lundi 23 novembre 2015

Le Tallith : un châle de prière ou un vêtement ?

ב״ה

Le Tallith : un châle de prière ou un vêtement ?


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De nos jours, l'usage du Tallith est uniquement confiné aux moments de la prière, à tel point que le Tallith est souvent traduit en français par « châle de prière ». Mais c'est l'une des distorsions modernes les plus profondes.

Toutes les sources juives faisant autorité démontrent que le Tallith était, à l'origine, fait de laine et que celui qui le portait le traitait comme un vêtement ordinaire de la vie quotidienne, et s'en servait donc pour des usages très variés, comme par exemple envelopper et transporter ses marchandises dedans, l'utiliser comme couverture pour se tenir au chaud, comme châle de prière, comme drap de lit pour dormir dessus, comme tapis de prière, comme manteau, etc. Et sur la base d'une Tashouvoh du Ramba''m ז״ל, il ressort que le Minhogh à son époque consistait à porter le Tallith tout au long de la journée. En outre, du Talmoudh il ressort également clairement que lorsque le Tallith est utilisé comme châle de prière, contrairement à notre époque, il peut être porté pour toutes les prières, et pas seulement pour celle de Shaharith. En fait, le Ramba''m rapporte dans son Mishnéh Tôroh que l'on doit s'envelopper d'un Tallith pour toutes les prières quotidiennes. C'est du moins obligatoire pour les Talmidhé Hakhomim.

Jusqu'à ce jour, les Témonim (Juifs yéménites), les Talmidhé HaRamba''m et les Dôr Da´im conservent encore certaines distinctions au niveau de l'usage du Tallith qui les rendent uniques et authentiques vis-à-vis du reste des Juifs. Le Rov Ya´aqôv Sappir ז״ל, qui fut envoyé au Yémen en 1859 pour le compte de diverses organisations religieuses de Palestine, écrivait que « les hommes qui craignent Dieu, les enseignants du peuple, portaient un autre vêtement, avec quatre coins et arborant des Sisith, en-dessous de leur manteau et par dessus leurs dos ; le Shamlé (c'est ainsi qu'on l'appelle en arabe), noir ou avec des bandes noires et blanches, fait de laine épaisse, carré, avec quatre coins, avec lequel ils couvrent leurs têtes et corps jusqu'en bas, et aux quatre coins ils pendent des Sisith, suivant la Halokhoh. Et ils se couvrent du Shamlé tout au long de la journée... la nuit aussi, ils se couvrent avec, ou l'utilisent pour couvrir le matelas sur lequel ils dorment. Et il est utilisé pour toutes les tâches ; les gens transportent des choses dedans lorsqu'ils s'en vont acheter ou vendre au marché, ou l'utilisent pour transporter du bois ».

En réalité, le Tallith est un vêtement « normal » et n'a jamais été exclusivement associé à la prière. On peut l'utiliser pour tous les usages, sans aucun problème halakhique. Mais aujourd'hui, en raison du fétichisme qui s'est répandu au sein des communautés juives, principalement Harédhim, le Tallith est traité comme un vêtement « sacré », qui ne peut être porté que pour la prière du matin, qui doit se plier et se déplier d'une manière particulière, et qui doit être porté d'une manière particulière. Toutes ces choses sont des bêtises qui n'ont aucune source halakhique. Nos Sages ne se sont jamais embêtés avec ces futilités. Un Tallith est un vêtement comme un autre, rien de plus, rien de moins. Évidemment, des Sisith y sont attachés, mais cela reste un vêtement. L'attitude moderne vis-à-vis du Tallith provient des supercheries kabbalistiques et, comme cela a été dit, du fétichisme qui domine les milieux dits « froum » ; ils traitent leurs chapeaux, leurs Shtreimelakh, leurs Bekishe, leurs chaussettes blanches ou noires, leur Gartel, leurs chemises blanches, leurs longs manteaux, etc., comme s'ils étaient dotés de pouvoirs magiques, comme s'ils portaient des vêtements sacro-saints, au point que porter les mauvaises couleurs de chaussettes devient un drame ! On ne doit jamais perdre de vue qu'il ne s'agit que de « vêtements » ! Que l'on me comprenne bien : le problème n'est pas de porter un caftan, ou un certain type de chapeau ; le problème survient lorsqu'on accorde à ces vêtements des propriétés ou une importance exagérée. Et c'est cela qui a amené le Tallith à passer d'un vêtement ordinaire de tous les jours à un châle exclusivement réservé à la prière. Les gens doivent donc savoir qu'un Tallith est un vêtement comme les autres, et qu'il n'y a absolument aucun problème à s'asseoir ou dormir dessus, ni à l'utiliser pour d'autres choses que pour la prière, comme par exemple pour transporter des affaires, pour se tenir chaud s'il faut froid, etc. Le ciel ne vous tombera pas sur la tête parce que vous aurez fait un usage « profane » du Tallith. Bien au contraire, le Tallith est bien un vêtement multifonction !

Quant au Tallith Qoton, le petit Tallith qui est porté sous les vêtements (les Hasidhim Heimishe veillent à le porter au-dessus des vêtements), au Yémen il n'était porté que par une minorité de Juifs. C'est seulement après que la communauté juive yéménite a immigré en Palestine qu'ils ont changé leur Minhogh pour se conformer à celui de leurs frères, qui en portaient un chaque jour.

Le Rov Shôlom Yishoq Halléwi, qui quitta le Yémen pour la Palestine en 1923, reconnut que seule une très petite minorité portait un Tallith Qoton, « mais cela ne signifie pas que les Juifs yéménites estimaient suffisant de porter un Tallith uniquement durant la prière. Le Minhogh accepté est que chaque Juif yéménite de sexe masculin au Yémen ne quittait pas le seuil de la porte de sa maison sans avoir un Tallith sur les épaules, et c'était le Tallith qu'il enveloppait autour [de lui] à la Synagogue durant la prière ». Et telle est la pratique que nous, les Talmidhé HaRamba''m encourageons : porter le Tallith aussi longtemps et autant de fois que cela est possible au cours d'une journée, et même de sortir avec chaque fois que cela est possible, évidemment. Mais les gens doivent savoir que le Tallith n'est en rien un vêtement exclusif à la prière ; c'est un vêtement pour les usages de la vie de tous les jours (manteau, tapis de prière, châle, couverture, drap, etc.). En outre, il n'existe aucune couleur halakhique que devrait avoir un Tallith. Que le Tallith soit jaune, bleu, noir, blanc, gris, vert, multicolore, etc., cela n'a aucune importance. (Nous y reviendrons une autre fois, Dieu voulant.)

Ci-dessous, quelques illustrations de la façon dont le Tallith était/est porté dans les milieux yéménites, Talmidhé HaRamba''m et Dôr Da´im (comme vous pourrez le voir, il a différentes couleurs, et peut se porter de diverses façons) :














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