans une source antérieure. En parlant de Yôm Tôv la Tôroh et le Talmoudh parlent plutôt d'une obligation de ִמְחָה « Simhoh – réjouissance. » Le concept de Simhoh est assez différent de celui de ´ônagh ; ce dernier à une délectation physique, alors que la Simhoh se réfère à un sentiment intérieur de joie (pouvant aussi être engendré par le fait d'avoir mangé). Il est donc difficile d'expliquer pourquoi le Ramba''m a étendu l'obligation de ´ônagh aux Yomim Tôvim.

1Shamôth 16:25
2Shabboth 117b
3Hilkôth Shabboth 30:9
4Yasha´yohou 58:13
5Hilkôth Shabboth 30:9

6Tashouvoh n°14
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