mercredi 9 décembre 2020

La Polygamie Juive

 

בס״ד

 

La Polygamie Juive

 

 

Cet article peut être téléchargé ici.

 

Un article publié cette semaine dans le Jerusalem Post (que vous pouvez lire en anglais ici) affirmant que l’acteur et chanteur Shuli Rand, un Ḥassid Breslev qui a notamment joué dans le film « Ushpizin », avait entrepris des démarches pour épouser une seconde femme, a suscité des réactions enflammées sur les réseaux sociaux contre la polygamie. Dans l’Etat d’Israël, un Juif ne peut pratiquer la polygamie qu’après avoir obtenu la signature de 100 rabbins le lui autorisant. Mais cette loi n’ aucune base halakhique sur laquelle s’appuyer. En outre, contrairement à ce qui est soutenu par les ignorants et détracteurs de la polygamie, le judaïsme n’interdit pas cette pratique, ni dans la Ṭôroh, ni dans le Talmoudh, ni dans le Mishnéh Ṭôroh, ni dans le Shoulḥon ´oroukh, et encore moins dans le célèbre décret de Ribbénou Gérshôm Méˋor Haggôloh ז״ל, qui est souvent utilisé pour affirmer qu’une telle interdiction existerait.

 

Dans cet article, nous analyserons et passerons en revue le Ḥéram de Ribbénou Gérshôm et le sujet de la polygamie pour les Juifs. Mais avant tout, je me dois de poser les bases de tout ce qui va suivre :

 

1.     Hashshém ית׳ est le Créateur ;

2.     Hashshém a donné aux Juifs l'entièreté de la Ṭôroh, Orale et Écrite ;

3.     ḤaZa’’l nous ont transmis avec exactitude l'interprétation correcte et légale de la Ṭôroh ;

4.     La Halokhoh est absolument obligatoire pour nous, plus qu'elle ne l'était dans les temps passés ;

5.     Uniquement ceux qui sont imprégnés de la Loi Juive, de la Tradition et de l'étude de la Ṭôroh peuvent correctement interpréter les lois de la Ṭôroh ;

6.     Tout comme nous devons suivre la Ṭôroh elle-même, nous devons aussi suivre les décrets émis par nos Sages du Sanhédhrin qui existait à Jérusalem qui ont pour but de préserver ou de renforcer l'observance de la Ṭôroh ou protéger la société.

 

Par conséquent, même si la base et l’objectif de cet article sont contraires à la pratique majoritaire, ils sont basés sur le plus haut niveau de respect et d'obéissance à la Ṭôroh, à la Tradition et au processus halakhique.

 

Par exemple, un argument selon lequel la polygamie est bonne pour la société ne pourrait être un argument valable que s'il était possible de montrer que la polygamie fut permise par la Halokhoh.

 

Chaque jour, dans la Ṭaphilloh de « Ouvoˋ Laṣiyôn », nous disons : תִּתֵּן אֱמֶת לְיַעֲקֹב חֶסֶד לְאַבְרָהָם « Tu as donné la vérité à Ya´aqôv, la bonté à ˋavrohom ». Il n’y a donc pas de corruption dans la Ṭôroh ! Et trop souvent, ceux qui s’opposent à la polygamie corrompent la Ṭôroh !

 

Le Gaon de Vilna ז״ל fut la plus grande autorité rabbinique durant une centaine d'années. Il était également un grand Ṣaddiq. Il a déclaré :[1]

 

Si je parviens à accomplir deux choses, je serai exempté d'étudier la Ṭôroh et de faire la Ṭaphilloh, et je me rendrai de ville en ville {pour faire accepter ces deux choses}. La première est d'éliminer le Ḥéram de Ribbénou Gérshôm contre la polygamie, car grâce à cela, la Gaˋoulloh se rapprochera ; et la seconde chose est qu'il puisse y avoir la Birkath Kôhanim chaque jour.

 

De son vivant, il n'y est pas parvenu, mais ses Ṭalmidhim qui se rendirent en ˋaraṣ Yisroˋél sont parvenus à imposer la Birkath Kôhanim chaque jour en ˋaraṣ Yisroˋél, et pas seulement à Shabboth et Yôm Tôv.

 

Par cet article sur la polygamie, nous espérons rapprocher la Gaˋoulloh et contribuer à accomplir l'objectif du Gaon de Vilna.

 

·        Ma´aséh ˋovôth Simon Lavonim

 

Nous avons un principe halakhique générale : « Ma´aséh ˋovôth Simon Lavonim – Les Actes des Patriarches Sont Un Signe Pour Leurs Enfants ». La raison pour laquelle la Ṭôroh nous raconte des histoires sur la vie des ˋovôth est afin que nous puissions apprendre de leurs vies des leçons de morale et d’éthique, et parce qu'elles nous racontent l'histoire future du peuple juif.

 

Dans la Ṭôroh,[2] Ya´aqôv ˋovinou ע״ה, fuyant la colère de son frère, ´ésow, se rend chez sa parenté, à Ḥoron. Rivqoh ˋimménou ע״ה donna à Yiṣḥoq ˋovinou ע״ה que la raison de ce voyage était qu'elle ne voulait pas que Ya´aqôv épouse une Kana'anith.

 

Ya´aqôv arriva à Ḥoron et se reposa près d'un puits afin d'attendre la suite des évènements. Roḥél ע״ה arriva, et dans son excitation en la voyant, il fut capable, d'un seul coup, de retirer le rocher qui couvrait le puits, une tache qui nécessitait généralement la force combinée de tous les bergers du village. Ya´aqôv embrassa Roḥél et se mit ensuite à pleurer. Rash’’i ז״ל explique qu'il pleura parce qu'il était venu les mains vides, alors que lorsque ˋali´azar était allé chercher une femme pour son père Yiṣḥoq, il avait emporté avec lui de nombreux présents.

 

Roḥél courut chez son père, Lovon, et lui raconta que son cousin était arrivé dans le village. Lovon se leva, et alla à sa rencontre, plein d'excitation, car il se souvenait à quel point Yiṣḥoq était riche et aussi de tous les beaux présents que ˋali´azar avait amené avec lui lorsqu'il était venu chercher et conclure un Shiddoukh pour Yiṣḥoq.

 

Lovon avait deux filles, Léˋoh ע״ה et Roḥél. Depuis qu'elles étaient toutes petites, toutes les discussions dans le village avaient toujours été, « Oh, que c'est beau. Léˋoh peut épouser ce beau garçon qu'est ´ésow et Roḥél peut épouser Ya´aqôv ». Léˋoh avait versé toutes les larmes de son corps durant des années à l'idée d'avoir un Shiddoukh si misérable.

 

Ya´aqôv avait immédiatement vu la beauté extérieure et la spiritualité intérieure de Roḥél, et avec cette combinaison, il était tombé amoureux d'elle dès le premier regard.

 

Il déclara à Lovon qu'il travaillerait sept ans et que son « salaire » sera qu'il lui donne Roḥél comme épouse. Sachant que Lovon était un malicieux, Ya´aqôv précisa « Roḥél, ta plus jeune fille ». Pas n'importe quelle Roḥél, pas n'importe quelle fille, mais cette personne en particulier. Lovon accepta, mais Ya´aqôv suspectant encore un mauvais coup, prépara un mot de passe secret entre lui et Roḥél pour la nuit de noce, de sorte que même s'il faisait sombre et qu'elle était voilée, il pourrait être sûr qu'il avait la bonne femme à ses côtés.

 

Ya´aqôv travailla durant sept années, et finalement, le temps du mariage avec sa bien-aimée était arrivé. Lovon le trompeur se prépara au mariage, mais aussi à tromper Ya´aqôv en remplaçant Roḥél par Léˋoh. Pourquoi désirait-il faire le remplacement ? Soit parce qu'il prenait plaisir à manipuler et à tromper les gens juste pour le plaisir que cela lui apportait, soit parce qu'il pensait pouvoir pousser Ya´aqôv à rester plus longtemps en donnant Roḥél plus tard. Oui, Lovon savait que Ya´aqôv était la meilleure chose qu'il pouvait avoir chez lui pour s'occuper du troupeau et le faire prospérer financièrement et matériellement.

 

Roḥél ne voulait pas que sa sœur soit embarrassée, elle donna alors à Léˋoh le mode de passe secret, et Ya´aqôv n'y vu que du feu. Le matin, il alla se plaindre auprès de Lovon, et Lovon lui présenta une excuse minable et feignit l'insulte. Ya´aqôv accepta de travailler sept années supplémentaires à condition qu'il puisse se marier à Roḥél. Tout de suite après la semaine de réjouissance avec Léˋoh, Ya´aqôv se maria à Roḥél.

 

La vie ne fut pas toute rose. Roḥél avait des problèmes de fertilité. Quand elle se plaignit à Ya´aqôv, il lui répondit, « J'ai eu des enfants avec Léˋoh, donc je ne suis à l'évidence pas le problème ». Elle répondit, « Mais quand ta grand-mère avait eu le même problème, ton grand-père a prié pour elle ». Il répondit, « Écoute, tu veux faire ce que ma grand-mère a fait ? » Et elle répondit, « Tu blagues ? Prends Bilhoh ma servante. Peut-être que je peux avoir des enfants à travers elle ».

 

Après quelques temps, Léˋoh vit qu'elle n'engendrait plus d'autres enfants, et elle proposa alors un arrangement similaire avec sa servante, Zilpoh. Ya´aqôv, sous la suggestion de ses épouses, épousa Bilhoh et Zilpoh, ce qui lui fit un total de quatre épouses.

 

C'est à partir de Ya´aqôv et de ses quatre épouses que l'entièreté du peuple juif a été construite.

 

Les commentateurs se demandent comment est-ce que Ya´aqôv a pu épouser deux sœurs, alors que la Ṭôroh interdit d'épouser la sœur de son épouse du vivant de cette dernière. Et diverses réponses ont été apportées pour expliquer cette anomalie. Mais ce qui est important à signaler, en comparaison de la pratique, de la « morale » et de l'attitude d'aujourd'hui sur la question de la polygamie, est que PAS UN SEUL commentateur Juif ne posa la question de savoir comment se fait-il que Ya´aqôv a pu épouser quatre femmes à la fois. La raison est simple : la Ṭôroh, le Ṭalmoudh, les Pôsaqim et la Halokhoh ont toujours considéré la polygamie comme autorisée : avoir plusieurs femmes est permis, normal et parfaitement convenable sous tous les angles. D'où le silence des commentateurs sur cette question.

 

·        L’Opposition Chrétienne à la Polygamie

 

Les commentateurs chrétiens, avec une perspective pervertie héritée de la tradition catholique romaine, ont d'énormes difficultés avec le fait que Ya´aqôv eut quatre épouses. Rien que ce point montre à quel point l'Église Romaine n'est pas une continuation des traditions, de la société et de la moralité juives, mais plutôt une continuation des traditions, sociétés et moralités païennes gréco-romaines.

 

L'homosexualité était une activité puissante dans la Grèce Antique. La caste des guerriers se considérait elle-même comme étant super masculine, et par conséquent, le plus grand objet de leur affection et attention était les autres hommes. La relation préférée était un soldat âgé avec un jeune garçon. Ils voyaient les femmes comme des « éleveuses », et les relations hétérosexuelles comme une nécessité malheureuse de la vie pour perpétuer la race humaine, mais certainement pas comme une relation idéale. À Sparte, chaque nouvelle recrue dans l'armée (à l'âge de 12 ans) se voyait assigner un soldat plus âgé et devenait son esclave sexuel durant deux années. Platon et Socrate, les soi-disant plus grands philosophes grecs étaient aussi homosexuels, et étaient férus de la pratique.

 

Le christianisme découragea quelque peu l'homosexualité, mais adopta entièrement l'attitude grecque envers les femmes et les relations normales entre hommes et femmes. Le christianisme adopta l'opinion selon laquelle la relation normale entre un homme et une femme est intrinsèquement pécheresse, et ne peut être justifiée que dans le but d'avoir des enfants, et que l'entièreté de l'institution du mariage n'est qu'une concession faite au Yéṣar Hora´. Le christianisme, basé sur une lecture de Matthieu 19:12, soutient que l'idéal pour un homme est de se castrer, et sur une interprétation faite d'une lettre de Paul, que l'homme devrait, si possible, tendre vers le célibat. Même n'avoir qu'une seule femme n'est qu'une concession faite au Yéṣar Hora´, et avoir plus qu'une femme est hors de question !

 

C'est en opposition totale avec les idéaux juifs. L'homosexualité est un péché passible de la peine de mort. Les relations maritales normales ne sont pas une concession faite au Yéṣar Hora´ ; elles représentent l'idéal. Un verset dans Qôhalath dit :[3] בַּבֹּקֶר זְרַע אֶת-זַרְעֶךָ, וְלָעֶרֶב אַל-תַּנַּח יָדֶךָ « Au matin, sème ta semence, et au soir, ne laisse pas ta main se reposer ». ḤaZa’’l interprètent ce verset pour dire qu'il faut se marier jeune et avoir des relations sexuelles normales, et même après avoir passé les années où l'on n'est plus capable d'engendrer des enfants il ne faut pas cesser d’avoir des rapports sexuels. Dans de nombreuses communautés, un homme ne recevait pas de Samikhoh (ordination rabbinique) tant qu'il n'était pas marié. Quelqu'un ne peut pas être un enseignant de petits enfants s'il n'est pas marié, d’après le Rambo’’m ז״ל. Nous considérons l'état marital comme l'état idéal.

 

L'opposition Chrétienne à la polygamie est profondément enracinée et toujours aussi virulente. Et cela nous permet de comprendre l'arrière-plan dans lequel le Ḥéram de Ribbénou Gérshôm a été émis. De même, les chrétiens censurèrent le Siddour, et à cause de cela, certains passages des prières qui furent interprétés comme étant contre la religion chrétienne furent retirés de la prière. Ce n'est que très récemment que les Siddourim sont en train d'être restaurés et que les Juifs se sentent à nouveau libres de retourner à leurs prières d'origine. De même, la Ṭaqqonoh contre la polygamie qui fut décrétée pour éviter des massacres de la part des chrétiens, disparaitra totalement lorsque nous nous rendrons compte que nous n'avons plus à avoir peur de ce que les chrétiens attendent de nous. Et peut-être que c'est une autre interprétation de ce que le Gaon de Vilna voulait dire lorsqu'il a dit qu'éliminer le Ḥéram de Ribbénou Gérshôm rapprocherait la Gaˋoulloh. Lorsque nous pouvons adorer Hashshém et accomplir Ses Miṣwôth sans s'inquiéter de ce que les Gôyim pensent, nous serons beaucoup plus proches de la Rédemption.

 

Comme nous le disons dans les prières des jours de fêtes, וּמִפְּנֵי חֲטָאֵינוּ גָּלִינוּ מֵאַרְצֵנוּ « Et à cause de nos péchés, nous avons été exilés de notre terre ». Nous sommes allés en exil au milieu des descendants de ´ésow. Rome et l'Église furent notre cadre de vie depuis 1900 ans. Durant cette période, nous nous sommes défendus du mieux que nous l'avons pu. Parmi les moyens de défense se trouvait le Ḥéram contre la polygamie, quelque chose considéré par Hashshém et Sa Ṭôroh comme étant moral, correct et normal. Quelque chose considéré correct et normal dans la vaste majorité des sociétés humaines depuis le commencement de l'humanité (comme si nous avions besoin de cela pour nous justifier). Mais à cause de notre exil en Europe, nous avons pris ici et là quelques valeurs étrangères. Nous avons pris la polygamie, quelque chose pratiqué par nos Patriarches, par Dowidh Hammalakh, etc., tout au long de notre histoire, et l'avons associé à des pratiques sexuelles dépravées. Nous devons divorcer avec cette attitude étrangère à notre foi. La polygamie a fait partie de la fondation de notre peuple, et faisait partie du plan Divin de Hashshém pour nous.

 

·        L'Attitude Juive Face à la Polygamie

 

Qu'en est-il donc du fait d'avoir plus qu'une femme du point de vue halakhique ? La Halokhoh claire est que Min Haṭṭôroh et Middarabbonon, un homme peut avoir autant d’épouses qu'il le souhaite (tant qu'il peut s'en occuper de façon équitable, dans le manger, les besoins matériels et les relations intimes). Personne n'a jamais sous-entendu que c'est moins moral ni quelques peu anormal.

 

·        Ḥéram de Ribbénou Gérshôm

 

Il y a approximativement mille ans, Ribbénou Gérshôm, l'un des plus grands rabbins de son époque, promulgua une Ṭaqqonoh contre le fait d'épouser plus qu'une femme. Depuis ce temps, dans de nombreuses communautés ashkénazes, dans la majorité des circonstances, les hommes ont été limités à une seule femme à la fois.

 

La compréhension courante est que cette interdiction s'applique à tous les Juifs ashkenazi peu importe le pays où il pourrait se trouver, pour toutes les générations et sous toutes les circonstances.

 

En l'honneur de Ya´aqôv ˋovinou, dont la Middoh était la Vérité, nous essayerons de corriger cette mauvaise compréhension.

 

Comme nous l'avons dit, le Gaon de Vilna déclara qu'abolir ce Ḥéram rapprocherait la Gaˋoulloh. Peut-être que l'idée de rapprocher la Gaˋoulloh est basée sur l’enseignement talmudique selon quoi Moshiaḥ ne viendra pas tant que toutes les âmes ne seront pas descendues et entrées dans des corps.

 

La plupart des gens considèrent l'idée d'un homme ayant deux épouses comme quelque peu immoral. En fait, toutes les autorités halakhiques déclarent sans la moindre hésitation ou doute que la raison pour le Ḥéram n'était pas pour des raisons ou considérations morales, ni pour protéger la Ṭôroh, mais pour des raisons purement sociales.

 

Rov Ya´aqôv d’Emden ז״ל dit que la raison pour le Ḥéram était le danger provenant du peuple des incirconcis (c-à-d., les chrétiens) au milieu duquel nous vivons. Le christianisme travailla dur entre l'an 600 et 900 de l'E.C., pour éradiquer d'Europe la pratique de la polygamie. En l'an 858, Hérard de Tours, archevêque de la ville de Tours, parvint à limiter les hommes à deux femmes (jusque là, la polygamie était encore pratiquée par les chrétiens). Peu de temps après, le décret contre les chrétiens d'Europe fut pratiquement achevé, et ils furent limités à une seule femme.

 

Puisque les chrétiens étaient à présent interdits de quelque chose qui avait été la pratique normale depuis des siècles, ils furent dégoûtés du fait que les Juifs, eux, pourraient continuer à avoir plus qu'une femme. Quand les Gôyim prennent en haine les Juifs, les Juifs se font évidemment massacrer. Par conséquent, afin d'empêcher les massacres de Juifs, Ribbénou Gérshôm, en sa qualité de chef et berger d’Israël, promulgua un Ḥéram contre la polygamie.

 

Rov Ya´aqôv d’Emden écrit que la Ṭaqqonoh est le résultat du fait que nous vivons au milieu des Gôyim. Il serait donc préférable d'éliminer le Ḥéram. Le Ḥéram n'était destiné à durer que jusqu'en l'an 5000 de notre calendrier. N'ajoutons pas à ce Ḥéram. Interdire totalement la polygamie va à l’encontre de ce Ḥéram et équivaut à imiter les Gôyim. La seule raison qui poussa Ribbénou Gérshôm à émettre ce Ḥéram, c'est que s’il ne l’avait pas fait cela aurait causé des massacres de Juifs par les chrétiens. En outre, Ribbénou Gérshôm n’en fit pas une interdiction absolue. Voici les propos exacts du Rov Ya´aqôv d’Emden :[4]

 

En nous s'est accompli, à cause de nos nombreux péchés, le verset : « Et ils se mélangeront aux milieux des Gôyim, etc. » Par conséquent, il convient de l'éliminer (le Ḥéram interdisant de prendre plus qu'une femme). N'ont-ils pas dit qu'il (Ribbénou Gérshôm) n'a émis ce Ḥéram que jusqu'en l'an 5000 ? Mais à coté de cela, n'ajoutons pas à ce Ḥéram, et vous ne pouvez avoir dans une nouvelle Ṭaqqonoh que les choses qui sont spécifiquement mentionnées dedans... Il aurait été préférable de ne même pas émettre une telle interdiction à cause de l'interdiction de marcher dans les voies des Gôyim, mais à cause du fait que cela ne nécessitait pas une action positive pour s'y conformer, et aussi à cause du danger guettant les Juifs qui vivent au milieu des incirconcis s'ils épousent deux épouses, Ribbénou Gérshôm, la Lumière de l'Exil, avait besoin d'émettre ce Ḥéram qui n'était pas convenable d'émettre.

 

Les détracteurs de la polygamie ne vous diront pas (peut-être par ignorance) que le Ḥéram fut géographiquement limité à l'Allemagne et aux parties de la France qui étaient limitrophes à l'Allemagne. Il s'est répandu en Pologne et en Russie occidentale. Il ne fut pas accepté dans le sud de la France, en Espagne, en Italie, en Grèce, en Turquie, en ˋaraṣ Yisroˋél, en Afrique et en Asie.

 

Dans les régions où il fut accepté, la Ṭaqqonoh incluait un Ḥéram (excommunication) pour ceux qui le transgresseraient. Dans les régions où il ne fut pas accepté, il n'avait aucune autorité de toute façon.

 

Selon la majorité des Pôsaqim, y compris le Shoulḥon ´oroukh et le Ramo’’ˋ, l'interdiction était temporaire jusqu'à l'an 5000 (qui correspond à l’an 1239 de l’7re Courante). Il s'est poursuivit par la suite comme Minhogh dans de nombreux endroits d'Europe, mas n'a plus la force d'un Ḥéram.

 

La plupart des gens présument que cette coutume s'applique à un ashkénaze même s'il s'installe là où le Ḥéram ne fut jamais accepté, comme par exemple en ˋaraṣ Yisroˋél. Cette position n'est pas universellement acceptée par les Pôsaqim. En fait, le Rashba’’ˋ ז״ל,[5] le Mahari’’l ז״ל[6] et le Rov Yôséph Qaˋrô ז״ל,[7] ainsi que le Rov d’Emden, soutiennent tous que dès qu'un ashkénaze s'est installé de façon permanente là où le Ḥéram ne fut pas accepté, il est entièrement libre du Ḥéram et peut épouser autant de femmes qu'il aura les moyens d’épouser et d'entretenir. Dans cette même Ṭashouvoh, Rov Yôséph Qaˋrô écrit qu'en Salonique, à Constantinople et à Adrianople, il y avait de larges communautés ashkénazes et personne ne questionna jamais le fait qu'un ashkénaze pouvait y épouser plusieurs femmes. Il cite aussi le cas d'un Ṭalmidh Ḥokhom ashkénaze à Jérusalem qui avait une femme et des enfants et qui épousa une seconde femme, et des Ṭalmidhé Ḥakhomim ashkénazes de renom assistèrent au mariage, venant d'aussi loin que Ṣaphoth et d'Égypte. Le Ra’’n ז״ל hésitait. D’après lui, le Ḥéram suivait un ashkénaze où qu’il aille. Rov Yôséph Qaˋrô affirme que si le Ra’’n avait vu la Ṭashouvoh du Rashba’’ˋ, il aurait été d'accord avec le Rashba’’ˋ que la Ṭaqqonoh est géographiquement limitée. Rov Ya´aqôv d’Emden écrit que puisque la seule raison pour l'institution de cette Ṭaqqonoh était la peur des chrétiens, dès que quelqu'un n'est plus situé dans un pays chrétien, le Ḥéram ne s'applique évidemment plus à lui. (Par « pays chrétien », on parle d'un pays non pas à majorité chrétienne, mais dont le christianisme est la religion d'état. Autrement dit, il n'y a pratiquement plus aucun pays de la sorte à notre époque.)

 

Ribbénou Gérshôm lui-même a rédigé trois Ṭashouvôth dans lesquelles il déclare que sa Ṭaqqonoh ne s'applique pas dans le cas où la femme n'a pas d'enfants ou a cessé d'avoir des enfants.[8] Si la femme consent à ce que son mari prenne une seconde épouse, le Ṭashbé’ṣ ז״ל dit que le Ḥéram ne s’applique alors pas.[9] Le Ra’’n soutient qu'il est probable, mais pas absolument certain, que dans un tel cas, le Ḥéram ne s'applique pas.[10]

 

Une lecture objective de la littérature halakhique indique qu'un ashkénaze vivant en Terre Sainte aujourd'hui est totalement libéré du Ḥéram pour trois raisons :

1.     la Ṭaqqonoh ne s’est jamais appliquée en Terre Sainte,

2.     elle n’a jamais visé l’intégralité des ashkénazes, et encore moins l’intégralité des Juifs,

3.     et elle est expirée depuis l'an 5000.

 

Si sa femme est d'accord qu'il prenne une seconde épouse, peu importe les raisons, cela lui sera permis, qu’il y ait une Ṭaqqonoh ou pas, car avec la permission de sa femme il peut tout faire. (Je rappelle que cela ne concerne que ceux qui acceptent ce décret. Les séfarades n’ayant jamais accepté ce décret, ainsi que les orientaux, ils n’ont pas besoin du moindre consentement de leur première femme pour en épouser une deuxième.) S'il y a un problème de fertilité, Ribbénou Gérshôm lui-même a écrit que le Ḥéram ne s'applique pas, donc un homme pouvait prendre une seconde épouse même en Allemagne avant l'année 5000, et à combien plus foret raison maintenant, et sans aucun doute en Terre Sainte, où la Ṭaqqonoh n'a jamais été appliquée.

 

·        La Promesse de Hashshém

 

Hashshém a promis à ˋavrohom ˋovinou que ses enfants seraient aussi nombreux que les étoiles du ciel. Jusqu'à présent, il semble que la constellation arabe ait plus d'étoiles que la nôtre. Nous devrions imiter nos ancêtres comme les arabes le font à leur façon, et rejeter la moralité chrétienne, pour embrasser la moralité de Hashshém. Il est( ironique que les chrétiens interdisent la polygamie mais n’ont aucun problème avec le fait qu’un homme ait de nombreuses maîtresses ou sortent avec plusieurs filles à la fois ! La récurrence du phénomène d’adultère dans les sociétés occidentales démontre que de nombreux hommes ne sont pas faits pour vivre uniquement avec une seule femme. Et le créateur connaissant la nature de l’être qu’Il a créé inclut dans Sa sainte Ṭôroh une autorisation d’épouser plusieurs femmes (dès lors qu’il y a une équité avec toutes les femmes, et qu’aucun de leurs besoins n’est négligé).

 

En outre, il y a statistiquement plus de femmes que d’hommes un peu partout dans le monde, et en tolérant la polygamie il sera plus facile pour les femmes de trouver un Shiddoukh, ce qui est un problème très récurrent dans de nombreuses communautés juives où les femmes célibataires ont toujours plus de mal à trouver un Shiddoukh que les hommes. Il n’y a pas assez d’hommes par rapport aux femmes désireuses d’être épousées.

 

En conclusion, selon la Halokhoh, en mettant de côté la notion de « Loi du pays », un Juif peut épouser plus qu'une femme, et non seulement cela lui est permis, mais dans de nombreux cas c'est une Miṣwoh, et peut aider à rapprocher la Rédemption.



[1] Ma´aséh Rov Hashsholém, page 276

[2] À partir de Baˋshith 28 :10.

[3] Qôhalath 11 :6

[4] Shaˋélôth Yaˋavé’’ṣ, Volume 2, Simon 15

[5] Shaˋélôth Outhshouvôth HaRashba’’ˋ, Volume 3, Simon 446

[6] Shaˋélôth Outhshouvôth Hammahari’’l Hahadhoshôth, Makhôn Yarousholayim, Simon 202

[7] Shaˋélôth Outhshouvôth Habbéth Yôséph, Kathoubbôth, Shaˋéloh 14

[8] Voir ˋôṣar Happôsaqim, ˋévan Ho´azar 1 :10, pages 14a-b.

[9] Ṭashbé’ṣ, Shaˋéloh 94

[10] Shaˋélôth Outhshouvôth HaRa’’nfin du Simon 48, cite par le Béth Yôséph.

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