samedi 6 avril 2019

Réflexions sur la bonne et mauvaise éducation torahique – Partie I


בס״ד

Réflexions sur la bonne et mauvaise éducation torahique – Partie I



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Le peuple Juif est profondément attaché à la transmission de la Tôroh d'une génération à la suivante. Nous consacrons des moyens considérables afin de nous assurer que nos enfants et petits-enfants baignent dans la connaissance de la Tôroh et deviennent des Juifs pratiquants. Néanmoins, la communauté Juive orthodoxe présente un défaut aux conséquences catastrophiques : la façon dont les parents et écoles orthodoxes transmettent les paroles de HaZa''l aux enfants et élèves. À l'évidence, les enseignements de nos Sages sont d'une importance centrale ; il est donc malheureux que les paroles de HaZa''l soient enseignées de façon inappropriée. L'éducation religieuse devient alors de la mauvaise éducation.

Dans son introduction au « Péraq Hélaq », Ribbénou critiqua ceux qui suivaient une approche littérale et fondamentaliste des paroles de HaZa''l. Étant donné que les Sages étaient sages et raisonnables, leurs paroles étaient évidemment remplies de sagesse et de rationalité. Lorsque leurs déclarations semblent s'éloigner de la raison, nous devons les comprendre comme étant symboliques, homilétiques ou hyperboliques, et non pas littéralement vraies. Il serait absurde d'appeler à une acceptation littérale d'une déclaration faite dans une `aggodhoh ou dans un Midhrosh qui transgresse la raison ou qui a été démontrée plus tard comme étant factuellement incorrecte.

D'après Ribbénou, ceux qui insistent sur la littéralité de toutes les déclarations de HaZa''l rendent non seulement un mauvais service à nos Sages, mais pire encore ils corrompent notre foi. Voici, entre autres, les propos précis de Ribbénou dans l'introduction susmentionnée :

Concernant ce groupe de personnes à la connaissance appauvrie, on doit avoir pitié de leur folie ! D'après leur compréhension, ils honorent et exaltent nos Sages ; en fait ils les rabaissent à l'extrémité de la bassesse ! Ils ne comprennent même pas cela. Par les Cieux ! Ce groupe dissipe la gloire de la Tôroh et cache ses lumières derrière des nuages, plaçant la Tôroh de D.ieu à l'extrême opposé de son intention.

Ribbénou explique qu'exiger une acceptation des paroles de HaZa''l même lorsqu'elles sont ouvertement déraisonnables ou incorrectes, n'est pas une démonstration de loyauté envers les Sages, mais est plutôt un rabaissement grave de leur crédibilité intellectuelle. Des gens raisonnables en viendraient à ne pas prendre au sérieux les rabbins et perdraient confiance en leur autorité religieuse.

Ribbénou `avrohom ז״ל, le fils de Ribbénou, a ajouté que l'on ne doit pas accepter la vérité d'une déclaration simplement sur l'autorité de la personne qui l'a émise. Plutôt, nous devons utiliser notre raison pour déterminer sa validité. De plus, il est intellectuellement problématique d'accepter aveuglément les enseignements de nos Sages dans les domaines de la médecine et des sciences naturelles, étant donné qu'elles ne faisaient pas partie de leurs domaines d'expertise. Pour citer Ribbénou `avrohom1 :

Nous, et toute personne sage et intelligente, sommes obligés d'évaluer chaque idée et chaque déclaration, afin de trouver le moyen par lequel la comprendre ; d’éprouver la vérité et confirmer ce qu'il convient de confirmer, et annuler ce qu'il convient d'annuler... Nous voyons que nos Sages eux-mêmes ont dit : « Si c'est une Halokhoh (une tradition légale unanimement acceptée par les Sages), nous l'accepterons ; mais s'il s'agit d'un Din (basé sur une opinion individuelle), il y a matière à discuter ».

Ribbénou et son fils ont avancé qu'il n'était pas nécessaire de supprimer la raison pour être quelqu'un de religieux. Lorsque nous évaluons des déclarations rabbiniques, on ne doit pas attendre de nous d'abandonner la raison. Nous ne devons pas non plus enseigner la Tôroh à nos enfants et élèves d'une manière qui exige une obéissance aveugle et une suspension de la raison. Autrement, ils grandiront un jour et découvriront que nous leur avons enseigné des choses irrationnelles et incorrectes ; cela les amènera à douter de tout ce que nous leur aurions transmis.

Voici quelques anecdotes réels qui illustrent l'importance de ces propos :

  1. Un garçon de 10 ans s'est fait enseigner par son enseignant de Tôroh que les dinosaures n'ont jamais existé. Étant donné que la tradition rabbinique enseigne que le monde a moins de 6 000 ans, il n'est pas possible que les scientifiques puissent avoir raison lorsqu'ils déclarent que les dinosaures ont vécu sur la Terre il y a des millions d'années. Le garçon a répondu à son enseignant qu'il avait récemment visité le Musée des Histoires Naturelles à New York et avait vu des ossements de dinosaures de ses propres yeux ! Comment donc l'enseignant pouvait-il nier que les dinosaures aient pu exister ? L'enseignant lui répliqua ceci : « Ce ne sont pas des ossements de dinosaures que tu as vus ; ce que tu as vu, c'était des ossements de chiens qui se sont élargis durant le Déluge de Nôah ! »
  2. Un professeur de science dans une école du mouvement « Orthodoxe moderne » disséquait le larynx d'un mouton dans le cadre de son cours. Certains élèves remarquèrent que la trachée se trouvait à l'avant et l’œsophage derrière elle. Les élèves dirent au professeur : « Cela ne peut pas être correct ! Nous avons appris au cours de Tôroh que l’œsophage se trouve à gauche et la trachée à droite. C'est pourquoi nous nous accoudons à gauche la nuit de Pasah lors du Sédhar, de façon à ce que la nourriture descende directement dans l’œsophage. Si nous nous accoudions à droite, la nourriture entrerait dans la trachée et nous risquerions de nous étouffer ». Le professeur demanda aux élèves d'observer le larynx du mouton : ils pouvaient voir par eux-mêmes que les canaux étaient situés l'un derrière l'autre, pas côte à côte. Un élève suggéra que cela pouvait être vrai pour les moutons, mais que ce ne pouvait être le cas pour les humains. Le professeur leur expliqua, illustrations à l'appui, que la physiologie des humains était la même que celle des moutons. Après le cours, le professeur discuta de ce problème avec quelques enseignants d'études Juives et des responsables de l'école. La plupart d'entre eux croyaient que les canaux étaient situés côte à côte. Même après que le professeur leur présenta les faits scientifiques, ils se refusèrent d'accepter cette information. Un enseignant lui répliqua même ceci : « Je trouverais difficile d'enseigner quelque chose qui va à l'encontre des enseignements de HaZa''l ! » (Mais il ne trouverait apparemment pas difficile d'enseigner quelque chose qui fut démontré comme étant faux !)
  3. Une classe étudiait les lois relatives au lavage des mains le matin. L'enseignant expliqua, sur base du Shoulhon ´oroukh2, que les mains sont lavées afin d'éliminer un mauvais esprit (Rouah Ro´oh). Il n'est pas permis de toucher ses yeux ou d'autres parties sensibles du corps avant de s'être lavé les mains, car autrement il y a un danger que le mauvais esprit nous nuise. Un élève demanda : « Quelle est la signification du mauvais esprit ? L'écrasante majorité des gens dans le monde ne lavent pas dès le réveil leurs mains de la façon rituelle prescrite. Ils touchent leurs yeux et oreilles, mais aucun mal ne leur arrive ! Le mauvais esprit n'affecte-t-il que les Juifs religieux, et personne d'autre ? » L'enseignant répondit à l'élève qu'il était impertinent, et qu'un des principes de la foi est que nous devons faire confiance en la sagesse de nos Sages. Si le Shoulhon ´oroukh dit qu'il y a un mauvais esprit dangereux sur nos mains le matin, c'est donc un fait absolu, non sujet au doute de notre part.
  4. En étudiant la Sidhroh de la Tôroh qui traite du mariage de Yishoq `ovinou et Rivqoh `imménou, des élèves se firent enseigner par leur enseignant que Rivqoh n'avait que trois ans lorsqu'elle abreuva les chameaux du serviteur de `avrohom `ovinou, et lorsqu'elle se maria juste après avec Yishoq. Ceci est, évidemment, un enseignement midrashique, à ne pas prendre littéralement. Un élève demanda : « Comment fut-il possible pour une fille de trois ans d'abreuver des chameaux ? Cela aurait nécessité trop de forces pour un enfant si jeune. De plus, si elle n'était âgée que de trois ans, pourquoi son père lui demanda-t-elle si elle acceptait de quitter pour toujours la maison afin d'épouser le fils de `avrohom ? Elle aurait certainement été beaucoup trop jeune que pour prendre une telle décision ! Enfin, est-ce raisonnable de penser qu'un homme de quarante ans comme Yishoq épouserait réellement une petite fille de trois ans ? La description faîte par la Tôroh implique qu'elle était beaucoup plus âgée que trois ans ! » Le rabbin répondit : « Si HaZa''l disent que Rivqoh avait trois ans, c'est que c'était là son âge ! Il n'y a pas matière à débattre à ce sujet ! »
  5. Un élève d'une école maternelle rapporta à la maison des images décrivant l'histoire de la Maghillath `astér. L'une des images illustrait Washti avec une queue verte et une gueule d'un animal. Les parents de l'enfant demandèrent à l'institutrice la raison pour laquelle elle avait inclus une image si bizarre, alors que rien dans le texte de la Maghilloh ne justifiait une représentation si étrange de Washti. L'institutrice répondit que c'est de cette façon qu'on lui avait appris l'histoire, et que c'était basé sur une description midrashique de Washti. Les parents demandèrent alors à l'institutrice la raison pour laquelle elle n'avait pas informé les élèves que cela venait du Midhrosh, et non du texte de la Maghilloh. Elle répondit que les enseignements de HaZa''l dans le Midhrosh donnaient les sens réels du texte, et qu'il n'y avait nullement besoin de différencier entre le texte biblique et l'interprétation rabbinique.

Les cinq cas susmentionnés, qui sont un portrait fidèle de l'approche éducationnelle de nombreuses écoles Juives orthodoxes et de bon nombre de parents Juifs orthodoxes, sont symptomatiques des graves problèmes dans la façon dont la communauté Juive orthodoxe transmet les enseignements de la Tôroh. La position fondamentaliste et littéraliste, critiquée avec tant de virulence par Ribbénou, tient bon encore chez beaucoup de Juifs orthodoxes. Il incombe aux rabbins, enseignants et parents d'orienter l'éducation religieuse vers une compréhension rationnelle et raisonnable des paroles de nos Sages.

Dans les prochains articles, nous passerons en revue ces cinq cas pour en déceler les problèmes et déterminer comment y répondre convenablement.
1Ma`amor `ôdhôth Daroshôth HaZa''l
2`ôrah Hayim 4:2-3

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