lundi 2 mars 2020

Le traditionnel VS le réformiste


ב״ה

Le traditionnel VS le réformiste


Cet article peut être téléchargé ici.

Comme vous l'avez certainement remarqué à travers plusieurs de mes articles, je ne fais pas partie de ceux qui croient que toutes les tendances au sein du judaïsme se vaudraient. Il est essentiel de connaître les différences entre les diverses tendances afin de ne pas tomber dans de nombreux pièges, comme le syncrétisme ou accepter des idéologies qui s'apparentent à des hérésies Tout comme nos Sages ne considéraient pas légitimes les mouvances sadducéennes, esséniennes, nazaréennes ou encore celles des Kouthim, sur des bases halakhiques et traditionnelles objectives, de même, nous ne pouvons tolérer toutes les tendances modernes du judaïsme (libérale/réformée, Conservative/Massorti, reconstructionniste, et même certaines déviances orthodoxes), et devons être capables de nous en expliquer à l'aide d'arguments objectifs tirés de la Halokhoh et de la tradition.

C'est à l'égard du Siddour traditionnel d'Israël que l'on découvre le plus grand contraste entre l'attitude du traditionnel, d'un côté, et celle du Réformé et Reconstructionniste, de l'autre côté. Le Juif traditionnel est tout simplement trop modeste que pour critiquer le Siddour. Il sait qu'il fut progressivement mis en place par des Saddiqim et Hakhomim dont il souhaiterait atteindre et imiter la ferveur religieuse. À l'inverse, les Réformés et Reconstructionnistes considèrent le Siddour sous leur angle caractéristique de l'adoration de l'homme et le modifient afin qu'il colle à leur nouvelle religion.

  • Les Qôrbonôth

Par exemple, le Siddour traditionnel fait souvent référence aux animaux sacrificiels qui étaient offerts dans le Béth Hammiqdosh à Yarousholayim ´ir Haqqôdhash. Les Juifs traditionnels ne prétendent pas comprendre la signification de ces Qôrbonôth. Les nombreuses explications proposées par Ribbénou ז״ל, le Rambo''n ז״ל, le Mahabbér ז״ל et d'autres, ne résolvent pas toutes les interrogations à ce sujet. Mais le fait qu'ils ne comprennent pas ne les amènent pas à s'octroyer le droit de rejeter ces passages. Ils ne savent pas, mais ils croient ! Ils croient non seulement en Hashshém ית׳ mais également en la sagesse des Hakhomim ayant formulé ces prières. De l'autre côté, les Réformés et Reconstructionnistes sont certains de savoir mieux que leurs prédécesseurs. Ils sont si certains de leur rationalisation des Houqqim bibliques concernant les Qôrbonôth, que s'appuyant sur elle ils se sentent en droit de dédaigner ceux qui les ont précédés. Un illustre « rabbin » Réformé osa même déclarer « Transformerons-nous nos synagogues en abattoirs ? », pour justifier de retirer du Siddour les références aux Qôrbonôth. Mais les Juifs traditionnels sont trop modestes que pour se dire que leurs aspirations religieuses sont supérieures esthétiquement et philosophiquement à celles des Prophètes, qui ont approuvé le culte sacrificiel. Et en y regardant de plus près, les Juifs traditionnels se rendent compte de la nature inappropriée et biaisée des arguments de leurs adversaires.

Ces derniers partent des suppositions que la prière fut ordonnée par des Prophètes progressifs comme substitut aux Qôrbonôth, et la synagogue comme substitut au Béth Hammiqdosh. Mais ils ignorent les innombrables preuves dans les sources midrashiques et talmudiques attestant que les prières étaient récitées en même temps que les Qôrbonôth étaient offertes, et que même aux époques du Béth Hammiqdosh, lorsque les offrandes animales étaient la règle, il n'existait pas seulement des centaines de synagogues à Yarousholayim, mais il y avait même une synagogue dans le Béth Hammiqdosh lui-même ! Il est vrai que les Prophètes ont critiqué l'hypocrisie de ceux qui offraient des Qôrbonôth en pensant, par exemple, qu'il suffisait d'en apporter pour que le Créateur les exonère de leurs crimes commis envers la veuve, le pauvre et l'orphelin, sans même aucune repentance. Or, ces même Prophètes critiquaient également, et avec une vigueur identique, ceux qui s'adonnaient à la prière, qui levaient leurs mains en adoration vers le ciel, alors qu'elles avaient été des instruments de vol et de meurtre.1 Cela signifie-t-il donc que les Prophètes étaient opposés à la prière ? Nous voyons donc le ridicule de l'approche des Réformés.

Oui, certains peuples primitifs offraient des animaux pour calmer leurs fausses divinités, mais un Juif traditionnel ne peut jamais oublier le Chapitre 19 de Wayyiqro`, ce chapitre immémorial qui contient l'obligation de וְאָֽהַבְתָּ֥ לְרֵֽעֲךָ֖ כָּמ֑וֹךָ « et tu aimeras ton semblable comme toi-même ».2 Ce même chapitre contient les lois fondamentales qui régissent la validité ou l'invalidité des offrandes animales. Si ce chapitre est une obligation de Hashshém, qui oserait le modifier ou effacer la moindre partie de ce qu'il contient ? Mais s'il avait été écrit par un homme, qui oserait dire que le génie qui a conçu les prescriptions éthiques extraordinaires qu'on retrouve dans ce Chapitre 19 était dans le même temps un barbare pour ne pas avoir compris, contrairement aux Réformés, qu'il était offensant de considérer que des offrandes animales pourraient constituer une expérience religieuse authentique ? Le Juif traditionnel est prêt à accorder à Hashshém ou à Son serviteur le bénéfice du doute, et bien qu'il ne présume pas connaître pleinement la signification des offrandes animales, il ne les considère pas non plus comme une marque de barbarisme. En fait, il ne doit jamais être oublié que les Juifs, même les Réformés, ont conservé dans leur calendrier religieux jusqu'à nos jours un souvenir du culte sacrificiel d'antan, à savoir le Sédhar de Pasah, qui est de loin le rituel juif le plus observé et chéri. Si les Réformés étaient logiques avec leur approche et opinion sur les offrandes animales, ils devraient renoncer à observer le Sédhar de Pasah, qui est un rappel de l'agneau que l'on offrait au Béth Hammiqdosh !

Les Réformés et Reconstructionnistes sont prompts à citer un passage du Mishnéh Tôroh de Ribbénou pour justifier leur élimination de toutes les références aux Qôrbonôth dans leur Siddour. Mais à quel point sont-ils honnêtes lorsqu'ils ignorent les affirmations explicites de Ribbénou selon quoi lorsque le Moshiah viendra, l'intégralité du culte sacrificiel sera restaurée ? En outre, ils citent le fait que Ribbi Yôhonon ban Zakka`y, en l'an 70 de l’Ère Courante, interdit d'apporter des Qôrbonôth, mais ignorent dans le même temps la raison que lui-même a expressément exprimée : c'était afin de prolonger le deuil pour la destruction du Béth Hammiqdosh ! Il décréta des interdictions similaires, comme par exemple l’interdiction de tenir des mariages trop festifs.

Rien ne tient la route dans les arguments que les Réformés pourraient donner pour dénigrer les Qôrbonôth et leurs références dans le Siddour. Au contraire, cela ne fait que faire ressortir leur arrogance et mépris envers la Tôroh, la tradition et les Sages.

  • Façon de considérer la femme

L'arrogance des Réformistes et Reconstructionnistes, par rapport aux ancêtres, dans leur attitude envers les Qôrbonôth est égalée uniquement par leurs sentiments de supériorité dans le domaine de la « galanterie ». Le Juif traditionnel, encore une fois, ne prétend pas être plus galant que ses ancêtres ; et si dans le judaïsme en général, et dans le Siddour en particulier, il y a des facteurs qui offenseraient les femmes, il ne rejette rien. Il souhaite simplement avoir davantage de connaissances avant d'exprimer son opinion sur le sujet, se demandant ce qu'ont voulu réellement dire les Sages, et s'il serait possible de comprendre différemment leurs propos. Comme pour les Qôrbonôth, le Juif traditionnel ne considère pas la tradition injuste, mais parcourt les sources pour être plus éclairé sur le sujet. Au lieu de purger le Siddour des prières qui lui posent problème, il se met à tourner les pages du Talmoudh pour en savoir plus sur la question. Il part de la supposition qu'il n'en sait pas assez, et qu'il n'est pas plus saint et savant que les initiateurs de notre énorme héritage, car la modestie est la marque de fabrique de la tradition.

Il est vrai que de nombreux textes peuvent être cités du Talmoudh et du Midhrosh pour illustrer la basse estime de certains rabbins concernant l'intelligence des femmes. Mais on peut citer autant, si pas plus de passages encore tirés des mêmes sources, qui illustrent le profond respect que bon nombre d'autres rabbins avaient vis-à-vis des femmes. En outre, les rabbins n'avaient pas non plus la même opinion quant à savoir qui était plus chaste entre les hommes et les femmes. Mais de manière générale, la Halokhoh était remarquablement progressiste à l'égard des droits des femmes, dans et en dehors du cadre du mariage, même si l'égalité ne fut jamais la règle, avant comme aujourd'hui. (D'ailleurs, il est absurde de militer pour l'égalité homme-femme. Les deux sexes sont différents et ont des rôles distincts. Il y a des domaines dans lesquels les femmes sont plus brillantes et d'autres dans lesquels les hommes brillent davantage.)

De plus, le statut des femmes du point de vue de la pratique religieuse, de la prière, de la synagogue, ou même des fonctions dans le Béth Hammiqdosh, nécessite une analyse philosophique plus minutieuse que voudraient nous le faire penser ceux qui, à la hâte, se prétendent être les émancipateurs des femmes. Concernant l'écrasante majorité des commandements, les femmes furent autant soumises à la Loi que les hommes. Et leurs capacités ne furent jamais rabaissées. En effet, du point de vue stricte de la Halokhoh, dix femmes réunies ensembles pourraient organiser des offices de prière comme les hommes. Et des femmes pourraient également être appelées à la Tôroh lors des lectures publiques. Mais elles préféraient rester discrètes, contrairement à bon nombre de femmes contemporaines qui militent bruyamment pour avoir le droit de se voir accorder l'honneur de monter à la Tôroh ou mettre les Taphillin devant tout le monde, mais qui ne font pas autant de bruits pour le droit de mettre les Taphillin ou un Tallith en privé, chose que la Halokhoh leur permettrait sans problème ! C'est là que l'on voit la malhonnêteté de ces femmes et des mouvements réformés et reconstructionnistes.

Du point de vue des rituels, les femmes ne furent pas astreintes à l'accomplissement de nombreux commandements. Néanmoins, elles avaient la permission de les accomplir, si elles le désiraient. Mais chaque fois que le commandement impliquait une limite de temps pour être accompli, elles étaient exemptées. C'est pour cette raison qu'elles ne se virent pas imposer l'obligation de mettre les Taphillin ou de porter un Tallith, parce que les hommes n'ont l'obligation de les mettre qu'en journée mais pas de nuit. Et ces exemptions n'étaient en rien liées à la prétendue « impureté »ou « saleté » de la femme. Certains rabbins contemporains enseignent maladroitement que les femmes auraient été exemptées de ces Miswôth parce que s'occuper des corvées domestiques, des enfants, etc., ne laisserait pas aux femmes de temps pour ces Miswôth. Non seulement cet argument n'a aucune source dans la tradition, mais elle permet des contre-arguments très faciles. En effet, si telle en serait la raison, pourquoi même les femmes non mariées, et jeunes femmes, ainsi que les femmes âgées, en seraient exemptées ? Ou en quoi serait-il impossible ou difficile pour une femme, même ayant des enfants, de réciter le Shama´ Yisro`él deux fois par jour (le matin et le soir), une Miswoh dont les femmes sont également exemptées ? Nous pouvons voir que cet argument ne tient pas la route.

Une lecture minutieuse des sources talmudiques révèle que la différence que fait la Halokhoh entre les hommes et les femmes était basée sur la nature et le fonctionnement naturel, et non sur des considérations sociales ou économiques. La nature n'a pas doté les hommes d'un apparatus interne leur permettant de mesurer le temps. Afin qu'un homme apprenne à sanctifier le temps, la Halokhoh lui impose de nombreuses Miswôth qui sont régies par un calendrier et une horloge. Les femmes, par contre, par la nature même de leur constitution physique et des exigences de la Halokhoh par rapport à leurs périodes menstruelles, avaient moins besoin qu'on les rende conscientes de la sainteté du temps. Elles sont conscientes qu'elles ont une horloge naturelle : chaque mois, elles ont une période de menstruation ; contrairement aux hommes, elles ont également une limite biologique pour procréer, etc. Leur période naturelle a alors été orientée vers la sainteté par la Halokhoh. L'homme cherche constamment à s'échapper de son instabilité par la conquête, tandis que la femme est toujours rattrapée par son « destin ». C'est parce que le schéma de la femme est en phase avec les saisons de la terre. Dans son propre corps elle reproduit le schéma de la terre, qui se renouvelle de façon cyclique. C'est ce fonctionnement naturel de la femme, qui est limitée, qu'elle le veuille ou pas, par différents délais dans sa vie, qui a été pris en compte au niveau de la Halokhoh.

L'homme étant incapable, sans contrainte, de sanctifier son temps, la Halokhoh lui impose plus de devoir, et en bénissant chaque jour Hashshém de ne pas l'avoir fait femme, il veut dire par-là que c'est une grâce Divine qu'il ait été créé homme pour s'obliger à servir Hashshém, car autrement, sans ces Miswôth il n'aurait été que vide. Cette bénédiction n'est donc en aucun cas une insulte ou mépris vis-à-vis des femmes. Il est intéressant de noter que l'auteur de cette bénédiction fut Ribbi Mé`ir ז״ל, dont l'épouse n'était pas seulement sa bien-aimée, mais également sa collègue, une femme dont l'érudition en Tôroh était si élevée que le Talmoudh rapporte qu'une fois tous les Sages émirent une certaine opinion sur une question, puis interrogèrent Barouriyoh (l'épouse de Ribbi Mé`ir) qui donna une opinion inverse, et elle fut suivie ! Elle joua également un rôle prépondérant dans la composition de la Mishnoh ! Sachant cela, il est impossible que cette bénédiction ait émané d'un homme sexiste ou misogyne !

Et lorsque le Juif traditionnel récite quotidiennement la bénédiction composée par Ribbi Mé`ir, il n'est jamais animé de la pulsion de la modifier, ni de la supprimer, car ce serait de l'arrogance ; il se prétendrait plus galant que ce grand Sage, et plus respectueux de son épouse que ne l'était Ribbi Mé`ir vis-à-vis de la sienne !

  • Façon de considérer Hashshém

Toutefois, c'est vis-à-vis de Hashshém, plus que vis-à-vis des femmes ou des Qôrbonôth, que le Juif traditionnel se retrouve dans une humeur plus modeste que les Réformateurs et Reconstructionnistes. Le Juif traditionnel ne fixe pas la portée ou étendue de l'omnipotence de Hashshém. Il ne sait pas comment ou quand Hashshém ressuscitera les morts, mais il ne place pas en conséquence cette possibilité en dehors de la puissance de Hashshém. En fait, Hashshém doit ressusciter les morts s'Il doit exercer Son omnipotence dans la réalisation de Son attribut de Sadhoqoh. Car, comme l'explique magistralement bien le Rov Yôséph B. Soloveitchik, le rang le plus élevé sur l'échelle de la Sadhoqoh implique de donner de l'aide à ceux qui sont dans le plus grand besoin, à ceux qui sont les plus abandonnés à eux-mêmes. Or, qui sont les plus incapables de s'aider eux-mêmes que les morts ?! C'est pourquoi, si les attributs Divins de Gavouroh et Sadhoqoh ont une quelconque signification, ils doivent inclure l'ultime résurrection des morts. Ce dogme ne s'accepte pas aisément, car il transcende la raison humaine, mais il n'est pas plus surnaturel que la plupart des enseignements des Navi`im (prophètes) selon quoi la nature deviendra parfaite, que la mort disparaîtra, que l'ordre moral et naturel refléteront ensembles et en même temps le dessein ultime de leur Créateur, etc. Ce n'est qu'avec la `amounoh qu'on peut rendre significatifs et donner un sens à ces enseignements prophétiques basiques.

Les agnostiques sont cohérents. Ils ne prétendent pas que le progrès est réel ou qu'il y aurait un concept de perfection. Mais les Réformateurs et Reconstructionnistes prêchent encore les idéaux prophétiques, en dépit de leur caractère surnaturel, mais nient à Hashshém la puissance de faire venir un Moshiah de chair et de sang ou de faire justice à ceux qui, sans faute de leur part, naquirent avant l'ère où la mort ne sera plus.

Les Reconstructionnistes en particulier ont cherché à intégrer dans le judaïsme toutes les normes du naturalisme moderne. Le Siddour compte de nombreuses références aux lois naturelles. Par exemple, dans la première bénédiction qui précède la récitation du Shama´ du soir nous déclarons ceci : מַחֲלִיף אֶת הַזְּמַנִּים, מְסַדֵּר אֶת הַכּוֹכָבִים בְּמִשְׁמְרוֹתֵיהֶם בָּרָקִיעַ כִּרְצוֹנוֹ « Il alterne les saisons, Il met en ordre les étoiles d'après leurs gardes dans le firmament, selon Son désir ». Mais avec le Psalmiste, le Juif traditionnel considère le naturel comme miraculeux et cela se reflète dans les formulations employées dans le Siddour. D'ailleurs, aucun scientifique n'a même jamais supposé pouvoir donner l'explication complète de tous les phénomènes. Et quand bien même il s'aventurerait à le faire, l'explication conserverait une grande part de mystères, car le phénomène expliqué pourrait être uniquement la partie visible de l'iceberg, alors que ce qu'il reste à expliquer pourrait être encore plus extraordinaire. Néanmoins, même sans explication complète, le peu qu'on connaît suffit à causer une grande admiration envers Hashshém, et quand bien même le but d'une découverte serait de nier Hashshém, la vérité est que chaque découverte confirme la nature miraculeuse de la création et de la nature. Mais retirer au Créateur Son pouvoir d'interférer avec la loi de la nature n'équivaut pas seulement à renier Son omnipotence, mais également cet élément de « miracle » dans la nature, que les scientifiques appellent « chance » et qu'ils tentent de rationaliser depuis les jours de Peirce.

Ce qui est fondamental dans le judaïsme traditionnel c'est l'adoration de Hashshém en tant que Créateur, et le dogme qui l'accompagne selon quoi aucune chose créée ne peut être adorée. Concevoir Hashshém en des termes humains équivaut pratiquement à faire d'une créature (puisque Hashshém est rabaissé au niveau des hommes ou d'autres créations) l'objet d'une adoration plutôt que le Créateur. C'est la raison pour laquelle la modification que les Réformistes et Reconstructionnistes ont apporté au Siddour dans la première bénédiction qui précède le Shama´ du matin est dramatique, car dans sa forme originelle elle nous transmettait un message fondamental. La formule de cette bénédiction est celle-ci :

Béni tu es `adhônoy notre `alôhim, Roi de l'univers, Formateur de la lumière et Créateur de l'obscurité, Faiseur de la paix et Créateur de tout, Celui qui renouvelle dans Sa bonté, chaque jour, constamment, l’œuvre de la création. Béni Tu es `adhônoy, Formateur des luminaires.
בָּרוּךְ אַתָּה יהוה, אֱלֹהֵינוּ מֶלֶךְ הָעוֹלָם, יוֹצֵר אוֹר וּבוֹרֵא חֹשֶׁךְ. עֹשֶׂה שָׁלוֹם וּבוֹרֵא אֶת הַכֹּל, הַמְחַדֵּשׁ בְּטוּבו בְּכָל יוֹם תָּמִיד מַעֲשֶׂה בְרֵאשִׁית. בָּרוּךְ אַתָּה יהוה, יוֹצֵר הַמְּאוֹרוֹת

Cette bénédiction, qui est une paraphrase de Yasha´yohou 45:7, fut instituée par les `anshé Kanasath Haggadhôloh (Hommes de la Grande Assemblée) pour servir de protestation contre le zoroastrisme, qui souscrivait à la croyance selon quoi le bien et le mal, la lumière et l’obscurité, étaient représentés par des divinités distinctes. Afin d'affirmer l'opposition sans équivoque du judaïsme face à cette approche, les `anshé Kanasath Haggadhôloh appelèrent les Juifs à proclamer quotidiennement le fait que Hashshém seul est « Formateur de la lumière et Créateur de l'obscurité, Faiseur de la paix et Créateur de tout », Lui qui est partout considéré comme Saint par les créatures, y compris par les milices célestes. C'est la signification essentielle de la première bénédiction qui précède le Shama´ du matin. Plus tard, cette bénédiction fut rallongée à l'époque des Ga`ônim et ensuite au Moyen-âge. À Shabboth et Yôm Tôv, et plus particulièrement durant les Dix Jours Redoutables, de nombreux Piyoutim et autres additions ont été ajoutés dans cette bénédiction.

Enfin, le Siddour contient également de nombreux anthropomorphismes sur Hashshém. Et l'écrasante majorité de ceux qui comprennent les prières ne furent pas amenés à concevoir Hashshém en termes humains, malgré le fait que des figures de style anthropomorphiques étaient employées. Mais les Réformistes et Reconstructionnistes, dans leur zèle pour bannir tout anthropomorphisme, le remplacèrent par l'anthropocentrisme. À la place des figures de style anthropomorphiques, ils présentèrent un dieu créé à l'image de la couronne de Sa création, l'homme. Et la conséquence fut que tout ce que l'homme ne pouvait pas concevoir fut, ipso facto, supposé être hors de portée de la puissance de Hashshém. C'est pourquoi les Réformistes (Juifs libéraux) et Reconstructionnistes en sont arrivés à présumer que Hashshém ne S'est jamais révélé. C'est aussi pour cela qu'ils rejettent catégoriquement la possibilité que Hashshém ait pu Se choisir un peuple appelé à devenir Son royaume spécial de Kôhanim et une sainte nation ! La doctrine des libéraux est donc qu'il n'y a pas de révélation Divine, et puisqu'il n'y a pas de révélation Divine, il n'y a a donc pas de peuple élu de Hashshém. La Tôroh est vue par ces hérétiques comme étant une œuvre purement humaine, et en tant que telle elle n'a pas de nature éternelle et peut être modifiée, et certaines de ces lois ou idéologies peuvent être rejetées si elles ne sont plus en phase, selon eux, avec l'époque !

Ce sont les hérésies que vous tolérez en considérant les Réformistes et Reconstructionnistes comme des mouvements « juifs ».

  • L'élection du peuple juif

Non seulement les Réformés et Reconstructionnistes accusent nos ancêtres d’anthropomorphisme, mais ils les accusent également d'égocentrisme par le fait que nos ancêtres affirmaient une croyance dans le concept d'élection du peuple d'Israël par Hashshém. Cela pourrait vous surprendre mais les Réformés et Reconstructionnistes ne croient pas du tout dans la notion pourtant biblique que nous serions les élus de Hashshém, comme mentionné plus haut. Ils considèrent qu'il est injuste d'estimer que Hashshém aurait favorisé un peuple par rapport aux autres. Le rejet de cette doctrine pourtant fondamentale du TaNa''Kh est causé par les sentiments humanistes qui imprègnent ces deux branches hérétiques du judaïsme. C'est au point qu'ils ont osé retirer du Siddour traditionnel l'expression « Qui nous a choisis » et l'ont remplacée par « Qui nous a rapprochés de Lui ». Mais il est inutile de dire que remercier Hashshém de nous avoir rapprochés de Lui peut être tout aussi offensant que de Le remercier pour nous avoir choisis. Si la dernière formule sous-entend qu'Il nous a choisis en rejetant d'autres, alors la première, par la même logique erronée, sous-entend que si nous sommes proches c'est que d'autres sont plus loin. Or, si les autres nations peuvent faire le choix de se rapprocher de Lui, c'est qu'elles peuvent également faire le choix d'être choisies. Et c'est précisément ce que le Juif traditionnel enseigne. Le fait d'avoir été choisi n'exclut personne. Pourquoi devrions-nous donc avoir honte de notre élection par Hashshém, en sachant, en outre, que ceux qui n'ont pas été choisis peuvent faire le choix de l'être (de la même manière qu'ils peuvent choisir de se rapprocher de Hashshém), soit en acceptant partiellement la Tôroh (les Sept Lois Noahides), soit en se convertissant ?

Le peuple d'Israël n'a pas seulement été choisi, mais il a également choisi d'être choisi, en faisant le choix d'accepter sur lui l'intégralité de la Tôroh et des Miswôth. Cette élection n'est pas pour décorer ou pour se glorifier aux yeux des nations, mais vient avec des obligations et des responsabilités. En effet, Hashshém a exprimé qu'Il était sanctifié par ceux qui étaient les plus proches de Lui3 ; or, c'est justement du plus proche qu'Il attend une réalisation maximale du potentiel et une obéissance maximale et minutieuse. Ainsi, l'élection du peuple juif fait des Juifs des commandos dans la lutte pour l'accomplissement de la volonté de Hashshém dans l'univers. Et dans cette bataille les Juifs ont en réalité énormément appris de très nombreux Gôyim. Mais quelqu'un qui se dit religieux et est doté d'un peu de modestie n'oserait pas se grandir en se donnant l'image d'un vrai universaliste tout en accusant à demi-mots ses ancêtres d'avoir été des xénophobes, comme le font les Réformés et Reconstructionnistes !

Le fait que le monde Gôy réagisse négativement au concept du « Peuple Élu » ne justifie pas et ne nous autorise pas à chercher leur approbation au dépend de notre tradition et de l'intégrité de la réputation de bon nombre de personnes qui ne peuvent plus se défendre aujourd'hui. En fait, si nous devions excessivement nous inquiéter des incompréhensions des Gôyim, alors les Réformés et Reconstructionnistes feraient certainement mieux d'abandonner le sionisme, et même le Sédhar de Pasah, car les Gôyim d'aujourd'hui n'aiment pour la plupart d'entre eux pas du tout le sionisme, et qu'ils ne sont pas capables de comprendre le rituel de la nuit de Pasah.

Le problème est que les Réformés et Reconstructionnistes, en tant qu'humanistes extrémistes, placent les pensées humaines devant celles de Hashshém, et s'inquiètent ainsi plus de plaire aux hommes plutôt qu'à Hashshém.

  • La notion du retour à Sion

La plupart des Libéraux et Reconstructionnistes ne sont pas prêts à retirer toute mention de Sion de leurs Siddourim, mais ils s'accordent sur le principe que prier pour un « retour » là-bas est hypocrite. Étant donné qu'ils ne croient pas en un Messie personnel qui rassemblera les « exilés » des quatre coins de la terre, et étant donné qu'ils sont amoureux de la vie prospère en Amérique et en Europe qu'ils mènent, ils altèrent leurs Siddourim afin qu'ils reflètent leur confort dans la civilisation occidentale.

Mais pour le Juif traditionnel, prier pour un retour vers Sion ne signifie pas seulement retourner littéralement en Terre d'Israël, mais cela constitue également une prière pour retourner vers Hashshém. Car avant d'opérer un retour physique vers `aras Yisro`él, le Juif se devra d'opérer un retour spirituel vers Hashshém, condition immuable pour le retour massif vers Sion. Ainsi, avant la venue du Moshiah, qui nous tirera de cet exil, il reste encore énormément de travail personnel à faire. Certains pourraient choisir de le faire en `aras Yisro`él, d'autres en Amérique, d'autres encore en Europe, voire même à Madagascar. Tous sont conscients du rôle du judaïsme et des Juifs dans l'avancement de la justice sociale. Mais pour le Juif traditionnel, Sion représente beaucoup plus qu'un lieu géographique ; il s'agit de la Terre Sainte ! Tout comme le monde doit être corrigé afin qu'il puisse œuvrer et avancer vers la justice, de même les occupants de la Terre d'Israël doivent être corrigés vers la justice pour le bien du judaïsme. Et comme dans les précédentes périodes de l'histoire juive, les deux fonctions doivent être réalisées par des Juifs aussi bien à la maison qu'en exil. Que certains d'entre nous aient fait le choix ou en aient été contraints de servir dans un lieu plutôt qu'un autre est conséquent, mais n'altère en rien la signification des prières pour un retour complet, lorsque le monde entier connaîtra la justice et les justes, et que les Juifs rentreront à la maison pour jouir d'une plus grande communion avec Hashshém et expérimenter davantage de Sa sainteté dans leur observance de Sa Tôroh...l'intégralité des 613 Miswôth, qu'il est impossible de respecter à l'époque présente. (Mais puisque les Libéraux et Reconstructionnistes ne croient pas en l’immutabilité et immuabilité de la Tôroh, ils n'espèrent donc pas de retour vers Sion, où la Tôroh pourra être pleinement respectée.)

Là encore, cela pourrait nécessiter un peu de `amounoh non seulement pour croire que cela se produira mais également que cette communion totale avec Hashshém est l'objectif ultime. Les Libéraux et Reconstructionnistes croient plutôt que l'objectif ultime n'est pas la communion totale avec Hashshém, mais atteindre la justice sociale, la liberté, l'égalité et la prospérité, de sorte que l'homme puisse se développer seul ! Le but ultime est donc l'homme, au-delà duquel il n'y a rien d'autre. Et lorsque l'ère messianique viendra, l'homme, d'après leur idéologie, sera capable de réaliser le maximum de son potentiel et par lui-même. Mais pour faire quoi ? Serions-nous tenter de demander ! L'humaniste laïc se contente simplement de dire qu'il ne sait pas pour quelle raison. Il suppose en savoir peu sur la vie, et il la mène comme il la trouve ! Mais eux qui déguisent leurs doctrines abjectes et centrées sur l'homme dans des manteaux de religion, nous doivent bien une réponse : quand l'homme aura atteint son plein potentiel, quelle sera la suite ? Qui aura-t-il après ? Et pour quoi faire ? Au moins, le traditionnel affirme que la fin de tout est l'accomplissement de la volonté maximale de Hashshém, la Tôroh ! L'homme est la couronne de la Création, mais il reste néanmoins une chose créée, et c'est vers le Créateur et Sa volonté que nous aspirons à « retourner ».

Nous pourrions continuer à élaborer sur les différences notoires entre les Juifs traditionnels, d'un côté, et les Libéraux et Reconstructionnistes, de l'autre côté. Mais ce que nous avons dit ici devrait suffire à comprendre pourquoi tous les mouvements prétendument « juifs » ne se valent pas.
1Voir Yasha´yohou 1:15
2Wayyiqro` 19:18
3Wayyiqro` 10:3

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...