lundi 7 décembre 2015

Version raccourcie de la Birkath Hammozôn

ב״ה

Version raccourcie de la Birkath Hammozôn


Cet article peut être téléchargé ici.

À la suite de l'article intitulé « La Birkath Hammozôn », la question suivante m'a été soumise : « Y aurait-il également une version plus courte lorsqu'on est pressé par le temps ? ».

C'est une excellente question ! À la base, je comptais en parler dans l'article susmentionné, mais je m'en suis finalement abstenu pour ne pas être trop long. Je vais donc le faire ici, la question ayant été posée.

Dans son Mishnéh Tôroh, au Chapitre 2 des Hilkôth Barokhôth, le Ramba''m ז״ל traite effectivement du cas de personnes ne pouvant pas faire l'intégralité de la Birkath Hammozôn, parce qu'elles sont pressées par le temps. Il utilise l'exemple d'ouvriers devant travailler dans la maison de celui qui les a engagés. À un moment donné, ils décident de faire une pause pour manger du pain. Si après avoir mangé ils faisaient la Birkath Hammozôn dans son intégralité, et que cela pourrait les amener à reprendre leur travail trop tard, ce qui leur causerait des soucis avec leur employeur1, ils doivent faire une version raccourcie de la Birkath Hammozôn. Comment cela fonctionne-t-il ? Le Ramba''m écrit2 :

Ils ne bénissent pas avant. Et après leur repas, ils font uniquement deux bénédictions, afin de ne pas négliger le travail [qu'ils doivent réaliser] pour le maître de maison. La première bénédiction, [ils la font] telle qu'elle a été instituée. La deuxième commence par [la formule de] la Birkath Ho´oras, inclut [une mention à] la construction de Yarousholayim dans la Birkath Ho`oras, et se conclut [par la formule de conclusion de] la Birkath Ho`oras.
אֵין מְבָרְכִין לְפָנֶיהָ. וּמְבָרְכִין לְאַחַר סְעוֹדָתָן שְׁתֵּי בְּרָכוֹת בִּלְבָד, כְּדֵי שֶׁלֹּא יִבָּטְלוּ מִמְלֶאכֶת בַּעַל הַבַּיִת: בְּרָכָה רִאשׁוֹנָה כְּתִקְנָהּ; שְׁנִיָּה פּוֹתֵחַ בְּבִרְכַת הָאָרֶץ, וְכוֹלֵל בּוֹנֵה יְרוּשָׁלַיִם בְּבִרְכַת הָאָרֶץ, וְחוֹתֵם בְּבִרְכַת הָאָרֶץ

Là encore, comme pour son exemple, toutes ces instructions sont données par HaZa''l dans le Talmoudh, au traité Barokhôth 16a. Nous allons les décortiquer afin de bien comprendre de quoi il s'agit.

  • Ils ne bénissent pas avant

L'obligation de réciter une bénédiction avant de manger est d'origine rabbinique, et est donc d'un niveau inférieur à l'obligation de bénir HaShem après avoir mangé. Par conséquent, dans certaines situations, comme par exemple lorsque notre temps est compté, les Sages ont levé cette obligation.

De ce fait, dans des situations pressantes, on ne fera même pas la bénédiction de « Hammôsi` » avant de manger son pain.

  • Et après leur repas, ils font uniquement deux bénédictions

Comme cela est indiqué dans la suite de cette Halokhoh, la première bénédiction sera la première de la Birkath Hammozôn, tandis que la deuxième sera une combinaison des deuxième et troisième bénédictions de la Birkath Hammozôn (ainsi, les thèmes de la quatrième bénédiction ne seront même pas repris, car la quatrième bénédiction est un ajout tardif venus après l'abolition du Sanhédhrin, comme nous l'avions expliqué dans l'article intitulé « La Birkath Hammozôn » ; elle n'a donc pas le statut « biblique » des trois autres).

La raison à cela est que la Tôroh ne nous demande que de mentionner trois concepts dans la Birkath Hammozôn, qui sont :
  1. remercier HaShem pour la nourriture,
  2. exprimer notre appréciation de `aras Yisro`él, et
  3. faire mention de Yarousholayim ´ir Haqqôdhash, d'où découle en réalité toute la sainteté de `aras Yisro`él.

D'après la Tôroh, la façon dont ces trois concepts sont mentionnés n'a aucune importance, que ce soit dans une bénédiction (comme c'est le cas du « ´al Hammihyoh », où ces trois concepts sont résumés en une seule bénédiction), dans deux bénédictions (comme c'est le cas dans cette Halokhoh-ci), ou dans trois bénédictions (comme c'est le cas dans les situations ordinaires). En d'autres mots, l'essentiel est que ces trois concepts soient mentionnés. Le nombre de bénédictions nécessaires pour que ces trois concepts soient mentionnés n'a pas une importance. De ce fait, on peut les abréger ici en deux bénédictions.

  • La première bénédiction, [ils la font] telle qu'elle a été instituée

Nous venons juste d'expliquer que même si les trois concepts étaient résumés dans une seule bénédiction, c'était valable au niveau de la Tôroh. Pourquoi donc le faisons-nous en deux bénédictions ? Et pourquoi cette différence entre la première bénédiction, qui est faite intégralement, et la deuxième bénédiction, qui est une combinaison des deuxième et troisième bénédictions de la Birkath Hammozôn ?

Dans son commentaire sur la Gamoro` de Barokhôth 16a, qui est la source de cette Halokhoh, Rash''i ז״ל explique que nos Sages ont fait cette distinction parce que les deuxième et troisième bénédictions de la Birkath Hammozôn se ressemblent beaucoup et ont un thème commun (la sainteté de `aras Yisro`él découle directement de la ville de Yarousholayim. De ce fait, faire mention de `aras Yisro`él dans une bénédiction, puis de Yarousholayim dans une autre, c'est prolonger le même thème). Par conséquent, ces deux bénédictions peuvent aisément être combinées en une seule. Par contre, la première bénédiction de la Birkath Hammozôn est centré sur un thème complètement différent (la nourriture). Par conséquent, elle reste à part.

Il existe une raison supplémentaire : si les trois bénédictions de la Birkath Hammozôn avaient été abrégées en une seule bénédiction, cela aurait alors porté confusion avec la bénédiction de « ´al Hammihyoh », qui est justement l'abrégé des trois bénédictions de la Birkath Hammozôn en une seule bénédiction, mais qui n'est faite qu'après un repas au cours duquel un aliment (autre que le pain) à base des cinq céréales aura été consommé. Pour éviter cette confusion, il a été demandé de résumer ici la Birkath Hammozôn en deux bénédictions, plutôt qu'une.

  • La deuxième commence par [la formule de] la Birkath Ho´oras, inclut [une mention à] la construction de Yarousholayim dans la Birkath Ho`oras, et se conclut [par la formule de conclusion de] la Birkath Ho`oras

Ainsi, les thèmes des deuxième et troisième bénédictions de la Birkath Hammozôn sont combinés en une seule bénédiction qui commence et se termine par les formules de la deuxième bénédiction de la Birkath Hammozôn, et inclut avant la conclusion une mention de la construction de Yarousholayim ´ir Haqqôdhash.

Rabbénou Manôah ז״ל commente en disant que cela signifie que les deuxième et troisième bénédictions de la Birkath Hammozôn doivent être abrégées de la manière suivante :

Nous faisons preuve de reconnaissance à Ton égard, `adhônoy notre Dieu, car Tu nous as accordé en héritage un pays précieux, bon et spacieux, ainsi que Yarousholayim Ta ville. Puisse-Tu la reconstruire prochainement, de nos jours. Béni Tu es `adhônoy, pour le pays et pour la nourriture.
נוֹדֶה לְּךָ יהוה אֱלֹהֵינוּ כִּי הִנְחַלְתָּנוּ אֶרֶץ חֶמְדָּה טוֹבָה וּרְחָבָה וִירוּשָׁלַיִם עִירֶךָ. וּבְנֵה אוֹתָהּ בְּקָרוֹב בְּיָמֵינוּ. בָּרוּךְ אַתָּה יהוה, עַל הָאָרֶץ וְעַל הַמָּזוֹן

En résumé :

Lorsque quelqu'un est, pour une raison ou pour une autre, pressé par le temps, et pense ne pas pouvoir faire la Birkath Hammozôn dans son intégralité, avant de manger il ne fera pas de bénédiction de « Hammôsi` ». Et quand il aura terminé son repas, il fera deux bénédictions : la première l’acquittera du thème de la première bénédiction de la Birkath Hammozôn, tandis que la deuxième l'acquittera des thèmes des deuxième et troisième bénédictions de la Birkath Hammozôn. Il dira donc :

Béni Tu es `adhônoy notre Dieu, Roi de l'univers, Qui nous nourrit ainsi que le monde entier de bien, de faveur, de grâce et de miséricorde. Notre Dieu, notre Père, conduis-nous, pourvois pour nous, et ne nous rend pas dépendants des présents de la chair et du sang, mais seulement de Ta main pleine et ouverte, afin que nous ne soyons, pour l'éternité et à jamais, ni [couverts] de honte ni disgraciés, car il est dit3 : « Tu ouvres Ta main et satisfais les besoins de tout être vivant ». Béni Tu es `adhônoy, Qui nourrit tout [le monde].
בָּרוּךְ אַתָּה יהוה אֱלֹהֵינוּ מֶלֶךְ הָעוֹלָם, הַזָּן אוֹתָנוּ וְאֶת הָעוֹלָם כֻּלּוֹ בְּטוֹב, בְּחֵן בְּחֶסֶד וּבְרַחֲמִים. אֱלֹהֵינוּ אָבִינוּ, רְעֵנוּ, פַּרְנְסֵנוּ, וְאַל תַּצְרִיכֵנוּ לִידֵי מַתְּנַת בָּשָׂר וָדָם. כִּי אִם לְיָדְךָ הַמְּלֵאָה וְהַפְּתוּחָה. שֶׁלֹּא נֵבוֹשׁ וְלֹא נִכָּלֵם לְעוֹלָם וָעֶד. כָּאָמוּר: פּוֹתֵ֥חַ אֶת־יָדֶ֑ךָ וּמַשְׂבִּ֖יעַ לְכָל־חַ֣י רָצֽוֹן. בָּרוּךְ אַתָּה יהוה, הַזָּן אֶת הַכֹּל

Nous faisons preuve de reconnaissance à Ton égard, `adhônoy notre Dieu, car Tu nous as accordé en héritage un pays précieux, bon et spacieux, ainsi que Yarousholayim Ta ville. Puisse-Tu la reconstruire prochainement, de nos jours. Béni Tu es `adhônoy, pour le pays et pour la nourriture.
נוֹדֶה לְּךָ יהוה אֱלֹהֵינוּ כִּי הִנְחַלְתָּנוּ אֶרֶץ חֶמְדָּה טוֹבָה וּרְחָבָה וִירוּשָׁלַיִם עִירֶךָ. וּבְנֵה אוֹתָהּ בְּקָרוֹב בְּיָמֵינוּ. בָּרוּךְ אַתָּה יהוה, עַל הָאָרֶץ וְעַל הַמָּזוֹן

Et quand est-il si même faire cette version abrégée de la Birkath Hammozôn n'est pas possible, car la première bénédiction est trop longue et qu'on n'aura donc pas le temps de la faire intégralement ? Nos Sages répondent à cette question en rapportant qu'un berger nommé Binyomin, lorsqu'il mangeait en gardant son troupeau, il abrégeait alors la première bénédiction.4 Et comment l'abrégeait-il ? Nos Sages disent qu'il se contentait de dire en Araméen (ou toute autre langue que l'Hébreu) la bénédiction suivante :

Béni soit le Miséricordieux, notre Dieu Roi de l'univers, le Maître de ce pain.
ְרִיךְ רַחַמָנָא אֱלָהָנָא מַלְכָּא דְעָלְמָא, מָרָא דְהַאי פִּיתָּא

Puis, il faisait l'abrégé des deuxième et troisième bénédictions de la Birkath Hammozôn de la façon prescrite plus haut. Et ainsi, il ne perdait pas de temps et pouvait rapidement reprendre la surveillance de son troupeau.

Pourquoi la disait-il en Araméen (ou toute autre langue, excepté l'Hébreu) ? La Gamoro` répond qu'il est seulement permis de modifier la Birkath Hammozôn (ou toute autre bénédiction) dans toute langue que l'on désire si on reste fidèle à la forme que la bénédiction a lorsqu'elle fut instituée par les Sages. Mais si on ne garde pas la forme de la formulation de nos Sages, on devra employer une autre langue que l'Hébreu pour s'exprimer. Puisque nos Sages n'ont pas institué de forme abrégée de la première bénédiction de la Birkath Hammozôn (contrairement à la forme abrégé des deuxième et troisième bénédictions de la Birkath Hammozôn), bien qu'ils l'ont tolérée dans les cas de grandes nécessités (comme Binyomin et son troupeau), celui qui abrégera la première bénédiction devra le faire dans une langue autre que l'Hébreu, et cela sera valable dès lors que les mots « Béni », « notre Dieu, Roi de l'Univers » et « pain » seront employés dans la formule. (Le Nom d'HaShem, « `adhônoy », ne pourra pas être employé, car il ne s'agit pas d'une formule instituée par HaZa''l, et la règle veut que toute bénédiction que l'on récite, mais dont la récitation n'a pas été demandée par HaZa''l, ne mérite pas que le Nom d'HaShem y soit mentionné. Par contre, lorsque HaZa''l ont dit qu'il fallait faire une bénédiction dans telle ou telle cas, mais n'ont pas dit la formule à employer, la bénédiction pourra être faite en Hébreu et inclure le Nom d'HaShem.)

En d'autres mots, HaZa''l ont décrété que dans des situations où ne pas faire la Birkath Hammozôn en entier n'était pas possible, il fallait faire la première bénédiction de la Birkath Hammozôn dans son intégralité et combiner les thèmes des deuxième et troisième bénédictions en une seule bénédiction. Mais certaines personnes se retrouvaient parfois dans des situations où ils n'avaient pas le temps de faire la première bénédiction dans son intégralité. HaZa''l n'ont pas dit explicitement ce qu'il fallait faire dans de tels cas, et certaines personnes prenaient la liberté d'abréger eux-mêmes la première bénédiction en récitant une courte phrase dans une langue autre que l'Hébreu et ne contenant pas le Nom d'HaShem. Lorsque cela est parvenu aux oreilles de HaZa''l, ils ont tranché que c'était valable. Bien que cela n'ait pas émané d'eux, cela a du sens lorsqu'il n'y a vraiment pas le temps ou la possibilité de faire la première bénédiction dans son intégralité, et par conséquent ils ont validé cette pratique. (Mais pour nous indiqué que cela n'émane pas de HaZa''l, le Nom d'HaShem n'est pas mentionné.)

En résumé :

Si on n'a même pas le temps de faire intégralement la première bénédiction lorsqu'on fait un abrégé de la Birkath Hammozôn, on abrégera alors la première bénédiction par une courte phrase dans une langue autre que l'Hébreu, puis on fera la version abrégée des deuxième et troisième bénédictions, telle qu'elle a été présentée plus haut. Ainsi, on dira :

Béni soit le Miséricordieux, notre Dieu Roi de l'univers, le Maître de ce pain.
ְרִיךְ רַחַמָנָא אֱלָהָנָא מַלְכָּא דְעָלְמָא, מָרָא דְהַאי פִּיתָּא

Nous faisons preuve de reconnaissance à Ton égard, `adhônoy notre Dieu, car Tu nous as accordé en héritage un pays précieux, bon et spacieux, ainsi que Yarousholayim Ta ville. Puisse-Tu la reconstruire prochainement, de nos jours. Béni Tu es `adhônoy, pour le pays et pour la nourriture.
נוֹדֶה לְּךָ יהוה אֱלֹהֵינוּ כִּי הִנְחַלְתָּנוּ אֶרֶץ חֶמְדָּה טוֹבָה וּרְחָבָה וִירוּשָׁלַיִם עִירֶךָ. וּבְנֵה אוֹתָהּ בְּקָרוֹב בְּיָמֵינוּ. בָּרוּךְ אַתָּה יהוה, עַל הָאָרֶץ וְעַל הַמָּזוֹן

Et de cette manière, on aura accompli son devoir de faire mention des trois concepts essentiels que sont la nourriture, `aras Yisro`él et Yarousholayim.

Nous avons donc vu les deux façons d'abréger sa Birkath Hammozôn en cas de nécessité, ou lorsqu'on est pressé par le temps.

Signalons également que faire une version abrégée (par l'une des deux méthodes rapportées ici) est également possibles lorsqu'on est trop fatigué ou malade que pour faire l'intégralité de la Birkath Hammozôn, ainsi que lorsqu'on sent que l'on n'aura pas la concentration adéquate pour faire l'intégralité de la Birkath Hammozôn. Les gens doivent savoir qu'il est alors possible de s'acquitter de leur devoir par des versions abrégées.

Signalons enfin, comme cela est indiqué dans certains Siddourim (par exemple, le Siddour « Tehilat HaShem » de Chabad-Loubavitch), que les enfants ne sont pas tenus de faire la Birkath Hammozôn dans son intégralité, et ils devront donc apprendre, dans un premier temps, à dire simplement :

Béni soit le Miséricordieux, notre Dieu Roi de l'univers, le Maître de ce pain.
ְרִיךְ רַחַמָנָא אֱלָהָנָא מַלְכָּא דְעָלְמָא, מָרָא דְהַאי פִּיתָּא

Puis, progressivement, quand ils grandiront et pourront retenir de plus longues bénédictions, on leur apprendra les quatre bénédictions de la Birkath Hammozôn.

Vous pouvez retrouver ces deux versions abrégées de la Birkath Hammozôn dans la rubrique « Bénédictions et prières », dans la colonne de droite, sur le blog.

1C'est en fait un exemple que le Ramba''m reprend du Talmoudh lui-même, au traité Barokhôth 16a
2Hilkôth Barokhôth 2:2
3Tahillim 145:16

4Barokhôth 40b
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