Affichage des articles dont le libellé est Rabbénou `avrohom ban HaRamba''m. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Rabbénou `avrohom ban HaRamba''m. Afficher tous les articles
jeudi 28 août 2025
mardi 26 août 2025
mercredi 1 janvier 2025
Les Loubavitchs, le Rambam et la forme de la Menorāh – Deuxième Partie
Libellés :
Contradictions,
Erreurs,
Fêtes & Calendrier,
Halokhoh & Minhoghim,
Harédhim & Hasidhim,
Histoire,
Questions,
Rabbénou `avrohom ban HaRamba''m,
Ramba''m,
Sens des mots,
Tradition orale,
Vidéo
jeudi 12 décembre 2024
mardi 29 octobre 2024
lundi 28 octobre 2024
jeudi 10 octobre 2024
mercredi 18 septembre 2024
dimanche 11 août 2024
vendredi 15 mars 2024
lundi 26 février 2024
lundi 8 avril 2019
Réflexions sur la bonne et mauvaise éducation torahique – Partie II
בס״ד
Réflexions
sur la bonne et mauvaise éducation torahique – Partie II
Cet
article peut être téléchargé ici.
- La Tôroh et la science
Puisque
le même D.ieu a créé aussi bien la Tôroh que la science, il est
axiomatique de considérer que la Tôroh et la science ne peuvent pas
avoir de conflit fondamental. La Tôroh et la science sont des
manifestations du D.ieu Unique, l'Auteur de la vérité. C'est la
raison pour laquelle nos Sages ont enseigné qu'HaShem Se comprend à
travers Ses œuvres de création. Et sur base de cela, Ribbénou
consacre les quatre premiers chapitres de son Mishnéh Tôroh à
traiter de la science, car la connaissance scientifique est
indispensable dans la foi juive authentique. Si la Tôroh et la
science paraissent s'opposer sur certains points, c'est soit parce
que nous n'avons pas correctement compris la Tôroh, soit parce que
nous n'avons pas bien révisé nos sciences.
La
connaissance scientifique a énormément progressé depuis les temps
anciens. Chaque génération a contribué au savoir cumulé de
l'humanité, et ce processus se poursuit dans notre génération, il
se poursuivra également dans les générations futures. Avec
l’avènement de nouveaux outils de recherche, les scientifiques ont
été capables d'étendre l'horizon de la connaissance scientifique.
Si HaZa''l et les rabbins de l'ère médiévale croyaient que
la Terre était plate, que la Terre était le centre de l'univers, ou
que le soleil tournait autour de la Terre, cela ne peut pas
surprendre, puisque c'était là le niveau de leurs connaissances
scientifiques en ces temps-là. De même, on ne peut pas leur
reprocher de ce ne pas avoir connu des choses qui ne furent
découvertes ou théorisées que bien des années ou siècles après
leurs morts. Rash''i pensait que l'Océan Atlantique était
« l'extrémité du monde » : Ribbénou
croyait que le système ptoléméen d'astronomie était correct ;
HaZa''l croyaient que les éclipses étaient des signes de la
fureur Divine, alors qu'il s'agit simplement de phénomènes naturels
prévisibles. Ce serait absurde de défendre les opinions
scientifiques caduques de ces Sages et illustres rabbins, puisque
nous savons aujourd'hui que leurs opinions ont été démontrées
incorrectes. Les Sages et Ri`shônim se basaient sur les meilleures
informations scientifiques disponibles à leurs époques ; mais
les recherches et découvertes ultérieures ont conduit vers des
informations plus précises et exactes. Nous devons traiter les
choses sur base du niveau actuel de connaissance scientifique.
Penchons-nous donc sur la question de l'âge de l'univers, à la
lumière de la tradition torahique et de la science moderne.
Les
Sages anciens calculèrent l'âge de l'humanité en additionnant les
âges des personnages bibliques depuis le temps de `odhom. Il y
avait des divergences d'opinion quant à la datation exacte, étant
donné que le récit biblique ouvre la porte à diverses
interprétations.1
La Bible elle-même n'utilise jamais le anno mundi (depuis la
création du monde) pour dater des événements, et le système que
nous utilisons actuellement (5779 au moment de la rédaction de cet
article) semble s'être répandu seulement après les temps
talmudiques. Les Tôsophôth2
s'étonnaient de la permissivité, à leur époque, de dater les
Gittin (documents de divorce) en prenant pour base la création du
monde, alors qu'en fait les Gittin d'antan (et d'autres documents
légaux) étaient datés sur base de l'année du roi régnant du pays
dans lequel les Juifs résidaient.
En
fait, bien que le système de datation actuel que nous utilisons ne
prend pas pour référence la création du monde, mais celle de
`odhom, les littéralistes supposent faussement que l'on pourrait
atteindre l'âge de l'univers en ajoutant les cinq premiers jours de
la création à l'âge de `odhom ! Cela signifierait que le
monde aurait été créé moins de 6 000 ans auparavant, d'où
l'impossibilité pour eux que quoique ce soit ait pu exister avant ce
temps-là. Mais nous avons des preuves sans équivoque de fossiles
d'êtres qui existaient des millions d'années de là, et d'autres
preuves scientifiques que l'univers est venu à l'existence il y a
des milliards d'années. Les littéralistes résolvent le dilemme en
niant l'existence de la moindre chose avant 5779 ans d'ici. Ils
considèrent les évidences scientifiques comme imprécises, fausses,
ou basées sur de mauvaises suppositions scientifiques. Ils sont
prêts à mettre leurs mains à couper que le monde n'a que 5779 ans.
Les dinosaures ne peuvent donc pas avoir existé ; quand on voit
des ossements de dinosaures, il s'agirait simplement d'ossements de
chiens qui furent avalés durant le déluge de Nôah, ou
d'ossements qu'HaShem a plantés juste pour nous tester afin de voir
si l'on pourrait croire que le monde ait plus de 5779 ans, ou encore
qu'il s'agirait d'ossements qui ont mal été datés en raison de
l'incompétence des scientifiques.
Pourtant,
la Tôroh exige-t-elle réellement que nous nions les évidences
scientifiques afin de justifier le système de datation anno
mundi ? Ribbénou répondrait que non, puisqu'il insiste à
d'innombrables reprises sur le fait que nous devrions rechercher la
vérité et nous rapprocher ainsi de l'Auteur de la vérité. Si la
science a démontré au-delà de tout doute raisonnable que les
dinosaures ont existé il y a plusieurs millions d'années en
arrière, nous devons alors rejeter l'opinion littéraliste selon
quoi le monde n'aurait que 5779 ans !
Plusieurs
de nos Sages et rabbins ont, en outre, mis en avant le fait que les
six jours de la création n'étaient pas des jours de 24 heures. En
effet, le soleil ne fut créé qu'au quatrième jour ; il ne
pouvait donc pas y avoir un coucher ou un lever du soleil lors des
trois premiers « jours ». Le mot « jour »,
tel qu'il est employé au début de la Tôroh, doit plus exactement
se comprendre par « période » d'une longueur
indéterminée. À chaque période de la création, il y a eu un
passage d'une phase plus simple à une phase plus complexe. Puisque
ces six « jours » de la création pourraient avoir
duré des milliards d'années par calculs humains, les dinosaures
peuvent avoir largement le temps d'avoir vécu et disparu avant que
`odhom et Hawwoh n'eurent été créés au sixième « jour ».
le
Rov `aryéh Kaplan a cité dans ses ouvrages de nombreux textes
traditionnels Juifs soutenant que le monde est bien plus âgé que ne
les laissent supposer les 5779 ans de notre système de datation
actuel. Par exemple, le Séphar Hattamounoh,
qui fut rédigé par le Tanno` (Sage de l'époque de la Mishnoh)
Ribbi Nahounyoh
ban Hakkanoh, avance que d'autres mondes existaient avant que `odhom
ne fut créé. Même le Midhrosh Baré`shith Rabboh 1:5
enseigne qu'il existait des « ordres de temps »
avant le premier jour de la création rapporté dans la Tôroh. Quant
au Talmoudh3,
il rapporte l'opinion selon laquelle il exista 974 générations
avant `odhom.
Le
plus intéressant est l'opinion de Ribbénou Yishoq d'Acre, un
disciple et collègue du Rambo''n et l'un des premiers kabbalistes de
son époque. En examinant l'un des ouvrages les plus importants de
Ribbénou Yishoq, `ôsar Hahayyim, le Rov Kaplan
a découvert que Ribbénou Yishoq déduisit que l'univers
aurait un peu plus de 15,3 milliards d'années ! Cette théorie
avancée par un kabbaliste médiéval, sur la seule base
d'interprétations des textes bibliques et rabbiniques, est
remarquablement proche des calculs de la science moderne qui date le
« Big Bang » à approximativement 15 milliards
d'années d'ici.4
Ribbénou Yishoq ne considérait pas être un besoin d'offrir
des explications farfelues et tirées par les cheveux pour justifier
à tous prix la théorie des 5779 ans. Lui, et ses nombreux pieux
collègues et disciples, n'avaient aucun problème à considérer un
univers vieux de plusieurs milliards d'années ; ils ne
considéraient pas un tel calcul comme compromettant la vérité et
véracité de la Tôroh. Il est donc essentiel de retenir que nous
possédons des traditions légitimes dans le judaïsme torahique qui
estiment que l'univers est plus âgé que 5779 ans.
Nos
écoles et les parents ne devraient pas enseigner aux enfants que les
ossements de dinosaures seraient des ossements de chiens emportés
dans le déluge. Ce n'est pas une éducation torahique, mais de la
mauvaise éducation. Il n'y a non seulement aucune nécessité
religieuse à enseigner une telle absurdité, mais c'est au contraire
un impératif religieux de ne pas enseigner de fausseté. Habiller
une fausseté dans des manteaux de religiosité, c'est compromettre
la foi véritable.
De
même, au sujet de l'emplacement de la trachée et de l’œsophage,
c'est un travestissement de l'éducation et de la morale d'enseigner
sans honte de fausses informations dans le but de « valider »
les notions erronées des rabbins des générations antérieures. Le
Talmoudh5
enseigne que s'accouder vers l'arrière ou sur le côté droit n'est
pas une façon valable d'accomplir le précepte de Hasibboh
(s'accouder en mangeant), et ajoute l'explication que s'accouder
d'une façon incorrecte peut mettre en danger la personne en amenant
la nourriture à descendre dans la trachée. Commentant ce passage
talmudique, Rash''i déclare que cette explication fut donnée en
référence au fait de s'accouder vers l'arrière. Mais le Rashba''m
s'oppose à la compréhension de Rash''i et cite ses maîtres qui ont
plutôt affirmer que la trachée se trouvait à droite ; ainsi,
d'après les maîtres du Rashba''m, le Talmoudh interdisait de
s'accouder à droite en raison du danger de s'étouffer. Bien que ni
Ribbénou ni même le Shoulhon ´oroukh ne citent cette
explication farfelue, elle fut reprise par le Moghén `avrohom et le
Ta''z, et devint depuis lors un enseignement très répandu dans les
milieux orthodoxes. Or, cette explication, qui a commencé par les
maîtres du Rashba''m, est factuellement fausse, et ne doit, par
conséquent, pas être enseignée pour expliquer la raison pour
laquelle nous nous accoudons à gauche lorsque nous mangeons.
Lorsqu'on
enseigne aux enfants qu'il faut s'accouder à gauche en mangeant
(notamment la nuit du Sédhar de Pasah), la seule explication
valide est que dans l'Antiquité les hommes libres mangeaient assis
sur des couches. Ils s'accoudaient ensuite sur leur côté gauche
pour deux raisons : premièrement pour marquer leur statut
d'hommes libres, et deuxièmement parce qu'en s'accoudant de ce
côté-là leur main droite était disponible pour prendre la
nourriture. C'est aussi simple que cela ! Si quelqu'un demande :
« Ne nous accoudons-nous pas à gauche parce que c'est là
que se trouve notre œsophage ? », la réponse est :
« Certaines personnes pensaient de façon erronée que telle
était la raison de notre accoudement à gauche, mais ce n'est pas la
raison correcte. l’œsophage et la trachée ne sont pas l'un à
côté de l'autre, mais l'un derrière l'autre ! »
C'est
un principe général d'insister auprès de nos enfants et élèves
que les déclarations scientifiques de HaZa''l et des rabbins
des générations antérieurs étaient basées sur le niveau de
connaissances scientifiques disponible à leurs époques. Nos Sages
ont eux-mêmes admis dans le Talmoudh6
que les hommes instruits parmi les Gôyim étaient de loin plus
avancés qu'eux dans les sujets scientifiques, et régulièrement nos
Sages se tournaient vers eux lorsqu'ils avaient des questions à ces
sujets. Comment donc, tout d'un coup, les Orthodoxes prétendent-ils
que nos Sages connaissaient tout ce qui touchait aux domaines
scientifiques ? C'est du pur mensonge ! Voici ce que l'un
de nos illustres rabbins, le Rov Hayyim Dowidh Halléwi, a
remarqué7 :
S'il
devient clair au moyen d'une méthode scientifique précise qu'une
certaine idée exprimée par nos Sages est complètement incorrecte,
cela ne diminue en rien leur grandeur intellectuelle, Hos
Washolôm, ni même leur grandeur en tant que sages de la Tôroh.
Leurs paroles qui se rapportent à la Tôroh furent émises par la
puissance de la sainteté de la Tôroh avec une part de Rouah
Haqqôdhash (inspiration Divine) ; mais leurs autres paroles
émises sur des sujets généraux furent prononcées uniquement du
fond de leur sagesse humaine.
À
suivre...
1Ribbénou
´azaryoh de Rossi (1511-1578) énonça toutes les inexactitudes et
contradictions dans les calculs rabbiniques dans son ouvrage « Mé`ôr
´énayim »
2Sur
Gittin 80b
3Haghighoh
13b
4`aryéh
Kaplan, Immortalité, Résurrection et l’Âge de l'Univers :
Une Opinion Kabbalistique
5Pasohim
108a
6Ibid.,
94b
7´aséh
Lakho Rov 5:49
samedi 31 décembre 2016
Faut-il ou pas dire chaque jour les trois bénédictions « Shallô` ´osoni... » ?
ב״ה
Faut-il
ou pas dire chaque jour les trois bénédictions « Shallô`
´osoni... » ?
Cet
article peut être téléchargé ici.
Nous
lisons ceci dans le Talmoudh1 :
Il
a été enseigné : Ribbi Mé`ir disait : « Un
homme a l'obligation de faire cent bénédictions chaque jour,
ainsi qu'il est dit2 :
''Et à présent, ô Yisro`él, qu'est-ce qu'HaShem, ton Dieu,
attend de toi ?'' »3
Le Shabboth et à Yôm Tôv4,
Rov Hiyo`, le fils de Rov `Awiyo`, tentait d'atteindre ce
nombre par des épices et des gourmandises5.
Il a été enseigné : Ribbi Mé`ir disait : « Un
homme a l'obligation de faire trois bénédictions chaque jour.
Les voici : ''Sha´osoni Yisro`él''6
(dans certaines versions ''Shallô` ´osoni Gôy''), ''Shallô`
´osoni `ishoh'', ''Shallô` ´osoni Bour'' »
Rov `aho`
bar Ya´aqôv entendit [une fois] son fils dire « Shallô`
´osoni Bour. »
Il lui dit : « Et celui-ci aussi ! »7
L'autre lui dit : « Quelle bénédiction
dois-je alors faire à la place ? ».
[Il lui répondit] : « Shallô`
´osoni´avadh. »
« Mais
n'est-ce pas la même chose qu'une femme ? »8
« Un
esclave lui est inférieur ! »9
|
תניא
היה רבי מאיר אומר חייב אדם לברך מאה
ברכות בכל יום שנאמר
ועתה ישראל מה
ה'
אלהיך
שואל מעמך רב חייא בריה דרב אויא בשבתא
וביומי טבי טרח וממלי להו באיספרמקי
ומגדי תניא היה ר"מ
אומר חייב אדם לברך שלש ברכות בכל יום
אלו הן <שעשאני
ישראל>
{שלא
עשאני גוי}
שלא
עשאני אשה שלא עשאני בור רב אחא בר יעקב
שמעיה לבריה דהוה קא מברך שלא עשאני בור
אמר ליה כולי האי נמי אמר ליה ואלא מאי
מברך שלא עשאני עבד
היינו אשה עבד זיל טפי
|
Chaque
jour, un homme bénit : « Boroukh `attoh HaShem
`alôhénou Malakh Ho´ôlom Shallô` ´osoni Gôy »,
« Boroukh `attoh HaShem `alôhénou Malakh Ho´ôlom
Shallô` ´osoni ´avadh », « Boroukh `attoh
HaShem `alôhénou Malakh Ho´ôlom Shallô` ´osoni `ishoh ».
|
וּמְבָרֵךְ
אָדָם בְּכָל יוֹם--בָּרוּךְ
אַתָּה ה'
אֱלֹהֵינוּ
מֶלֶךְ הָעוֹלָם,
שֶׁלֹּא
עָשָׂנִי גּוֹי;
בָּרוּךְ
אַתָּה ה'
אֱלֹהֵינוּ
מֶלֶךְ הָעוֹלָם,
שֶׁלֹּא
עָשָׂנִי עֶבֶד;
בָּרוּךְ
אַתָּה ה'
אֱלֹהֵינוּ
מֶלֶךְ הָעוֹלָם,
שֶׁלֹּא
עָשָׂנִי אִשָּׁה
|
Ainsi,
contrairement aux autres bénédictions du matin qui, d'après le
Ramba''m, ne doivent être faites que lorsqu'on accomplit les actes
pour lesquels ces bénédictions furent instituées (par exemple, si
on a entendu le coq chanter, on fait la bénédiction de « Hannôthén
Lasakhwi Vinoh », mais si on ne l'a pas entendu chanter on ne
la fait pas), ces trois bénédictions devraient être faites
quotidiennement. Rabbénou Manôah ז״ל
commente
ce passage du Mishnéh Tôroh en expliquant qu'un homme rencontrera
probablement durant la journée une de ces trois personnes, une
femme, un esclave ou un Gôy ; par conséquent, ces trois
bénédictions doivent être faites quotidiennement, contrairement
aux autres bénédictions du matin qui ne sont faites que lorsqu'on
s'est retrouvé dans une situation où on doit les faire.
Rabbénou
`avrohom ז״ל,
le fils du Ramba''m, cite dans son Séphar Hammaspiq, ce passage du
Mishnéh Tôroh, répète la règle concernant les autres
bénédictions du matin, puis commente ceci :
Mon
père ז״ל
a
déjà lancé des avertissements contre ce Minhogh erroné11
dans les Hilkôth Taphilloh. Cependant, à partir de ses mots, il
semble clair que trois de ces bénédictions, שֶׁלֹּא
עָשָׂנִי גּוֹי,
שֶׁלֹּא
עָשָׂנִי עֶבֶד et
שֶׁלֹּא
עָשָׂנִי אִשָּׁה sont
faites en toutes circonstances, que l'on ait rencontré ou pas un
Gôy, un esclave ou une femme. Il semble en être également ainsi à
partir de l'édition populaire du Piroush de Rabbénou Yishoq
l'auteur des Halokhôth.12
Néanmoins, quelqu'un qui a vu une copie d'une édition ancienne du
Talmoudh qui est rapportée dans ce Piroush lit : « lorsqu'un
homme voit un Gôy il dit שֶׁלֹּא
עָשָׂנִי גּוֹי »,
et il en est de même concernant une femme et un esclave. Cette
édition est correcte, car elle est logique ! On peut trouver la
même chose dans le Siddour de Rabbénou ´amrom ban Shôshonoh13.
Rabbénou
`avrohom s'oppose ici à la décision de son père concernant ces
trois bénédictions et dit qu'elle fut causée par une mauvaise
édition du Ri''ph. Ayant entendu parler d'une édition du Ri''ph
différente de celle que l'on connaît généralement et qui est plus
logique à ses yeux, Rabbénou `avrohom s'appuie sur elle pour
trancher différemment de son père. Ce n'est pas nouveau, puisque de
nombreux Ri`shônim avaient à leur disposition différentes versions
du Talmoudh et du Ri''ph.
L'édition
du Ri''ph que nous possédons aujourd'hui n'est pas fiable.
D'ailleurs, nous trouvons de nombreux Ri`shônim qui citent le Ri''ph
d'une manière différente de ce que nous lisons dans l'édition
actuelle !
Ce
qui est fascinant est que Rabbénou `avrohom nous montre que nous
n'avons pas une obligation de suivre quelque chose rapporté dans le
Talmoudh (ou même le Ramba''m) qui n'a pas de sens. Et sachant qu'il
existe différentes versions du Talmoudh, peut-être que les passages
illogiques peuvent être causées par des éditions qui ne sont pas
fiables et qu'ils ne se retrouvaient pas dans d'autres éditions. Et
effectivement, la version que cite Rabbénou `avrohom est beaucoup
plus logique ; si les bénédictions du matin ne se font que
lorsqu'on accomplit les actes pour lesquels elles furent instituées,
pourquoi cela serait-il différent avec les trois autres
bénédictions ? Cela a du sens d'affirmer que l'on ne devrait
les dire également que si l'on rencontre durant la journée un Gôy,
un esclave ou une femme. Le seul « problème » avec la
version différente que cite Rabbénou `avrohom est qu'elle ne colle
pas avec le texte du Talmoudh que nous possédons ; pour se
faire le texte du Talmoudh nécessiterait quelques lignes
supplémentaires. Mais peu importe, cela nous permet de voir à quel
point les textes du Talmoudh pouvaient être variés même en ces
temps-là, à peine quelques siècles après la finalisation du
Talmoudh. Remarquez d'ailleurs une autre variation de texte :
dans certaines éditions du Talmoudh, il est rapporté qu'il faudrait
dire « Shallô ´osoni Gôy » (et c'est généralement ce
que l'on retrouve dans l'écrasante majorité des versions
actuelles), tandis que dans d'autres éditions il est indiqué qu'il
faudrait plutôt dire « Sha´osoni Yisro`él. »
Ces
variations de textes talmudiques du temps des Ri`shônim ont un
impact réel sur la Halokhoh. Ce n'est pas la même chose de dire
qu'il faudrait faire ces bénédictions coûte que coûte chaque jour
ou de dire qu'il ne faudrait les faire qu'en voyant une femme, un Gôy
ou un esclave ! Mais bien que dans ce cas-ci il s'agisse d'un
détail sans grande portée, certaines variations d'autres passages
talmudiques peuvent avoir des ramifications plus sérieuses. Il n'est
donc pas étonnant de devoir tant dépendre des Ri`shônim qui, avant
toutes les autodafés catholiques contre le Talmoudh au Moyen-âge,
avaient accès à de nombreuses versions différentes et étaient
capables de les analyser de façon critique, alors que de nos jours
le fait de n'avoir qu'une version populaire du Talmoudh et d'autres
écrits empêche de faire ce travail critique ou de voir qu'il
pourrait y avoir des problèmes et une absence de logique avec
certains passages.
1Manohôth
43b
2Davorim
10:12
3Le
mot hébreu, מה
« Moh » (qu'est-ce que) est lu comme s'il
s'écrivait מאה
« Mé`oh », qui signifie « cent ».
C'est par ce jeu de mots que Ribbi Mé`ir déduit l'obligation de
faire cent bénédictions par jour !
4Où
au lieu de faire une ´amidhoh de 18 bénédictions, on fait une
´amidhoh de 7 bénédictions, ce qui réduit la possibilité
d'atteindre les 100 bénédictions ces jours-là
5Qui
nécessitent une bénédictions au préalable. Ainsi, il faisait
exprès de respirer des épices et de manger en-dehors des repas
pour s'obliger à faire des bénédictions ces jours-là et
atteindre le nombre de 100 bénédictions
6Qui
m'a fait Israélite
7C'est-à-dire,
il n'y a aucune raison de prononcer cette bénédiction, étant
donné que même un sot est lui aussi lié à l'accomplissement des
Miswôth.
8Puisque
au niveau de l'accomplissement des Miswôth, une femme et un
esclave sont sur le même pied d'égalité, étant donné qu'ils
sont exemptés des mêmes Miswôth. De ce fait, si une femme
et un esclave sont sur le même pied d'égalité au niveau des
Miswôth, si l'on a déjà dit « Shallô` ´osoni
`ishoh », pourquoi devrait-on alors aussi dire « Shallô`
´osoni ´avadh » ?
9Puisqu'elle
est soumise à plus de Miswôth qu'un esclave, une femme
Israélite a un statut supérieur à un esclave. Voilà pourquoi ce
n'est pas la même chose de dire « Shallô` ´osoni `ishoh »
et « Shallô` ´osoni ´avadh » ?
10Hilkôth
Taphilloh Ouvirakhath Kôhanim 7:6
11Consistant
à faire toutes les bénédictions du matin, même lorsqu'on
n'accomplit pas les actes pour lesquels elles furent instituées
12Il
parle ici de Rabbénou Yishoq `alphasi (le Ri''ph)
13Décédé
en 575 de l'E.C.
vendredi 11 mars 2016
Mayim `aharônim : une Halokhoh ou une superstition ?
ב״ה
Mayim
`aharônim : une Halokhoh ou une superstition ?
Cet
article peut être téléchargé ici.
Dans
son fameux ספר
המסגיק לעובדי השם « Séfar
Hammaspiq La´ôvadhé HaShem », un ouvrage plus que
passionnant, le fils du Ramba''m ז״ל,
Rabbénou `avrohom ז״ל,
traite, à un moment donné, des מַיִם
אַחֲרוֹנִים « Mayim
`aharônim » (le
lavage des mains qui suit un repas, avant la Birakhath Hammozôn).
Lorsqu'on demande la raison de cette Halokhoh, l'explication
traditionnelle consiste à dire que ce lavage des mains sert à
retirer le מֶלַח
סְדוֹמִית « Malah
Sadhômith » (sel sodomite) qui se serait accroché aux mains
pendant que l'on mangeait. Apparemment, le sel utilisé durant les
repas adhérait aux mains et pouvait être dangereux s'il finissait
dans l’œil. Par conséquent, un lavage des mains fut rescrit pour
éviter ce danger. C'est ainsi que le Ramba''m écrit ceci dans son
Mishnéh Tôroh1 :
Chaque
fois [que quelque chose contient] du sel, il est nécessaire de se
laver les mains par la suite, par crainte que s'il y avait du sel
sodomite ou du sel dont la nature est comparable à celle du sel
sodomite, et qu'on passait ses mains sur ses yeux on
s'aveuglerait. C'est à cause de cela qu'ils ont imposé de laver
les mains à la fin de tout repas ; à cause du sel. Dans un
camp [militaire], nous exemptons du lavage des mains au début
[d'un repas], parce qu'ils sont impliqués dans une guerre. Mais
nous obligeons [au lavage qui vient] après [le repas], à cause
du danger.
|
כָּל
אֶת הַמֶּלַח,
צָרִיךְ
נְטִילַת יָדַיִם בָּאַחֲרוֹנָה--שֶׁמֶּא
יֵשׁ בּוֹ מֶלַח סְדוֹמִית אוֹ מֶלַח
שֶׁטִּבְעוֹ כְּטֶבַע מֶלַח סְדוֹמִית,
וְיַעְבִיר
יָדָיו עַל עֵינָיו וְיִסָּמֵה;
וּמִפְּנֵי
זֶה חִיְּבוּ לִטֹּל יָדַיִם בְּסוֹף
כָּל סְעוֹדָה,
מִפְּנֵי
הַמֶּלַח.
וּבַמַּחֲנֶה,
פְּטוּרִין
מִנְּטִילַת יָדַיִם בַּתְּחִלָּה,
מִפְּנֵי
שְׁהֶן טְרוּדִין בַּמִּלְחָמָה;
וְחַיָּבִין
בָּאַחֲרוֹנָה,
מִפְּנֵי
הַסַּכָּנָה
|
Rabbénou
`avrohom écrit ceci :
Extérieurement,
la raison donnée par la Halokhoh pour les Mayim `aharônim
est afin de prévenir les risques causés par le sel sodomite.
D'après moi, la raison des Mayim `aharônim
et pourquoi les Rabbins les a rendu plus importantes que le lavage
qui précède le repas ainsi qu'ils l'ont dit, « Le lavage
qui précède le repas est une Miswoh ; le
lavage qui suit le repas est une obligation ; et dans un camp
[militaire], on n'a pas l'obligation de se laver avant un repas, mais
on est obligé de se laver après le repas », est que l'on
a besoin de se préparer à la Birakhath Hammozôn, qui est une
obligation toranique et une prière mineure. Ils ont invoqué le
danger comme raison exotérique et l'ont énoncée dans la Halokhoh
afin que les gens la prennent au sérieux et ne soient pas
négligents, les faisant craindre pour leur vie. Je rapporte une
chose similaire de mon père ע״ה
sur
les propos suivants des Rabbins « On ne doit pas manger en
paires, ni boire en paires »2.
Il a dit que la raison de cette interdiction est afin d'éloigner les
gens de la coutume consistant à faire des doublons dans le Béth
Hammiqdosh, les gens le faisant afin d'être [doublement] bénis. Par
conséquent, les Rabbins dirent cela et l'attachèrent à un danger
afin de les empêcher de le faire.
Rabbénou
`avrohom rapporte donc que son père, le Ramba''m, a expliqué la
fameuse interdiction des זוּגוֹת
« Zoughôth »
(paires), qui est traitée dans la Gamoro` de Pésahim. La
raison supposée telle qu'elle est donnée par la Gamoro` est que les
paires sont dangereuses, apparemment pour des raisons mystiques ou
spirituelles, et pourraient nuire à celui qui les consomme. Le
Ramba''m était dérangé par cette raison, car elle semble soutenir
la superstition. Par conséquent, il a expliqué qu'il existait une
superstition parmi les gens qui se rendaient au Béth Hammiqdosh, qui
cherchaient toujours à ne consommer un aliment que par multiples de
deux, comme un talisman, et les Rabbins avaient cette croyance en
horreur. Pour dissuader les gens de le faire, les Rabbins
prétendirent que cette pratique était dangereuse et nuisible,
sachant pertinemment bien que c'était là la seule chose qui pouvait
dissuader les masses de continuer à s'y adonner. Rabbénou `avrohom
poursuit :
Ce qui a attiré
mon attention et m'a fait réanalyser la raison des Mayim `aharônim
est la règle selon quoi « immédiatement après s'être lavé
[les mains], on doit faire la bénédiction » et l'interdiction
d'utiliser de l'eau chaude, parce que l'eau chaude ne nettoie pas. Si
la raison pour le lavage qui suit le repas était le danger, ces
restrictions n'auraient pas été appliquées. En outre, les Rabbins
donnèrent l'explication pour justifier d'utiliser une bonne huile
[sur les mains après le repas] : « parce qu'une
personne sale n'a pas la permission d'adorer [dans le Béth
Hammiqdosh] ».3
C'est une preuve pour ma thèse, pour celui qui comprend ! Ce
n'est pas juste une allusion. Faîtes soigneusement attention, car
c'est un secret qui n'est compris que par les érudits !
Rabbénou
`avrohom argue que si la raison de l'obligation de se laver les mains
après un repas est afin d'éviter une situation dangereuse, pourquoi
est-ce qu'alors la Halokhoh interdit-elle explicitement de repousser
la bénédiction après s'être lavé les mains ? Le fait de
devoir faire la bénédiction immédiatement après le lavage des
mains indique que ce lavage est bien à des fins d'une Miswoh,
et non pas en raison d'un danger, car on ne fait jamais de
bénédiction pour un précepte rabbinique ayant été institué en
raison d'un danger ! Il renvoie ensuite à la Gamoro` qui exige
qu'une huile de qualité soit utilisée pour oindre les mains après
le repas, et explique cette exigence en comparant la Birakhath
Hammozôn au service dans le Béth Hammiqdosh. À l'évidence, les
Rabbins considéraient donc la Birakhath Hammozôn comme un
remplacement ou un processus similaire à celui qui se faisait dans
le Béth Hammiqdosh (d'ailleurs, ils ont enseigné qu'en l'absence du
Béth Hammiqdosh, notre table sur laquelle nous mangeons remplace
l'autel des Qorbonôth). Tous les services réalisés dans le Béth
Hammiqdosh nécessitaient un lavage des mains, et de même en est-il
de la Birakhath Hammozôn. En fait, nous savons que les Rabbins
considéraient la prière comme équivalent aux Qorbonôth.4
De
nombreuses leçons peuvent être tirées de cette discussion. La
coutume générale qui prévaut de nos jours consiste à apporter
après le repas une petite coupe ou un plateau en argent avec une
toute petite coupe pour les Mayim `aharônim afin de laver
uniquement les bouts des doigts. Cette pratique est basée sur les
Tôsofôth5
ז״ל
qui
disent qu'à nos époques, il n'y a plus d'inquiétude à avoir
concernant le Malah Sadhômith, puisque ce genre de sel n'est
plus disponible. Par conséquent, les Mayim `aharônim ne sont
plus obligatoires. Les gens se lavent donc uniquement de façon
symbolique plutôt qu'afin de réaliser une Miswoh, d'où la
pratique consistant à ne se laver que les bouts des doigts et non la
main entière. Mais de l'autre côté, le Ramba''m ne fait pas cette
distinction, rendant obligatoires les Mayim `aharônim même à
nos époques, comme nous pouvons le voir au Chapitre 6 des Hilkôth
Barokhôth de son Mishnéh Tôroh (qui est d'ailleurs téléchargeable
sur le blog, dans la colonne de droite). Il est donc clair que les
Mayim `aharônim doivent se réaliser de la même façon que
l'on réaliserait le lavage des mains qui précède le repas,
c'est-à-dire en utilisant un Kali (récipient), en versant au moins
une Ravi´ith sir chaque main jusqu'aux poignets, etc. L'explication
donnée par Rabbénou `avrohom confirme cela.
En
outre, cela concorde également avec les raisons des autres lavages
des mains halakhiquement obligatoires. Nous nous lavons les mains
avant le repas en guise de préparation à la consommation du pain
(qui est un aliment d'une grande importance) ; nous nous lavons
les mains avant la prière (ou le Shama´) en guise de préparation à
cette activité spirituelle. De la même manière, concernant les
Mayim `aharônim qui précèdent la Birakhath Hammozôn,
Rabbénou `avrohom explique que la Birakhath Hammozôn est une Miswoh
biblique qui a le statut d'une prière mineure. Or, la prière a été
organisée de façon à ressembler au service qui se faisait dans le
Béth Hammiqdosh ; tout comme le lavage des mains était requis
avant de pouvoir apporter le Qorban Tomidh, le lavage des mains est
requis avant la prière. Cette idée est également mentionnée par
le Béth Yôséf, où il cite une Tashouvoh du Rashba''` ז״ל.
Le Ramba''m aussi fait ce parallèle dans les Hilkôth Tafilloh
Ouvirakhath Kôhanim 4:3. Rabbénou `avrohom l'applique donc
également au Mayim `aharônim, et conclut que c'est un lavage
nécessaire pour se préparer à la Birakhath Hammozôn (une mini
prière), tout comme on fait des ablutions pour se préparer à la
prière (les Shamônah ´asréh). Et notre pratique consiste
effectivement à faire les Mayim `aharônim de la même
manière que nous faisons le lavage des mains qui précède le repas,
et également avec la bénédiction de « ´al Natilath
Yodhoyim ». (Et c'est aussi ce que défend d'autres Ri`shônim,
comme par exemple le Ra`ava''d ז״ל.)
Ce
qui est particulièrement intéressant dans tout cela est le contexte
qu'utilise Rabbénou `avrohom pour introduire cette idée. Il
réfléchit et n'accepte pas la raison donnée par la Gamoro` pour
les Mayim `aharônim, car à première vue cela n'a aucun sens
pour lui. Il compare ensuite son objection à la raison du danger
donnée pour justifier les Mayim `aharônim à la raison
donnée pour l'interdiction des Zoughôth. Cela indique qu'il
considérait clairement l'explication du danger du sel sodomite comme
de la pure superstition plutôt qu'un fait scientifique. Il a donc
fouillé dans le Talmoudh et découvert que ce ne pouvait être la
raison réelle de cette Halokhoh. Nous avons ici une approche très
rationnelle, voire straussienne, de la Halokhoh, où une raison
ésotérique est combinée à une raison exotérique. Rabbénou
`avrohom ajoute que la raison pour laquelle la vraie raison fut
gardée secrète est parce que cela n'aurait pas garanti que le
peuple de cette époque-là y adhère. Les Rabbins ont alors donné
une raison qui pousserait les masses à suivre leur décret.
Cela
donne un excellent exemple de la manière dont le Talmoudh devrait
être étudié, de sorte que tout puisse concorder avec la raison.
1Hilkôth
Barokhôth 6:4
2Pésahim
109b ; c'est-à-dire que l'on ne doit pas manger ou boire
deux aliments ou un multiple de deux aliments
3Barokhôth
53b
4Voir
le Mishnéh Tôroh, Hilkôth Tafilloh Ouvirakhath Kôhanim 1:5,
ou l'article intitulé « Les
lois relatives à la prière – Première Partie »
5Sur
Barokhôth 53b
lundi 1 février 2016
« Faisons l'homme à notre image ! »
ב״ה
« Faisons
l'homme à notre image ! »
Cet article peut être téléchargé ici.
Dans
le tout premier chapitre de la Tôroh, nous tombons sur l'un des
passages les plus « obscurs », celui qui concerne la
création de l'homme. Il est dit ceci1 :
Et
`alôhim dit : « Faisons un homme à notre image,
suivant notre ressemblance, et qu'il domine le poisson de la mer,
l'oiseau du ciel, l'animal domestique, toute la terre et tout ce
qui se meut sur la terre ». Et `alôhim créa l'homme à
Son image ; c'est à l'image de `alôhim qu'Il le créa. Mâle
et femelle Il les créa.
|
וַיֹּאמֶר
אֱלֹהִים,
נַעֲשֶׂה
אָדָם בְּצַלְמֵנוּ כִּדְמוּתֵנוּ;
וְיִרְדּוּ
בִדְגַת הַיָּם וּבְעוֹף הַשָּׁמַיִם,
וּבַבְּהֵמָה
וּבְכָל-הָאָרֶץ,
וּבְכָל-הָרֶמֶשׂ,
הָרֹמֵשׂ
עַל-הָאָרֶץ.
וַיִּבְרָא
אֱלֹהִים אֶת-הָאָדָם
בְּצַלְמוֹ,
בְּצֶלֶם
אֱלֹהִים בָּרָא אֹתוֹ:
זָכָר
וּנְקֵבָה,
בָּרָא
אֹתָם
|
Dans
le tout premier chapitre de Son Môréh Navoukhim (Guide des Égarés),
le Ramba''m ז״ל
traite
naturellement de la question qui se pose à la lecture du passage
susmentionné, qui décrit l'homme comme ayant été créé dans le
צֶלֶם
« Salam »
(image) et la דְּמוּת
« Damouth »
(forme/ressemblance) de Dieu. Il note que cette description a amené
certains à croire faussement que le Judaïsme attribut des
propriétés physiques à Dieu :
צֶלֶם
« Salam »
et דְּמוּת
« Damouth ».
- Il y a eu des gens qui croyaient que Salam, dans la langue
hébraïque, désignait la figure d'une chose et ses linéaments, et
ceci a conduit à la pure corporification [de Dieu], parce qu'il est
dit : נַעֲשֶׂה
אָדָם בְּצַלְמֵנוּ כִּדְמוּתֵנוּ
« Faisons
un homme à notre image, suivant notre ressemblance ». Ils
croyaient donc que Dieu avait la forme d'un homme, c'est-à-dire sa
figure et ses linéaments, et il en résultait pour eux la
corporification pure qu'ils admettaient comme croyance, en pensant
que, s'ils s'écartaient de cette croyance, ils nieraient le texte
[de l’Écriture], ou même qu'ils nieraient l'existence de Dieu
s'Il n'était pas [pour eux] un corps ayant un visage et des mains
semblables aux leurs en figure et en linéaments.
Le
Ramba''m répond à cet argument en exposant le fait qu'il est né
d'une mauvaise interprétation des mots « Salam »
et « Damouth ». Il explique alors le mot « Salam »
de la manière suivante :
Quant
à צֶלֶם
« Salam »,
il s'applique à la forme naturelle, je veux dire à ce qui constitue
la substance de la chose, par quoi elle devient ce qu'elle est et qui
forme sa réalité, en tant qu'elle est tel être [déterminé]. Dans
l'homme ce quelque chose, c'est ce dont vient la compréhension
humaine, et c'est à cause de cette compréhension intellectuelle
qu'il a été dit de lui : בְּצֶלֶם
אֱלֹהִים בָּרָא אֹתוֹ
« c'est
à l'image (Salam)
de `alôhim qu'Il le créa ».
C'est pourquoi aussi on a dit [en parlant des impies]2 :
צַלְמָם
תִּבְזֶה « Tu
méprises leur image (Salmom) » ;
car le mépris atteint l'âme qui est la forme spécifique, et non
pas les figures des membres et leurs linéaments. Je dis de même que
la raison pour laquelle les idoles étaient appelées צְלָמִים
« Salomim »,
c'est que, ce qu'on cherchait dans elles était quelque chose qu'on
leur supposait ; mais ce n'était nullement pour leur figure et
leurs linéaments. Je dirai encore la même chose au sujet des
mots3 :
צַלְמֵי
טְחֹרֵיכֶם
« les
images de (Salmé)
vos Tahôrim » ;
car ce qu'on y cherchait, c'était le moyen d'écarter le mal des
Tahôrim,
et ce n'était nullement la figure des Tahôrim.
Si cependant il fallait absolument admettre que le nom de « Salam »,
appliqué aux images des Tahôrim
et aux idoles, se rapportât à la figure et aux linéaments, ce nom
serait un homonyme ou amphibologique4,
et s'appliquerait non seulement à la former spécifique, mais aussi
à la forme artificielle, ainsi qu'aux figures analogues des corps
physiques et à leurs linéaments. Par les mots : נַעֲשֶׂה
אָדָם בְּצַלְמֵנוּ
« Faisons
un homme à notre image ».
on aurait donc voulu parler de la forme spécifique, c'est-à-dire de
la compréhension intellectuelle, et non de la figure et des
linéaments.
En
d'autres mots, « Salam »
ne se réfère pas à l'apparence physique de l'entité décrite,
mais plutôt à son essence, la qualité première qui fait d'elle ce
qu'elle est. Puis, il explique le sens de « Damouth »
(ressemblance) :
Quant
à דְּמוּת
« Damouth »,
c'est un nom [dérivé] de דמה
(ressembler),
et qui indique également une ressemblance par rapport à quelque
idée ; car les paroles [du Psalmiste]5 :
דָּמִיתִי,
לִקְאַת
מִדְבָּר
« Je
ressemble (Domithi) au pélican du désert »,
ne signifient pas qu'il lui ressemblait par rapport aux ailes et au
plumage, mais que la tristesse de l'un ressemblait à la tristesse de
l'autre. De même [dans ce passage]6 :
כָּל-עֵץ,
בְּגַן-אֱלֹהִים--לֹא-דָמָה
אֵלָיו,
בְּיָפְיוֹ
« Aucun
arbre dans le jardin de Dieu ne lui ressemblait (Domoh) en beauté »,
il s'agit d'une ressemblance par rapport à l'idée de beauté ;
[de même dans ces autres passages] : חֲמַת-לָמוֹ,
כִּדְמוּת
חֲמַת-נָחָשׁ
« Ils
ont du poison semblable (Kidhamouth) au poison du serpent »7 ;
דִּמְיֹנוֹ--כְּאַרְיֵה,
יִכְסוֹף
לִטְרֹף
« Il
ressemble (Dimyônô) à un lion avide de proie »8.
Tous [ces passages indiquent] une ressemblance par rapport à une
certaine idée, et non par rapport à la figure et aux linéaments.
De même9 :
דְּמוּת
הַכִּסֵּא
« La
ressemblance (Damouth) du trône »
est une ressemblance par rapport à l'idée d'élévation et de
majesté, et non par rapport à la forme carrée, à l'épaisseur et
à la longueur des pieds, comme le croient les esprits pauvres, et il
en est de même de דְמוּת
הַחַיּוֹת
« la
ressemblance (Damouth) des animaux sauvages »10.
En
d'autres mots, en Hébreu, quelque chose qui « ressemble »
à quelque chose d'autre ne partage pas nécessairement toutes ses
propriétés ; il partage plutôt un ou plusieurs points de
ressemblance avec cette autre chose.
Le
concept de la création de l'homme dans le Salam
et la Damouth de Dieu ne soutient, par conséquent, pas la conclusion
selon quoi Dieu partage les caractéristiques physiques de l'homme.
Cela signifie plutôt que l'essence de l'homme ressemble à celle de
Dieu en ce qu'il a été doté de la capacité singulière de la
pensée et de l'intellect. C'est ainsi que le Ramba''m poursuit en
disant :
Or,
comme l'homme se distingue par quelque chose de très remarquable
qu'il y a en lui et qui n'est dans aucun des êtres au dessous de la
sphère de la lune, c'est-à-dire par la compréhension
intellectuelle, pour laquelle on n'emploie ni sens, ni mains, ni
bras, [celle-ci] a été comparée à la compréhension Divine, qui
ne se fait pas au moyen d'un instrument ; bien que la
ressemblance n'existe pas en réalité, mais seulement au premier
abord. Et pour cette chose, je veux dire à cause de l'intellect
Divin qui se joint à l'homme, il a été dit de celui-ci qu'il était
[fait] à l'image de Dieu et à Sa ressemblance, [et cela ne veut
dire] nullement que Dieu le Très-Haut soit un corps ayant une figure
quelconque.
Évidemment,
la sagesse de Dieu est fondamentalement différente de celle de
l'homme, mais le fait que l'homme (contrairement à toutes les autres
créatures) possède des capacités intellectuelles, et est
caractérisé par cette qualité, signifie qu'il est fait dans le
Salam
de Dieu, en ce qu'ils partagent la même caractéristique
déterminante. La caractéristique déterminante de Dieu est
précisément l'absence de propriétés physiques, le fait qu'Il soit
une intelligence pure, et la qualité qui distingue l'homme de toutes
les autres créatures est sa capacité à penser et comprendre.
Le
fils du Ramba''m, Rabbénou `avrohom ban HaRamba''m ז״ל,
dans son commentaire sur la Tôroh, utilise l'explication donnée
par son père de l'expression צֶלֶם
אֱלֹהִים
« Salam
`alôhim » (image de Dieu), et l'utilise pour nous faire
comprendre la forme plurielle par laquelle la Tôroh rapporte la
décision de Dieu de créer un homme : וַיֹּאמֶר
אֱלֹהִים,
נַעֲשֶׂה
אָדָם בְּצַלְמֵנוּ כִּדְמוּתֵנוּ
« Et
`alôhim dit : ''Faisons un homme à notre image, suivant notre
ressemblance'' ».
Rash''i, en citant l'enseignement de nos Sages de mémoire bénie11,
commente ce verset de la manière suivante : עַנְוְתָנוּתוֹ
שֶׁל הַקָּדוֹשׁ בָּרוּךְ הוּא לָמַדְנוּ
מִכָּאן לְפִי שֶׁהָאָדָם הוּא בִּדְמוּת
הַמַּלְאָכִים וְיִתְקַנְּאוּ בּוֹ
לְפִיכָךְ נִמְלָךְ בָּהֶם
« Nous
apprenons ici la modestie du Saint, béni soit-Il. L’homme étant à
l’image des anges, ceux-ci auraient pu être jaloux. C’est
pourquoi Il les a consultés ».C'est
évidemment un enseignement `aggadique, et nous avons déjà maintes
fois expliqué qu'une `aggodhoh ne doit pas être compris
littéralement. Ainsi, Rabbénou `avrohom ban HaRamba''m signale
qu'il va de soi que les anges n'ont pris aucune part, ni joué le
moindre rôle, dans la création de l'homme. Plutôt, les Sages
veulent dire, par cet enseignement imagé, que l' « image »
Divine dans laquelle l'homme fut créé tire ses origines du même
domaine spirituel et incorporel dans lequel les anges furent créés
aussi. Concernant les anges, le Ramba''m écrit12 :
« Les
anges sont de même incorporels ; ce sont des intelligences sans
matière, mais ils sont néanmoins des êtres créés, et Dieu les a
créés... ».
À l'inverse de l'homme, qui est le produit d'une combinaison entre
la matière et l'intelligence, les anges sont de la pure
intelligence, sans matière. Lorsque Dieu a déclaré, נַעֲשֶׂה
אָדָם
« Faisons
l'homme »,
Il Se référait au fait que la caractéristique déterminante et
unique de l'homme tirera ses origines de la même source que celle
des anges, c'est-à-dire que l'être humain ressemblera aux anges en
possédant l'intelligence. Bien que l'être physique de l'homme tire
son origine de la terre, de la même source que les animaux, sa
caractéristique déterminante, à savoir, sa capacité
intellectuelle, découle du domaine céleste spirituel, du domaine
même à partir duquel les anges furent créés.
1Baré`shith
1:26-27
2Tahillim
73:20
31
Shamou`él 6:5
4Puisqu'il
existe un autre mot en Hébreu pour désigner littéralement la
forme ou l'image d'une chose, à savoir, תוֹאַר
« Tô`ar »
5Tahillim
102:7
6Yahazqé`l
31:8
7Tahillim
58:5
8Ibid.,
17:12
9Yahazqé`l
1:26
10Ibid.,
1:15
11Talmoudh,
Sanhédhrin 38b ; Midhrosh, Baré`shith Rabboh 8:7
12Môréh
Navoukhim, Volume 1, Chapitre 49
Inscription à :
Articles (Atom)