ב״ה
Quel
est l'écartement des jambes interdit ?
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Certains
invoquent la Gamoro` de Pésahim 3a-b
(que nous avons citée dans l'article
précédent) pour conclure que le port du pantalon est
interdit aux femmes en raison du principe de פִּיסוּק
רַגְלַיִים « Pisouq
Raghlayim – écartement des jambes ». Dans certains livres
sur la Sani´outh, il est même fait mention qu'en vertu de
cette notion, Rash''i ז״ל,
dans son commentaire sur cette Gamoro`, aurait interdit le port du
pantalon aux femmes.
Mais
nous avons rapporté cette Gamoro` dans l'article précédent et dit
que Rash''i ne soutenait pas une telle position. Il ne cite même pas
le pantalon dans son commentaire, mais explique que bien que
« monter » et « s'asseoir » se réfèrent à
la même chose concernant l'impureté rituelle de l'homme Zov et de
la femme Niddoh, parce que la Tôroh se devait d'employer un langage
raffiné il n'était pas approprié de mentionner explicitement le
fait de monter (רְכִיבָה
« Rakhivoh »)
et écarter les jambes ( פִּיסוּק
רַגְלַיִים « Pisouq
Raghlayim ») par une femme. La question ne tourne pas autour de
l'acte, mais de la manière décente de l'exprimer. Pour ceux qui
veulent lire d'eux-mêmes le commentaire de Rash''i, voir
ci-dessous :
Voici
comment le commentaire de Rash''i est déformé dans certains livres
sur la Sani´outh (dont un très populaire dans les milieux
Harédhim, mais dont je ne citerai pas le nom) : Rash''i
dit que la Tôroh ne se réfère pas au fait qu'une femme monte un
animal parce qu'il n'est pas approprié de mentionner le fait qu'elle
« monte », et évite ainsi de mentionner la division de
leurs jambes en deux. Par extension, si l'on ne doit pas même
mentionner l'acte, qui est lié à l'endroit du corps
où les parties supérieures de ses jambes s'écartent, à l'évidence
c'est une transgression très grave de la Sani´outh si une
femme porte un pantalon, car les gens peuvent alors voir
qu'une femme a deux jambes et que son corps est séparé à cet
endroit ! Ainsi, Rash''i n'aurait eu aucune hésitation à
interdire le pantalon, parce que c'est de la פְּרִיצוּת
« Parisouth »
(débauche, indécence).
Mais
Rash''i ne dit pas cela ! Si tel était le cas, la Tôroh ne
mentionnerait pas non plus le fait qu'une femme marche
parce que marcher implique le fait qu'une femme a deux jambes qui se
divisent en deux dans la partie supérieure de son corps lorsqu'elle
fait le mouvement. Et cela est bien visible ! Maintenant,
éloignez-vous de votre écran d'ordinateur, et faites l'exercice
suivant : faites semblant de monter un cheval ou un âne. Gardez
droit votre dos, mais écartez largement vos jambes et faites
descendre votre bassin, comme si vous étiez assis sur un cheval.
Retirez de votre esprit le cheval, et vous voyez bien que vous restez
dans une pose grossière et loin d'être pudique.
C'est
de cela que parlait Rash''i ! Pisouq Raghlayim ne se réfère
pas à l'endroit du corps où les jambes se séparent en deux, et
encore moins au fait de voir une division des jambes, ni à un
vêtement qui rendrait apparente la division des jambes en deux.
Plutôt, cela se réfère littéralement à l'écartement des jambes.
Lisez à nouveau la Gamoro` et Rash''i et voyez par vous-mêmes que
c'est de cela qu'il s'agit. Puis, lisez également Rabbénou Hanon`él
ז״ל,
qui dit plus ou moins la même chose, mais en des termes différents :
« monter se fait par l'écartement des jambes ».
Ainsi, même si la Gamoro` voulait parler de l'acte en lui-même (ce
qui n'est pas le cas, car toute la Soughyoh tourne autour du fait de
savoir s'il est décent de le dire explicitement ou pas), on ne peut
utiliser ni cette Gamoro`, ni le commentaire qu'en fait Rash''i, pour
dire que le pantalon est interdit, car on ne parle pas de l'endroit
où les jambes se divisent, ni du fait de voir la division des
jambes, et encore moins d'un vêtement qui permet de voir que les
jambes sont divisées en deux, mais littéralement du fait d'écarter
grand les jambes. Et nous avons de nombreuses preuves à cela !
Reconnais
seulement ton crime, car tu as été rebelle envers HaShem, ton
Dieu ; tu as dispersé tes voies vers les étrangers, sous
chaque arbre verdoyant, et vous n'avez pas écouté Ma voix, dit
HaShem.
|
אַךְ
דְּעִי עֲוֹנֵךְ,
כִּי
בַּה׳ אֱלֹהַיִךְ פָּשָׁעַתְּ;
וַתְּפַזְּרִי
אֶת-דְּרָכַיִךְ
לַזָּרִים,
תַּחַת
כָּל-עֵץ
רַעֲנָן,
וּבְקוֹלִי
לֹא-שְׁמַעְתֶּם,
נְאֻם-ה׳
|
Commentant
ce verset, Rash''i écrit :
tu
as dispersé tes voies : C'est une expression de
débauche, un écartement des jambes vers les parties intimes
d'une femme.
|
Ainsi,
« tu as dispersé tes voies » est un euphémisme pour
dire « tu as écarté tes jambes ». Et le ton et le
contexte de ce passage du Prophète Yirmayohou indiquent clairement
qu'il a une connotation sexuelle, mais le Prophète a préféré
l'exprimer décemment en utilisant l'image de disperser ses voies.
Cela nous est plus explicitement dit dans le passage suivant du
Prophète Yahazqé`l ע״ה2 :
Sur
chaque commencement de route tu te construis des tréteaux, tu
vilipendes ta beauté, tu écartes tes
jambes à tout passant, et tu multiplies tes
prostitutions.
|
אֶל-כָּל-רֹאשׁ
דֶּרֶךְ,
בָּנִית
רָמָתֵךְ,
וַתְּתַעֲבִי
אֶת-יָפְיֵךְ,
וַתְּפַשְּׂקִי
אֶת-רַגְלַיִךְ
לְכָל-עוֹבֵר;
וַתַּרְבִּי,
אֶת-תַּזְנוּתָיִךְ
|
Là,
l'expression « écarter les jambes » est explicitement
mentionnée, et il est clair que cela a une connotation sexuelle.
C'est également dans ce sens-là que cette expression est employée
dans le Sékhél Tôv3,
le Yalqout Shim´ôni4,
qui cite en fait la Gamoro` de Kathoubbôth 39a. Là, la Gamoro`
rapporte que lorsque quelqu'un cause du tort à son prochain, il doit
lui payer des compensations financières pour plusieurs points, dont
la « douleur » qu'il lui a causée. Et la Gamoro`
explique que dans le cas d'un viol, le paiement pour la « douleur »
causée se rapporte à l'écartement des jambes de la victime.
L'homme a écarté de force les jambes de cette femme et doit donc
payer pour cela. Et l'expression « Pisouq Raghlayim » est
également employée dans ce sens-là dans les `iggarôth Môshah du
Rov Môshah Feinstein ז״ל.5
Ainsi,
Rash''i ne parlait pas du pantalon, ni même de la Sani´outh
(qui n'est même pas le sujet de la Soughyoh), et encore moins d'une
situation où l'on peut observer qu'une femme a les jambes divisées
en deux, ni même du fait de porter un vêtement qui se sépare à
partir de son bassin en deux entités séparées. Il parle du fait de
discuter d'une femme se trouvant dans une position
spécifique, qui est nécessaire pour monter un cheval, c'est-à-dire
une position dans laquelle ses jambes sont largement écartées. (Et
non, contrairement au mythe qui circule dans les milieux Harédhim,
monter un cheval n'est pas interdit aux femmes. Et le Talmoudh
lui-même parle de situations où des femmes montaient des animaux.
L'une des raisons que les Harédhim invoquent souvent pour
l'interdire est cette Gamoro`, ce qui est ridicule. Autre argument :
le fait de faire du cheval pourrait déchirer l'hymen. C'est absurde
et un mythe qui a la vie longue chez les Harédhim ! En
outre, quad bien même l'hymen d'une fille se serait déchiré en
faisant du cheval, cela n'a aucune incidence halakhique, puisque la
Halokhoh ne compte comme perte de la virginité que le cas d'une
femme ayant consenti à un rapport sexuel. Ainsi, la Gamoro` nous
informe que si une femme s'est déchiré l'hymen par quoi que ce soit
d'autre qu'une relation sexuelle consentie, elle reste vierge et cela
n'a pas de conséquence sur sa Kathoubboh).
L'écartement
des jambes qu'interdit la Tôroh n'est pas celui qui se produit
lorsqu'une femme monte un cheval, ni même lorsqu'elle fait un
mouvement naturel, et encore moins lorsqu'elle porte un vêtement qui
montre la division de ses jambes en deux, mais le fait d'écarter ses
jambes d'une manière provocante, indécente ou impudique. Et de ce
fait, peu importe ce qu'elle porte, même une jupe, écarter ses
jambes d'une certaine manière, comme on l'a vu dans les versets
susmentionnés, est ce qui est interdit, un peu à l'image de ces
jeunes filles Harédhiyôth ci-dessous :
On
peut donc très bien être coupable de Pisouq Raghlayim peu importe
le vêtement que l'on porte, puisque cette interdiction n'a
absolument rien à voir avec un vêtement ! Et dans le cas d'une
femme qui monte un animal, c'est tout simplement une position
naturelle !
Il
n'y a pas de Parisouth dans le fait de porter un vêtement qui
montre la séparation des jambes. Ce n'est pas de cela que parlait la
Gamoro`, ce n'est pas ce que disait Rash''i, et on ne peut utiliser
ce passage talmudique pour conclure que porter un pantalon est
interdit aux femmes !
Rappelons
que les pantalons pour femmes existent depuis le 6ème siècle avant
l’Ère Courante, mais que c'est seulement depuis le 20ème siècle
que les femmes européennes en portent. Mais des femmes Juives en
portaient depuis des siècles dans différents pays non européens,
comme au Maghreb, au Yémen, ou encore en Inde et d'autres pays. Que
l’Église Catholique en Europe ait longtemps considéré comme de
la Parisouth le fait qu'une femme porte des pantalons ne doit
avoir aucun effet quant à la question de savoir si c'est de la
Parisouth d'après la Halokhoh (et comme je l'ai dit, les
femmes Juives de tous les continents hors de l'Europe
portaient/portent des pantalons sous leurs robes/jupes), tout comme
la pudibonderie de l’Ère victorienne ne doit pas nous contraindre
à placer des couches sur tous nos chevaux !
Donc,
pour le redire plus clairement : l'écartement des jambes
interdit est celui qui rappelle la position dans les rapports
intimes, ou qui ressemble à ce qu'on ferait si on montait un animal,
car c'est indécent. Cela n'a rien à voir avec le fait de porter un
pantalon, car écarter ses jambes de cette manière, même en jupe ou
en robe, est ce qui est interdit.
Je
conclus en rappelant que de nombreux Pôsqim sont clairement d'avis
que les règles de Sani´outh sont autant en vigueur pour les
hommes. Le Hozôn `ish ז״ל,
par exemple, estimait qu'il ne convenait pas qu'un homme sorte en
pantalon, parce que c'est moulant et fait souvent saillir les parties
génitales de l'homme. C'est pourquoi il était d'avis qu'un homme
devait porter un long manteau par-dessus. En fait, il portait
toujours un Tallith Qoton extra large de sorte que lorsqu'il devait
faire, sous la chaleur, sa promenade quotidienne que lui avait
ordonnée son médecin pour ses problèmes de santé, il pourrait
placer son manteau sur ses épaules tout en ayant son Tallith Qoton
qui était suffisamment grand que pour couvrir ses genoux et ne pas
laisser paraître son entrejambe. C'est rapporté par le Rov `aharôn
Roter, l'auteur du Sha`aré `aharôn, qui était le concierge du
Hozôn `ish vers la fin de sa vie.
1Yirmayohou
3:13
216:25
3Shamôth
Chapitre 12
4Yahazqé`l
Réméz 356
5Shou''th
`iggarôth Môshah, `évan Ho´azar Volume 4, Chapitre 41