jeudi 17 décembre 2015

Indulgence et bon sens

ב״ה

Indulgence et bon sens


Cet article peut être téléchargé ici.

Concernant le phénomène grandissant des jeunes Hasidhim qui abandonnent totalement la pratique religieuse pour mener leurs vies comme des Gôyim (ceux qu'on appelle les « off the Derekh », ceux qui s'écartent de la voie), un ami Hosidh me disait ceci :

Cela m’amène à penser à tous ces « Noshrim », les gamins qui abandonnent complètement le Yiddishkeit. Pourquoi personne ne les aide à faire au moins un minimum et ne leur montre-t-il pas qu'ils n'ont pas à laisser tomber même le Judaïsme de base. Ils pensent que le Judaïsme est synonyme de rigueurs, d'interdictions, etc., etc., sans aucune flexibilité.

Si un nouveau Ba´al Tashouvoh me disait qu'il désire respecter le Shabboth mais a néanmoins besoin d'utiliser son ordinateur, je lui dirais que si c'est pour faire des choses nécessaires, il peut le faire, tout en tentant de l'utiliser le moins possible en raison de l'esprit du Shabboth, parce que de nombreux Pôsqim ont soutenu qu'il n'y avait aucune transgression du Shabboth lorsqu'on utilise un ordinateur. Il me dira alors « Mais tous les Juifs et rabbins diront qu'utiliser un ordinateur à Shabboth est une transgression... ». Je lui dirai alors que la communauté a adopté l'approche la plus stricte, mais que ce n'est rien d'autre qu'une mesure de rigueur. Par conséquent, puisqu'il ne s'agit que d'une Houmroh, il ne commettrait même pas de transgression en respectant le Shabboth tout en utilisant un ordinateur.

J'ai travaillé avec de nombreux jeunes qui venaient de familles très religieuses et avaient abandonné totalement le Judaïsme, car cela devenait trop rigide pour eux. L'Orthodoxie est devenue une pure folie où les nouvelles mesures de rigueur sont chaque fois plus strictes que les précédentes. Je dis toujours que si nos ancêtres avaient vécu à notre époque, les rabbins des milieux Harédhim les auraient considéré comme des frei, voire des impies !

Nous ne devons pas nous voiler la face : les mesures de rigueur dépassent les bornes, et il est tout à fait compréhensible que des jeunes en ont marre et tournent complètement le dos à la foi. De par mon expérience avec les jeunes « off the Derekh », je peux vous dire qu'ils ont besoin qu'on leur enseigne d'abord le minimum requis par la Halokhoh et le Din. Puis, avec le temps, s'ils le désirent, et surtout si cela est nécessaire à leur cas particulier, ils peuvent aller « Lifnim Mashourath Haddin » (au-delà de la lettre de la loi). Et il n'a jamais été interdit de s'imposer des mesures de rigueur personnelles ! (Là où cela devient une faute et quelque chose d'inapproprié, c'est lorsqu'on veut imposer ses propres mesures de rigueur à tout le monde, ou que l'on juge les autres par rapport à ses propres mesures de rigueurs.) Pour l'heure, on demande beaucoup trop des gens. Le résultat en est que lorsqu'ils tournent le dos au Yiddishkeit ou qu'ils ont en marre des mesures de rigueur excessives, ils abandonnent entièrement le Judaïsme. Pourquoi ? Parce que toutes leurs vies, on leur a dit que ces Houmrôth constituaient la « Halokhoh » et étaient obligatoires. De ce fait, ils grandissent avec une mentalité selon laquelle « Le Judaïsme, c'est tout ou rien ! ». Or, ce n'est pas vrai, et c'est pour cela qu'il est important de leur montrer ce que dit précisément le Din. Et c'est l'un des objectifs majeurs de ce blog, et je peux dire que, Dieu merci, cela a eu des résultats très probants. Quand les gens savent que le Judaïsme ne leur demande en fait pas toutes ces Houmrôth, ils se sentent plus légers et confiants qu'il est en réalité plus facile d'accomplir la volonté d'HaShem qu'ils ne le pensaient. Et ils se réconcilient alors avec la foi et la pratique. Je reçois beaucoup de messages dans ce sens, et c'est une grande exhortation pour moi à continuer ce travail très précieux. Si la Halokhoh est « stricte » sur un sujet, je ne peux pas être indulgent, et si elle est « indulgente » sur un sujet, je dis clairement aux gens que la Halokhoh est indulgente et qu'ils n'ont pas à suivre les mesures de rigueur que les rabbins tentent de leur présenter comme des « obligations ».

L'une des raisons du nombre sans cesse croissant de Juifs « off the Derekh » (qui s'écartent du chemin), ou encore de Juifs hypocrites (qui donnent l'apparence publique qu'ils sont très pieux, mais qui remettent en question ce qu'on leur enseigne, voire même qui ne sont plus pratiquants chez eux mais seulement en public), est précisément parce qu'on a tenté de robotiser tout le monde. L'Orthodoxie est devenu une grande usine communiste où on doit fabriquer le même Juif partout. À un moment donné, les gens n'en peuvent plus, car ils ne se sentent plus eux-mêmes. Les gens doivent avoir une marge d'action, savoir qu'il y a un minimum requis qu'ils peuvent respecter sans se sentir coupable par rapport à ceux qui en font plus, car ce minimum requis fait partie de la Halokhoh, et on n'est donc pas un « pécheur » en s'y tenant.

Une fois que le minimum requis est identifié, la personne est alors plus libre d'évoluer à son rythme, et d'adopter, s'il le désire et s'en sent la capacité, des mesures plus strictes. La personne s'épanouit en progressant. Mais l'inverse n'est pas vrai ! On ne peut pas exiger de tout le monde de mener sa vie comme s'il faisait partie des « anges » et non des hommes. Car si on impose cela, lorsque les gens échouent, rencontrent des difficultés, etc., ils abandonnent TOUT ! Ou ils dépriment, ou sont hypocrites, etc. Des jeunes Hasidhim ou Ba´alé Tashouvoh comme ça, il y en a beaucoup. Parce qu'on leur a mis tout de suite sur les épaules une charge de 100 kilos, sans même se soucier de savoir si c'était pour eux. Ce n'est pas pour rien que le Talmoudh (et le Ramba''m ז״ל) fait la différence entre ce qui est demandé du simple Israélite et ce qu'on attend du Talmidh Hokhom. Vous ne pouvez pas demander à l'intégralité des Juifs, comme cela se fait dans les milieux hassidiques, de mener une vie suivant les règles s'appliquant aux Talmidhé Hakhomim (étudier la majorité de la journée, n'avoir de préférence qu'un rapport hebdomadaire avec son épouse, ne pas faire ceci ou cela, etc.). C'est cela qui détruit les gens et leur foi. Tout le monde n'est pas fait pour une mener une vie de grandes exigences. C'est pourquoi, le Talmoudh a toujours différencié le comportement attendu des Talmidhé Hakhomim et celui des simples Israélites. Ce n'est pas une question d'être plus libéral, permissif, etc., mais une question de bon sens qui prend également en compte les situations particulières de chacun.

Je suis pour l'enseignement vers le bas, et non l'enseignement à partir du haut. Par conséquent, il est beaucoup plus bénéfique et sain de commencer par les bases et dire uniquement aux gens ce qui est le minimum requis par la Halokhoh de notre foi qu'est le Judaïsme. Nous ne sommes pas obligés de tout faire, mais nous n'avons pas non plus le droit de ne rien faire. Faisons au moins un peu, c'est-à-dire tâchons de savoir ce qui est le minimum requis et respectons-le dans un premier temps (Mishnoh, `ovôth 2:21). Comme l'ont dit nos Sages, « On ne tire pas de preuves du comportement d'un fou » (Shabboth 104b). Et du point de vue de la Halokhoh, les Harédhim sont des « fous », qui accordent plus d'importance à des futilités (de quel côté sont les boutons de la chemise, de quelles couleurs sont les chaussettes, quel style de chapeau ou de manteau porter, etc.), aux apparences, aux choses secondaires et à des Minhoghim insensés et superstitieux, plutôt qu'à la Halokhoh. Ne prenez donc même pas en compte ce qu'ils font. Sachez faire la différence entre le Judaïsme (cette foi remarquable et extraordinaire) et les mouvements religieux qui se revendiquent du Judaïsme. Sachez faire la différence entre, d'un côté, la Halokhoh et le Din, et de l'autre côté, ce qui est de l'ordre du Minhogh et du Lifnim Mashourath Haddin. Mais plus encore, faites les choses pour HaShem et non pour les hommes. Là alors, vous comprendrez la grandeur de la Tôroh et la flexibilité de la Halokhoh.

De plus, tout cela s'applique également à ceux qui veulent se rapprocher du Judaïsme (non Juifs ou Juifs non pratiquants) mais n'osent pas, étant freinés par toutes les mesures de rigueur et d'autres pratiques qu'ils ont pu voir chez les Harédhim. Mais dès lors qu'ils ont conscience que tous leurs actes doivent reposer exclusivement sur ce que Dieu demande, ils ne peuvent qu'être en paix.

Trop souvent, certains Juifs très « religieux » ou « pieux » ont tendance à regarder les autres Juifs de haut, à la limite comme si ces derniers n'étaient pas eux-mêmes Juifs. Mais lorsqu'on comprend le minimum requis par la Halokhoh, quand bien même on serait soi-même très strict dans la pratique, on devient tout d'un coup beaucoup plus compréhensible. C'est le meilleur moyen d'accomplir la Miswoh d'aimer son prochain comme soi-même, alors qu'être fanatique développe l'animosité et la méfiance. (Voir à cet égard l'article intitulé « Juger les gens sur l'apparence ».)


Cette approche permet de présenter aux Gôyim et athées le vrai visage du Judaïsme. Combien de Gôyim ne sont-ils pas effarés d'entendre parler ou lire des articles sur certaines pratiques stupides, exagérées ou superstitieuses qui ont cour dans certains milieux juifs ? C'est l'une des définitions même du Hilloul HaShem : accomplir des choses qui vont amener les gens à mépriser la Tôroh, le Judaïsme, les Juifs, voire pire encore, HaShem Lui-même ! À l'inverse, lorsqu'on leur montre la vraie facette du Judaïsme, que c'est une foi plus flexible qu'ils ne le pensent, c'est un énorme Qiddoush HaShem qui les amène à reconsidérer leur vision du Judaïsme et des Juifs, que tous les Juifs ne sont pas pareils, qu'ils ne doivent pas penser que ces égarés représentent tous les Juifs, peu importe leur nombre, et qu'on ne juge pas une foi religieuse sur base de ceux qui prétendent la suivre, mais sur base de ces textes. Plein de Gôyim sont intéressés qu'on leur présente la vraie face du Judaïsme. On doit leur parler, les guider, répondre à leurs interrogations, et être des modèles exemplaires de ce qu'est la foi israélite. Et pour se faire, il faut absolument se débarrasser de tout ce qui ne provient pas du Judaïsme mais de l'esprit tordu et pervers de certains qui prétendent parler au nom du Judaïsme. (Il conviendrait de relire l'article intitulé « Ce qui empêche les Gôyim d'admirer notre foi ».)
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