mercredi 29 juillet 2015

Les rabbins et pseudo « Gadhôlim » d'aujourd'hui

ב״ה

Que dire des rabbins et pseudo « Gadhôlim » d'aujourd'hui ?


Cet article peut être téléchargé ici.

À toute première page de son Mishnéh Tôroh (voir ici), le Ramba''m זצ״ל énumère les quarante générations successives, de Rov `Ashi ז״ל jusqu'à Môshah Rabbénou ע״ה, qui ont reçu la Tôroh, chaque Sage du Sage de la génération précédente. Il n'y avait aucune interruption dans la chaîne de transmission. Cette Tôroh, identique à celle que Môshah Rabbénou reçut, était disséminée parmi la populace et enseignée publiquement. Les noms de ceux qui ont compilé la Mishnoh, le Talmoudh et les Midhroshim sont également cités par le Ramba''m.

Les Ri`shônim, dont le Ramba''m est l'un des plus grands, n'avaient également aucune dispute concernant l'authenticité de la Tôroh qu'ils avaient reçue. En outre, HaShem ית׳ Lui-même a fait la promesse que la Tôroh ne sera jamais perdue au sein de notre peuple, comme il est écrit1 : ואני, זאת בריתי אותם אמר יהוה--רוחי אשר עליך, ודברי אשר-שמתי בפיך: לא-ימושו מפיך ומפי זרעך ומפי זרע זרעך, אמר יהוה, מעתה, ועד-עולם « Quant à Moi, voici Mon alliance avec eux, dit `Adhônoy : Mon esprit qui est sur toi, et Mes paroles que J'ai mises dans ta bouche, ne s'éloigneront pas de ta bouche, ni de celle de ta descendance, ni de celle des descendants de ta descendance, dit `Adhônoy, d'à présent et jusqu'à l'éternité ».

Par contre, concernant les rabbins d'aujourd'hui, la Samikhoh (ordination rabbinique) ou l'acceptation de quelqu'un comme rabbin par les masses, ne valide en aucun cas ses positions comme reflétant les positions authentiques de la Tôroh. Beaucoup de ces rabbins tiennent des positions illogiques et incompréhensibles, voire même en totale contradiction avec la Tôroh, HaZa''l et les Ri`shônim. Or, ce qui est contraire à la raison, à la Tôroh, à HaZa''l et aux Ri`shônim ne peut faire partie de la Tôroh. La Tôroh est synonyme de « vérité ». Si quelqu'un dit quelque chose qui contredit la raison et la Tôroh, il est dans l'erreur, qu'il soit rabbin ou pas ! Mais son erreur ne remet en aucun cas en question le fait que la Tôroh que nous possédons aujourd'hui est celle de Môshah Rabbénou.

Est-ce possible que nos Sages et les Ri`shônim aient pu commettre des erreurs comme celles commises par les rabbins d'aujourd'hui ? Oui, car tout le monde peut se tromper ! Mais la différence est que leurs erreurs auraient été facilement détectées et corrigées, étant donné que tout était enseigné publiquement. Aucune de leurs erreurs n'aurait pu échapper à la minutie de tant d'esprits bien instruits. C'est ainsi qu'un traité du Talmoudh (le traité Hôroyôth) est intégralement consacré aux erreurs commises par des membres du Sanhédhrin au niveau halakhique et comment on corrigeait ces erreurs. De même, le Ramba''m a corrigé son Mishnéh Tôroh à de très nombreuses reprises lorsqu'on lui faisait remarquer par ses critiques les erreurs de jugement qu'il avait commises. Chaque fois qu'un rabbin de la période des Ri`shônim publiait un ouvrage halakhique ou des commentaires sur le Talmoudh, automatiquement son livre était scruté par les rabbins de la génération, qui publiaient à leur tour leurs remarques sur ces livres, là où l'auteur s'était trompé, etc., et les rabbins entretenaient entre eux des correspondances pour faire part de leurs remarques, demander des éclaircissements, etc. Mais aujourd'hui, personne n'arrive à la cheville de ces Sages et Ri`shônim dont les jours et les nuits étaient consacrés à l'étude, et non à amasser des fortunes ou atteindre les sommets de la popularité. Aujourd'hui, on nous raconte que les rabbins sont infaillibles, ; et que tout ce qu'ils disent est forcément correct. Par conséquent, on ne prend plus la peine de vérifier la moindre de leurs paroles, et le faire est vu comme de l'hérésie. Aujourd'hui, la mentalité juive est frappée d'un cancer très grave ; on nous dit que « La réputation et le nombre de fidèles qui suivent Untel font qu'il a raison ». Pire encore, de nombreux enseignants et éducateurs d'aujourd'hui se font enseigner par une génération précédente dont les idées sont fausses et déviantes. C'est ainsi qu'une nouvelle génération d'enseignements se lève et prolifère les faussetés dont ils ont héritées.

Aujourd'hui, si un « rabbin » dit quelque chose, il est accepté à l'aveuglette, alors que dans le Talmoudh (Houllin 124a) il est enseigné que personne n'est infaillible. Même Shalômôh Hammalakh ע״ה, qui était pourtant l'homme le plus sage que la terre ait connu, a commis des erreurs ! En fait, même la raison exige que l'on croit qu'aucun homme n'est infaillible car seul HaShem est parfait ! Ce qui se passe c'est que lorsque suffisamment de gens suivent l'erreur du rabbin « infaillible », d'autres finissent par croire que cette nouvelle masse de Juifs ignorants et égarés est la preuve qu'il faut adopter ces positions-là et non pas une autre. Ce cycle continue, et un nombre de gens chaque fois plus grand accepte ces fausses idées.

Mais Boroukh HaShem, nous avons les écrits de Môshah Rabbénou, des Prophètes, de HaZa''l et des Ri`shônim. HaShem a préservé Sa promesse selon quoi la Tôroh ne sera jamais perdue aussi de notre peuple. C'est juste que les enseignants d'aujourd'hui n'étudient pas la Tôroh, mais répètent simplement, comme des perroquets écervelés, les enseignements de leurs enseignants ! Ce n'est pas la Tôroh qu'ils enseignent, mais les doctrines et idées de leurs maîtres.

Nous avons le bonheur d'avoir un Ramba''m, qui nous a enseigné comment déterminer avec certitude qu'un certain concept a du sens et est valable. Nous avons le bonheur d'avoir un Rabbi Bahayé `Ibn Paqoudho` זצ״ל, qui nous a enseigné à ne pas même accepter un rabbin sur la seule base de son aura, de sa popularité, de son autorité, car celui qui fait cela en arrivera à pécher contre HaShem. En effet, celui qui suit un rabbin même quand ce dernier lui dit des choses contraires à la Tôroh et la Halokhoh de HaZa''l, pèche contre HaShem, car il méprise HaShem pour des doctrines de mains d'hommes ! Nous avons les capacités et tout ce qu'il faut pour vérifier, dans la Tôroh, le Talmoudh et les écrits des Ri`shônim, si tel ou tel rabbin a raison. Être paresseux et s'appuyer sur n'importe qui est un péché contre HaShem. Nous avons le bonheur d'avoir un Shalômôh Hammalakh et un Rabbi `Avrohom ban HaRamba''m זצ״ל, qui nous ont enseigné que les Sages parlent en métaphores. Ces leçons nous permettent de ne pas tomber dans le piège de prendre au sens littéral les Midhroshim du Talmoudh et du Midhrosh. (Voir ici et ici.) Nous avons le bonheur d'avoir un `Ibn ´Azro` זצ״ל, qui nous a enseigné que la Tôroh interdit ce qui est faux, et non ce qui est vrai, indépendamment du nombre de gens qui acceptent la fausseté. Par conséquent, toutes les superstitions et amulettes des Harédhim et Kabbalistes sont des mensonges. Les bracelets rouges, la vérification des Mazouzôth quand il y a un malheur, cuire des Hallôth en forme de clefs, porter une Hamsa pour se protéger du « mauvais œil » (voir ici, ce qu'est réellement le « Mauvais Œil »), ou encore réciter des Tahillim pour obtenir une guérison (voir ici), toutes ces choses sont stupides. Certaines de ces choses sont même explicitement condamnées dans le Shoulhon ´Oroukh (que la majorité des Juifs prétendent hypocritement suivre, alors que c'est faux, puisque lorsque le Shoulhon ´Oroukh interdit ce qu'ils veulent permettre, ils se basent sur des sources qui contredisent le Shoulhon ´Oroukh). Mais tous ceux qui disent, avec arrogance, que le `Ibn ´Azro` et le Ramba''m étaient des opinions minoritaires, ont non seulement tort mais dévoilent en plus au grand jour leur incapacité à réfléchir, car il serait ridicule de dire que les 1,5 milliards de Chrétiens ou 1 milliards d'Hindous, qui servent des idoles aujourd'hui, ont raison et que la minorité de Juifs attachés à la Tôroh a tort !

Il nous a tous été accordé de l'intelligence, car HaShem désire que chacun d'entre nous fasse usage de cette faculté, et non pas que nous soyons les singes ou perroquets des autres. C'est notre outil de travail. C'est la volonté d'HaShem et Sa méthode pour nous permettre de déterminer ce qui est vrai et ce qui est faux, pour toutes les génération. C'est la seule méthode que vous pouvez, et devez utiliser.


1Yasha´yohou 59:21

mardi 21 juillet 2015

La pratique consistant à écrire « B''H » ou « BS''D »

בס״ד

La pratique consistant à écrire « B''H » ou « BS''D »


Cet article peut être téléchargé ici.

Les lettres ב״ה « B''H » et בס״ד « BS''D » sont très populaires, apparaissant sur l'entête de n'importe quoi, de courriers aux sites Internet en passant par les journaux et les e-mails. On peut même les retrouver sur des cartes de visite de plombiers Juifs. Sur pratiquement tous les documents écrits d'aujourd'hui, nous pouvons retrouver ces lettres en guise d'en-tête. Ce qui est frappant que que, parmi les Pôsqim majeurs, il n'existe aucune source à cette pratique. Pas un passage dans le Mishnéh Tôroh, le Shoulhon ´Oroukh, ou encore le Mishnoh Barouroh... Et pourtant, c'est considéré être une norme dans de nombreux milieux religieux. Y a-t-il une base à ce Minhogh ?

Les Responsas contemporaines renvoient toujours à des sources relativement récentes pour expliquer cette pratique. Or, le point de départ pour répondre à notre question est le Talmoudh, dans lequel nous lisons ceci1 :

Le trois Tishri, la mention [du nom de Dieu] sur les contrats fut abolie2, car le gouvernement Grec3 avait décrété que le nom des Cieux ne devait plus être mentionné par leurs bouches4, et lorsque le gouvernement Hasmonéen se renforça et les vainquit, ils promulguèrent qu'ils devaient mentionner le nom des Cieux même sur les contrats, et ils avaient ainsi l'habitude d'écrire : « En l'an unetelle de Yôhonon, Kôhén Godhôl, au Dieu Très-Haut ». Mais lorsque les Sages en entendirent parler, ils dirent : « Demain, cet homme paiera sa dette et le contrat sera jeté dans un gros tas de fumier ! », et ils les firent cesser [cette pratique] et firent de ce jour un jour de fête.
בתשרי בטילת אדכרתא מן שטרייא שגזרה מלכות יון <גזרה> {שמד} שלא להזכיר שם שמים על פיהם וכשגברה מלכות חשמונאי ונצחום התקינו שיהו מזכירין שם שמים אפילו בשטרות וכך היו כותבים בשנת כך וכך ליוחנן כהן גדול לאל עליון וכששמעו חכמים בדבר אמרו למחר זה פורע את חובו ונמצא שטר מוטל באשפה וביטלום ואותו היום עשאוהו יו"ט

Les Syro-Grecs, parmi les nombreux décrets qu'ils imposèrent aux Israélites, avaient interdit la mention du nom de Dieu. C'est pourquoi les Hasmonéens, après leur victoire, décidèrent d'aller jusqu'à l'autre extrême : ils décrétèrent qu'une mention de Dieu devait se retrouver sous quelque forme que ce soit sur tous les documents, peu importe que le contenu n'avait aucun rapport avec un sujet de Tôroh. Nos Sages de mémoire bénie exprimèrent une inquiétude évidente face à cette pratique, à savoir que les gens se mettent à écrire le nom de Dieu sur, par exemple, un contrat d'achat ou de vente. Une fois que l'achat aurait été achevé, et qu'il n'y aurait plus aucun besoin du document, il finirait par être jeté dans les ordures. Par conséquent, ils mirent fin à cette pratique. La date à laquelle ce Minhogh fut abolie par nos Sages de mémoire bénie est le 3 Tishri, qui est de nos jours la date du Jeûne de Gédhalyoh. (Dans les temps Mishnaïques, étant donné que le Temple existait, le 3 Tishri n'était pas célébré comme un jour de jeûne, car les quatre jeûnes mentionnés dans le TaNaK''h à la suite de la destruction du Premier Temple n'étaient pas en vigueur tout le temps de l'existence du Deuxième Temple.) Mais pourquoi avoir fait de ce jour un jour de fête ? Rash''i זצ״ל explique que cette pratique fut très rapidement adoptée par l'ensemble du peuple et nos Sages de mémoire bénie avaient peu d'espoir de parvenir à l'abolir. Dans un certain sens, le fait qu'ils parvinrent à la faire abolir avec le consentement du peuple fut quelque peu miraculeux. C'est pourquoi ils instituèrent un Yôm Tôv à cette date. (La Maghillath Ta´anith nous parle d'une très longue liste de fête qui étaient célébrées dans les temps mishnaïques et talmudiques, mais qui ne le sont plus aujourd'hui.)

Nos Sages ont donc interdit cette pratique consistant à écrire le nom de Dieu même sur des contrats. (Cela pourrait expliquer pourquoi ceux qui traitent du sujet ne mentionnent que des sources relativement récentes ; la pratique est si répandue qu'il est préférable de ne pas dire que nos Sages l'ont interdite dans le Talmoudh.) C'est pourquoi il n'y a aucune mention à ce Minhogh dans le Mishnéh Tôroh, le Shoulhon ´Oroukh, ou encore le Mishnoh Barouroh.

Tentons à présent de comprendre l'erreur des Syro-Grecs, ainsi que celle des Hasmonéens, car cela nous permettra de comprendre du même coup les excès que l'on constate à notre époque concernant cette pratique d'écrire « B''H » ou « BS''D » sur l'entête de tous les documents, peu importe que leur contenu ne serait pas religieux.

Quel était l'objectif recherché par les Syro-Grecs en interdisant aux Israélites toute mention du nom de Dieu ? Dans toute religion, la divinité qui est adorée et la religion elle-même sont intrinsèquement liées l'une l'autre. La divinité existe pour la religion, et la religion (ainsi que ses adhérents) existe pour servir la volonté de la divinité. L'objectif des Syro-Grecs était de briser ce lien, de « tuer » la Divinité des Israélites en interdisant toute mention de cette Divinité. En rendant illégale la seule mention de Son nom, la cassure entre les deux serait entière, les rapprochant ainsi de leur objectif de destruction du Judaïsme.

Les Hasmonéens, après avoir assuré leur victoire militaire sur les Syro-Grecs, décidèrent de démontrer un défaut significatif dans le raisonnement des Syro-Grecs et de la plupart des autres nations. Dans les autres religions, la divinité est, dans un certain sens, limitée par la religion elle-même. Mais HaShem ית׳ est qualitativement différent à cet égard. Il existe en-dehors de la religion, car Il est le Créateur de l'univers. Peu importe que le peuple d'Israël ait existé ou pas, cela n'aurait eu aucun effet sur HaShem ; Il est omniscient, omnipotent et omniprésent. Les Hasmonéens voulurent démontrer cela par le fait d'inclure le nom de Dieu dans tous les domaines extra-religieux. Désormais, chaque document contiendrait une référence à HaShem, montrant par-là qu'Il ne devait pas être considéré comme étant intrinsèquement lié au peuple d'Israël, mais qu'Il transcendait non seulement la religion mais également tout l'univers.

Bien que cette idée des Hasmonéens soit philosophiquement valable et appropriée, elle est également dangereuse, comme cela nous est démontré par la décision prise par HaZa''l de mettre fin à ce Minhogh. Le problème n'était pas seulement la possibilité pratique que les gens finissent par jeter le document à la suite d'un oubli que le nom de Dieu s'y trouvait ou parce que le document n'avait plus d'utilité ; tout cela, c'est évident et les gens l'auraient compris sans l'avis de HaZa''l. En fait, l'inquiétude principale de HaZa''l était le changement de perception des différents noms et descriptions de Dieu, car à force de les écrire partout et pour tout et n'importe quoi, l'importance des noms et descriptions de Dieu finirait par être minimisée, au point que les gens n'en arrivent à se débarrasser des documents sur lesquels se trouvent les noms et descriptions de Dieu. Quand on se réfère à HaShem comme étant « le Dieu Très-Haut », nous ne Lui offrons pas seulement une louange. À l'intérieur de cette description se retrouve une idée, un concept, concernant HaShem, une plus grande perception de Lui. On pourrait en dire de même sur n'importe quelle autre sorte de description. Chacune sert de véhicule menant à une idée spécifique, toutes liées à la connaissance d'HaShem. Marquer le nom de Dieu sur tout document aurait pour effet d'amener le nom de Dieu à devenir mondain, transgressant ainsi l'interdiction biblique de mentionner Son nom en vain. Après un certain point, mentionner Son nom ne sera plus une porte vers une plus grande connaissance de Dieu. Au contraire, cela deviendra une chose ordinaire. Et une fois qu'on en arrive à ce stade, la personne finira par le jeter. Elle ne fera plus la distinction entre l'importance et la sainteté du nom de Dieu et la non importance du document sur lequel elle a inscrit le nom de Dieu ! Par conséquent, il était impératif pour HaZa''l de mettre fin à cette pratique.

Ainsi, si nous nous arrêtions là, nous pourrions conclure que toute mention de Dieu sur un document profane, que ce soit sur une carte de visite ou à l'entête d'un e-mail, doit être évité. En effet, tout ce que nous avons vu plus haut interdit clairement la mention d'HaShem sur des documents profanes. Néanmoins, la pratique actuelle est une tentative de « contourner le problème » soulevé par HaZa''l. HaZa''l ont interdit toute mention des noms de Dieu sur les documents profanes. Afin de respecter cette interdiction, tout en honorant le décret des Hasmonéens (que HaZa''l ont pourtant annulé), certains Juifs ont d'abord développé le Minhogh d'écrire ב״ה « B''H », qui est l'acronyme de ברוך השם « Boroukh HaShem » (béni soit HaShem) ou בעזרת השם « Ba´azrath HaShem » (avec l'aide d'HaShem). Ainsi, ils font mention d'HaShem sur des documents profanes conformément au décret des Hasmonéens, mais sans pour autant mentionner l'un des noms de Dieu, conformément à l'interdiction des Sages. Il existe un grand débat quant à savoir quand est-ce que ce Minhogh a commencé et qui y adhérait. Par exemple, il semblerait que les rabbins de l'école de Brisq ou encore le Hatho''m Sôfér זצ״ל n'écrivaient jamais « B''H », ni quoi que ce soit en fait, à l'entête de leurs documents. De l'autre côté, le Hiddoushé HaRi''m (Rabbi Yishoq Mé`ir Alter, 1798-1866. Il fut le premier Gourrer Rebbe) et le Safath `Amath (Rabbi Yahoudhoh `Aryéh Leib Alter, 1847-1905. Il fut le deuxième Gourrer Rebbe) écrivaient tous les deux « B''H » en entête de leurs documents.5 Le débat concernant qui écrivait et qui n'écrivait pas « B''H » n'a rien à voir avec une compétition, mais sert à illustrer le fait que ce Minhogh n'était pas, et n'est toujours pas, universellement accepté, car il n'est basé sur aucune Halokhoh de HaZa''l.

Ce qui est encore plus intéressant est que ce Minhogh, qui n'est en rien une Halokhoh, donna naissance à une Houmroh discutable. Dans la Responsa citée plus haut (note de bas de page 5), le Basél Hokhmoh discute du « problème » potentiel qu'il y aurait avec le « H » de « B''H ». Le Radhba''z (Rabbi Dowidh ban Shalômôh `Ibn `Abi Zimro´, 1479-1573) explique que si quelqu'un écrit une lettre d'un nom de Dieu avec l'intention d'écrire l'entièreté du nom de Dieu, il est alors interdit d'effacer cette lettre. Par exemple, écrire le `Alaf du nom אלהים « `Alôhim », puis s'arrêter sans écrire le reste des lettres de ce nom de Dieu aura pour conséquence que bien qu'on ait écrit qu'une seule lettre et non le nom en entier, on ne pourra plus effacer ce `Alaf. C'est sur la base de cette décision du Radhba''z qu'une question fut soulevée lorsque se développa la pratique consistant à écrire « B''H » en entête des documents profanes : y avait-il un problème à écrire le « H » ? La stupidité dans cette question est que la lettre « H » signifie « HaShem », qui n'est pas l'un des noms de Dieu mentionnés dans la Tôroh. (« HaShem » est une circonvolution servant simplement à ne pas dire ou écrire « YHWH ». Ce n'est donc pas un des noms sacrés de Dieu et il n'est pas mentionné dans la Tôroh.) Par conséquent, il n'y a aucune raison pour laquelle ce serait un problème. Et c'est le consensus général des Pôsqim. Mais dans cette Responsa susmentionnée, l'auteur écrit que celui qui choisit toutefois d'écrire « BS''D » (qui est l’acronyme de בסיעתא דשמיא « Basi´atho` Dishmayo` - avec l'aide des Cieux ») plutôt que « B''H » est digne de louange. On peut se demander pourquoi, puisque l'écrasante majorité des Pôsqim sont d'accord sur le fait que « HaShem » n'est pas un des noms de Dieu.

Deux Pôsqim contemporains se sont le plus penchés sur la pratique consistant à écrire « B''H » ou « BS''D » en entête de tout document, à savoir le Rov ´Ôvadhyoh Yôséf et HoRov Môshah Feinstein זצ״ל. (Ils sont cités, non en guise d'approbation, mais parce que ce sont les deux qui se sont le plus documentés sur le sujet.) Le premier a retracé ce Minhogh en citant les opinions de nombreux Pôsqim de diverses époques. Il remarque le problème que constitue le fait d'écrire le nom de Dieu sur un document profane, comme cela est mentionné dans le Talmoudh (il cite d'ailleurs la source talmudique que nous avons rapportée plus haut) ; par conséquent, il est d'avis qu'il n'y a pas de problème à écrire « B''H » (puisque HaShem n'est pas l'un des noms de Dieu). Il conclut sa Responsa en disant qu'il est non seulement permis d'écrire « B''H », mais qu'en plus c'est une très bonne pratique à suivre.6 On peut s'interroger sur les raisons pour lesquelles il soutient une telle position, étant donné qu'il n'offre aucune raison pouvant justifier d'écrire « B''H » sur des documents profanes (sans contenu religieux).

Quant au deuxième, il note le Minhogh qu'ont beaucoup de Juifs d'écrire « B''H » sur tous les documents et il questionne les raisons d'une telle pratique. Il se demande même comment des Juifs osent associer Dieu à un document profane qui contient des propos insensés ou quelque chose d'interdit, tel que du Loshôn Horo ! En effet, beaucoup de religieux, même lorsqu'ils publient un document remplit de Loshôn Horo` à l'égard de quelqu'un d'autre, écrivent « B''H » en entête du document calomniateur ! Ils ne réfléchissent même plus qu'ils écrivent « Boroukh HaShem » ou « Ba´azrath HaShem » sur un document dans lequel ils calomnient d'autres personnes ! D'autres encore écrivent « B''H » en entête d'e-mails alors qu'il n'y a aucun contenu religieux dans les e-mails qu'ils envoient (parfois même, ces e-mails contiennent des bêtises). Comment osons-nous donc associer HaShem à ces sottises, voire même à des transgressions ? C'est précisément pour cela que nos Sages ont interdit de mentionner les noms d'HaShem sur des documents profanes, et c'est ce qu'ils voulaient dire quand ils ont exprimé leur crainte que les gens finissent par jeter ces documents dans les tas de fumier : ils craignaient que cela devienne tellement banal de mentionner HaShem qu'on finirait par le fait même pour des stupidités, futilités et choses contraire à la Tôroh et la volonté d'HaShem. Quand on mentionne HaShem pour tout et n'importe quoi, on finit par faire de la mention d'HaShem une banalité ! Le Rov Feinstein conclut sa Responsa en insistant sur le fait que toutefois, HaShem n'étant ps l'un des noms de Dieu il n'y a aucune raison de s'inquiéter en écrivant « B''H », mais que si quelqu'un est gêné de l'écrire il n'y a alors aucun soucis à écrire « BS''D » à la place.7 Cependant, à l'évidence, le Rov Feinstein n'exprimait pas un soutien envers cette pratique, mais juste le fait que puisqu'il ne s'agit pas de noms de Dieu, il n'y avait pas de problème halakhique.

1Rô`sh Hashonoh 18b
2C'est une phrase tirée de la Maghillath Ta´anith que va à présent nous expliquer la Baraytho`
3Il s'agit plus précisément des Syro-Grecs, à l'époque des événements de Hanoukkoh
4C'est-à-dire, les Israélites n'avaient plus le droit de mentionner le nom de Dieu, verbalement ou par écrit
5Shou''th Basél Hokhmoh 4:105
6Yabia` `Ômér 3:76

7`Iggarôth Môshah, Yôréh Dé´oh 2:138

samedi 18 juillet 2015

Que sont les Midhroshim ?

ב״ה

Que sont les Midhroshim ?


Cet article peut être téléchargé ici.

Pratiquement chaque traité du Talmoudh contient des parties appelées אֲגָּדוֹת « `aggodhôth » ou מִדְרָשִׁים « Midhroshim. » Certains incluent diverses déclarations faites par nos Sages, ainsi que des histoires au sujet de différents individus et événements. D'autres contiennent des principes moraux. D'autres encore de l'exégèse biblique. Tous les Midhroshim ne furent pas consignés dans le Talmoudh. Certains furent rassemblés dans des livres à part entière composés par divers Sages, comme par exemple le Midhrosh Rabboh ou encore les Pirqé Darébbi `ali´azar.

Lorsqu'on examine de très près les divers Midhroshim, un problème commun se pose très souvent : ils sont insensés, illogiques et souvent complètement énigmatiques. Certains Midhroshim contiennent des passages qui, à première vue, semblent avoir du sens, mais une analyse plus poussée exposera certaines difficultés à les prendre littéralement. Par contre, d'autres Midhroshim n'ont aucun sens, même à première vue ; ils semblent être carrément absurdes et irrationnels. D'autres, enfin, contredisent totalement des versets de la Tôroh. Comment pouvons-nous comprendre ces Midhroshim ? Nos Sages voulaient-ils que l'on comprenne les Midhroshim littéralement, nous amenant ainsi à accepter des phrases fausses comme étant vraies ? Se pourrait-il que nos Sages avaient un tout autre but en compilant ces Midhroshim ? Nous nous devons de comprendre ce que nos Sages tentaient de nous communiquer à travers ces textes et quelle méthode employer lorsqu'on est confronté à eux.

Le Ramba''m ז״ל écrit dans son introduction au Môréh Navoukhim (Guide des Égarés) qu'il y a des passages dans le Midhrosh « qui, s'ils sont pris littéralement, semblent ne pas être cohérents avec la vérité et le bon sens, et doivent par conséquent être pris allégoriquement. » Il répète cela également dans son Commentaire sur la Mishnoh.1 Malheureusement, beaucoup de gens sont attirés par le sens littéral des Midhroshim. Ils se disent qu'étant donné que nos Sages les ont rédigés sous cette forme, c'est que nous devons les accepter sous cette forme. Ils ne comprennent pas qu'il y a une sagesse profonde cachée derrière les propos de nos Sages. La cause de cette erreur est l'ignorance, comme le dit le Ramba''m : « Nous avons, en outre, remarqué que lorsqu'un théologien peu instruit lit ces Midhroshim, il n'y verra aucune difficulté ; car ne possédant aucune connaissance de la propriété des choses, il ne rejettera pas des déclarations qui impliquent des impossibilités. » Quelqu'un qui accepte des impossibilités comme étant possibles ne peut posséder une vraie connaissance et une intelligence saine. En fait, c'est la raison principale pour laquelle les Harédhim aiment se tenir au sens littéral des Midhroshim : le niveau d'éducation parmi eux est tellement faible qu'ils ne savent pas que les histoires qu'ils lisent sont tout bonnement impossibles. Ils ne savent pas comment fonctionne le monde (ils ne s'intéressent d'ailleurs pas du tout à la « science », c'est-à-dire à l'observation des créations de Dieu) et quelles sont les propriétés des choses mentionnées dans ces Midhroshim. Par conséquent, ils ne détectent aucun problème dans ces Midhroshim et les prennent comme étant de vraies histoires, acceptant par-là des impossibilités comme étant possibles.

Le Ramba''m poursuit en traitant de la méthode que quelqu'un d'intelligent doit utiliser lorsqu'il fait face à un Midhrosh difficile : « Mais quand quelqu'un qui est à la fois religieux et bien instruit les lit, il ne peut échapper au dilemme suivant : soit il les prend littéralement, et remet alors en question les compétences de l'auteur et ses facultés intellectuelles, soit il consent à dire que les passages en question possèdent un certain sens caché, et il continuera alors à tenir l'auteur en grande estime qu'il comprenne ou ps l'allégorie. » Chaque individu a le droit d'accepter une seule de ces deux possibilités. Mais il serait irrationnel d'accepter les passages littéralement tout en tenant l'auteur en grande estime, car un individu ne peut être respecté lorsqu'il fait des déclarations qui ne sont pas cohérentes avec la vérité. Si un scientifique de renom proclamait publiquement que la terre est plate, il serait ridiculisé et on le considérerait comme un fou. Il perdrait tout l'honneur dont il jouissait jusque là. Il en est de même de nos Sages : si ce qu'ils ont enseigné n'a aucune cohérence avec la vérité mais qu'on accepte leurs propos littéralement, alors on ne peut garder le respect qu'on avait à leur égard.

Illustrons tout cela par un exemple classique. La Tôroh raconte le sauvetage de Môshah Rabbénou ע״ה, lorsqu'il était bébé et placé dans un panier sur le Nil, de la façon suivante2 :

La file de Pharaon descendit pour se baigner dans le fleuve, et ses jeunes filles3 marchaient au bord du fleuve ; elle vit un coffret au milieu des joncs, et envoya son esclave pour qu'elle le prenne.
וַתֵּרֶד בַּת-פַּרְעֹה לִרְחֹץ עַל-הַיְאֹר, וְנַעֲרֹתֶיהָ הֹלְכֹת עַל-יַד הַיְאֹר; וַתֵּרֶא אֶת-הַתֵּבָה בְּתוֹךְ הַסּוּף, וַתִּשְׁלַח אֶת-אֲמָתָהּ וַתִּקָּחֶהָ

Citant un très célèbre Midhrosh4, Rash''i ז״ל commente ainsi ce verset :

Mais ils5 ont interprété « `amothoh » (son esclave) [comme voulant dire] « Yodhoh » (sa main), car sa main s'est allongée démesurément de plusieurs `ammôth (coudées).
וְהֵם דָּרְשׁוּ אֶת אֲמָתָהּ אֶת יָדָהּ וְנִשְׁתַּרְבְּבָה אֲמָתָהּ אַמּוֹת הַרְבֵּה

Faisant un jeu de mots entre אֲמָתָהּ « `amothoh » (son esclave) et אֲמּוֹת « `ammôth » (coudées), nos Sages disent que la main de la fille de Pharaon s'est allongée de plusieurs coudées pour pouvoir se saisir du panier dans lequel se trouvait Môshah Rabbénou. Cela contredit clairement le sens simple (Pashat) de la Tôroh, qui dit que l'esclave de Pharaon est allée chercher le panier, et non pas que la fille de Pharaon est restée sur la berge et que son bras s'est étendue miraculeusement pour prendre le panier d'où elle était !

Un certain rabbin de la mouvance des Talmidhé HaRamba''m a souvent l'habitude de confronter ses nouveaux élèves en leur montrant les divergences et impossibilités entre le Pashat des versets de la Tôroh et les Midhroshim cités par Rash''i dans son commentaire sur la Tôroh. Et la réaction est toujours la même : les élèves le regardent bouche bée en raison de ce qu'ils entendent de sa part. Une fois, il a posé la question suivante à une jeune fille de 15 ans appelée Lé`oh : « Si tu pouvais remonter le temps et revenir au moment où la fille de Pharaon a vu bébé Môshah dans on panier, que verrais-tu ? Verrais-tu la fille de Pharaon demander à son esclave d'aller chercher le panier dans l'eau comme le dit la Tôroh, ou verrais-tu la main de la fille de Pharaon s'agrandir de 8 mètres comme Monsieur Fantastique et s'enrouler autour du panier comme le raconte le Midhrosh ? »

La jeune Lé`oh, en entendant cette question, s'est sentie comme si on venait de lui demander de choisir entre son père et sa mère au cours d'un procès de divorce. Elle savait que la Tôroh faisait autorité et était correcte et que le Midhrosh faisait autorité et était correct. C'est pourquoi, son esprit lui disait que les deux versions ne pouvaient pas être simultanément vraies ! Par conséquent, elle est restée paralysée et incapable de répondre.

Lé`oh avait été instruite dans une école religieuse privée. L'écrasante majorité des enfants qui suivent le système actuel des Yashivôth pour garçons et écoles privées pour filles croient que tous les Midhroshim font partie du cours littéral des événements rapportés dans la Tôroh.

Ce rabbin a alors expliqué à Lé`oh que le récit de la Tôroh est ce qui s'est vraiment produit dans l'espace et le temps tandis que le Midhrosh est là pour nous faire comprendre un message. Nos Sages ont parlé de la prétendue extension miraculeuse du bras de la fille de Pharaon pour nous transmettre l'idée suivante : l'énorme difficulté à laquelle elle était confrontée en voulant sauver un bébé Hébreu. Imaginez, si vous le pouvez, un Pharaon des temps modernes, ou peut-être un Staline יש״ו, voire même un Calife de l’État Islamique. Quelle serait la probabilité que la fille d'un homme si singulièrement mauvais défit les plans meurtriers de son père ? Ses actes exigeraient de sa part d'aller contre son éducation haineuse et les ordres de son père. Cela créerait sans aucun doute un conflit terrible dans le cœur de toute jeune femme, et encore plus dans celui d'une jeune femme jouissant d'une telle position dans l'Égypte antique. La Tôroh, qui se veut concise et va droit au but, ne prend pas la peine de mentionner ce conflit intérieur. Mais le Midhrosh le fait, et lorsqu'il est utilisé et compris correctement, il nous permet d'examiner les motivations de la fille de Pharaon. La métaphore de l'extension de son bras nous indique que c'est en fait HaShem Lui-même ית׳ qui a dirigé les actes de la fille de Pharaon. Les Sages nous enseignent que le fait d'avoir eu la force morale d'aller à l'encontre de l'éducation reçue par son père et ressentir des sentiments de compassion envers ce bébé Hébreu, alors que son père désirait tous les exterminer, est un miracle aussi grand que si HaShem avait agrandi son bras de huit mètres.

Lé`oh s'est sentie comme si un lourd fardeau venait d'être retiré de ses épaules. À 15 ans, on venait de lui apprendre pour la première fois le lien entre la Tôroh et les Midhroshim !

Tous les enseignants ne devraient enseigner un Midhrosh que s'ils aident leurs élèves à découvrir son message caché. Mais si eux-mêmes ne connaissent pas le message profond caché dans un certain Midhrosh ou qu'eux-mêmes croient littéralement dans l'histoire racontée par un certain Midhrosh, ils ne doivent pas du tout apprendre ce Midhrosh à leurs élèves, car ils font plus de tort qu'autre chose et éduquent des élèves qui croiront en des absurdités et des impossibilités ! En outre, cela apprend aux gens à accepter des récits qui contredisent ouvertement le Pashat de la Tôroh, ce qui est une aberration !

Prenons un autre exemple bien connu. Dans la Tôroh, nous lisons ceci6 :

`aharôn étendit sa main sur les eaux de l'Égypte, la grenouille monta et couvrit le pays d'Égypte.
וַיֵּט אַהֲרֹן אֶת-יָדוֹ, עַל מֵימֵי מִצְרָיִם; וַתַּעַל, הַצְּפַרְדֵּעַ, וַתְּכַס, אֶת-אֶרֶץ מִצְרָיִם

Rash''i, citant un Midhrosh rapporté dans le Talmoudh7, commente ce verset de la façon suivante :

Il y avait eu une seule grenouille. Ils l'avaient frappée et elle s'était alors transformée en une abondante multitude. Voilà pour le Midhrosh. Quant au sens simple, il exprime l'idée d'un singulier collectif venant désigner une multitude de grenouilles, comme dans : Kinnom [« la vermine », au singulier8), à savoir un fourmillement d'insectes. En français médiéval : « pedulier » (« une multitude de poux »). De même ici : « la grenouille », en français médiéval : « grenouillerie ».
צְפַרֵדַּע אַחַת הָיְתָה וְהָיוּ מַכִּין אוֹתָהּ וְהִיא מַתֶּזֶת נְחִילִים נְחִילִים זֶהוּ מִדְרָשׁוֹ. וּפְשׁוּטוֹ יֵשׁ לוֹמָר שֵׁרוּץ הַצְּפַרְדְּעִים קוֹרֵא לָשׁוֹן יְחִידוּת. וְכֵן וַתְּהִי הַכִּנָּם הָרְחִישָׁה פדוליר"א בּלע"ז וְאַף וַתַּעַל הַצְּפַרְדֵּעַ גּרינוליי"רא בּלע"ז

Le texte de la Tôroh utilise le singulier pour désigner les grenouilles. Évidemment, comme le fait remarquer Rash''i, le sens simple de notre verset est qu'en Loshôn Haqqôdhash et dans d'autres langues, un groupe entier ou des animaux d'une même espèce peuvent être désignés collectivement au singulier. Et c'est une chose que fait fréquemment la Tôroh. Ainsi, bien que la Tôroh parle d'une grenouille au singulier, elle désigne à l'évidence un groupe de grenouilles. Mais le Midhrosh saisit l'opportunité de l'emploie du mot « grenouille » au singulier pour enseigner qu'il n'y avait qu'une seule grenouille qui sortie du Nil. Et chaque fois que les Égyptiens frappaient cette grenouille, au lieu qu'elle soit écrasée sous les coups et meurt, elle se divisait en de nombreuses nouvelles grenouilles. Et c'est ainsi que les grenouilles se multiplièrent et couvrirent toute l’Égypte, car les Égyptiens continuaient de les frapper encore et encore, et chaque fois la grenouille qui se faisait frapper se multipliait en de nouvelles grenouilles. La plaie ne faisait donc qu'empirer. Évidemment, ce n'est pas ce qui s'est passé ! La leçon de ce Midhrosh est très simple et puissante : Quand les gens font face à des problèmes et tentent de les résoudre sans réfléchir (car comment se fait-il que les Égyptiens n'ont pas compris rapidement qu'à chaque fois qu'ils frappaient les grenouilles, elles se multipliaient ? C'est qu'ils agissaient par colère, sans plus réfléchir), avec entêtement et colère, comme l'ont fait les Égyptiens, au lieu de se demander ce qui a mal été et comment corriger le problème (les plaies avaient pour but d'amener les Égyptiens à se repentir et accepter la toute puissance d'HaShem, et que les dieux d’Égypte étaient fausses et impuissantes face à Lui), le problème ne peut qu'empirer. Plus les Égyptiens combattaient les grenouilles, plus les choses empiraient pour eux. C'est la leçon du Midhrosh, et nos Sages ne l'ont pas raconté pour qu'on le prenne au sens littéral !

L'approche du Ramba''m face aux Midhroshim n'est pas unique. En fait, c'est l'approche même de notre Masôroh (Tradition Orale). Des Ri`shônim tels que le Mé`iri ז״ל, le Ritva''`ז״ל, le Ramba''n ז״ל, ou encore le Rashba''` ז״ל, offraient des interprétations non littérales à de nombreux Midhroshim. (Voir par exemple l'article intitulé « Rivqoh avait-elle trois ans quand elle a épousé Yishoq ? », dans lequel nous avons montré que le Ramba''n, le `ibn ´azro` ז״ל et d'autres s'opposent catégoriquement à l'idée rapportée par Rash''i selon quoi Rivqoh `imménou ע״ה avait trois ans quand elle a épousé Yishoq `ovinou ע״ה, car c'est complètement absurde et incohérent par rapport au Pashat du récit rapporté par la Tôroh.) Les Midhroshim renferment des concepts profonds qui furent écrits au moyen de l'allégorie, et seuls des Talmidhé Hakhomim pourront comprendre leur signification. Rabbénou Yishoq `abbôhav ז״ל (fin du 14ème siècle) écrit dans son fameux מנורת המאור « Manôrath Hammé`ôr »9 : « Mais quelqu'un qui n'a pas la capacité de comprendre leur sens profond et pense qu'ils sont littérales, il n'existe rien de plus éloigné de l'intelligence et de la connaissance [qu'un tel homme.] » Le Ra`ava''d ז״ל (Rabbénou `avrohom ban Dowidh, 1125-1198), dans son commentaire sur le Mishnéh Tôroh du Ramba''m10, déclare que prendre littéralement les Midhroshim « fausse les principes de la foi. » C'est malheureux à dire, mais c'est le cas avec les enfants de notre génération. On leur a appris les Midhroshim comme de vraies histoires, et les conséquences sont désastreuses !

Il n'y a pas que les Ri`shônim qui adhéraient à cette approche. Les `aharônim aussi considéraient que les Midhroshim cachaient un sens profond et ne furent pas rapportés pour être pris littéralement. Le Go`ôn de Wilno` ז״ל (Rabbi `éliyohou ban Shalômôh Zalman, 1720-1797) analysa divers Midhroshim d'une manière non littérale dans un petit ouvrage intitulé « Un commentaire sur de nombreuses `aggodhôth ». Le Ramha''l ז״ל (Rabbi Môshah Hayim Louzzatô, 1707-1746), qui était un kabbaliste, traite de la nature des Midhroshim dans sa « Rédaction sur les `aggodhôth ». Il écrit ceci : « Ils (les Sages) leur demandaient de les écrire afin qu'ils ne soient pas perdus pour les générations futures, mais [ils le faisaient] sous une forme obscure ou par diverses énigmes. » Il précise qu'ils ne doivent donc pas être compris littéralement. Dans son « Commentaire sur les `aggodhôth », le Maharsha''` ז״ל (Rabbi Shamou`él `ali´azar `aydels, 1555-1631) écrit que les enseignements de nos Sages qui contiennent des histoires folles et des déclarations qui n'ont pas de sens doivent être expliqués comme des paraboles et des métaphores.

Prenons garde à n'instruire nos enfants qu'avec des vérités et en insistant sur le fait que les Midhroshim ne sont pas de vraies histoires. Mais si nous ne sommes pas capables de leur expliquer le sens profond des Midhroshim, abstenons-nous d'en faire mention !

1Péraq Halaq (Sanhédhrin Chapitre 10)
2Shamôth 2:5
3C'est-à-dire, ses servantes
4Talmoudh, Sôtoh 12b ; Midhrosh Shamôth Rabboh 1:23
5Les Sages
6Shamôth 8:2
7Sanhédhrin 67b
8Dans Shamôth 8:14
9Quatrième Nér, 3ème Partie, Chapitre 2

10Hilkôth Tashouvoh Chapitre 3

vendredi 17 juillet 2015

Arguments sans base

בס״ד

Arguments sans base


Cet article peut être téléchargé ici.

Ce qui suit est un vrai dialogue. Nous verrons par la suite les absurdités des réponses du répondeur.

  • 1. Questionneur : Existe-t-il une notion de « Gilgoul » ?
  • 2. Répondeur : Oui !
  • 3. Questionneur : Comment le savez-vous ?
  • 4. Répondeur : Le Zôhar en parle !
  • 5. Questionneur : Quelle est la traduction de « Gilgoul » ?
  • 6. Répondeur : Réincarnation.
  • 7. Questionneur : D'accord. Jetez un coup d’œil sur l'article suivant...
  • 8. Répondeur : Ah, je connais cette personne... Il dit que la notion de « Gilgoul » est fausse et méprise le Rov ´Ôvadhyoh Yôséf pour avoir dit que les Juifs tués durant la Seconde Guerre Mondiale étaient des Gilgoulim.
  • 9. Répondeur : Je n'ai pas visité ce site depuis de nombreuses années, je pense. Cette personne a des idées étranges sur le Judaïsme.
  • 10. Questionneur : Qu'est-ce qui vous permet de dire qu'il se trompe ?
  • 11. Répondeur : Parce qu'il n'est pas logique !
  • 12. Questionneur : Pourquoi pas ? Veuillez vous expliquer !
  • 13. Répondeur : Expliquer quoi ?
  • 14. Questionneur : En quoi est-il illogique ? Donnez-moi un exemple !
  • 15. Répondeur : Il dénigre le Rov ´Ôvadhyoh Yôséf pour avoir dit que les Juifs qui furent tués étaient des Gilgoulim, alors que c'est un point de vue tout à fait légitime !
  • 16. Répondeur : En plus, il n'a aucune source sur laquelle se baser !
  • 17. Questionneur : Il dit que le Rov Sa´adhyoh Go`ôn a qualifié d' « absurde » la notion de réincarnation.
  • 18. Répondeur : Oui. Bon, même si on concède cela, il y en a d'autres qui disent que ce n'est pas absurde. Donc pourquoi le Rov ´Ôvadhyoh Yôséf ne pourrait pas suivre les autres ?

La première erreur commise par le répondeur se trouve à la ligne 4. Il embrasse une opinion pour nulle autre raison qu'elle a été exprimée dans une source particulière, et non sur la base d'une analyse de la vérité. Que ferait-il s'il trouvait une autre source soutenant l'opinion inverse ? Abandonnerait-il sa position actuelle ? Et s'il abandonne sa position actuelle simplement parce qu'il est tombé sur une source disant l'inverse de ce qu'il croyait, cela reflète-t-il un comportement raisonnable et faisant sens de sa part ? Certainement pas ! Il suit tout simplement le dirigeant et n'utilise pas du tout sa tête. S'il embrasse des idées sur la seule base qu'une certaine autorité les défend, il ne sera pas capable de choisir une position dans chaque domaine de la vie où des avis divergents existent. Il sera coincé, car de nombreuses opinions existent sur tel ou tel point.

Plus important encore, le répondeur ne s'aligne pas une opinion à cause de son contenu. Par conséquent, il n'est d'aucune utilité pour qui que ce soit, car soutenir une opinion uniquement n'est d'aucune aide pour qui que ce soit. Ce n'est que lorsqu'il y a un raisonnement que les propos de quelqu'un reflète sa connaissance. Mais si quelqu'un se contente de simplement imiter la position de quelqu'un d'autre, il atteste par-là sa totale ignorance de la raison. C'est une marionnette qui réagit en fonction des mouvements de ficelles du marionnettiste. Tout comme la marionnette ne sait pas pourquoi pas elle fait tel ou tel mouvement, le répondeur ne sait pas pourquoi il suit les autres. Tout comme une marionnette n'est pas applaudie pour ses mouvements, le répondeur ne peut rien mériter pour son imitation. Ses opinions ne sont pas les siennes, et il ne gagne rien en les embrassant. Le seul individu de mérite est celui qui parvient à des idées sur la base d'un raisonnement. Cet individu développe alors une conviction de ce qui est réel dans le monde. Le raisonnement est le seul outil avec lequel on apprend des idées réelles sur la nature du monde et la Tôroh. Au moyen de la raison, l'homme construit des faits sur des faits, découvrant chaque fois un peu plus de vérités solidement enracinées dans la réalité. Seul cet individu accomplit la Volonté Divine, car il fait usage de ce que Dieu lui a donné. Seul cet individu exprime le fait d'avoir été créé à l'image de Dieu, c'est-à-dire, en tant qu'être doté d'intelligence. Il n'y a que d'un tel individu que l'on peut dire qu'il « connaît » quelque chose.

Pour citer le Ramba''m זצ״ל :

Môréh Navoukhim, Livre 3, Chapitre 54
Nos sages disent en outre, que l'homme doit d'abord rendre compte de sa connaissance de la loi, puis de l'acquisition de la sagesse, et enfin des leçons déduites des conclusions logiques provenant la loi, à savoir, les leçons concernant ses actions. Ceci est également le bon ordre : nous devons d'abord apprendre les vérités par la tradition, après cela, on doit se faire enseigner comment les démontrer, et ensuite étudier les actions qui contribuent à améliorer les voies de l'homme.

L'idée que l'homme devra rendre des comptes au sujet de ces trois choses dans l'ordre décrit, est exprimée par nos Sages dans le passage suivant: « Quand l'homme se présente devant le Tribunal Céleste, on lui demande d'abord ceci : ''As-tu fixé certains moments pour l'étude de la loi ? T'es-tu engagé dans l'acquisition de la sagesse ? As-tu déduis d'une chose une autre chose ?'' Cela prouve que nos Sages font une distinction entre la connaissance de la loi, d'une part, et la sagesse, de l'autre part, comme étant les moyens de démontrer les leçons enseignées dans la loi par un raisonnement correct.

On peut se demander ce que recherche quelqu'un qui réfléchit comme le répondeur, qui défend une opinion sans la moindre compréhension des raisons pour laquelle il la défend. Assez franchement, un tel individu est un menteur et ne le sait pas : il souhaite imprégner une autre personne de la notion selon laquelle cette opinion « A » est juste, mais il n'a, dans le même temps, aucune idée pourquoi cette opinion « A » est juste ! Néanmoins, il désire que les autres soient d'accord avec son point de vue. Cela démontre de l'instabilité et de la fausseté !

Le répondeur s'égare à nouveau à la ligne 8. Il fait appel à l'argument selon quoi on doit faire preuve de « respect » envers son rabbin et maître à penser. Cet argument est prouvé être fausse très simplement : si même un rabbin vous dit que Dieu est réellement deux êtres, et non un, vous pouvez respectueusement ne pas être d'accord avec lui. La raison et la Tôroh elle-même vous disent que ce rabbin a faux. Rien d'autre ne compte, si ce n'est la Tôroh et la raison. Son titre de rabbin et le nombre de ses disciples ne sont d’aucune importance. Seules la Tôroh et la raison doivent être respectées. C'est ainsi qu'il est dit dans la Tôroh1 : אחרי יהוה אלהיכם תלכו, ואתו תיראו; ואת-מצותיו תשמרו ובקלו תשמעו, ואתו תעבדו ובו תדבקון « C'est derrière `Adhônoy votre Dieu que vous marcherez, c'est Lui que vous craindrez, ce sont Ses commandements que vous observerez, c'est Sa voix que vous écouterez, c'est Lui que vous servirez, et c'est à Lui que vous serez attachés ».

Comme nous le voyons dans les lignes 11 et 15, le répondeur lui-même fait usage de mots tels que « logique » et « légitime », mais n'est pas lui-même capable de fournir le moindre argument intelligent. Balancer comme ça des mots avec un semblant d'argumentation rationnelle est souvent trompeur. Mais comme nous le voyons, il ne fait pas suivre cela d'explications.

À la ligne 16, le répondeur dit qu'avoir des « sources » est la méthode par laquelle arriver à la vérité. C'est là que se révèle son erreur principale. Le répondeur soutient l'opinion que simplement avoir une source suffit pour démontrer que quelque chose est correcte. Puisqu'il peut citer le Zôhar comme source pour soutenir la doctrine de la réincarnation, il pense que cela suffit pour en faire une doctrine valable. Cela signifie que chaque fois que quelqu'un dit quelque chose, ce qu'il dit doit être considéré comme étant vrai parce qu'à présent il a une source ? Le répondeur répondra évidemment que non, car il faut aussi que la source soit viable. Mais à cela nous pouvons simplement répondre « Qu'est-ce qui rend une source viable ? ». Il sera contraint de conclure que la Tôroh et la raison doivent être les seuls facteurs décisifs !

Puis, le répondeur se contredit. D'abord, le répondeur dit que des sources suffisent, mais lorsqu'on lui montre une source qui soutient une opinion différente de la sienne, il change son argumentation afin de défendre sa position. C'est là que nous voyons que la vraie intention du répondeur n'est PAS de répondre à la question mais défendre son point de vue et non parvenir à la vérité. Il s’accroche à n'importe quel autre argument qui lui permettra de sauver sa face pour ne pas devoir admettre son erreur. Si nous parvenons à démontre cela, nous pouvons automatiquement déduire les sentiments qui anime le répondeur : son besoin d'être accepté. Ce sentiment empêche de nombreuses personnes d'abandonner des idées prouvées comme étant fausses par la Tôroh, la raison et nos Sages, car leur désir d'acceptation surpasse leur recherche de la vérité. Mais si le répondeur réfléchissait un peu, par qui essaie-t-il d'être accepté ? Par d'autres personnes frappées de la même maladie ? Par d'autres personnes qui elles-mêmes suivent également le chef comme des moutons ? Mais qui est le chef ?

Dans la Tôroh, le vrai chef est HaShem ! Il a créé toute réalité que nous voyons. Il nous a offert le don de la raison afin que nous puissions étudier ces magnifiques idées. Il nous a fait don du guide le plus précieux de l'univers, Sa sainte Tôroh ! Nous allons contre Sa volonté et perdons notre unique chance de mener une vraie vie lorsque nous abandonnons Sa Tôroh et notre raison comme ça, préférant regarder derrière nos épaules pour voir ce que font et pensent les autres. Nos Sages de mémoire bénie ne se comportaient pas ainsi ! Ils débattaient intensément les uns avec les autres, comme nous devrions nous aussi le faire. Les noms des rabbins, l'envie d'être accepté, et un titre porté par quelqu'un... rien de tout cela ne doit être pris en compte lorsque nous étudions.

À la ligne 18, le répondeur réoriente l'échange vers un sujet n'ayant rien à voir, à savoir « Qui peut suivre qui ». Comme lui-même le dit, « Pourquoi le Rov ´Ôvadhyoh Yôséf ne pourrait pas suivre les autres » plutôt que le Rov Sa´adhyoh Go`ôn ? Mais en réalité, le questionneur demandait à la ligne 12 des explications argumentées pourquoi l'opinion du Rov Sa´adhyoh Go`ôn n'était pas logique. Le questionneur ne demandait pas « Qui devrais-je suivre ? », alors que le répondeur l'oriente sur le sujet de « Qui peut suivre qui ».

Oui, les gens ont besoin de sentir qu’ils suivent un dirigeant. Les premières années de sa jeunesse, un enfant n'a pas d'autre choix, étant donné qu'il n'a pas suffisamment de connaissance ou de capacités de raisonnement pour arriver par lui-même à certaines vérités. MAIS une fois qu'il a atteint la maturité intellectuelle, la Tôroh exige de sa part qu'il engage son propre cerveau et parvienne à ses propres conclusions. C'est pourquoi HaShem a doté CHACUN D'ENTRE NOUS d'une intelligence. Si singer ou imiter quelqu'un d'autre était le but de l'homme, l'intelligence n'aurait pas été accordée à l'être humain !


1Davorim 13:5
Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...