mardi 30 octobre 2018

Sidhrath Zah Séphar Tôladhôth `odhom – Yésh Mé`ayin


בס״ד

La Sidhroh avec Rabbénou
Sidhrath Zah Séphar Tôladhôth `odhom – Yésh Mé`ayin

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Lors du Davar Tôroh sur la Sidhrath Baré`shith, nous avions longuement parlé du principe fondamental du יֵשׁ מֵאַיִן « Yésh Mé`ayin » (existence à partir d'une non-existence ; c'est-à-dire la croyance en la création à partir de rien), tel que Rabbénou ז״ל l'explique dans les Chapitres 13 à 31 du 2ème volume de son Môréh Navoukhim. Il retourne à cette théorie du Yésh Mé`ayin beaucoup plus tard dans son Môréh Navoukhim (Volume 3, Chapitre 50), dans un contexte totalement différent, en plein milieu de son explication sur la raison cachée de l'inclusion dans le TaNa''Kh de quelques récits qui, à première vue, ne semblent pas du tout importants. Après avoir affirmé que « chaque récit dans la Tôroh sert un certain but en relation avec l'instruction religieuse », Rabbénou tente d'expliquer le but servi par les Chapitres 5 et 10 du Séphar Baré`shith qui présentent les anales généalogiques des premières générations humaines. Ces deux chapitres ne contiennent pratiquement aucune information autre que les noms et durées de vie des descendants de `odhom jusqu'à Nôah, et de Nôah jusqu'à `avrohom. Rabbénou offre pourtant l'explication suivante quant à l'importance religieuse de ces anales généalogiques :

C'est l'un des principes fondamentaux de la Tôroh que l'univers fut créé Yésh Mé`ayin, et que la race humaine a été créée à partir d'un seul individu, `odhom. Étant donné que le temps qui s'est écoulé depuis `odhom jusqu'à Môshah n'était pas plus de deux mille cinq cent ans, les gens auraient nourri des doutes sur cette affirmation si d'autres informations n'avaient pas été ajoutées ; en effet, voyant que la race humaine s'était répandue sur toutes les parties de la terre en différentes familles et différentes langues, toutes plus éloignées les unes des autres, il aurait semblé impossible de croire en une origine commune de la race humaine. Afin de retirer ce doute la Tôroh donne la généalogie des nations et la façon dont elles découlent toutes d'une seule racine commune. Elle nomme ceux d'entre elles qui étaient bien connus, et nous dit qui étaient leurs pères, combien d'années et où ont-ils vécu.

L'existence de tant de peuples différents, de tant d'apparences, de cultures et d'habitudes différentes, qui vivent sur des terres si éloignées les unes des autres, pourrait sembler incohérente avec le principe du Yésh Mé`ayin, la notion selon laquelle toute existence tire ses origines d'une source unique., C'est pourquoi la Tôroh estime nécessaire de ramener tous les peuples à leur racine, `odhom, et c'est la raison pour laquelle nous retrouvons des listes détaillées et autrement pas intéressantes de noms et ages dans les premiers chapitres du Séphar Baré`shith.

Cette explication de Rabbénou nous permet de mieux comprendre un passage quelque peu mystérieux que l'on retrouve dans le Tôrath Kôhanim (Paroshath Qadhôshim) et le Talmoudh Yaroushlami (Nadhorim 9:4), où un débat est rapporté concernant le Posouq de la Tôroh qui constitue le כְּלָל גָּדוֹל בַּתּוֹרָה « Kalol Godhôl Battôroh » (plus grand principe de la Tôroh). L'opinion la plus connue est celle de Ribbi ´aqivoh ז״ל, qui accorde ce statut au fameux adage : וְאָֽהַבְתָּ֥ לְרֵֽעֲךָ֖ כָּמ֑וֹךָ « et tu aimeras ton semblable comme toi-même » (Wayyiqro` 19:18). Par contre, ban ´azza`y ז״ל répond qu'un autre Posouq représente un « principe » encore plus grand, à savoir le tout premier Posouq de notre Sidhroh de la semaine, par lequel la Tôroh introduit les anales généalogiques de l'humanité : זֶ֣ה סֵ֔פֶר תּֽוֹלְדֹ֖ת אָדָ֑ם « Ceci est le Livre des Engendrements de `odhom » (Baré`shith 5:1). De nombreux commentateurs ont bataillé pour identifier « le grand principe » qui se retrouverait énoncé dans ce Posouq somme toute ordinaire, et ont eu de grandes difficultés à comprendre en quoi cela serait plus important et plus exigeant que l'obligation d'aimer son semblable comme soi-même. Le Ra`ava''d ז״ל, qui rédigea l'un des premiers commentaires sur le Tôrath Kôhanim, explique que ban ´azza`y se réfère à la phrase de conclusion du Posouq, à savoir : בְּי֗וֹם בְּרֹ֤א אֱלֹהִים֙ אָדָ֔ם בִּדְמ֥וּת אֱלֹהִ֖ים עָשָׂ֥ה אֹתֽוֹ « au jour où l'Autorité créa `odhom, c'est dans la ressemblance de l'Autorités qu'Il le fit ». En d'autres mots, « le grand principe » transmit à travers ce Posouq est la notion selon laquelle tous les humains furent créés dans la ressemblance Divine, une qualité qui oblige à les respecter et à les traiter correctement. Ce message surpasse de loin celui de וְאָֽהַבְתָּ֥ לְרֵֽעֲךָ֖ כָּמ֑וֹךָ « et tu aimeras ton semblable comme toi-même » parce qu'il nous oblige à traiter les autres avec dignité même si nous ne demandons à être traités correctement par les autres. (Cette interprétation se retrouve également dans Rabbôthénou Ba´alé Hattôsophôth ´al Hattôroh, un rassemblement de commentaires rédigés par les Tôsophôth sur la Tôroh.)

Mais à la lumière de ce passage tiré du Môréh Navoukhim, nous pouvons parvenir à une explication totalement différente de la position de ban ´azza`y. « Le Livre des Engendrements de `odhom » constitue en effet un Kalol Godhôl Battôroh, parce qu'il sert à soutenir et confirmer la croyance fondamentale qu'HaShem ית׳ est le Créateur. Puisque, comme l'explique Rabbénou, la reproduction rapide et la dispersion de la race humaine menaçaient de compromettre ce fondement, les anales généalogiques du Séphar Baré`shith jouent un rôle indispensable dans le soutien de la doctrine du Yésh Mé`ayin, que Rabbénou décrit comme « l'un des principes fondamentaux de la Tôroh ».

Dans les milieux académiques, il y a une discussion considérable concernant l'attitude de Rabbénou vis-à-vis de la notion du Yésh Mé`ayin et la doctrine aristotélicienne de l'éternité de l'univers. De nombreux chercheurs croient que Rabbénou ne s'opposait pas forcément à la théorie d'Aristote, et ils affirment détecter diverses nuances dans les propos de Rabbénou pouvant sous-entendre une acceptation de la position aristotélicienne. Mais les passages du Mishnéh Tôroh et Môréh Navoukhim cités dans ce Davar Tôroh et celui sur la Sidhrath Baré`shith ne laissent place à aucun doute sur la ferme conviction de Rabbénou que la terre fut créée à partir d'une non-existence. Ses nombreuses références à l'importance et centralité de cette croyance, ainsi que le vaste espace qu'il consacre dans son Môréh Navoukhim à parler de ce concept, suffisent à nous convaincre de sa position sans équivoque en faveur du Yésh Mé`ayin. En outre, comme nous l'avons vu ici, Rabbénou considérait cette croyance si vitale qu'elle méritait que la Tôroh inclut deux grands chapitres de généalogies qui, autrement, n'auraient aucun sens.

Comme nous l'avions dit dans le Davar Tôroh sur la Sidhrath Baré`shith, après avoir présenté la théorie du Yésh Mé`ayin, Rabbénou nous lance explicitement l'avertissement suivant : « Ne suis aucune autre théorie ! ». Il est certain qu'il a suivi sa propre exhortation, et a résolument souscrit au principe fondamental de la création à partir de rien et rejeté la théorie aristotélicienne de l'éternité de l'univers.

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