בס״ד
Jouer
de la musique à Shabboth & Yôm Tôv – Deuxième Partie
Cet article peut être téléchargé ici.
Pour (re)lire la première partie, voir ici.
Nous avions terminé
l’article précédent par les questions suivantes : pourquoi est-il
normalement interdit de jouer de la flûte ? Quelle est la substance de
l'interdiction ici qui peut être annulée dans certains contextes ?
II.
Le Ṭalmoudh
b.
Le son du silence
Le contexte plus
large des sources tannaitiques suggère assez clairement que le problème avec
des instruments comme la flûte et le Shôphor est qu'ils étaient trop forts, et
donc interféraient avec la culture du calme que nous essayons de créer le Shabboth
et Yôm Tôv. La Mishnoh de Ṭomidh 3: 8 nous informe que le son de la
flûte et du Shôphor sur le mont du Temple (Har Habbayith) passait vers l'est par-dessus
les collines de Judée et parvenait jusqu'aux oreilles des habitants de Jéricho,
une ville située à plus de trente kilomètres. Même si c'est une exagération,
cela révèle clairement que cet instrument faisait toute une impression en
termes de sonorité.[1] Le
problème n'est donc pas celui d'un instrument de musique en soi, mais plutôt
tout ce qui génère un bruit important.
Une multitude de
sources manifestent des préoccupations similaires. Le Makhilṭoˋ Daribbi Shim´ôn ban Yôḥoˋy 12:16
énumère les applaudissements, les danses et les tapotements comme des activités
non-Maloˋkhôth
qui sont interdites le Shabboth, et dérive cette interdiction à partir de
versets, indiquant que ces activités sont intrinsèquement problématiques le Shabboth
et ne font pas simplement partie d'une préoccupation dérivée. La Mishnoh de Béṣoh
5: 2 affirme également cette interdiction. La Ṭôsaphṭoˋ de Shabboth 18:15 interdit également ces
activités dans le cadre d’une tentative d’effrayer les animaux et les faire fuir
de son jardin. La Mishnoh de Shabboth 5: 4 interdit à une personne de laisser
un âne sortir dans le domaine public le Shabboth avec une cloche même si la
cloche est bouchée. On pourrait penser qu'en bouchant la cloche, on a résolu le
problème principal ; ce texte enseigne que la cloche reste un objet qu'un
animal ne peut pas transporter d'un domaine à un autre le Shabboth.
L'implication est claire : il est interdit de sonner une cloche le Shabboth.
En effet, cela est confirmé dans la Ṭôsaphṭoˋ de Shabboth 14:15, où nous apprenons qu'un Shôphor
et un hochet - bien qu'il soit interdit de les utiliser pour leur usage prévu,
qui est de faire du bruit - peuvent être utilisés à d'autres fins légitimes.
Néanmoins, le texte précise que l'on ne peut pas sonner une cloche ou secouer
un hochet pour un enfant le jour du Shabboth. D'autres textes peuvent également
refléter cette interdiction de faire du bruit.[2]
Dans le Yaroushlami Béṣoh 5: 2, 63a, Ribbi ˋal´ozor énonce un principe simple et général : כל משמיעי קול אסורין בשבת « Tout bruit est interdit le Shabboth ».
Ce même passage dans
le Yaroushlami fournit à la fois la preuve de
l'opposition continue à faire du bruit le Shabboth ainsi que les efforts pour
limiter, contenir et même potentiellement annuler cette interdiction :
Ribbi Yônoh et ses
collègues : L'un a dit : « Applaudir de cette manière est
autorisé et de cette manière est interdit » l'autre a dit : « C'est
interdit dans les deux cas » - mais nous ne savons pas qui a dit
quoi. Du fait que Ribbi Yônoh ait dit : « Il y avait des anciens
qui frappaient des mains à l’envers le Shabboth », nous apprenons
que c'est lui qui a dit que les applaudissements de cette manière sont
autorisés et que de cette manière est interdite. Ribbi mariait son fils Ribbi
Shim´ôn et les gens applaudissaient à l’envers le Shabboth. Ribbi Méˋir est passé et a entendu
le son et a dit : « Nos Maîtres ! Shabboth a-t-il été
autorisé ? » Ribbi a entendu sa voix et a dit : « Qui
est ici pour dominer sur nous dans notre maison ? »… Ribbi Méˋir a entendu sa voix et
s'est enfui… Ribbi La´ozor a dit : « Tout bruit est
interdit à Shabboth ». Ribbi Shamouˋél bar Rov Yiṣḥoq a dit :
« Mon grand-père était le frappeur de la synagogue ».[3] Ribbi Lél bar Ribbi ˋélam avait l'habitude de cogner
sur une chaise. Ribbi ˋilloˋ étudiait [tard dans la
nuit] et est rentré chez lui et a trouvé tout le monde endormi. Il s'est
couché sur une échelle plutôt que de frapper à la porte le Shabboth. Ribbi Yirmayoh
avait l'habitude d’étudier avec le fils de Ribbi ˋimmi. [Ribbi ˋimmi] vint le réveiller
le matin du Shabboth et se mit à frapper à la porte. Il lui dit : « Père,
qui t'a permis de faire ça ? » |
ר' יונה וחברייא חד אמר הכין שרי והכין אסור וחורנה
אמר בין הכין ובין הכין אסור ולא ידעין מאן אמר דא ומאן אמר דא מן מה דא"ר
יונה אית הוה סבין ביומינן והוון מטפחין לאחורי ידיהון בשובתא הוי דו אמר הכין
שרי והכין אסור רבי הוה מסב לר"ש בריה והוון מטפחין לאחורי ידיהון בשובתא
עבר ר"מ ושמע קלהון אמר רבותינו הותרה השבת שמע ר' קליה אמר מי הוא זה שבא
לרדותינו בתוך ביתינו … שמע ר"מ קליה וערק …
א"ר לעזר כל משמיעי קול אסורין בשבת רבי שמואל בר רב יצחק סבר מקושה
דכנישתא חדתא ר' ליל בי ר' אלם מקש על כסא ר' אילא עני בסדרא סלק לביתא אשכחון
דמיכין רבע ליה על סולמא בגין דלא מקשה על תרעא בשובתא ר' ירמיה הוה פשט עם בריה
דרבי אימי אזל בעי מתערתא בקריצתא דשובתא שרי מיקש על תרעא א"ל אבא מאן שרא
לך |
Au centre de ce passage
se trouve une histoire sur Ribbi ז״ל, qui, avec d'autres collègues, frappait
des mains à l'envers lors d'une célébration de mariage pour son fils le Shabboth.
Lorsque Ribbi Méˋir ז״ל est passé et a entendu tous les applaudissements, il a accusé
les personnes rassemblées d'avoir transgressé le Shabboth. Ribbi Yônoh ז״ל approuve la permission d'applaudir à l'envers le Shabboth,
alors que ses collègues ont rejeté une telle clémence.
Ces débats semblent
se demander si les interdictions tannaitiques de faire du bruit concernent le
bruit en soi, ou s'il s'agit de faire ce bruit d'une certaine manière. Ribbi et
Ribbi Yônoh semblent penser que tant que l'on applaudit d'une manière
inhabituelle, on est autorisé à générer le même type de volume, alors que Ribbi
Méˋir, une fois qu'il entendit
le bruit fort émanant de la célébration du mariage, estima automatiquement que le
Shabboth avait été transgressé. Ce désaccord fondamental se joue dans d'autres
histoires de ce passage. Ribbi Shamouˋél bar Rov Yiṣḥoq ז״ל rapporte
que son grand-père était le frappeur public de la synagogue, et Ribbi Lél bar Ribbi
ˋélam ז״ל avait l'habitude de cogner sur une chaise. En
revanche, Ribbi ˋilloˋ
ז״ל a préféré dormir à l'extérieur de sa maison plutôt que de frapper à la
porte pour réveiller ceux qui étaient à l'intérieur pour le laisser entrer !
Ribbi Yirmayoh ז״ל s’est mit à frapper à une porte pour réveiller le fils
de Ribbi ˋimmi le
matin de Shabboth ; ce dernier a été étonné par ce comportement permissif.
Ces derniers cas
semblent présenter des positions indulgentes qui ne concernent que la fonction
potentielle du bruit ; le bruit pour amener les gens à ouvrir les portes
ou à se réveiller est acceptable, alors que le bruit interdit dans les sources
tannaitiques, pourrait (selon ces opinions) pourrait l’avoir été à cause d’utilisations
problématiques de bruits inappropriées pour le Shabboth. Les opinions strictes
semblent focalisées sur le volume du bruit lui-même, auquel cas le mode ou le
but pour lequel il est produit est sans importance. En tout état de cause, on
peut voir clairement à partir de ce passage que l'axe de préoccupation n'est
pas les instruments de musique en eux-mêmes, mais plutôt leur utilisation ou
toute autre chose qui génère un bruit inapproprié et de manière inappropriée.
Pourtant, il semble y avoir un consensus sur le fait que faire du bruit le Shabboth
est une activité dont on se méfie et potentiellement problématique.
Dans la prochaine
partie nous passerons aux sources talmudiques de l’époque des ˋammôroˋim,
vu que nous avons terminé de passer en revue les sources talmudiques de l’époque
des Ṭannoˋim.
[1] Notez que la description du son
perçant du Shôphor colle bien avec la supposition déjà avancée par d’autres que
le problème d’en sonner le Rôˋsh Hashshonoh qui tombe un Shabboth était
originellement connecté à son niveau de décibels. Il est avéré et même enseigné
par plusieurs Riˋshônim, dont le Rambo’’m, que les
Sages ne donnaient pas toujours les raisons réelles de leurs Gazérôth.
[2] La Ṭôsaphoˋ de
Shabboth 1:11 permet une foule d'activités qui commencent avant Shabboth même
si elles se termineront d’elles-mêmes pendant le Shabboth. La seule exception :
on ne peut pas placer le blé dans un moulin à eau (qui fonctionnera de son
propre chef) juste avant le Shabboth ; le blé doit être moulu avant le
début du Shabboth. Cela reflète le fait que le moulin à eau fait beaucoup de
bruit, contrairement aux autres activités problématiques décrites dans ce
passage. Et c’est ce qu’expliquent Ribbi Ḥaggay dans le Yaroushlami
Shabboth 1: 5, 4a et Rabboh dans le Bavli Shabboth 18a. Enfin, la Mishnoh de Ṭa´nith
3: 3 n'autorise התרעה le
Shabboth que dans des circonstances où la vie est en danger. Dans le Bavli Ṭa´nith
14a, ce terme se définit soit comme le fait de sonner du Shôphor, soit comme la
récitation de la prière du ´anénou. Cela pourrait indiquer une interdiction
normale de sonner du Shôphor le Shabboth, ou même une interdiction de gémir et
de hurler. D’ailleurs, la Mishnoh déclare que si c’est pour aider, cela est
autorisé, mais pas pour crier. Comme nous l'avons noté, une fois que le
problème est le bruit et non les instruments de musique, il n'y a aucune raison
de supposer qu'il n'y aurait pas non plus de restrictions sur la voix humaine.
[3] Celui chargé de frapper sur quelque
chose afin d’attirer l’attention de la communauté, faire taire les gens, etc.